Discours de Francis Gurry, prononcé devant l'Assemblée générale de l'OMPI à l'occasion de sa nomination au poste de directeur général – 22 septembre 2008
Votre Excellence, Monsieur l’ambassadeur Martin Uhomoibi, Président de l’Assemblée générale de l’OMPI,
Monsieur Kamil Idris, Directeur général de l’OMPI,
Mesdames et Messieurs les Ministres, Excellences, Mesdames et Messieurs les délégués,
Merci de l’honneur que vous me faites, et de la confiance que vous m’accordez, en me nommant au poste de directeur général de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).
Le processus qui a abouti à votre décision de ce matin a été long, parfois tendu, mais toujours intéressant. La réussite de ce processus doit beaucoup à deux personnes, à qui j’a imerais rendre hommage dès à présent. En premier lieu, permettez-moi de mentionner le président de l’Assemblée générale de l’OMPI, M. Martin Uhomoibi, qui a pris le relais après la désignation effectuée par le Comité de coordination et qui, avec la sagesse, l’autorité naturelle et l’exemplaire habileté diplomatique qui le caractérisent, a conduit l’Organisation du stade d’une désignation à celui d’une nomination. Il a également joué un rôle exceptionnel en pilotant l’O rganisation pendant la phase de transition et en apportant sa collaboration et ses conseils à M. Idris et moi-même pour en assurer le bon déroulement. Monsieur Uhomoibi, nous vous sommes tous redevables, et moi en particulier.
J’aimerais aussi rendre hommage à Mme Hilde Skorpen, présidente du Comité de coordination de l’OMPI, qui a eu pour tâche peu enviable de diriger le processus long de six mois qui a abouti à la désignation d’un nouveau directeur général par le Comité de coordination de l’OMPI en mai de cette année. Nous lui savons tous gré de sa patience et de son souci de transparence dans la recherche de procédures susceptibles d’être acceptées d’un commun accord par tous les membres du Comité de coordination, ainsi que de l’efficacité et de l’i mpartialité avec lesquelles elle a conduit la réunion qui a servi de cadre à l’élection.
Pour ma part, comme vous le savez, j’ai été désigné à l’origine par le Gouvernement australien, qui m’a assisté et soutenu tout au long du processus. J’aimerais adresser mes remerciements au Gouvernement australien, à Mme Caroline Millar, ambassadrice et représentante permanente de l’Australie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, à M. Bruce Gosper, ambassadeur et représentant permanent de l’Australie auprès de l’O rganisation mondiale du commerce, ainsi qu’au personnel du Département des affaires étrangères et du commerce, du Ministère de la justice et de IP Australia, et en particulier aux membres des missions permanentes de l’Australie à Genève. Je les remercie de leur soutien, de leurs efforts, de leurs conseils avisés et de leur amitié.
À compter de ma désignation par le Comité de coordination, j’ai cessé d’être le candidat de l’A ustralie pour devenir celui du Comité de coordination. Nombreux sont ceux qui, parmi les représentants des gouvernements et les membres des missions permanentes, en particulier les coordonnateurs des groupes, et le personnel de l’OMPI, notamment au sein de l’Équipe de transition, m’ont apporté depuis lors des conseils d’une valeur inestimable. J’aimerais les remercier eux aussi pour leur aide et leur soutien. Nombre d’entre vous trouveront dans mes propos de ce matin et dans le programme futur de l’Organisation des échos de leurs conseils. J’espère que vous y verrez la volonté de collaborer avec tous au sein de l’Organisation plutôt qu’une atteinte à votre droit d’auteur. À tous les États membres et à tout le personnel, que vous ayez appuyé ma désignation devant le Comité de coordination ou que vous ayez préféré une autre solution, soyez assurés que je travaillerai avec tous les États membres, et pour eux, et que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir en vue de surmonter les divisions et de parvenir à des positions et des décisions propres à recueillir la plus large adhésion possible parmi les États membres de l’O rganisation.
Avant de parler de l’avenir, je me tourne enfin vers mes prédécesseurs au poste de directeur général, et plus particulièrement vers le directeur général sortant, M. Kamil Idris. J’a imerais leur exprimer notre gratitude pour leur contribution collective à la construction de l’O rganisation telle que nous la connaissons aujourd’hui. Je remercie particulièrement, au nom de l’ensemble du personnel, M. Kamil Idris, pour ses 25 années de service à l’OMPI, dont 23 ans au cours desquels nous avons été collègues, et pour son rôle à la tête de l’O rganisation durant ses deux mandats de directeur général. Je m’associe au président de l’A ssemblée générale pour saluer les réalisations de M. Idris et les initiatives prises pendant ses mandats, qui ont élargi la portée de la propriété intellectuelle et diversifié la participation à cette Organisation.
