8 avril 2024
Dans le cadre du règlement des litiges en matière de propriété intellectuelle, un grand nombre de ressorts juridiques prévoient des mesures provisoires permettant de perquisitionner des locaux et de saisir des éléments de preuve sans avertissement préalable. Dans les pays de common law, ces mesures sont communément dénommées “ordonnances Anton Piller”, ce nom faisant référence à un jugement rendu en Grande-Bretagne en 1975. Les ordonnances Anton Piller et les mécanismes connexes visent à empêcher la destruction de preuves pertinentes et à obtenir des preuves de l’existence et de l’étendue d’une infraction présumée.
En France et dans d’autres pays de droit civil, les tribunaux utilisent largement le mécanisme de saisie-contrefaçon comme moyen d’obtenir des preuves dans les affaires d’atteinte à la propriété intellectuelle. Lorsqu’elle est autorisée par un juge, la saisie-contrefaçon permet à un titulaire de droits de propriété intellectuelle de faire appel à un fonctionnaire désigné pour constater une infraction, ce fonctionnaire étant habilité à pénétrer dans tout lieu où l’infraction pourrait être constatée et à saisir les preuves de l’infraction. Les ordonnances Anton Piller et la saisie-contrefaçon fonctionnent généralement comme des procédures ex parte ne nécessitant aucune notification ou représentation de la partie visée.
Participez au prochain webinaire de l’OMPI à l’intention des juges tirer les enseignements des points de vue et des données d’expérience du juge Malik Chapuis (troisième chambre, tribunal de première instance de Paris (France)), du juge Michael Manson (Cour fédérale d’Ottawa (Canada)) et du juge David Unterhalter (Division Gauteng, Haute Cour, Johannesburg (Afrique du Sud)), dans le cadre d’un webinaire interactif explorant des questions telles que :
Le webinaire se déroulera le 2 mai 2024 (de 16 h 00 à 17 h 30 (heure d’Europe centrale) vérifier votre heure locale) en français et en anglais, avec une interprétation simultanée en français, anglais, arabe, chinois, espagnol et russe. La participation au forum est ouverte uniquement aux juges des tribunaux et aux arbitres des organes de recours parajudiciaires des offices de propriété intellectuelle.
Pour participer au webinaire, veuillez vous inscrire. Les inscriptions seront ouvertes jusqu’au 29 avril 2024 à 18 heures (heure d’Europe centrale). Pour toute question, veuillez contacter l’Institut judiciaire de l’OMPI.
Outre les recours civils ou les sanctions pénales disponibles, un titulaire de droits de propriété intellectuelle peut, sous certaines conditions, demander des mesures provisoires pour empêcher la contrefaçon et l’entrée de marchandises contrefaites sur le marché, ou pour faciliter la collecte et la conservation des preuves pertinentes. L’article 50.1 de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Accord sur les ADPIC) prévoit que les autorités judiciaires seront habilitées à ordonner l’adoption de mesures provisoires rapides et efficaces :
a) pour empêcher qu’un acte portant atteinte à un droit de propriété intellectuelle ne soit commis et, en particulier, pour empêcher l’introduction, dans les circuits commerciaux relevant de leur compétence, de marchandises, y compris des marchandises importées immédiatement après leur dédouanement;
b) pour sauvegarder les éléments de preuve pertinents relatifs à cette atteinte alléguée.
En ce qui concerne le deuxième objectif des mesures provisoires, à savoir la collecte et la conservation de preuves concernant une infraction présumée, il existe d’importants mécanismes judiciaires, connus sous le nom d’“ordonnances Anton Piller” dans les pays de common law et de “saisie-contrefaçon” dans les pays de droit civil. Les ordonnances Anton Piller et la saisie-contrefaçon fonctionnent de manière similaire pour permettre la perquisition de locaux et la saisie de preuves.
Les ordonnances Anton Piller, qui tirent leur nom de l’affaire Anton Piller KG c. Manufacturing Processes Limited [1975] EWCA Civ 12, jugée en Grande-Bretagne en 1975, ou des mécanismes similaires, existent dans les pays de common law. L’ordonnance Anton Piller est une forme d’injonction provisoire qui donne à un plaignant le droit de perquisitionner les locaux d’un défendeur et de saisir des éléments de preuve sans avertissement préalable. Compte tenu de la nature intrusive des ordonnances Anton Piller, qui sont obtenues dans le cadre d’une procédure ex parte, certaines conditions doivent être remplies pour qu’un tribunal puisse accorder une telle ordonnance, et la partie requérante doit divulguer tous les faits importants. Les critères pris en compte par les tribunaux lors de l’examen d’une demande d’ordonnance Anton Piller sont souvent énumérés dans la jurisprudence du ressort juridique concerné.
La saisie-contrefaçon, autorisée dans les pays de droit civil, est largement utilisée en France. Comme les ordonnances Anton Piller, la saisie-contrefaçon permet d’obtenir des preuves de l’existence et de l’étendue de l’atteinte aux droits de propriété intellectuelle. En autorisant la mesure de saisie-contrefaçon, le juge permet au titulaire des droits de propriété intellectuelle requérant de faire appel à un huissier (dans le contexte français) ou à un fonctionnaire assumant des fonctions comparables pour pénétrer dans tout lieu où la contrefaçon présumée pourrait être observée, ainsi que pour saisir des éléments de preuve de la contrefaçon. Les obligations des États membres de l’Union européenne concernant les mesures de conservation des preuves sont examinées à l’article 7 de la Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle.
Les ordonnances Anton Piller et la saisie-contrefaçon sont accordées dans le cadre d’une procédure ex parte, la partie visée par la mesure n’étant pas informée de la procédure ni en mesure d’y participer.