Le Requérant est Guess? IP Holder L.P. de Los Angeles, Californie, Etats-Unis d'Amérique, représenté par Cabinet Hoffman, France.
Le Défendeur est Mei Hong Xiao de Zhanjiang, Guangdong, Chine.
Les Noms de Domaine Litigieux <boutiques-guess.com>, <fr-solde-guess.com>, <guess-en-ligne.com>, <guess-nouvelle.com>, <guess-pas-cher.com> sont enregistrés auprès de Zhengzhou Zitian Network Technology Co., Ltd. (ci-après désigné "l'Unité d'enregistrement").
Une plainte en français a été déposée par Guess? IP Holder L.P. auprès du Centre d'arbitrage et de médiation de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le "Centre") en date du 16 novembre 2017. En date du 17 novembre 2017, le Centre a adressé une requête à l'Unité d'enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Les 18 novembre et 1er décembre 2017, l'Unité d'enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l'ensemble des données du litige et informant que la langue du contrat d'enregistrement est le chinois.
Le 1er décembre 2017, le Centre a envoyé un avis aux parties, invitant le Requérant soit à fournir la preuve d'un accord, entre le Requérant et le Défendeur, prévoyant que la procédure se déroule en français, soit à déposer une plainte traduite en chinois, soit à déposer une demande afin que le français soit la langue de la procédure. Le Défendeur a également été invité à fournir des arguments à cet égard. Le 1er décembre 2017, le Requérant a déposé une demande afin que la procédure administrative se déroule en français. Le Défendeur n'a fourni aucun argument à cet égard.
Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés "Principes directeurs"), aux Règles d'application des Principes directeurs (ci-après dénommées les "Règles d'application"), et aux Règles supplémentaires de l'OMPI (ci-après dénommées les "Règles supplémentaires") pour l'application des Principes directeurs précités.
Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d'application, le 7 décembre 2017, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur en français et en chinois. Conformément au paragraphe 5 des Règles d'application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 27 décembre 2017. Le Défendeur n'a fait parvenir aucune réponse. En date du 5 janvier 2018, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.
En date du 20 janvier 2018, le Centre nommait Flip Jan Claude Petillion comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu'elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d'application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d'acceptation et une déclaration d'impartialité et d'indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d'application.
Le Requérant, Guess? IP Holder L.P, est titulaire du portefeuille des marques GUESS, apposée sur des vêtements et accessoires de mode.
Le Requérant est titulaire de différentes marques enregistrées dans le monde, y compris la marque verbale de l'Union européenne GUESS, enregistrée sous le n° 000135681, le 15 octobre 1998. La marque GUESS est notoirement connue pour des vêtements, montres, maroquinerie et autres accessoires de mode.
Les Noms de Domaine Litigieux ont été enregistrés par une personne physique identifiée comme Mei Hong Xiao, apparemment domiciliée en Chine. Les Noms de Domaine Litigieux ont été enregistrés par le Défendeur le 12 mars 2017, sauf le Nom de Domaine Litigieux <guess-en-ligne.com> qui a été enregistré le 10 mars 2017.
Le Nom de Domaine Litigieux <boutiques-guess.com> renvoyait vers un site de vente en ligne avec des articles identiques ou similaires à ceux commercialisés par le Requérant sous la marque GUESS. Les autres Noms de Domaine Litigieux <fr-solde-guess.com>, <guess-en-ligne.com>, <guess-nouvelle.com> et <guess-pas-cher.com> ne renvoient pas vers une page active.
Le Requérant soutient que les Noms de Domaine Litigieux sont semblables, au point de prêter à confusion, à sa marque GUESS sur laquelle le Requérant prétend avoir des droits. Le Requérant soutient également que le Défendeur n'a aucun droit sur les Noms de Domaine Litigieux, ni aucun intérêt légitime. Enfin, le Requérant soutient que le Défendeur a enregistré et utilisé les Noms de Domaine Litigieux de mauvaise foi, puisqu'ils ont été réservés par le Défendeur dans le but d'attirer, à des fins lucratives, les internautes en créant une probabilité de confusion avec les marques du Requérant.
Le Défendeur n'a pas répondu aux arguments du Requérant.
Aux termes du paragraphe 11(a) des Principes directeurs, "sauf convention contraire entre les parties ou stipulation contraire du contrat d'enregistrement, la langue de la procédure est la langue du contrat d'enregistrement; toutefois, la commission peut décider qu'il en sera autrement, compte tenu des circonstances de la procédure administrative."
