Le Requérant est Crédit Industriel et Commercial SA, Paris, France, représenté par le Cabinet Meyer & Partenaires, France.
Le Défendeur est Stéphane Reynaud, Paris, France.
Le litige concerne les noms de domaine suivants :
- <cic-entreprises.com>
- <cicentreprises.com>
- <cic-entreprises.net>
- <cic-entreprises.pro>
- <cicentreprises.pro>
- <cicetoileentreprises.com>
- <cic-etoile-entreprises.pro>
- <credit-industriel-et-commercial.pro>
- <creditindustrieletcommercial.pro>.
L'unité d'enregistrement auprès de laquelle les noms de domaine sont enregistrés est Gandi Sarl.
Une plainte a été déposée par Crédit Industriel et Commercial SA auprès du Centre d'arbitrage et de médiation de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 3 juillet 2009.
En date du 6 juillet 2009, le Centre a adressé une requête à l'unité d'enregistrement des noms de domaine litigieux, Gandi Sarl, aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 7 juillet 2009, l'unité d'enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l'ensemble des données du litige. Le Requérant a déposé un amendement le 9 juillet 2009.
Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d'application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d'application”), et aux Règles supplémentaires de l'OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l'application des Principes directeurs précités.
Conformément aux paragraphes 2(a) et 4(a) des Règles d'application, le 13 juillet 2009, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5(a) des Règles d'application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 2 août 2009. Le Défendeur a fait parvenir sa réponse le 30 juillet 2009.
En date du 12 août 2009, le Centre nommait dans le présent litige comme expert unique Stéphane Lemarchand. La Commission administrative constate qu'elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d'application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d'acceptation et une déclaration d'impartialité et d'indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d'application.
Le Requérant est le Crédit Industriel et Commercial, ci-après dénommé “CIC”, filiale du Groupe Crédit Mutuel, quatrième groupe bancaire français, créé en 1859.
Le CIC, disposant d'un réseau de 2,122 agences commerciales en France, gérant les actifs de plus de 4,1 millions de clients, bénéficie d'une grande notoriété.
Le CIC est également présent à l'international grâce à son réseau de succursales couvrant 50 pays dans le monde, en Europe, en Afrique, en Amérique et en Asie.
Le Requérant est également présent sur Internet, exploitant un portail Internet à l'adresse “www.cic.fr” depuis 2000.
Le Requérant bénéficie, sur la dénomination “CIC”, sigle inscrit sur son certificat d'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés, de droits de propriété industrielle.
La dénomination “CIC” est ainsi protégée à titre de marques, française et communautaire, régulièrement renouvelées par le Requérant, telles que :
- la marque verbale française C.I.C., enregistrée sous le n° 1 358 524 le 10 juin 1986 et régulièrement renouvelée (marque constituant le renouvellement d'un dépôt effectué le 25 juin 1976, enregistré sous le n° 959 999);
- la marque verbale communautaire CIC, enregistrée sous le n° 5 891 411 le 10 mai 2007;
- la marque verbale française CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL enregistrée sous le n° 1 358 525 le 28 novembre 1986, dûment renouvelée (déposée initialement le 25 juin 1976 sous le n° 221 711).
Le Requérant est également titulaire de noms de domaine incluant les termes “CIC” ou “Crédit Industriel et Commercial” tels que :
- <cic.fr>: enregistré le 28 mai 1999;
- <cic.asia> : enregistré le 6 février 2008;
- <cic.eu> : enregistré le 6 mars 2006;
- <cic.mobi> : enregistré le 29 septembre 2006;
- <cic.tel> : enregistré le 4 mars 2009;
- <credit-industriel-et-commercial.biz> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <credit-industriel-et-commercial.com> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <credit-industriel-et-commercial.eu> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <credit-industriel-et-commercial.info> enregistré le 31 octobre 2007;
- <credit-industriel-et-commercial.mobi> enregistré le 31 octobre 2007;
- <credit-industriel-et-commercial.net> enregistré le 31 octobre 2007;
- <credit-industriel-et-commercial.org> enregistré le 31 octobre 2007;
- <credit-industriel-et-commercial.fr> : enregistré le 6 novembre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.biz> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.com> : enregistré le 3 octobre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.eu> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.fr> : enregistré le 20 septembre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.info> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.mobi> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.net> : enregistré le 31 octobre 2007;
- <creditindustrieletcommercial.org> : enregistré le 31 octobre 2007.
C'est dans ces conditions que le Centre a été saisi du présent litige.
Le Requérant soutient qu'il est détenteur de droits antérieurs sur les signes “CIC” et “CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL” à titre de dénomination sociale, de noms de domaine et de marques françaises, communautaires et internationales.
Le Requérant fait également valoir que les dénominations “CIC” et “Crédit Industriel et Commercial” bénéficient, en France, d'une réputation certaine dans le domaine bancaire et financier eu égard à leur exploitation intensive et soutenue depuis plusieurs années.