Du fait de l’évolution mondiale dans les domaines technologique, économique et social, l’O rganisation s’est récemment trouvée confrontée à un certain nombre de défis fondamentaux. Le plus crucial de ces défis est peut-être celui lié à l’attention nouvelle suscitée par la propriété intellectuelle. Sujet hautement spécialisé, la propriété intellectuelle est longtemps restée un domaine paisible et méconnu avant de passer brusquement, au cours des deux dernières décennies, sous les feux des projecteurs. La gestion de ce changement d’environnement de la propriété intellectuelle est déjà un défi majeur. À cet égard, il convient de rappeler que la propriété intellectuelle n’est pas une fin en soi. C’est un instrument pour atteindre certains objectifs de politique générale tels que, au moyen des brevets, des dessins et modèles et du droit d’auteur, la stimulation et la diffusion de l’innovation et de la créativité dont nous sommes devenus si dépendants et, au moyen des marques, des indications géographiques et du droit de la concurrence, l’instauration de l’ordre sur le marché et la lutte contre les ennemis des marchés et des consommateurs que sont l’incertitude, la confusion et la fraude. En fin de compte, nos débats et nos discussions visent à savoir comment la propriété intellectuelle peut servir au mieux ces politiques fondamentales, c’est-à-dire à déterminer si telle ou telle modification du cadre international est de nature à stimuler ou à freiner l’innovation et la créativité et leur diffusion et à ajouter de la confusion ou de la clarté au fonctionnement du marché.
L’institution de la propriété intellectuelle telle que nous l’avons toujours connue est affectée par un certain nombre de phénomènes qui risquent de l’empêcher de remplir sa mission première, celle de stimuler l’innovation et la créativité et de contribuer à l’instauration de l’ordre sur le marché. L’OMPI doit anticiper les incidences de ces phénomènes et s’y attaquer directement.
Le premier de ces phénomènes est une tendance soutenue qui fait que la technologie imprègne tous les aspects de notre vie quotidienne et de la sphère économique. Avec l’accélération de cette tendance, la valeur économique de l’innovation s’est accrue et, avec elle, le désir d’acquérir des droits de propriété au-delà des frontières du savoir. Lorsque la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle a été conclue en 1883, on comptait environ 80 000 demandes de brevet ou solutions techniques nouvelles. L’année dernière, ce nombre s’élevait à 1,7 million. Ainsi que l’a déclaré Arthur Conan Doyle, “le savoir engendre le savoir, comme l’argent produit des intérêts”. La conséquence concrète de cette tendance est que le système devient victime de son propre succès. Les offices de brevets sont submergés par la demande et luttent pour adapter leurs délais de traitement aux besoins de l’é conomie. On estime aujourd’hui à 3,5 millions le nombre de demandes de brevet non examinées dans le monde. La qualité du travail des offices de brevets, pressés de faire face à cette demande, est aussi observée d’un œil critique. Le Traité de coopération en matière de brevets (PCT), sur lequel repose l’architecture financière de cette Organisation, est un instrument multilatéral conçu pour régler les problèmes découlant de l’accroissement de la demande et de l’i nternationalisation du système des brevets. S’il est l’un des exemples les plus éclatants d’u ne coopération internationale réussie, il n’apporte pas, pour toute une série de raisons liées davantage au comportement des acteurs du système qu’au système lui-même, une réponse suffisante à la crise de la gestion de la demande. Or le problème est d’une importance et d’une urgence telles qu’une solution sera trouvée. Je suis convaincu qu’il doit s’agir d’une solution multilatérale plutôt que d’une solution émanant du ou des groupes d’États les plus touchés. Plus que tout autre instrument à l’examen ou envisageable actuellement, le PCT est le meilleur point de départ pour élaborer une solution d’avenir.
