Technologie photovoltaïque - Le soleil brille du bon côté
Le solaire photovoltaïque - source d’énergie verte par excellence - est en plein essor. Sa production double tous les deux ans depuis 2002, ce qui en fait la branche la plus dynamique du secteur de l’énergie. Grâce au soutien de subventions gouvernementales, l’industrie progresse fortement et la recherche ouvre de nouvelles avenues tout en réduisant les coûts. Le nombre des demandes de brevet déposées en vertu du Traité de coopération en matière de brevets (PCT) pour des inventions liées à l’énergie solaire a triplé entre 2004 et 2008, passant de 460 à 1411.
Vanguard I (Photo: NASA)
L’effet photovoltaïque - le phénomène de conversion de l’énergie lumineuse en électricité - a d’abord été décrit par le physicien français Edmond Becquerel en 1839. Albert Einstein en publia en 1904 une explication théorique qui lui valut le prix Nobel. De 1950 à 1969, la course à l’espace favorisa une mobilisation intense de la recherche, qui conduisit un certain nombre d’entreprises à mettre au point et commercialiser des cellules solaires, ou cellules photovoltaïques, dès 1955. Vanguard I fut, en 1958, le premier satellite à être équipé de cellules photovoltaïques et fonctionna pendant huit ans. D’autres suivirent. L’énergie solaire continue d’être utilisée de nos jours dans ce domaine, tant comme source d’alimentation auxiliaire pour les engins spatiaux que pour alimenter les batteries des satellites orbitaux.
Les choses ont mis un peu plus longtemps à démarrer en ce qui concerne les applications terrestres. Le taux de rendement du photovoltaïque ne justifiait pas, en effet, d’y investir, dans la mesure où la plupart des autres méthodes (charbon, hydraulique ou nucléaire) permettaient de produire de l’électricité à un coût nettement inférieur. Les questions de changement climatique sont toutefois venues modifier notre perspective au cours de la dernière décennie. L’alarme a été sonnée par les problèmes environnementaux liés à l’accumulation de gaz carbonique (CO2) : il y a désormais urgence à mettre au point de nouvelles technologies non polluantes. Cela a suscité un regain d’intérêt pour des technologies qui, bien que connues, avaient été mises de côté à l’époque où les considérations de coût et de volumes de production l’emportaient sur toutes les autres. Et c’est ainsi que la technologie du photovoltaïque a été ressortie de la poussière de l’information brevet où elle reposait, presque oubliée, depuis des années.
Les dons du soleil |
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Le marché du photovoltaïque
Un arbre photovoltaïque à Gleisdorf (Allemagne). (Photo: Anna Regelsberger)
Selon une étude intitulée “Global Photovoltaic Market Analysis and Forecasts to 2020”, la capacité mondiale de production d’électricité photovoltaïque est passée de 1,3 gigawatts (GW) en 2001 à 15,2 GW en 2008. L’EPIA* et Greenpeace prévoient pour leur part que si les investissements et les gains d’efficacité se maintiennent au rythme actuel, les systèmes photovoltaïques atteindront, d’ici l’année 2030, une production de 2600 térawatts-heure (TWh), soit près de 14% des besoins d’électricité de la population mondiale.
Les chefs de file en matière d’installations photovoltaïques semblent être l’Allemagne, le Japon et les États-Unis d’Amérique, mais les chiffres diffèrent selon les rapports. L’Espagne a revendiqué la première place en janvier, après avoir installé en 2008 plusieurs grandes centrales pour une capacité totale de 226,3 mégawatts (MW). En fait, le nombre des poses de centrales, tant individuelles que collectives, connaît une telle expansion que le classement change sans arrêt. Cette croissance est due principalement à des mesures d’aide financière qui prennent souvent la forme de subventions permettant de récupérer une partie des coûts d’installation ou d’une tarification particulière pour le rachat par le réseau électrique local du surplus d’électricité produit par le consommateur.
Le marché du photovoltaïque n’est pas hors de portée pour les pays en développement. Ces derniers peuvent en effet en bénéficier désormais, grâce à la réduction des coûts que permet la recherche. L’énergie solaire constitue une excellente solution pour les régions éloignées où le raccordement au réseau électrique est trop coûteux, voire impossible (lire l’article Barefoot College, Une formation d’ingénieur solaire pour grands-mères). Un important marché s’est d’ailleurs développé dans ces régions pour des accumulateurs rechargeables à l’énergie solaire.
