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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Carrefour contre Daroueche Mzembaba

Litige No. D2018-2205

1. Les parties

Le Requérant est Carrefour of Boulogne-Billancourt, France, représenté par Dreyfus & associés, France.

Le Défendeur est Daroueche Mzembaba de Lille, France.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le nom de domaine litigieux <carrefour-banque.website> est enregistré auprès de PDR Ltd. d/b/a PublicDomainRegistry.com (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Carrefour auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 28 septembre 2018. En date du 28 septembre 2018, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 29 septembre 2018, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 1 octobre 2018, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant le Requérant à soumettre un amendement à la plainte ou une plainte amendée. Le Requérant a déposé un une plainte amendée le 4 octobre 2018.

Le Centre a vérifié que la plainte et la plainte amendée répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 5 octobre 2018, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 25 octobre 2018. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 1 novembre 2018, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.

En date du 17 novembre 2018, le Centre nommait Christian André Le Stanc comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

La plainte a été déposée en Anglais, langue du contrat d’enregistrement. La Commission administrative, cependant, en application de l’article 11(a) des Règles d’application, décide que la langue de la procédure sera le français en raison de ce que le Requérant est une grande entreprise française ayant son siège en France à Boulogne-Billancourt et dont le représentant autorisé est un cabinet de conseil en propriété industrielle français ayant son siège à Paris; en raison de ce que le Défendeur est domicilié en France; en raison de ce que le nom de domaine litigieux a dans un premier temps dirigé vers le site d’un restaurant de cuisine libanaise situé en France dans le département de l’Hérault; et en raison du fait que les éléments ci‑dessus suggèrent que ledit Défendeur comprend évidemment le français sans quoi il ne se serait pas intéressé au dépôt d’un nom de domaine en relation avec le nom d’une entreprise française et comportant le mot français “banque”. Par ailleurs la Commission administrative, en application de l’article 11(b) des Règles précitées décide de ne pas demander la traduction en français des documents présentés en anglais, telle la plainte à l’origine de la présente procédure.

4. Les faits

Le Requérant, société Carrefour, est une entreprise française très importante dans le secteur de la distribution de produits de détail qui dispose de 12 300 magasins et sites de e-commerce dans 30 pays, emploie plus de 38 000 salariés et accueille chaque jour 13 millions de clients dans le monde.

Une filiale du groupe Carrefour, la société Carrefour Banque, fournit depuis 30 ans des services financiers.

Le Requérant est titulaire de diverses marques et notamment:

La marque française BANQUE CARREFOUR, n° 3585968, enregistrée le 2 juillet 2008 pour les produits ou services de la classe 36;

La marque de l’Union européenne CARREFOUR, n° 005178371, déposée le 20 juin 2006 et enregistrée le 30 août 2007, renouvelée, pour les produits ou services des classes 9, 35, 38;

La marque de l’Union européenne CARREFOUR, n° 008779498, déposée le 23 décembre 2009 en enregistrée le 13 juillet 2010, renouvelée, pour les produits ou services de la classe 35; et

La marque internationale CARREFOUR, n° 1010661, enregistrée le 16 avril 2009, pour les produits ou services de la classe 35.

Le Requérant est en outre titulaire des noms de domaine suivants incorporant ses marques:

<carrefour.com> enregistré le 25 octobre 1995;
<carrefour.fr> enregistré le 23 juin 2005;
<carrefour-banque.fr> enregistré le 7 octobre 2009.

Le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux <carrefour-banque.website> le 1 août 2018.

Relevant l’enregistrement par le Défendeur, dont l’identité n’est pas révélée sur le WhoIs en raison du Règlement général sur la protection des données, du nom de domaine litigieux, le Requérant a formalisé auprès du Centre une plainte pour en obtenir le transfert à son profit. Le Défendeur n’a pas présenté de réponse à la plainte.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Le Requérant indique avoir protesté de l’enregistrement litigieux auprès de l’Unité d’enregistrement et du fournisseur de services lié au courriel contenant le nom litigieux. Sans succès. Dans la présente procédure, le Requérant fait état de ses marques antérieures dont la notoriété a été constatée par de nombreuses décisions rendues par le Centre.

