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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Kiloutou contre Sun Adams Diaby

Litige No. D2019-1084

1. Les parties

Le Requérant est Kiloutou, Villeneuve-d’Ascq, France, représenté par Cabinet Beau de Loménie, France.

Le Défendeur est Sun Adams Diaby, Côte d’Ivoire / Diaby Ousmane Adams, Onloutou, Côte d’Ivoire.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le nom de domaine litigieux <onloutou.com> est enregistré auprès de Ligne Web Services SARL (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Kiloutou auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 10 mai 2019. En date du 10 mai 2019, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Les 13, 14 et 20 mai 2019, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 28 mai 2019, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant le Requérant à soumettre un amendement à la plainte ou une plainte amendée. Le Requérant a déposé une plainte amendée le 28 mai 2019.

Le Centre a vérifié que la plainte et la plainte amendée répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 6 juin 2019, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 26 juin 2019. Le Défendeur a soumis une réponse les 13 et 14 juin 2019.

En date du 11 juillet 2019, le Centre nommait le professeur François Dessemontet comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

La langue de la présente procédure est le français.

4. Les faits

Le Requérant est une société française par actions simplifiée au capital de 10 441 555 EUR, active depuis 1980 dans la location de divers engins de chantier et d’autres actifs industriels ou de loisirs, téléviseurs, réfrigérateurs, matériels électroniques par exemple.

Le Requérant est titulaire de nombreuses marques combinées avec un élément verbal “kiloutou” dans une graphie spéciale, entouré d’un ovale noir et sous-titré “No1 de la location”. Il s’agit en particulier des marques de l’Union européenne n° 003332814 et n° 003393634 enregistrées les 18 novembre 2005 et 4 juillet 2005 et renouvelées, ainsi que des marques françaises n° 94527183 et n° 94527182 enregistrées le 1er juillet 1994, renouvelées, enfin des marques internationales n° 628443 et n° 628442 enregistrées le 16 novembre 1994. Le Requérant possède aussi une marque ONLOUTOU enregistrée le 26 août 2016 sous n° 90646 par l’Organisation africaine de la Propriété Intellectuelle, dont fait partie notamment la Côte d’Ivoire. Enfin, le Requérant exploite depuis 20 ans environ deux noms de domaine en tout cas reprenant l’élément verbal de ses marques : <kiloutou.fr> et < kiloutou.com>. Il semble que le Requérant ne soit pas actif en Côte d’Ivoire. Cependant le Requérant emploie selon ses dires plus de 4 500 personnes ailleurs dans le monde, grâce à environ 487 agences, et il réalise un chiffre d’affaires de plus de 500 millions d’EUR chaque année.

Le Défendeur est le fondateur et le dirigeant d’une entreprise individuelle ivoirienne qui est sérieusement active dans la location de toutes sortes d’objets courants, usuellement financés par le petit crédit et qui argue notamment d’un partenariat avec la Poste ivoirienne. L’entreprise du Défendeur a présenté ses réalisations commerciales dans divers salons industriels en Côte d’Ivoire et à l’étranger, où elle a obtenu quelquefois des récompenses. Elle possède et exploite le nom de domaine litigieux <onloutou.com>, enregistré le 2 février 2016. Le Défendeur soutient que ses activités se différencieraient de celles du Requérant car le Requérant serait actif plutôt dans le BTP tandis que le Défendeur le serait pour des biens destinés à l’usage privé. Il n’est pas nécessaire de déterminer ce point vu les conclusions juridiques qu’entraîne l’examen des signes distinctifs en cause.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Signe identique ou similaire et possibilité de confusion

Le Requérant soutient que ses marques jouissent d’une grande renommée et que le nom de domaine litigieux est susceptible d’être confondu avec ses marques. Le Requérant fait tout d’abord valoir que six des huit lettres de ses marques (“loutou”) se retrouvent dans la partie caractéristique du nom de domaine litigieux (“onloutou”). La distinction introduite par les deux premières lettres (“on” plutôt que “ki”) serait indifférente. En outre, la partie graphique des marques combinées du Requérant (caractères de deux couleurs entourés d’un ovale sombre) serait copiée par le Défendeur dans ses affaires.

Le Requérant soutient ensuite que le Défendeur n’a aucun droit ni intérêt légitime à utiliser le nom de domaine litigieux.

Enfin, le Requérant affirme que le Défendeur a certainement agi de mauvaise foi, en se rapprochant autant que possible des marques du Requérant qu’il ne pouvait ignorer, car une simple recherche d’antériorité les aurait fait apparaître. Vu l’ampleur des affaires du Requérant à travers le monde il est hautement probable que le Défendeur connaissait les signes distinctifs du Requérant avant l’inscription du nom de domaine litigieux. D’ailleurs, le Défendeur n’a pas consenti à rechercher un accord à l’amiable avec le Requérant malgré la démarche en ce sens du Requérant auprès de lui.

B. Défendeur

Le Défendeur observe tout d’abord qu’il n’a pas reçu l’annexe page 3 de la Requête du Requérant, soit le contrat d’hébergement du nom de domaine litigieux. Il produit un constat d’huissier documentant cette circonstance.

Le Défendeur fait ensuite valoir qu’il n’a nullement cherché à s’approprier les marques du Requérant, qui se distinguent très nettement de son nom de domaine. En effet, selon lui, la structure orthographique du nom de domaine litigieux et celle des marques seraient différentes. Il n’existerait aucune similitude entre les signes concurrents. En aucun cas, on ne pourrait parler de reproduction des éléments verbaux. Quant aux éléments figuratifs de ces marques, le Défendeur produit diverses pièces montrant que la présentation graphique des marques du Requérant à l’heure actuelle et depuis 2016 se distingue tout-à-fait de la forme oblongue sombre naguère adoptée pour entourer les éléments verbaux. Il s’agit maintenant d’un carré comportant des couleurs vives.

