Le Requérant est WRH Marketing AG, M. Markus Felix, Suisse, représenté par Rentsch & Partner, Suisse.
Le Défendeur est M. Serge Pastor, France.
Le litige concerne le nom de domaine <memostick.com> (ci-après dénommé le “nom de domaine litigieux”).
L'unité d'enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine est enregistré est Nordnet.
Une plainte a été déposée par WRH Marketing AG auprès du Centre d'arbitrage et de médiation de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 30 juin 2009.
En date du 30 juin 2009, le Centre a adressé une requête à l'unité d'enregistrement du nom de domaine litigieux, Nordnet, aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 2 juillet 2009, l'unité d'enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l'ensemble des données du litige, confirmant l'identité du titulaire du nom de domaine concerné et ses coordonnées.
Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d'application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d'application”), et aux Règles supplémentaires de l'OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l'application des Principes directeurs précités.
Conformément aux paragraphes 2(a) et 4(a) des Règles d'application, le 7 juillet 2009, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée et effectuée au Défendeur par la poste, mais fut rejetée par le courrier électronique. Conformément au paragraphe 5(a) des Règles d'application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 27 juillet 2009. Le Défendeur n'a fait parvenir aucune réponse. En date du 28 juillet 2009, le Centre notifiait le défaut du Défendeur au contact administratif du Défendeur ainsi qu'au contact technique du Défendeur sans cependant pouvoir notifier avec succès le Défendeur lui-même à son adresse électronique. L'adresse électronique du Défendeur était rejetée au motif qu'elle était archivée et ne recevait plus de message.
En date du 4 août 2009, le Centre nommait dans le présent litige comme expert-unique J. Nelson Landry. La Commission administrative constate qu'elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d'application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d'acceptation et une déclaration d'impartialité et d'indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d'application.
Le Requérant est titulaire de la marque de commerce MEMO-STICK enregistrée au Royaume Uni en 1991 en association avec des matériaux pour l'écriture et le dessin, adhésifs pour la papeterie ou le ménage, papier et articles en papier et imprimerie. Cette marque de commerce est également enregistrée dans 19 autres pays dans le monde, dont la France où réside le Défendeur (ci-après la “Marque de commerce”) (annexes 5 et 6).
Le Requérant utilise la Marque de commerce MEMO-STICK pour la commercialisation des autocollants produits et distribués pour la publicité sur la première page dans les journaux. Selon le site Web du Requérant les produits du Requérant sont commercialisés avec l'aide d'un réseau global de 25 compagnies de ventes et services agissant comme partenaires exclusifs avec Ferag AG, société sœur du Requérant.
Le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux le 10 décembre 1999.
Le 30 juillet 2008, le Requérant, par son agence de marketing a communiqué au Défendeur une offre d'achat du nom de domaine litigieux pour un prix de 500 euros en compensation des frais d'enregistrement. Après plusieurs autres tentatives dont une lettre au Défendeur par courrier recommandé offrant d'acheter le nom de domaine, en février 2009, le Défendeur, après avoir déclaré être disposé à vendre le nom de domaine concerné sans mentionner de prix de vente, a l'offre d'achat de 1 000 euros proposé par le Requérant, et a subséquemment indiqué qu'il n'était pas du tout intéressé à vendre le nom de domaine litigieux pour cette somme. Suite à plusieurs tentatives de la dite agence de marketing d'obtenir un prix fixé par le Défendeur, ce dernier a demandé un prix de 10 000 euros.
Le Requérant représente avoir des droits dans la marque de commerce MEMO-STICK enregistrée dans plusieurs pays et utilisée depuis plusieurs années et que le nom de domaine litigieux <memostick.com> est identique ou très semblable à la marque de commerce MEMO-STICK, de nature à porter à confusion.