Le Requérant soutient que le nom de domaine litigieux <carrefour-banque.website> est identique ou similaire au point de prêter à confusion avec ses marques CARREFOUR – et spécialement sa marque BANQUE CARREFOUR – en ce que le nom de domaine ne diffère de la marque que par l’interversion des termes “carrefour” et “banque”, sans conséquences sur le risque de confusion; et par la présence d’un tiret, absent de la marque BANQUE CARREFOUR, mais également sans conséquences. Le Requérant souligne, par ailleurs, qu’il est acquis que l’adjonction d’une extension générique de premier niveau (“gTLD”) (tel que “website”) du nom de domaine litigieux ne modifie pas le fait que “carrefour-banque” soit au moins similaire au point de prêter à confusion avec la marque BANQUE CARREFOUR.

Le Requérant ajoute que le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt qui s’y attache. Le Requérant précise que le Défendeur n’a pas de relations avec le Requérant et ne l’a pas autorisé à enregistrer un nom comportant la marque. La marque, notoire, est bien antérieure à l’enregistrement du nom de domaine litigieux. Le Défendeur ne saurait faire, dans ces conditions, une offre de bonne foi de biens ou de services. Le fait que le nom de domaine litigieux ait un temps dirigé vers le site d’un restaurant de cuisine libanaise et qu’un serveur email ait été un temps configuré sur ce nom de domaine dans un but probable d’hameçonnage, établit précisément le contraire.

Le Requérant indique que le Défendeur a enregistré de mauvaise foi le nom de domaine litigieux. Le Défendeur connaissait ou devait connaître l’existence de la marque au moment de l’enregistrement du nom de domaine litigieux. La marque a déjà été reconnue notoire à plusieurs reprises par le Centre. Le nom de domaine litigieux <carrefour-banque.website> reproduit les marques BANQUE CARREFOUR et CARREFOUR et est de surcroit semblable au nom de domaine du Requérant <carrefour-banque.fr>. Par ailleurs, une recherche d’antériorités de marque aurait révélé les enregistrements du Requérant, voire une simple recherche sur un moteur de recherches, et le Défendeur aurait dû procéder à cette recherche.
Tous éléments établissent que le Défendeur a enregistré de mauvaise foi le nom de domaine litigieux.

Le Requérant enfin a utilisé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi. À preuve, selon le Requérant, le fait que le Défendeur n’ait pas obtenu du Requérant une autorisation d’utiliser la marque notoire CARREFOUR. À preuve également le fait que le nom de domaine litigieux ait dans un premier temps dirigé vers le site d’un restaurant libanais de la banlieue de Montpellier, usage destiné à attirer des internautes vers un site suscitant un risque de confusion avec les marques du Requérant. À preuve aussi le fait que dans un second temps le nom de domaine litigieux ait été détenu passivement, constituant ce faisant un usage de mauvaise foi dudit nom.

B. Défendeur

Le Défendeur n’a pas répondu aux arguments du Requérant.

6. Discussion et conclusions

Le paragraphe 15(a) des Règles d’application prévoit: “La commission statue sur la plainte au vu des écritures et des pièces qui lui ont été soumises et conformément aux principes directeurs, aux présentes Règles et à tout principe ou règle de droit qu’elle juge applicable.”

Le paragraphe 4(a) des Principes directeurs impose au requérant désireux d’obtenir le transfert à son profit de nom de domaine enregistré par le défendeur de prouver contre ledit défendeur, cumulativement, que:

(i) Le nom de domaine enregistré par le défendeur “est identique ou semblable au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou services sur laquelle le requérant a des droits”;

(ii) Le défendeur “n’[a] aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s’y attache”; et

(iii) Le nom de domaine “a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi”.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