Les inconvénients du photovoltaïque |
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Un risque de pénurie
Les modules photovoltaïques standard peuvent être faits de silicium monocristallin ou polycristallin. Les plaquettes de silicium traité représentent environ 50% de leur coût. L’invention par Emanuel Sachs, en 1980, du silicium fondu entre deux fils (brevet US 4661200) a été décisive pour l’industrie du panneau solaire, car elle permettait de produire les plaquettes en bandes continues de silicium multicristallin, en éliminant les pertes et les coûts considérables liés jusqu’alors au sciage des blocs de silicium. La réduction de prix de revient ainsi réalisée a facilité l’adoption à plus grande échelle de la technologie solaire.
Le silicium cristallisé présente toutefois d’importants inconvénients. Outre le fait que sa fabrication est fortement consommatrice d’énergie, son utilisation a pour conséquence une dépendance du photovoltaïque au silicium - une matière coûteuse et rare pour laquelle il est en outre en concurrence avec le secteur de la microélectronique. La qualité de silicium polycristallin nécessaire à la fabrication des panneaux solaires n’étant produite que dans 12 usines dans le monde, les prix explosent lorsque le marché des microprocesseurs et celui des cellules solaires prospèrent simultanément. En 2004, par exemple, le prix du silicium s’est envolé en raison d’une forte demande dans le secteur de l’électronique. Cette situation pousse le secteur du photovoltaïque à essayer de trouver des matériaux de remplacement, bien que cela ne signifie nullement l’abandon des recherches dans le domaine du silicium.
La physique des solides a démontré que le silicium n’est pas le matériau idéal pour convertir la lumière en électricité. Son efficacité dans les applications spatiales, qui bénéficient des technologies les plus avancées et du silicium le plus pur et le plus performant qui soit, se maintient autour de 30%. Pour la plupart des modules photovoltaïques actuellement commercialisés, elle se limite à 12 à 18%. L’amélioration de l’efficacité du silicium constitue donc pour l’industrie du solaire une importante priorité.
Gains d’efficacité en vue
La conversion de l’énergie solaire en électricité se faisait précédemment par concentration du rayonnement solaire, un peu comme lorsque l’on démultiplie la lumière du soleil à l’aide d’une loupe afin de brûler un morceau de papier. Il fallait utiliser à cet effet des dispositifs lourds et encombrants, munis de lentilles dont l’épaisseur pouvait attendre 30 cm. Les chercheurs ont mis au point depuis des cellules en film mince qui leur permettent de battre des records d’efficacité avec des panneaux solaires de plus en plus faciles à manipuler. Ils visent une architecture idéale, répondant à tous les impératifs de coût, de taille et de fabrication de masse.
En 2007, après 21 mois de travail dans le cadre d’un projet visant à mettre au point la base technologique d’une nouvelle cellule solaire à haute efficacité en silicium cristallisé, un consortium de recherche dirigé par l’université du Delaware a obtenu un rendement de 42,8%, grâce à une architecture intégrant un concentrateur optique à la cellule optique, ce qui permet de réaliser un dispositif de très petite taille qui trouve facilement sa place sur un ordinateur portable (pour plus de détails, voir le brevet PCT WO2008/091290). Le consortium pense atteindre les 50% d’ici 2010.
De nouveaux matériaux prometteurs
Outre les avancées que connaît la fabrication des cellules solaires à base de silicium, des percées ont été réalisées avec d’autres matériaux, notamment des semi-conducteurs ou des composés de chimie organique. L’utilisation de matières autres que le silicium peut se traduire par une réduction de coût, car elle donne accès à des procédés de fabrication plus simples et plus économiques, sans compter qu’elle libère des contraintes liées à la dépendance au silicium. D’autres recherches sont toutefois nécessaires pour parvenir à égaler et surpasser le rendement des cellules solaires au silicium. Comme le montrent les exemples ci-après, les choses progressent à grands pas dans ce domaine.
Le consortium de recherche ThinPV, dont fait partie l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), veut augmenter l’efficacité des modules solaires à couches minces faits de matériaux autres que le silicium, à savoir les cellules en disélénure de cuivre-indium-gallium (CIGS), les cellules organiques et les cellules sensibilisées par colorant. Lors du démarrage du projet, en 2006, le rendement obtenu à l’aide de cellules CIGS à couches minces était de 11%. ThinPV a atteint depuis un rendement de 15% en laboratoire, grâce à la combinaison des cellules CIGS et des cellules à colorant brevetées de l’EPFL. Le groupe estime toutefois qu’il peut faire beaucoup mieux.