Le Requérant soumet que le Défendeur n'a jamais utilisé le nom de domaine litigieux, n'est pas en cours de l'utiliser et que de plus, ce dernier n'est pas connu sous ledit nom de domaine et ne possède aucun droit propre à l'utilisation de ce nom de domaine. Selon le Requérant, le nom de domaine litigieux a été enregistré par le Défendeur pour la seule raison de bloquer l'utilisation de la désignation “memostick” sur Internet et ensuite de le vendre à une partie intéressée pour un prix excessif.
Le Requérant allègue que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi en ce qu'il ne l'a jamais utilisé, il a refusé de le vendre pour un prix correspondant à son coût d'enregistrement et a plutôt demandé un prix considérablement supérieur. De plus, par son comportement et ledit enregistrement, le Défendeur empêche le Requérant, titulaire de la marque de commerce MEMO-STICK, d'enregistrer sa marque de commerce sous forme de nom de domaine en utilisant un domaine de premier niveau “.com”. Selon le Requérant, l'utilisation du nom de domaine litigieux par le Défendeur serait illégitime car elle constituerait une violation des droits du Requérant en vertu du droit des marques. Voir Ladbroke Group Plc v. Sonoma International LDC, Litige OMPI No. D2002-0131.
Finalement, le Requérant soulève le fait que le Défendeur, également défendeur dans Électricité de France Service National (EDF) c. Serge Pastor, Litige OMPI No. D2002-0967, avait également enregistré un nom de domaine identique ou similaire aux marques détenues par cette dernière.
Le Défendeur n'a pas déposé de réponse.
La Commission administrative a observé dans la documentation du Centre que le Centre a notifié la plainte au Défendeur avec succès par la poste et l'avis de défaut aux adresses électroniques des contacts administratifs et techniques alors que les mêmes documents n'ont pu être notifiés par fax ou par courriel à l'adresse électronique du Défendeur.
La Commission administrative considère que le Centre a employé l'ensemble des moyens appropriés et raisonnables pour notifier avec succès et adéquatement la plainte et l'avis de défaut au Défendeur.
Le paragraphe 15(a) des Règles prévoit que “la commission statue sur la plainte au vu des écritures et des pièces qui lui ont été soumises et conformément au Principe directeur aux présentes Règles et à tout Principe ou Règle de droit qu'elle juge applicable”.
Au demeurant, le paragraphe 4(a) des Principes directeurs impose au requérant de prouver contre le défendeur cumulativement que :
i) son nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion à une marque de produit ou de service sur laquelle le requérant a des droits; et
ii) il n'a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s'y rattache; et
iii) son nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.
En conséquence, il y a lieu de répondre à chacune des trois conditions prévues par le paragraphe 4(a) des Principes directeurs.
Il est également opportun de mentionner que ces critères mentionnés ci-dessus ne sont pas exhaustifs.
La preuve soumise par le Requérant est élaborée et convaincante à l'égard du fait que la Marque de commerce est enregistrée au nom du Requérant dans de très nombreuses juridictions tel qu'il en ressort de l'Annexe 6 et que cette marque est utilisée fréquemment par le Requérant. La Commission administrative détermine donc que le Requérant a des droits dans ladite Marque de commerce à laquelle est associé un achalandage important.
Le nom de domaine litigieux ne diffère de la Marque de commerce que par l'absence du trait d'union présent dans la Marque de commerce et de l'ajout de l'extension domaine de premier niveau “.com”. Il est reconnu par des décisions antérieures de Commissions administratives que l'ajout de l'extension de premier niveau “.com” ne diminue en rien la similitude entre une marque de commerce et un nom de domaine. De plus, le retrait du trait d'union également ne diminue en rien la très grande similitude entre la Marque de commerce et le nom de domaine litigieux et que ce dernier est de nature à prêter à confusion avec la Marque de commerce du Requérant.
La Commission administrative considère que le premier critère des Principes directeurs est rempli.
