Assemblées de l’OMPI de 2010
20 au 29 septembre 2010
Votre Excellence, Monsieur l’ambassadeur Alberto Dumont, président de l’Assemblée générale de l’OMPI,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les représentants permanents,
Mesdames et Messieurs les délégués,
J’ai le grand plaisir de m’associer au président de l’Assemblée générale, M. l’ambassadeur Dumont, pour vous souhaiter la bienvenue à cette session des assemblées des États membres de l’OMPI. Nous sommes honorés et heureux de constater qu’un si grand nombre de ministres ont choisi d’assister aux assemblées et de consacrer une partie de leur temps précieux à l’OMPI.
Je ne vais pas vous rendre compte oralement et en détail aujourd’hui des résultats des activités de l’Organisation au cours des 12 mois écoulés. J’ai communiqué séparément un rapport écrit à cette fin. Je préférerais utiliser le temps dont je dispose pour aborder brièvement le thème du Segment de haut niveau, à savoir innovation, croissance et développement et son lien avec les activités de l’Organisation.
L’innovation est un facteur clé de la croissance économique et de la création d’emplois de meilleure qualité. Elle est également essentielle à la compétitivité des pays, des industries et des entreprises. L’innovation est la procédure par laquelle nous élaborons des solutions pour relever les nombreux défis sociaux et économiques auxquels nous devons faire face, sachant que la solution à la plupart de ces défis passe par de nouveaux savoirs et de nouvelles technologies. De plus, elle est à l’origine de l’amélioration de la qualité de tous les aspects de notre vie matérielle. Elle est également la raison d’être de la propriété intellectuelle. Pour autant, l’innovation et les nombreux avantages qu’elle procure nécessitent un investissement considérable en termes de temps, d’efforts et de ressources humaines et financières. La propriété intellectuelle fournit les incitations nécessaires à cet investissement.
L’innovation est rarement un processus simple. La reconnaissance de la complexité du trajet entre l’idée et la réalité commerciale nous a permis de mieux comprendre ce qu’on entend par innovation. Outre la technologie, nous considérons désormais que l’information en matière de commercialisation, d’organisation et de conception est essentielle pour la réussite de l’innovation.
L’OMPI fournit des services essentiels pour appuyer l’innovation au sens large dans le cadre de ses systèmes mondiaux de propriété intellectuelle, en particulier le Traité de coopération en matière de brevets (PCT), le système de Madrid pour les marques, le système de La Haye pour les dessins et modèles et le système de Lisbonne pour les appellations d’origine. La protection d’une part croissante de l’innovation mondiale s’effectue dans le cadre de ces systèmes. Le nombre de parties à ces systèmes ne cesse d’augmenter. Ils sont également des actifs stratégiques qui génèrent plus de 90% des recettes de l’Organisation et lui permettent d’offrir un large éventail de services de renforcement des capacités et d’autres services en faveur du développement.
Pour continuer d’assurer des services essentiels d’aide à l’innovation mondiale, il est nécessaire que nous continuions d’investir dans ces systèmes mondiaux de propriété intellectuelle, notamment dans le domaine des techniques de l’information, afin de rester concurrentiels par rapport aux autres mécanismes de protection internationale. Il est nécessaire que nous assurions une amélioration continue de la qualité de l’expérience pour les utilisateurs. Et il est également nécessaire que ces systèmes bénéficient de l’appui et de l’intérêt des États membres. À cet égard, je prends note avec plaisir des efforts importants déployés par les États membres au sein des groupes de travail dans chacun de ces systèmes, où des initiatives majeures sont à l’examen pour leur insuffler un nouvel élan et élargir leur audience.
Le paysage de l’innovation mondiale est très dynamique. Tant la géographie de l’innovation que les moyens par lesquels elle se produit changent, bouleversant dans une large mesure un grand nombre de nos suppositions et nos attentes. Si, il y a 20 ans, on aurait pu s’attendre à ce que l’innovation émerge des États Unis ou d’Europe, dans un cas sur trois à présent, on peut s’attendre à ce qu’elle surgisse au Japon, en République de Corée ou en Chine. Les nouvelles tendances en matière de croissance économique et la structure des investissements dans l’éducation et la recherche développement font clairement apparaître que des modifications à l’échelle continentale se produiront dans le monde de l’innovation et que la carte de l’innovation continuera d’évoluer.
Dans le même ordre d’idées, il y a 20 ans, on aurait pu s’attendre à ce que l’innovation émerge du laboratoire d’une seule entreprise ou institution. Depuis lors, une économie en réseau et connectée s’est mise en place. L’information circule plus rapidement et de manière plus économique, à travers des réseaux qui, auparavant, n’existaient tout simplement pas. Cela a accéléré l’évolution vers une innovation ouverte, dans laquelle les entreprises et les institutions se tournent vers l’extérieur afin de satisfaire leurs besoins en matière d’innovation, en formant des partenariats et en coopérant avec un large éventail d’acteurs, y compris des concurrents, des collaborateurs, des fournisseurs et des clients.
Ces changements intervenus dans le paysage de l’innovation mondiale ont donné une importance nouvelle au rôle joué par l’OMPI dans le développement et la coordination de l’infrastructure mondiale. Dans le passé, l’action en matière de coopération internationale dans le domaine de la propriété intellectuelle était essentiellement axée sur le cadre juridique international. Nul ne songerait à affirmer que ce domaine revêt moins d’importance à l’heure actuelle. Toutefois, le cadre technique constitue une dimension supplémentaire de plus en plus propice, voire nécessaire, à la mise en place d’une coopération internationale efficace. Laissez moi citer juste deux exemples.
