Le Requérant est Hachette Filipacchi Presse, Levallois-Perret, France, représenté par Markplus International, France.
Le Défendeur est Madame Saint-Clare, Marseille, France.
Le litige concerne le nom de domaine <ellle.fr> enregistré le 20 novembre 2007.
Le prestataire Internet est la société EURODNS S.A.
Une demande déposée par le Requérant auprès du Centre d'arbitrage et de médiation de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) a été reçue le 25 mars 2009, par courrier électronique et le 27 mars 2009, par courrier postal.
Le 26 mars 2009, le Centre a adressé à l'Association Française pour le Nommage Internet en Coopération (ci-après l'“Afnic”) une demande aux fins de vérification des éléments du litige et de gel des opérations.
Le 26 mars 2009, l'Afnic a confirmé l'ensemble des données du litige, ainsi qu'aucune procédure administrative applicable au nom de domaine objet du litige n'est pendante.
Le Centre a vérifié que la demande répond bien au Règlement sur la procédure alternative de résolution des litiges du “.fr” et du “.re” par décision technique (ci-après le “Règlement”) en vigueur depuis le 22 juillet 2008, et applicable à l'ensemble des noms de domaine du “.fr” et du “.re” conformément à la Charte de nommage de l'Afnic applicable (ci-après la “Charte”).
Conformément à l'article 14(c) du Règlement, une notification de la demande, valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur le 31 mars 2009. Conformément à l'article 15 du Règlement, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 20 avril 2009. Le Défendeur n'a pas fait parvenir sa réponse. Le Centre a notifié le défaut du Défendeur le 21 avril 2009.
Le 30 avril 2009, le Centre nommait Alexandre Nappey comme Expert dans le présent litige. L'Expert constate qu'il a été nommé conformément au Règlement. L'Expert a adressé au Centre une déclaration d'acceptation et une déclaration d'impartialité et d'indépendance, conformément à l'article 4 du Règlement.
Le Requérant est une société française de presse, qui édite de nombreuses publications périodiques, parmi lesquelles figure l'hebdomadaire féminin “Elle”, publié depuis 1945
Le Requérant est titulaire de droits sur différentes marques ELLE, dont les suivantes :
- marque communautaire ELLE déposée le 30 octobre 2003 et enregistrée sous le n°3475365 ;
- marque française ELLE déposée le 20 janvier 1989 et enregistrée sous le n°1 500 024.
Le Requérant est également titulaire de plusieurs noms de domaine destinés à activer le site internet assurant la promotion du magazine “Elle”, dont <elle.com> enregistré depuis le 4 avril 1996 et <elle.fr> depuis le 20 juin 2005.
Le Requérant a relevé le dépôt, sous couvert d'anonymat, du nom de domaine <ellle.fr> le 20 novembre 2007. Le nom de domaine donne accès à une page de parking contenant des liens commerciaux.
Sur requête adressée à l'Afnic, le Requérant a obtenu la divulgation des données personnelles du titulaire du nom de domaine litigieux.
Le Requérant s'est adressé au Centre afin d'obtenir la transmission du nom de domaine litigieux à son profit.
Le Requérant soutient que le nom de domaine <ellle.fr> reproduit de manière quasi-identique la marque notoire ELLE qui lui appartient.
Le Requérant observe par ailleurs que le nom de domaine litigieux renvoie vers un site de parking sur lequel figurent des liens commerciaux, qu'il soutient être rémunérateurs pour le Défendeur.
Il souligne la mauvaise foi du Défendeur qui ne pouvait pas, selon lui, ignorer l'existence de la marque notoire ELLE lors de l'enregistrement du nom de domaine litigieux, et qui tire profit de cette notoriété en détournant les internautes susceptibles de commettre des erreurs de saisie.
En conséquence, le Requérant sollicite la transmission du nom de domaine litigieux à son profit.
Le Défendeur n'a fourni aucune réponse à la demande déposée à son encontre.
L'Expert rappelle que, en application de l'article 1 du Règlement, une atteinte aux droits des tiers est constituée “lorsque le nom de domaine est identique ou susceptible d'être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), ou est identique au nom patronymique d'une personne, sauf si le défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine et agit de bonne foi”. En application du même article, une atteinte aux règles de la concurrence désigne notamment “une violation du comportement loyal en matière commerciale en droit français ou communautaire”.
L'Expert souligne que, en application de l'article 20(c) du Règlement, il fait droit à la demande “lorsque l'enregistrement ou l'utilisation du nom de domaine par le défendeur constitue une atteinte aux droits des tiers ou aux règles de la concurrence telles que définies à l'article 1 du présent Règlement et, si la mesure de réparation demandée est la transmission du nom de domaine, lorsque le requérant a justifié de ses droits sur l'élément objet de ladite atteinte et sous réserve de sa conformité avec la Charte applicable”.
Les droits du Requérant sur les marques ELLE et les noms de domaine <elle.com> et <elle.fr> sont incontestablement établis, et il est également démontré que cette marque bénéficie d'une notoriété internationale dans le domaine de la presse féminine.
Il est constant que l'extension “.fr” ne doit pas être prise en compte lors de la comparaison entre le nom de domaine litigieux et la marque invoquée à son encontre.
L'Expert observe que le radical du nom de domaine est composé du terme “Elle”, qui présente d'étroites similitudes avec les marques du Requérant. Or, compte tenu de sa notoriété, le Défendeur ne pouvait raisonnablement ignorer l'existence de la marque ELLE au moment de l'enregistrement du nom de domaine en cause.
Par conséquent, l'Expert estime que le Requérant bénéficie de droits sur la dénomination ELLE, à titre de marque et de nom de domaine, et que le nom de domaine litigieux est similaire au point de prêter à confusion avec cette marque.
L'Expert estime que l'utilisation du nom de domaine litigieux est effectuée en violation à la fois des droits du Requérant et des règles du comportement loyal en matière commerciale.
L'activation d'une page de parking avec des liens commerciaux faisant la promotion des services de sociétés directement concurrentes du Requérant, à partir d'un nom de domaine susceptible d'induire en erreur les internautes d'attention moyenne, conforte l'opinion de l'Expert sur la mauvaise foi du Défendeur. (AXA contre Robert Kwasnik, Litige OMPI No. DFR2009-0009).
Conformément aux articles 20(b) et (c) du Règlement, l'Expert ordonne la transmission au profit du Requérant du nom de domaine <ellle.fr>.
Alexandre Nappey
Expert
Le 14 mai 2009