Le paragraphe 4(c) des Principes directeurs prévoit une liste non exhaustive de circonstances qui, si la Commission administrative considère les faits comme établis au vu de tous les éléments de preuve présentés, la preuve des droits du Défendeur sur le nom de domaine litigieux ou de son intérêt légitime qui s'y attache peut être constituée. Ces circonstances sont les suivantes :
i) avant d'avoir eu connaissance du litige, le défendeur a utilisé le nom de domaine ou un nom correspondant au nom de domaine en relation avec une offre de bonne foi de produits ou de services, ou fait des préparatifs sérieux à cet effet;
ii) le défendeur (individu, entreprise ou autre organisation) est connu sous le nom de domaine considéré, même sans avoir acquis de droits sur une marque de produits ou de services; ou
iii) le défendeur fait un usage non commercial légitime ou un usage loyal du nom de domaine sans intention de détourner à des fins lucratives les consommateurs en créant une confusion ni de ternir la marque de produits ou de services en cause.
Le Défendeur, en ne répondant pas à la plainte, n'a pas fait valoir une des circonstances qui auraient pu établir, selon le libellé du paragraphe 4(c) des Principes directeurs, ses droits sur le nom de domaine litigieux ou un intérêt légitime qui s'y rattache.
Le Défendeur n'a pas présenté de défense, il n'a pas contesté les affirmations du Requérant à savoir que le Défendeur n'est pas connu sous le nom de domaine, ne possède aucun droit ni autorisation pour en faire l'utilisation et que d'ailleurs, il ne l'a jamais utilisé, lequel enregistrement semble avoir été fait, selon la preuve avancée par le Requérant, dans le but de vendre le nom de domaine litigieux au Requérant pour un prix considérablement supérieur aux frais engendrés pour l'enregistrer et n'a pas remis en cause la preuve prima facie que le Requérant a soulevé par ses affirmations.
Le nom de domaine n'est pas un terme générique et aucune preuve n'a été donnée de l'existence d'un droit ou d'un intérêt légitime, ces faits sont autant d'éléments qui démontrent l'absence d'intérêt légitime du Défendeur mais aussi sa mauvaise foi.
La Commission administrative détermine que le Défendeur n'a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s'y rattache et que le second critère des Principes directeurs est rempli.
Eu égard aux marchandises associées à la Marque de commerce MEMO-STICK, les termes utilisés dans la Marque sont soit inventifs, soit dotés d'un sens qui ne décrivent nullement des produits commercialisés par le Requérant. L'absence d'utilisation du nom de domaine litigieux par le Défendeur, associée à son attitude récalcitrante ou d'absence de collaboration en réponse aux efforts du Requérant de transiger avec lui pour récupérer ledit nom de domaine et enfin, le prix exorbitant demandé par ce dernier démontrent à la Commission administrative que le Défendeur était au courant de la Marque de commerce du Requérant, laquelle pouvait être très facilement vérifiée sur les registres publics, et de son usage et que le nom de domaine litigieux a été enregistré de mauvaise foi et également utilisé de mauvaise foi. D'ailleurs, la Commission administrative note que le Requérant a souligné que le présent cas n'était pas le premier cas reproché au Défendeur, tel qu'il en ressort de la décision de la Commission administrative dans le Électricité de France Service National (EDF) c. Serge Pastor, Litige OMPI No. D2002-0967.
La Commission administrative détermine que le nom de domaine litigieux a été enregistré de mauvaise foi et utilisé de mauvaise foi par le Défendeur et que le troisième critère des Principes directeurs est rempli.
Vu les paragraphes 4(a), 4(b), 4(c) et 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles, la Commission administrative décide:
(a) que le nom de domaine <memostick.com> enregistré par le Défendeur est similaire au point de prêter à confusion avec la Marque de commerce détenue par le Requérant sur laquelle ce dernier détient des droits;
(b) que le Défendeur n'a aucun droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine <memostick.com>;
c) que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine de mauvaise foi.
En conséquence la Commission administrative constate que les trois critères requis par le paragraphe 4(a) des Principes directeurs sont remplis et ordonne que le nom de domaine <memostick.com> soit transféré au Requérant.
J. Nelson Landry
Expert unique
Le 18 août 2009