Le Requérant est AXA SA, France, représenté par Selarl Candé - Blanchard - Ducamp, France.
Le Défendeur est Genevieve Ludot, Synthese & Medias, France.
Le nom de domaine litigieux <clientaxa.com> est enregistré auprès de OVH (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).
Une plainte a été déposée par AXA SA auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 15 juin 2020. En date du 15 juin 2020, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 16 juin 2020, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 16 juin 2020, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant le Requérant à soumettre un amendement à la plainte. Le Requérant a déposé un amendement à la plainte le 17 juin 2020.
Le Centre a vérifié que la plainte et l’amendement à la plainte répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.
Le 30 juin 2020 et le 6 juillet 2020, le Centre a envoyé un courrier électronique à l’Unité d’enregistrement concernant l’expiration du nom de domaine litigieux. Le 17 juillet 2020, l’Unité d’enregistrement a informé que les dispositions nécessaires ont été prises pour garantir que le nom de domaine litigieux reste actif.
Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 30 juin 2020, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 20 juillet 2020. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 21 juillet 2020, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.
En date du 30 juillet 2020, le Centre nommait Michel Vivant comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.
Le groupe AXA est un des premiers groupes mondiaux d’assurance. Le Requérant, à savoir la société AXA SA, est titulaire de plusieurs marques dont la marque française AXA n°1270658 déposée et enregistrée le 10 janvier 1984, la marque de l’Union européenne, semi-figurative, AXA n°373894 déposée le 28 août 1996 et enregistrée le 29 juillet 1998 et la marque de l’Union européenne AXA n° 8772766 déposée le 21 décembre 2009 et enregistrée le 7 septembre 2012.
Le nom de domaine litigieux <clientaxa.com> a été enregistré le 19 juillet 2018.
Le nom de domaine litigieux pointait vers une page parking de l’Unité d’enregistrement. Des emails frauduleux ont également été envoyés à partir d’une adresse email […]@clientaxa.com.
Le Requérant fait valoir que le nom de domaine litigieux reproduit à l’identique la marque AXA, marque dépourvue de signification particulière et hautement distinctive, rappelant qu’il en est jugé ainsi quand le nom de domaine litigieux contient l’intégralité de la marque en cause. Il en est d’autant plus ainsi, dit-il, lorsque la marque antérieure bénéficie d’une renommée (qualité reconnue à la marque AXA par les commissions administratives). Ainsi, pour le Requérant, le nom de domaine litigieux est semblable, au point de prêter à confusion, à ses marques au sens du paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs.
Le Requérant fait valoir ensuite que le Défendeur, qui n’a aucun lien avec lui, a adopté sa marque “pour sa propre utilisation” et l’a incorporée dans son nom de domaine sans détenir l’autorisation de le faire. Observant que, selon la jurisprudence des commissions administratives, “la détention passive d’un nom de domaine ne constitue pas un usage non-commercial légitime”, il ajoute qu’en l’occurrence le nom de domaine litigieux est utilisé à des fins d’hameçonnage et que cela ne peut conférer de droits ou d’intérêts légitimes au Défendeur. Il conclut de tout cela que le Défendeur n’a aucun droit ou intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux.
Enfin, le Requérant avance que le Défendeur a “de toute évidence” acquis le nom de domaine litigieux en toute connaissance de cause. Il relève encore que le Défendeur se fait passer pour un employé de la société AXA Investment Manager, filiale du Requérant, dans les emails d’hameçonnage qu’il adresse aux clients d’AXA et qu’il s’agit donc de tromper les internautes, d’où il ressort, selon la jurisprudence des commissions administratives, que le nom de domaine a été enregistré et qu’il est utilisé de mauvaise foi.
Le Défendeur n’a pas répondu aux arguments du Requérant.
Le Requérant est titulaire de plusieurs marques AXA enregistrées bien avant la date à laquelle le nom de domaine litigieux ne le soit (dont la marque française AXA n°1270658 déposée et enregistrée le 10 janvier 1984, la marque de l’Union européenne, semi-figurative, AXA n°373894 déposée le 28 août 1996 et enregistrée le 29 juillet 1998 et la marque de l’Union européenne AXA n° 8772766 déposée le 21 décembre 2009 et enregistrée le 7 septembre 2012).
Le nom de domaine litigieux incorpore la marque du Requérant AXA dans son entièreté, ce qui a toujours été considéré par les commissions administratives comme la manifestation forte d’une pratique de cybersquattage. Qui plus est, la Commission administrative relèvera que l’adjonction d’un terme tel que “client” n’est aucunement de nature à empêcher le nom de domaine litigieux d’être identique à la marque du Requérant ou de présenter au moins une similitude avec celle-ci prêtant à confusion (cf. section 1.8 de la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux Principes UDRP, troisième édition (“Synthèse, version 3.0”)).
En conséquence, la Commission administrative considère que le nom de domaine litigieux est semblable à la marque du Requérant au point de prêter à confusion, au sens du paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs.
Le Défendeur, qui n’a aucun lien avec le Requérant, n’a reçu aucune autorisation de la part du celui-ci d’utiliser ses marques ou d’enregistrer un nom de domaine les reprenant. Qui plus est, il est bien certain, comme le fait valoir le Requérant, que le fait d’utiliser le nom de domaine litigieux à des fins d’hameçonnage ne saurait relever d’un “intérêt légitime”.
La Commission administrative observe, en outre, que, si le Défendeur avait bien des droits ou intérêts légitimes sur le nom de domaine litigieux, il aurait été facile pour lui de ne pas faire défaut et de faire valoir ses arguments.
Aussi il apparaît à la Commission administrative que le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache au sens du paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs.
Les marques AXA sont des marques bien connues à travers le monde de telle sorte que le caractère notoire de celles-ci a déjà été affirmé par les commissions administratives dans les décisions UDRP (ainsi AXA SA v. Franck Van, Litige OMPIn° D2014-0863).Ainsi est-il hors de doute que le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux en toute connaissance de cause et en méconnaissance des droits du Requérant.
La finalité réelle de l’enregistrement se révèle d’ailleurs dans l’usage finalement fait du nom de domaine litigieux puisqu’il s’agit de supporter des pratiques d’hameçonnage en se faisant passer pour un employé d’une des filiales du Requérant.
Ainsi la Commission administrative tient-elle pour caractérisés l’enregistrement comme l’usage de mauvaise foi au sens du paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs.
Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <clientaxa.com> soit transféré au Requérant.
Michel Vivant
Expert Unique
Le 13 août 2020