Dans le domaine des œuvres de création, qui sont les expressions concrètes de notre culture, les enjeux sont encore plus cruciaux. Le modèle du XXe siècle de rétribution des créateurs, des interprètes et de leurs partenaires commerciaux, fondé sur la distribution de supports matériels incorporant les œuvres, est sérieusement menacé par la convergence des formes d’e xpression numériques et de la puissance de diffusion de l’Internet. Cette évolution risque fort d’être plus préjudiciable aux pays en développement, où les créateurs et les interprètes n’ont pas les mêmes facilités d’accès à l’Internet, à la bande passante et aux autres modèles de rétribution que leurs homologues des pays développés. Les incitations à la création de contenu éducatif et d’œuvres littéraires, musicales, cinématographiques et autres qui enrichissent nos vies sont des questions fondamentales pour tous les pays. Comme pour le système des brevets menacé d’asphyxie, des solutions seront trouvées. Celles-ci viendront peut-être du marché lui-même, sous forme de systèmes de droit privé et de mesures techniques. Ces solutions seront peut-être adaptées. Mais il serait malheureux de devoir passer d’un système séculaire de droit public à des systèmes de droit privé simplement par défaut, et non en vertu d’un choix délibéré. Il s’agit d’une question épineuse. Dans chaque pays, on compte infiniment plus de consommateurs que de créateurs et d’interprètes, ce qui complique la gestion politique de la discussion. Cet aspect de politique intérieure, de même que la nature mondiale du partage de fichiers sur l’Internet, donne à penser qu’il conviendrait peut-être de mener cette discussion au niveau international plutôt qu’au plan national. La Convention de Berne, l’un des textes à l’origine de la création de l’OMPI, a été adoptée au XIXe siècle pour répondre aux préoccupations des auteurs concernant les incidences de la circulation internationale de leurs œuvres matérielles. Je suis convaincu que l’O MPI reste l’enceinte appropriée pour examiner au XXIe siècle la même question parée d’habits technologiques différents.
Le téléchargement illicite à grande échelle de musique et de films à partir de l’Internet pose plus généralement la question du respect de la propriété intellectuelle. Un tournant décisif a également été enregistré dans le domaine de la contrefaçon des supports matériels. En effet, ce phénomène a cessé depuis longtemps de se limiter aux produits de luxe pour se propager à de nombreux autres secteurs de l’économie, suscitant de graves préoccupations quant à la santé, la sécurité et la protection des consommateurs. Le crime organisé en est devenu un élément majeur. Selon les estimations, la part des produits de contrefaçon dans le commerce international s’élève à plus de 200 milliards de dollars par an. Des accords plurilatéraux pour lutter contre ce fléau sont sérieusement envisagés. Les menaces qu’il fait peser sur la santé et la sécurité, ainsi que la protection des consommateurs se posent, toutefois, au niveau mondial et ne sont pas circonscrites à des endroits déterminés. Il convient donc de se pencher sur le rôle approprié que l’OMPI, l’organisation internationale chargée de gérer le système de la propriété intellectuelle, doit jouer à cet égard. Doit-elle se limiter à la sensibilisation et à la formation des fonctionnaires des douanes et de la police et des magistrats? Ou alors doit-elle s’engager plus activement et, le cas échéant, doit-elle agir seule ou en collaboration avec les autres institutions internationales concernées?
Je n’ai mentionné jusqu’ici que des facteurs externes menaçant le bon fonctionnement du système de la propriété intellectuelle tel qu’il se présente aujourd’hui. Il est tout aussi important, cependant, de se pencher sur des questions dont la prise en considération incite le système de la propriété intellectuelle à élargir son horizon et à tenir davantage compte, dans l’a ccomplissement de sa mission, de la sensibilité collective de la communauté internationale.
Tout d’abord, se pose la question de savoir comment la propriété intellectuelle peut contribuer à réduire l’inégalité des savoirs et permettre aux pays en développement et aux pays les moins avancés de mieux tirer parti des avantages de l’innovation et de l’économie du savoir. Les disparités qui existent à cet égard sont bien connues de nous tous, mais elles sont peut-être davantage mises en évidence par le fait qu’à l’heure actuelle, le montant consacré chaque année par un certain nombre d’entreprises à l’élaboration de nouveaux savoirs est supérieur à celui dont disposent la plupart des pays subsahariens pour subvenir à leurs besoins dans tous les domaines, y compris ceux de l’éducation, de la santé ou encore des infrastructures. Globalement, mille milliards de dollars sont dépensés chaque année dans le monde pour la recherche-développement. La propriété intellectuelle n’apportera pas à elle seule la solution au problème posé par l’écart entre les niveaux de développement. Toutefois, le consensus récemment dégagé au sein de notre Organisation sur la mise en œuvre d’un Plan d’action pour le développement donne à l’OMPI une occasion extraordinaire de contribuer à la recherche de cette solution.