Technologie solaire à couches minces (Photo: www.treehugger.com.)
Comme celle des cellules solaires à couches minces à base de silicium, la technologie des cellules CIGS utilise des couches de films semi-conducteurs à échelle nanométrique qui peuvent être appliquées sur des substrats peu coûteux tels que le verre, des feuilles métalliques flexibles ou des polymères à haute température. Contrairement aux cellules photovoltaïques conventionnelles, les cellules sensibilisées par colorant différencient les fonctions d’absorption de la lumière et de séparation des charges électriques. Dans les cellules à colorant, les électrons produits par le photosensibilisateur (colorant) sont déposés à la surface de minces couches de matières semi-conductrices qui transportent la charge électrique. Parmi les applications possibles de cette technologie, une équipe de recherche britannique travaille actuellement à la mise au point de peintures solaires à pigments photosensibles qui pourraient être appliquées directement sur des tôles d’acier. Elle espère pouvoir les commercialiser d’ici 2011.
Le laboratoire des énergies renouvelables (NREL) du Ministère de l’énergie des États-Unis d’Amérique a battu le record de ThinPV en mars 2008, en atteignant un rendement de 19,9% avec des cellules CIGS à couches minces, ce qui place cette technologie sur un pied d’égalité avec celle du silicium cristallin. Selon le NREL, la différence est due à la qualité des matériaux appliqués au cours de la fabrication des cellules. Le laboratoire entrevoit un brillant avenir pour les cellules CIGS qui, en raison de leur faible poids, peuvent être mises en œuvre tant dans le domaine spatial que dans celui de l’électronique portable. Elles se prêtent également à des applications architecturales spéciales telles que bardeaux et fenêtres photovoltaïques.
Bien que la recherche dans ce domaine en soit encore à ses débuts, la technologie des cellules à couches minces autres qu’à base de silicium a déjà fait la transition du laboratoire au marché. Les attentes qu’elle suscite dans le secteur du photovoltaïque sont grandes, car les matériaux utilisés sont peu coûteux et faciles à fabriquer, ont une incidence faible sur l’environnement et sont compatibles avec des matières flexibles, ce qui permet d’envisager leur utilisation dans les domaines de l’emballage et du vêtement, ainsi que pour recharger les téléphones mobiles et ordinateurs portables.
Évolution du marché du photovoltaïque
Plusieurs nouveaux types de cellules solaires sont actuellement commercialisés aux côtés des cellules de silicium monocristallin et polycristallin, dont notamment les cellules en couches minces qui se sont déjà emparées de 7 à 10% du marché. Selon les prévisions de l’Institut Prometheus du développement durable, les cellules en couches minces autres qu’en silicium détiendront 40% du marché en 2012.
À l’heure actuelle, les fabricants des États-Unis d’Amérique donnent la préférence à diverses technologies de couches minces, tandis que l’Europe et l’Asie se concentrent plutôt sur les cellules solaires en silicium monocristallin et polycristallin. Les progrès de la recherche conduiront petit à petit à une augmentation des rendements qui devrait se traduire par l’arrivée sur le marché d’un nombre croissant de solutions prometteuses autres qu’à base de silicium. L’OMPI publiera prochainement une étude sur les technologies énergétiques de substitution, dans laquelle il est montré que le nombre des demandes de brevets déposées dans les grands offices de propriété industrielle pour des inventions relatives à l’électricité solaire a triplé au cours des 20 dernières années.
L’évolution du marché du photovoltaïque est certes ralentie par la crise financière, mais rien ne pourra l’arrêter. Le nombre croissant de brevets enregistrés en vertu du PCT dans le domaine de l’énergie solaire - que ce soit pour des améliorations techniques ou pour des inventions à proprement parler - témoigne des progrès réalisés par cette industrie. Nous n’avons fait ici qu’entrevoir son potentiel.
* Association européenne de l’industrie photovoltaïque
Sylvie Castonguay, La Rédaction, Magazine de l'OMPI, Division des communications
Remerciements : Hattie Carwell, Museum of African American Technology (MAAT) Village, anciennement du Ministère de l’énergie des États-Unis d’Amérique, et Alex Riechel, OMPI, Département de l’infrastructure mondiale en matière de propriété intellectuelle
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