Le Requérant est la société Crédit Lyonnais de Lyon, France, représenté par Novagraaf France SA, France.
Le Défendeur est Christoph Salvat de Paris, France.
Le litige concerne le nom de domaine <lcl-services.org>.
L’unité d’enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine est enregistré est Register.it SpA.
Une plainte a été déposée par la société Crédit Lyonnais auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 16 mars 2012.
En date du 19 mars 2012, le Centre a adressé une requête à l’unité d’enregistrement du nom de domaine litigieux, Register.it SpA, aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 19 mars 2012, l’unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l’ensemble des données du litige.
Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.
Conformément aux paragraphes 2(a) et 4(a) des Règles d’application, le 22 mars 2012, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5(a) des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 11 avril 2012. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 12 avril 2012, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.
En date du 23 avril 2012, le Centre nommait dans le présent litige comme expert-unique Marie-Emmanuelle Haas. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.
Le Requérant, la société Crédit Lyonnais, est l’un des principaux établissements bancaires français.
Le Requérant oppose ses droits sur une marque communautaire et sur cinq marques françaises composées du sigle “lcl”:
- la marque communautaire semi-figurative en couleurs LCL LE CREDIT LYONNAIS n° 004361622, déposée le 29 mars 2005 en classes 9, 16, 35, 36, 38 et 42;
- la marque semi-figurative française LCL BANQUE ET ASSURANCE n° 06 3 412 357, déposée le 24 février 2006 en classes 35 et 36;
- la marque française LCL A L’ECOUTE n° 05 3 368 264, déposée le 1er juillet 2005 en classes 35 et 38;
- la marque française LCL MINI AUTO n° 07 491 979, déposée le 30 mars 2007 en classe 36;
- la marque française LCL EVOLUTION n° 07 3 514 467, déposée le 18 juillet 2007 en classes 9 et 36;
- la marque française SOLUTIONS LCL n° 07 3 520 688, déposée le 22 août 2007 en classes 9 et 36.
Le Requérant revendique également des droits sur les noms de domaine <lcl.fr> et <lcl.com> et fait valoir que “LCL” est aussi son nom commercial.
Le Requérant a identifié l’enregistrement du nom de domaine litigieux, <lcl-services.org>, effectué le 2 mars 2012 au nom de Monsieur Christoph Salvat, domicilié à Paris, et exploité pour un site parking.
C’est dans ces circonstances que le Requérant a saisi le Centre afin d’obtenir le transfert, à son profit, du nom de domaine litigieux <lcl-services.org>.
Le Requérant considère que le nom de domaine litigieux <lcl-services.org> reprend le sigle “lcl” qui est l’élément dominant commun au nom de domaine et aux marques du Requérant, le terme “services” étant descriptif et dépourvu de caractère distinctif. Il en conclue à la similarité entre le nom de domaine litigieux <lcl-services.org> et les marques dont l’élément verbal dominant est le sigle “lcl”.
Le Requérant estime que le Défendeur ne détient aucun droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux <lcl-services.org>, dès lors que les parties ne sont aucunement liés, que le Défendeur n’est titulaire d’aucune marque déposée ou enregistrée identifiable à partir des bases de données des marques françaises, communautaires et internationales visant la France et qu’il n’exerce aucune activité sous ce nom. Il ajoute que l’usage du nom de domaine litigieux n’est pas un usage commercial légitime, dans la mesure où le site Internet accessible à partir de ce nom de domaine est un site parking.
Le Requérant constate enfin que le nom de domaine litigieux <lcl-services.org> a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi, dès lors qu’il s’agissait d’un site parking proposant des services financiers concurrents de ceux du Requérant et que le choix du sigle “lcl” par le Défendeur ne saurait être fortuit, compte tenu de la notoriété des marques LCL et de la communication importante effectuée par le Requérant en France, celui-ci utilisant le sigle “lcl” à titre de nom commercial depuis 2005.
Il considère que le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux <lcl-services.org> en vue de perturber les activités du Requérant.
C’est pourquoi le Requérant demande le transfert du nom de domaine litigieux à son profit.
Le Défendeur n’a pas répondu à la plainte.
En vertu du paragraphe 4(a) des Principes directeurs, le Requérant doit démontrer que les éléments suivants sont réunis:
(i) le nom de domaine enregistré par le Défendeur est identique ou semblable au point de prêter à confusion à une marque de produits ou de services sur laquelle le Requérant a des droits; et
(ii) le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s’y attache; et
(iii) le nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.
Le nom de domaine litigieux reprend le sigle LCL, qui est l’élément verbal dominant des marques du Requérant.
Le Requérant fait également valoir qu’il est titulaire des noms de domaine <lcl.fr> et <lcl.com>, sans pour autant communiquer leur extrait WhoIs pour en justifier.
Les Principes directeurs obligent le Requérant à justifier d’un droit à titre de marque et cette condition est ici remplie. La Commission administrative examinera le présent litige uniquement au regard des marques.
Le sigle “lcl” est effectivement l’élément verbal dominant des marques du Requérant et il est repris dans le nom de domaine litigieux <lcl-services.org>. L’ajout du terme générique “services” au sigle “lcl” ne permet pas de différencier le nom de domaine litigieux et d’écarter tout risque de confusion.
La condition prévue par le paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est donc remplie.
Le Défendeur n’a pas contesté la plainte pour revendiquer un droit ou intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux.
Le Requérant et le Défendeur sont tous deux domiciliés en France. L’objet du site “www.lcl-services.org” a été (jusqu’au dépôt de la plainte par le Requérant auprès du Centre), en ce qui concerne la première page, de proposer des liens vers, en majorité, des sites concurrents, dont certains sont des sites en français.
Le Défendeur n’est titulaire d’aucune marque déposée ou enregistrée et n’exerce aucune activité commerciale légitime sous le sigle “lcl”. Le nom de domaine litigieux <lcl-services.org> a été exploité pour donner accès à un site parking, qui est un site destiné à proposer des liens générés par les outils informatiques de tiers. Il ne s’agit pas d’une activité développée par le Défendeur.
Dans ces conditions, la Commission administrative considère que le Défendeur n’a aucun droit ou intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux.
La condition prévue par le paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs est donc remplie.
La Commission administrative constate que :
- le Défendeur, domicilié en France, ne pouvait raisonnablement pas ignorer le caractère notoire du sigle “lcl”, qui est l’élément verbal dominant des marques du Requérant;
- le Défendeur a exploité le nom de domaine litigieux pour un site parking proposant des liens hypertextes renvoyant vers des sites de concurrents du Requérant;
- le Défendeur n’a pas répondu à la plainte.
Au regard de ce qui précède, la Commission administrative considère que le nom de domaine litigieux a été enregistré en vue d’empêcher le Requérant de décliner le sigle “lcl”, qui est l’élément verbal dominant de ses marques, avec le terme générique “services” qui n’est absolument pas discriminant pour un prestataire de services tel qu’une banque, avec pour conséquence un risque de perturbation des activités du Requérant.
L’enregistrement de mauvaise foi est caractérisé, notamment au sens de l’article 4(b)(ii) des Principes directeurs, tandis que l’exploitation de mauvaise foi est caractérisée au sens de l’article 4(b)(iv) des Principes directeurs.
La Commission administrative considère que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi, et que par conséquent la condition énumérée au paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs est remplie.
Vu le paragraphe 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne le transfert du nom de domaine litigieux <lcl-services.org> au profit du Requérant.
Marie-Emmanuelle Haas
Expert Unique
Le 4 mai 2012