Tout d’abord, la coopération dans le domaine des infrastructures techniques offre une occasion de renforcer la participation des pays les moins avancés et des pays en développement à l’innovation mondiale et, par conséquent, de contribuer à la réalisation des idéaux énoncés à la fois dans les Objectifs du Millénaire pour le développement et dans le Plan d’action de l’OMPI pour le développement, à savoir réduire les inégalités en matière d’accès au savoir et la fracture numérique. Nous avons, l’année dernière, réalisé des progrès considérables en matière d’amélioration de l’accès au savoir, qui est la base de toute innovation. Une série de partenariats public privé avec des éditeurs et des fournisseurs de bases de données commerciales ont été établis, ce qui a permis de donner gratuitement accès à des périodiques scientifiques1 et des bases de données technologiques2 à toute personne dans un pays moins avancé, et d’en assurer l’accès à un prix très raisonnable pour toute demande émanant d’un pays en développement. En outre, dans le cadre de la Plate forme des parties prenantes, dans le cadre d’une association entre des éditeurs et l’Union mondiale des aveugles, des progrès significatifs ont été réalisés en ce qui concerne les plans relatifs à un ambitieux programme de diffusion d’œuvres publiées dans des formats accessibles aux déficients visuels3. Des centres d’appui à la technologie et à l’innovation ont été créés dans un certain nombre de pays en développement au cours des 12 derniers mois, en tant que points d’accès et centres de formation. Nous nous sommes aussi attachés à connecter les pays les moins avancés et les pays en développement aux réseaux mondiaux, des projets de numérisation et d’automatisation des offices de propriété industrielle ayant été mis en œuvre dans plus de 71 pays.
Concernant le deuxième exemple, la coopération en matière d’infrastructures techniques peut aussi constituer un moyen très approprié d’améliorer à la fois l’efficacité du travail des offices de brevet et la qualité de leurs résultats. Un grand nombre de projets sont en cours à cet égard dans des États membres, des groupes d’États membres et à l’OMPI même. Ils portent sur un large éventail de sujets, tels que les systèmes de classement, le partage des rapports de recherche et d’examen et, compte tenu de l’évolution du paysage de la technologie et, par conséquent, de l’évolution des langues utilisées, la traduction assistée par ordinateur. Dans certains cas, l’OMPI prend part à la mise en œuvre de ces projets et, dans d’autres, non. Qu’elle participe ou non à la réalisation des projets, un rôle essentiel que doit jouer l’Organisation à cet égard est de servir de relais pour mettre à disposition au niveau multilatéral les résultats obtenus. Ainsi, les diverses parties de l’infrastructure technique mondiale seront mises au point et fournies par différentes parties de sorte que, en fin de compte, nous disposerons d’une infrastructure mondiale bâtie par tous et appartenant à tous.
L’importance croissante de la coopération en matière d’infrastructure technique ne réduit en rien l’importance que revêt la coopération en ce qui concerne le cadre juridique international. À bien des égards, le succès d’une coopération au sujet du cadre juridique international permet d’évaluer l’utilité de l’Organisation et, par conséquent, du multilatéralisme. Les procédures lentes du multilatéralisme peuvent elles apporter en temps voulu des réponses au monde de l’innovation en mutation rapide? L’année dernière, comme l’a souligné M. l’ambassadeur Dumont, des progrès ont été enregistrés dans les divers comités de l’OMPI traitant des questions relatives au cadre juridique. Si le chemin est encore long, il existe des possibilités réelles d’accomplir des progrès concrets dans un certain nombre de domaines, y compris l’accès des déficients visuels aux œuvres publiées, les interprétations ou exécutions audiovisuelles, la radiodiffusion, le folklore et les savoirs traditionnels, les dessins et modèles et les marques sur l’Internet. Je voudrais saluer le travail des experts dans le cadre de ces comités, ainsi que la diplomatie très constructive et engagée déployée par les représentants permanents à Genève en vue de trouver des moyens d’avancer dans ce domaine et, également, vous rendre hommage, Monsieur l’ambassadeur Dumont, en votre qualité de président de l’Assemblée générale, pour avoir assuré la direction à Genève des délibérations, en constante évolution, au sujet du cadre juridique international.
J’aimerais, pour conclure, souligner que, tout comme nous croyons que l’OMPI a un rôle essentiel à jouer en matière d’innovation, nous estimons aussi que l’innovation joue un rôle fondamental à l’OMPI. Comme toutes les organisations internationales, nous devons faire face au rythme rapide de l’évolution du monde extérieur. Nous nous efforçons d’y répondre de manière mesurée, structurée et énergique dans le cadre du Programme de réorientation stratégique, dans la mise en œuvre duquel beaucoup de progrès ont été accomplis ces 12 derniers mois. Je voudrais, à cet égard, saluer le dévouement et le travail de l’ensemble de mes collègues.
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1 Accès à la recherche pour le développement et l’innovation (aRDi), https://www.wipo.int/ardi/fr/.
2 Accès à l’information spécialisée en matière de brevets (ASPI), https://www.wipo.int/patentscope/en/programs/aspi.
3 Voir http://www.visionip.org/portal/en/index.html.