La Commission administrative constate qu’effectivement, au vu du dossier communiqué, le Requérant dispose de droits de marque antérieurs à l’enregistrement du nom de domaine litigieux. Elle estime que le nom de domaine litigieux <carrefour-banque.website> est pratiquement identique à la marque BANQUE CARREFOUR et est en tous cas semblable au point de prêter à confusion aux yeux des internautes. Peu importe, en effet, le tiret figurant dans le nom de domaine et absent de la séquence des deux mots de la marque BANQUE CARREFOUR; peu importe l’interversion des termes “banque” et “carrefour”; et peu importe la présence dans le nom de domaine du suffixe gTLD “website” nécessaire pour des raisons techniques. L’internaute d’attention moyenne ne fera pas de différence et aura la conviction, selon la Commission administrative, que le nom de domaine litigieux traduit la marque BANQUE CARREFOUR par ailleurs renommée pour ses activités, notamment de banque et de financement. Le Défendeur, qui n’a pas répondu à la plainte n’a donc pas contesté ce point.

B. Droits ou intérêts légitimes

La Commission administrative relève que le Requérant, titulaire de marques antérieures et notoirement connues du public (voir les Décisions visées à la plainte), avance sans être contredit que le Défendeur n’a aucune relation avec le Requérant qui ne lui a concédé aucune autorisation d’enregistrer et d’utiliser le nom de domaine litigieux et que le Défendeur n’a jamais été connu sous la dénomination de “carrefour” ou “banque carrefour”. La Commission estime effectivement que le fait établi par le dossier communiqué qu’un temps le nom de domaine litigieux ait dirigé vers le site d’un restaurant et qu’un temps un serveur email ait été configuré sur le nom de domaine litigieux probablement dans un but d’hameçonnage, traduit clairement l’absence de droits sur ledit nom de domaine litigieux ou d’intérêts légitimes qui s’y attachent. Il n’a donc pas pu être constaté sous ce nom de domaine une offre de bonne foi de biens ou de services ni d’utilisation non commerciale légitime ou loyale du nom de domaine en cause.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Le Requérant établit que la marque CARREFOUR a été reconnue notoire par le Centre dans plusieurs décisions. Le nom de domaine litigieux <carrefour-banque.website> reproduit les marques BANQUE CARREFOUR et CARREFOUR et est quasi identique au nom de domaine antérieur du Requérant <carrefour-banque.fr>. Comme le Requérant le prétend, l’enregistrement du nom de domaine litigieux – dont il était facile de s’assurer de la disponibilité par une recherche sur internet – ne saurait résulter du hasard. La Commission administrative estime que la notoriété de la marque fait présumer, de première vue, que le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux de mauvaise foi dans le but d’attirer à des fins commerciales des utilisateurs d’Internet sur un site en créant un risque de confusion avec les marque du Requérant, ce que le Défendeur, défaillant, ne dément pas.

La Commission estime par ailleurs que le Défendeur a procédé à un usage de mauvaise foi du nom de domaine litigieux. Le fait que le nom de domaine ait dirigé vers le site d’un restaurant, et qu’un serveur email ait été configuré sur ce nom, probablement dans une finalité de hameçonnage, correspond aux yeux de la Commission administrative à la tentative d’attirer à des fins lucratives des utilisateurs de l’Internet sur un site web appartenant au Défendeur en créant une probabilité de confusion avec la marque du Requérant en ce qui concerne la source, le commanditaire, l’affiliation ou l’approbation dudit site ou d’un produit ou service qui y est proposé. Le fait que le nom de domaine litigieux dans un second temps ait dirigé vers un site inactif et que l’adresse email ait été désactivée, constitue un usage passif dudit nom effectué de mauvaise foi en raison spécialement de la notoriété de la marque et de son caractère distinctif; au fait que les circonstances rendaient improbable un enregistrement et un usage de bonne foi et enfin au fait que le Défendeur n’a pas souhaité contester ces points dans une réponse à la plainte (voir la Synthèse des avis des commissions administratives de l'OMPI sur certaines questions relatives aux principes UDRP, troisième édition (“Synthèse, version 3.0”), section 3.3).

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <carrefour‑banque.website> soit transféré au Requérant.

Christian André Le Stanc
Expert Unique
Le 27 novembre 2018