En l'espèce, le Requérant a demandé à ce que la langue de la procédure soit le français. Le Requérant démontre que tous les Noms de Domaine Litigieux enregistrés par le Défendeur contiennent des termes francophones. En outre, les descriptions sur le site web lié au Nom de Domaine Litigieux <boutiques-guess.com> étaient rédigées en français
La Commission administrative relève également que le Défendeur, qui a pourtant eu l'opportunité de répliquer à la plainte sur le fond mais également sur la question de la langue de la procédure, n'a pas contesté les arguments avancés par le Requérant. La Commission administrative considère que le Défendeur était suffisamment informé de l'objet de la procédure administrative, tant par l'acceptation des conditions du contrat d'enregistrement que par les communications du Centre. Le fait que le Défendeur n'ait pas répondu aux communications du Centre indique que le Défendeur a délibérément choisi de ne pas participer à la procédure administrative et de ne pas faire usage de son droit de défense. En l'absence de contestation ou de demande dérogatoire émanant des parties, la Commission administrative estime qu'il n'est pas inéquitable que la langue de la présente procédure administrative soit le français (Voir Crédit du Nord c. Laurent Deltort, Litige OMPI No. D2012-2532; INTS IT IS NOT THE SAME, GmbH (dba DESIGUAL) c. Two B Seller, Estelle Belouzard, Litige OMPI No. D2011-1978).
La Commission administrative considère que dans ces circonstances, il est préférable que la langue de la présente procédure administrative soit le français.
Le paragraphe 15 des Règles d'application prévoit que la Commission administrative statue sur la plainte au vu des écritures et des pièces qui lui ont été soumises et conformément aux Principes directeurs, aux Règles d'application et à tout principe ou règle de droit qu'elle juge applicable.
La charge de la preuve se situe auprès du Requérant et il résulte aussi bien de la terminologie des Principes directeurs que de décisions préalables de commissions administratives UDRP, que le Requérant doit prouver chacun des trois éléments mentionnés au paragraphe 4(a) des Principes directeurs afin d'établir que les Noms de Domaine Litigieux peuvent être transférés.
Dès lors, le Requérant doit prouver conformément au paragraphe 4(a) des Principes directeurs et selon la balance des probabilités que:
(i) les Noms de Domaine Litigieux sont identiques ou semblables au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou de services sur laquelle le Requérant a des droits; et
(ii) le Défendeur n'a aucun droit sur les Noms de Domaine Litigieux ni aucun intérêt légitime qui s'y attache; et
(iii) les Noms de Domaine Litigieux ont été enregistrés et utilisés de mauvaise foi.
Par conséquent, la Commission administrative examinera ces critères séparément.
En premier lieu, le Requérant doit établir qu'il a des droits de marques de fabrique ou de service dont il est titulaire. Comme le Requérant démontre être titulaire de la marque européenne verbale GUESS, le Requérant a établi qu'il existe des droits de marques de fabrique ou de service dont il est titulaire.
La Commission administrative considère que les Noms de Domaine Litigieux <boutiques-guess.com>, <fr-solde-guess.com>, <guess-en-ligne.com>, <guess-nouvelle.com> et <guess-pas-cher.com> sont semblables à la marque du Requérant en ce que les Noms de Domaine Litigieux reproduisent la marque invoquée dans son entièreté en ajoutant simplement un trait d'union et des termes descriptifs tels que "boutiques", "solde", "en ligne", "nouvelle" (Voir Boursorama S.A. contre Gimbert Christophe / Hourdry Cedric / Nom anonymisé, Litige OMPI No. D2017-1247).
La Commission administrative estime que la similitude entre les Noms de Domaine Litigieux et la marque du Requérant peut prêter à confusion. Dès lors, le Requérant a établi que le premier élément du paragraphe 4(a) des Principes directeurs est rempli.
Conformément au paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs, le Requérant a la charge de la preuve pour établir que le Défendeur n'a ni droits ni intérêts légitimes vis-à-vis du nom de domaine litigieux.
Il est de jurisprudence UDRP constante qu'il suffit pour le Requérant de démontrer qu'à première vue prima facie le Défendeur n'a ni droits ni intérêts légitimes vis-à-vis des Noms de Domaine Litigieux pour qu'il incombe au Défendeur de démontrer le contraire (Voir Champion Innovations, Ltd. c. Udo Dussling (45FHH), Litige OMPI No. D2005-1094; Croatia Airlines d.d. c. Modern Empire Internet Ltd., Litige OMPI No. D2003-0455; Belupo d.d. c. WACHEM d.o.o., Litige OMPI No. D2004-0110).