Le Requérant ajoute que la notoriété et la réputation du CIC et des marques y relatives ont été reconnues à plusieurs reprises par des experts désignés dans le cadre de procédures PARL ou UDRP.
Le Requérant soutient, tout d'abord, que les noms de domaine litigieux sont fortement similaires à la marque antérieure CIC.
La seule différence entre les noms de domaine litigieux et les marques du Requérant consiste dans l'ajout du terme générique “entreprises”, cette seule différence n'écartant pas le risque de confusion dans l'esprit du public entre la marque CIC et le nom de domaine litigieux.
Le Requérant fait valoir, en outre, que l'ajout du terme générique “entreprises” est une circonstance aggravante, dans la mesure où le CIC propose des services spécifiques pour les entreprises.
Le Requérant fait également valoir que la simple adjonction des extensions “.com”, “.pro” ou “.net” au sein des noms de domaine litigieux – inhérente au fonctionnement des noms de domaine – ne permet pas d'écarter tout risque de confusion.
Le Requérant fait valoir que la marque CIC est intégralement reproduite au sein des noms de domaine litigieux.
De plus, le Requérant fait valoir que :
- l'adjonction des extensions génériques “.com” et “.pro” au sein des noms de domaine litigieux n'a pas à être prise en compte dans l'appréciation de l'identité ou de la similitude des noms de domaine;
- l'adjonction des tirets entre les dénominations “CIC”, “Etoile” et “Entreprises” n'a pas non plus à être prise en compte;
- la confusion avec ses marques est renforcée dans la mesure où le CIC dispose, à Paris, d'une agence dédiée aux entreprise située à proximité de la place de l'Etoile et dont l'appellation est “Agence du CIC Paris Etoile Entreprises”.
Le Requérant soutient que la marque CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL est intégralement reproduite dans les noms de domaine litigieux.
De plus, le Requérant fait valoir que :
- l'adjonction de l'extension générique “.pro” au sein des noms de domaine litigieux n'a pas à être prise en compte dans l'appréciation de l'identité ou de la similitude des noms de domaine;
- l'adjonction des tirets entre les dénominations “CIC” et “Entreprises” n'a pas non plus à être prise en compte.
Le Requérant souligne qu'il n'a accordé aucune autorisation écrite préalable au Défendeur pour l'enregistrement et/ou l'utilisation des noms de domaine litigieux.
Le Requérant soutient également que les noms de domaine litigieux ont fait l'objet d'un enregistrement de mauvaise foi dès lors que le Défendeur, domicilié en France, ne pouvait ignorer l'existence du Requérant et de ses marques renommées au moment où il a procédé à l'enregistrement des noms de domaine litigieux.
En outre, le Requérant fait valoir que le Défendeur ne fait aucun usage des noms de domaine litigieux, ces derniers renvoyant vers une page inactive.
Or, le Requérant rappelle qu'il est constant, au regard des principes UDRP, que la simple détention des noms de domaine par le Défendeur n'est pas, en tant que telle, créateur d'un droit ou d'un intérêt légitime sur ces noms de domaine.
Le Requérant fait enfin valoir qu'il est impossible de concevoir dans le futur un usage des noms de domaine en cause qui ne serait pas illicite.
Le Défendeur ne conteste pas l'antériorité des marques déposées par le CIC.
En revanche, le Défendeur soutient qu'il n'y a aucun risque de confusion entre les marques déposées par le CIC et les noms de domaine litigieux.
Le Défendeur soutient qu'il a un intérêt légitime à déposer les noms de domaine litigieux.
En effet, le Défendeur invoque le lancement d'une activité de consulting auprès des entreprises dont la dénomination sociale aurait été “Centre International de Consulting”.
Le Défendeur fait valoir qu'il aurait enregistré les noms de domaine litigieux afin d'éviter toute confusion avec les marques du Requérant.
Le Défendeur fait également valoir que les noms de domaine litigieux n'ont pas été acquis aux fins de les revendre, les louer ou les céder à un tiers ou au Requérant, ni en vue d'empêcher le Requérant d'enregistrer sa marque sous forme de nom de domaine.
Le Défendeur soutient également ne pas être coutumier d'une telle pratique.
Le paragraphe 15(a) des Règles d'application des principes directeurs prévoit que “la Commission statue sur la plainte au vu des écritures et des pièces qui lui ont été soumises et conformément au Principe directeur aux présentes Règles et à tout Principe ou Règle de droit qu'elle juge applicable”.
Au demeurant, le paragraphe 4(a) des Principes directeurs impose au Requérant de prouver contre le Défendeur cumulativement que :
(A) son nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion à une marque de produit ou de service sur laquelle le requérant a des droits;
(B) il n'a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s'y rattache;
(C) son nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.
En conséquence, il y a lieu de s'attacher à répondre à chacune des trois conditions prévues par le paragraphe 4 (a) des Principes directeurs.