Pour que le Plan d’action pour le développement tienne toutes ses promesses, je crois qu’il est essentiel que nous traduisions le consensus politique en projets concrets et efficaces. L’O rganisation a la possibilité de mettre sur pied une infrastructure mondiale du savoir comprenant des bases de données publiques et gratuites d’informations techniques et scientifiques et appliquant les normes communes d’échange de données. Cette infrastructure viserait concrètement à mieux répartir les avantages sociaux des systèmes de propriété intellectuelle. Grâce à l’automatisation de leurs opérations et à la formation, les offices de propriété intellectuelle et les instituts de recherche et universités des pays en développement seraient mieux armés pour contribuer à une telle infrastructure.
Le Plan d’action pour le développement donne également à l’OMPI l’occasion d’évaluer l’e fficacité de ses services dans le domaine du renforcement des capacités. Je suis convaincu que l’adoption par les pays de stratégies nationales en matière de propriété intellectuelle et d’i nnovation, que l’Organisation pourrait aider à mettre en œuvre si ces derniers le souhaitent, constituerait un excellent moyen de mettre en adéquation les activités de l’Organisation dans le domaine du renforcement des capacités avec les ressources économiques et les objectifs et priorités de ces pays.
Le Plan d’action pour le développement et les activités de l’OMPI dans le domaine du renforcement des capacités offrent également la possibilité de répondre aux besoins particuliers des pays les moins avancés (PMA). Je propose de poursuivre sur la lancée de mon prédécesseur, qui a créé une Division des PMA, en augmentant les ressources humaines et financières allouées à cette division.
Par ailleurs, le Plan d’action pour le développement touche à un aspect qui dépasse le cadre du renforcement des capacités et de la mise en place d’une infrastructure du savoir et incite à une analyse et une réflexion permanentes sur le meilleur moyen de mettre le système de propriété intellectuelle au service de tous les pays, quel que soit leur niveau de développement. Cependant, il ne s’agit pas d’un simple exercice de réflexion. Il est essentiel que le Secrétariat soit mieux équipé en matière d’instruments de recherches et de statistiques économiques afin d’être en mesure de fournir aux États membres des données concrètes qui leur permettront de mener cette réflexion. J’ai l’intention de créer une division qui sera expressément chargée de réaliser des études d’impact en vue d’appuyer les initiatives des États membres; d’a nticiper l’évolution du système de la propriété intellectuelle; et de donner à la direction les moyens de définir de futures stratégies susceptibles d’avoir une incidence sur l’O rganisation.
Il a été établi que la protection des savoirs traditionnels et des expressions culturelles traditionnelles est un autre moyen d’élargir le champ d’application de la propriété intellectuelle afin de mieux l’adapter aux besoins des pays en développement. La mondialisation de l’é conomie et les progrès dans le domaine des technologies de la communication ont mis en évidence la vulnérabilité des peuples autochtones et des communautés traditionnelles face à la perte et à l’a ppropriation illicites des produits de leurs systèmes de savoirs traditionnels. Afin de remédier à cette situation, il est manifestement nécessaire de reconnaître expressément la contribution de l’innovation et de la créativité collectives à l’édification de la société et de protéger les produits issus de cette innovation et de cette créativité. L’Organisation a lancé un long processus de discussions et de négociations sur les moyens d’atteindre cet objectif. Je crois que le moment est venu de concrétiser les résultats de ce processus en augmentant le nombre de parties prenantes à l’OMPI et en donnant à son mandat un caractère plus universel.