Le Requérant apporte la preuve de l'enregistrement de sa marque GUESS, laquelle n'est pas contestée par le Défendeur. Le Défendeur n'a pas reçu de licence, mandat ou contrat de mission du Requérant pour enregistrer les Noms de Domaine Litigieux. Il n'existe d'ailleurs aucun lien entre le Requérant et le Défendeur.
Le Défendeur n'a pas répondu à ces arguments. Dès lors, la Commission administrative considère que le Requérant a démontré qu'à première vue, le Défendeur n'a ni droits ni intérêts légitimes vis-à-vis des Noms de Domaine Litigieux.
De plus, le Défendeur apparait ne faire aucune utilisation de bonne foi des Noms des Domaine Litigieux. Bien au contraire, le Requérant a démontré que le Défendeur a employé le Nom de Domaine Litigieux <boutiques-guess.com> pour mettre en vente des articles contrefaisant la marque du Requérant dans le but de tirer des profits commerciaux injustifiés auprès des utilisateurs. Le fait que les autres Noms de Domaine Litigieux soient inactifs n'est pas de nature à justifier un intérêt légitime sur ceux-ci.
Dès lors, la Commission administrative considère que le Requérant a démontré que le Défendeur n'a ni droits ni intérêts légitimes vis-à-vis des Noms de Domaine Litigieux. Le critère repris au paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs est donc rempli.
Le Requérant doit apporter la preuve sur la balance des probabilités que les noms de domaine ont été enregistrés et sont utilisés de mauvaise foi (Voir Telstra Corporation Limited v. Nuclear Marshmallows, Litige OMPI No. D2000-0003; Control Techniques Limited v. Lektronix Ltd, Litige OMPI No. D2006-1052).
Le paragraphe 4(b) des Principes directeurs prévoit une liste non-exhaustive de circonstances qui peuvent constituer la preuve que les noms de domaine ont été enregistrés et sont utilisés de mauvaise foi. Cette liste comprend le cas où en utilisant le nom de domaine, le Défendeur a essayé intentionnellement d'attirer, à des fins commerciales, des utilisateurs d'Internet sur son site web ou toute autre destination en ligne en créant un risque de confusion avec la marque du requérant quant à la source, au parrainage, à l'affiliation ou à l'approbation de son site web ou destination en ligne ou d'un produit ou service offert sur celui-ci.
En l'espèce, au vu de la notoriété de la marque GUESS et du fait que le Défendeur a utilisé à l'identique le signe GUESS sur le site web lié au Nom de Domaine Litigieux <boutiques-guess.com> et sur les articles contrefaits annoncés et mis en vente sur ce site web, la Commission administrative estime que le Défendeur devait être au courant de l'existence des droits de marque du Requérant au moment de l'enregistrement (Voir Karen Millen Fashions Limited v. Akili Heidi, Litige OMPI No. D2012-1395; Spontin SA c. sig services, Com web Services, A Consumer Service MutuWeb, Litige OMPI No. D2009-1281).
En outre, sans aucune autorisation de la part du Requérant, le Défendeur a utilisé le Nom de Domaine Litigieux susmentionné pour mettre en vente des produits identiques ou similaires à ceux commercialisés par le Requérant, et qui sont probablement des contrefaçons. La Commission administrative considère que ceci démontre sur la balance de probabilités que ce Nom de Domaine Litigieux a été enregistré et est utilisé par le Défendeur dans le but d'attirer, à des fins lucratives, les internautes sur son site web, en créant une probabilité de confusion avec les marques du Requérant en ce qui concerne l'origine des produits.
Au vu de ce qui précède, la Commission administrative estime qu'il est hautement improbable que les Noms de Domaine Litigieux inactifs puissent être utilisés de bonne foi par le Défendeur.
En ne soumettant pas de réponse à la plainte, le Défendeur n'a pris aucune initiative pour contester ce qui précède. Conformément au paragraphe 14 des Règles d'application, la Commission administrative devra en tirer les conclusions qu'elle estime appropriées.
La Commission administrative déduit des faits et circonstances susmentionnés que les Noms de Domaine Litigieux ont été enregistrés et utilisés de mauvaise foi. Par conséquent, la Commission administrative considère que le Requérant a satisfait le critère énoncé au paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs.
Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d'application, la Commission administrative ordonne que les noms de domaine litigieux <boutiques-guess.com>, <fr-solde-guess.com>, <guess-en-ligne.com>, <guess-nouvelle.com> et <guess-pas-cher.com> soient transférés au Requérant.
Flip Jan Claude Petillion
Expert Unique
Le 3 février 2018