La Commission constate que le Requérant justifie être titulaire de droits privatifs antérieurs sur les dénominations “CIC” et “Crédit Industriel et Commercial” notamment par le biais de plusieurs marques françaises et communautaires, ces dernières ayant été renouvelées.
La Commission constate également que le Requérant est titulaire de nombreux noms de domaine portant sur les dénominations “CIC” et “Crédit Industriel et Commercial” menant vers des sites Internet présentant son activité.
La Commission constate que les noms de domaine litigieux enregistrés par le Défendeur imitent les dénominations “CIC” et “Crédit Industriel et Commercial”.
En effet, l'adjonction de termes génériques tels que “Entreprises” ou “Etoile” n'est pas de nature à écarter l'existence d'un risque de confusion, et ce d'autant plus que le Requérant propose non seulement des services spécifiques pour les entreprises, mais dispose, par ailleurs, à Paris, d'une agence dédiée aux entreprises située à proximité de la Place de l'Etoile appelée “Agence du CIC Paris Etoile Entreprises”.
Est tout aussi inopérant l'ajout des extensions “.com”, “.net” et “.pro”.
En effet, l'adjonction d'une extension pour le moins commune dans le domaine des services rendus sur Internet ne confère à l'ensemble aucun caractère distinctif permettant d'écarter tout risque de confusion.
En conséquence, la Commission considère que les noms de domaine litigieux constituent l'imitation des marques détenues et exploitées par le Requérant et que le premier élément du paragraphe 4(a) des Principes directeurs est ainsi rempli.
Pour justifier d'un intérêt légitime à l'enregistrement des noms de domaine litigieux, le Défendeur prétend que l'enregistrement des noms de domaine <cic-entreprises> ou encore <cic(-)etoile(-)entreprises> est justifié à raison de activité.
En effet, “CIC” serait l'abréviation de la dénomination sociale de sa future société Centre International du Consulting; l'association des termes “etoile” et “entreprises” serait, quant à elle, justifiée à raison du lieu de l'activité et de l'activité elle-même de la future société.
Outre le fait que le Défendeur ne produit à la procédure aucun élément de nature à soutenir son argumentation, celui-ci n'explique pas plus la raison pour laquelle il a également enregistré des noms de domaine reproduisant la dénomination “Crédit Industriel et Commercial” qui est précisément la dénomination du Requérant.
Le Défendeur ne pouvait sérieusement ignorer l'existence du Requérant et des dénominations qu'il exploite.
En effet, la notoriété du Requérant et de son activité, que ce soit par la présence de ses nombreuses agences sur le territoire français ou par le biais de ses différents sites Internet, est incontestable.
Il est manifeste que le Défendeur n'a pas obtenu ni même sollicité une quelconque autorisation du Requérant pour exploiter à titre de noms de domaine les marques revendiquées.
En conséquence, la Commission considère que n'est pas établi l'existence d'un intérêt légitime du Défendeur à la détention des noms de domaine litigieux et que le Requérant a établi le deuxième élément du paragraphe 4(a) des Principes directeurs.
En premier lieu, compte tenu de la notoriété du Requérant et des marques qu'il exploite. Compte tenu du fait que le Défendeur est domicilié en France, soit dans le pays du siège social du Requérant, le Défendeur ne pouvait en toute bonne foi considérer que l'enregistrement de noms de domaine reproduisant les marques largement connues du public et exploitées de longue date par le Requérant ne serait pas de nature à porter à confusion.
En second lieu, il s'avère que les noms de domaine litigieux ne renvoient vers aucun site actif. Au regard des circonstances spécifiques d'espèce, l'Expert considère que ce seul élément est en soi constitutif de mauvaise foi.
A ce titre, la Commission considère que l'utilisation des noms de domaine litigieux est préjudiciable au Requérant dans la mesure où elle risque d'induire en erreur les internautes qui peuvent légitimement penser accéder aux sites Internet officiels du Requérant et seront dépourvus en constatant l'absence d'exploitation de sites Internet.
Cette utilisation frauduleuse, dès lors qu'elle renvoie vers une page inexploitée, risque d'entraîner une atteinte à l'image et à la réputation du Requérant.
En conséquence, au vu de l'ensemble des éléments précités la Commission considère que les noms de domaine litigieux ont été enregistrés et utilisés de mauvaise foi.
Les conditions posées au paragraphe 4(a) des Principes directeurs et 15 des Règles d'application des Principes directeurs étant réunies, la Commission administrative décide en conséquence le transfert des noms de domaine <cic-entreprises.com>, <cicentreprises.com>, <cic-entreprises.net>, <cic-entreprises.pro>, <cicentreprises.pro>, <cicetoileentreprises.com>, <cic-etoile-entreprises.pro>, <credit-industriel-et-commercial.pro> et <creditindustrieletcommercial.pro> au Requérant.
Stéphane Lemarchand
Expert Unique
Le 2 septembre 2009