L’OMPI n’est pas la seule à faire face à des enjeux fondamentaux. La nature même de notre société axée sur les technologies à base de carbone, ainsi que notre interconnexion et notre interdépendance croissantes, ont créé une série de problèmes dont la gravité et l’effet potentiellement destructeur préoccupent la communauté internationale. Un grand nombre de ces défis ont été recensés dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le développement. D’a utres ont été établis à travers l’expression collective des gouvernements, commentateurs, médias et acteurs de la société civile concernés. Il s’agit notamment de questions telles que les changements climatiques, la désertification, les épidémies, l’accès aux soins de santé, la sécurité alimentaire et la préservation de la biodiversité. L’histoire montre que la société se tourne généralement vers la technique – utilisant la science pour trouver une solution à ses problèmes pratiques – pour répondre aux menaces et aux problèmes qui lui sont posés. Les politiques visant à stimuler la création et la diffusion de la technologie sont donc directement liées à l’e xamen des moyens par lesquels la communauté mondiale peut résoudre ces problèmes. Notre Organisation doit s’engager plus activement dans le dialogue et la recherche de solutions par la communauté internationale dans ces domaines. Je propose de créer au sein du Secrétariat une division qui aura pour tâche d’œuvrer à cet engagement, en centrant son action sur la contribution du système de la propriété intellectuelle et de l’OMPI aux mesures collectives prises pour relever ces défis mondiaux. Elle permettra, je l’espère, de renforcer la collaboration de l’O rganisation avec les autres organisations du système des Nations Unies, de favoriser une plus grande interaction de l’OMPI avec ses États membres et de démontrer concrètement l’intérêt de la propriété intellectuelle.
Afin que l’OMPI soit en mesure de relever les défis que j’ai mentionnés – la liste est loin d’ê tre exhaustive, mais le temps ne me permet pas de les examiner de façon approfondie –, nous avons besoin d’une Organisation efficace. Naturellement, le terme “Organisation” ne s’entend pas uniquement du Secrétariat. Ce terme désigne les États membres et le Secrétariat, ainsi qu’un ensemble de plus en plus vaste et dynamique d’utilisateurs de ses services et de parties prenantes non gouvernementales. Une condition préalable au bon fonctionnement de l’Organisation est la mise en place d’une communication fiable entre ces différents acteurs. Telle sera d’e mblée notre priorité et je m’efforcerai de trouver les moyens de mieux communiquer avec l’ensemble de nos parties prenantes et d’intensifier le dialogue entre elles.
En ce qui concerne le Secrétariat, les États membres ont, ces dernières années, clairement exprimé leur volonté de renforcer son efficacité et d’améliorer ses résultats. J’ai l’i ntention de lancer un processus de réorganisation stratégique complète au cours des prochaines années. Elle portera sur la culture d’entreprise au sein du Secrétariat, l’efficacité de nos procédures internes et la conformité de nos programmes, de notre structure et de nos ressources aux objectifs stratégiques de l’Organisation. Cette réorganisation sera mise en œuvre de façon mesurée, systématique et professionnelle, et fera l’objet d’une communication détaillée et transparente tant au sein du Secrétariat, qu’avec les États membres. Il faudra plusieurs années pour la mener à bonne fin. Toutefois, compte tenu de l’évolution rapide de la situation extérieure à laquelle l’Organisation doit faire face, il serait peut-être plus indiqué de la considérer comme un processus permanent. À mes collègues du Secrétariat, j’aimerais dire avec insistance qu’il s’agira d’un effort collectif. Je me réjouis de travailler avec tous et compte sur votre appui.
Concernant les États membres, j’ai essayé d’indiquer les principaux défis que, à mon sens, l’O rganisation aura à relever. J’ai soulevé plus de questions que je n’ai apporté de réponses, ce qui, je pense, est le rôle du directeur général d’une organisation à l’écoute de ses États membres. Les questions soulevées interpellent sur la capacité du multilatéralisme à fournir des réponses en temps voulu. À cet égard, il serait intéressant de rappeler que le rythme de l’évolution technologique n’a cessé de s’accélérer. En effet, si cinq millions d’années ont été nécessaires à l’homme pour passer du stade où il a commencé à se tenir sur ses deux jambes, ce qui lui a permis d’utiliser ses bras à des fins autres que la locomotion, à celui de l’élaboration des premiers outils en pierre taillée, il ne lui a fallu que 1,8 million d’années pour maîtriser le feu, 700 000 ans pour mener à bien la révolution agraire, 12 000 ans seulement pour achever la révolution industrielle et 140 ans uniquement pour réussir la révolution de l’information. Les questions auxquelles doit répondre le système de la propriété intellectuelle sont, à bien des égards, des questions d’o rdre générationnel et il serait dommage de se perdre dans des polémiques et des considérations de politique locale. Le problème pour la communauté multilatérale est que ces questions se posent de plus en plus fréquemment parce que le rythme des progrès techniques est en train de réduire l’écart entre générations. Nous devrons faire preuve d’ingéniosité et de souplesse pour répondre à ces questions.
Je vous remercie de votre attention et me réjouis de travailler avec vous au cours des prochaines années.