Enfin, le Défendeur considère que c’est le Requérant qui a tenté de s’approprier son signe distinctif en déposant une marque ONLOUTOU n° 90646 le 26 août 2016 à l’Organisation africaine de la Propriété Intellectuelle.

Le Défendeur affirme qu’il a subi un dommage immatériel considérable en raison des actions du Requérant et il conclut à ce que la Commission administrative lui alloue des dommages-intérêts de l’ordre de 300 000 EUR (par conversion des conclusions en francs CFA).

6. Discussion et conclusions

La Commission administrative observe préliminairement qu’elle n’a aucune compétence pour ordonner l’octroi de dommages intérêts ni aucune compétence pour connaître d’un éventuel litige concernant la marque africaine n° 90645. Le Défendeur est renvoyé sans préjudice aux tribunaux ordinaires pour l’examen de ses conclusions pécuniaires.

Quant au défaut de fourniture d’une pièce annexe page n° 3 à la Requête, la Commission administrative note qu’il s’agit d’un contrat d’enregistrement qui devrait de toute manière se trouver en possession du Défendeur puisque ce contrat concerne son propre enregistrement du nom de domaine litigieux. Il ne peut donc exister aucun préjudice pour le Défendeur à cet égard dans la présente procédure, surtout en raison des conclusions atteintes au fond par la Commission administrative.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion (paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs)

Le point central du présent litige concerne l’identité ou la similitude prêtant à confusion, première exigence des Principes directeurs. Au cas où il existerait une similitude prêtant à confusion entre les marques du requérant et le nom de domaine litigieux, il conviendrait de déterminer les éventuels droits du Défendeur ou ses intérêts légitimes à utiliser le nom de domaine litigieux, et enfin d’examiner sa mauvaise foi éventuelle. Au cas où il n’existerait pas de similitude prêtant à confusion, il ne sera pas nécessaire de poursuivre plus avant l’examen des droits ou intérêts du Défendeur, ni de sa bonne foi, chacun étant libre de choisir le nom de domaine qu’il désire si ce nom est disponible, à condition qu’une similitude prêtant à confusion ne soit pas provoquée par ce choix et pourvu qu’aucune autre disposition légale ne s’y oppose.

La question de l’identité ne se pose pas, car le nom de domaine litigieux et les marques du Requérant ne sont pas identiques. Il ne s’agit manifestement pas d’une “reproduction”, comme le souligne le Défendeur. Il s’agit donc d’examiner si ces signes distinctifs prêtent à confusion. Pour décider ce point, la Commission administrative procédera tout d’abord à une analyse morphologique puis phonétique des signes en présence, et enfin à une analyse sémantique.

Morphologiquement, le Requérant souligne à bon droit l’extrême similitude des huit lettres en lesquelles consiste l’élément verbal de ses marques avec les huit lettres formant le domaine de second degré. ONLOUTOU et KILOUTOU semblent à première vue se rapprocher de telle manière à créer un risque de confusion. Ces deux signes ont la même longueur, et leurs deux dernières syllabes sont identiques. Un élément long de ces signes est l’expression “loutou”, qui correspond en une diction ramassée aux mots “loue tout”. Le fait que telle ou telle personne puisse porter aussi un patronyme ou un prénom “Loutou” n’exclut pas le risque de confusion que pourrait susciter une ressemblance de cette nature. Néanmoins, il convient de relever que le mot “loutou” contracté pour “loue tout” est de nulle force distinctive, s’agissant d’une référence à une activité de location diversifiée. Cette expression fait partie du domaine public et doit impérativement demeurer à la disposition des entrepreneurs et commerçants qui s’engageraient dans une activité de location.

Phonétiquement, la similitude ne paraît pas exister. Dans les deux signes, le locuteur d’expression française posera spontanément l’accent sur la première syllabe, “ki” ou “on”. Or cette syllabe est entièrement différente, sans confusion possible. L’analyse phonétique est évidemment moins importante pour un nom de domaine qui apparaît essentiellement en forme écrite sur le Web que pour une marque traditionnelle. Toutefois, l’élément phonétique n’est pas dénué de toute pertinence pour la réclame de bouche à oreille qui est aussi importante à l’établissement de relations d’affaires, les internautes se parlant fréquemment afin de se signaler les sites et les entreprises offrant des biens ou des services sur le Net.

Sémantiquement, le nom de domaine et les marques invoquées par le Requérant se distinguent fortement. L’élément verbal est le seul qui entre en ligne de compte ici. Or contrairement à ce que soutient le Requérant, “kiloutou” et “onloutou” ont des significations assez différentes en français. “Ki”, expression abrégée de “qui”, renvoie aux mots “celui ou celle qui”. “Ki” fait donc allusion à une personne déterminée. Par contraste, “on” est le pronom indéfini par excellence, celui qui ne fait allusion à aucune personne déterminée. Le lecteur de ce nom de domaine ne va pas penser un instant à l’entrepreneur actif en Côte d’Ivoire qui a eu l’idée de créer son entreprise de location. Il va au contraire penser à un site où des individus indéterminés offrent à la location de nombreux biens particuliers. Le site référencé pourrait par exemple être une sorte d’eBay de la location sur lequel se retrouveraient divers individus ou entreprises désireux d’offrir des biens à la location. Tel n’est pas le cas en fait, mais c’est le sens du mot “on”.

La Commission administrative considère donc que le risque de confusion est quasi-inexistant entre les marques du Requérant et le nom de domaine litigieux, que l’on envisage la question sous l’angle sémantique, phonétique ou morphologique.

La Commission administrative n’étant liée par aucun précédent, il ne convient pas d’analyser dans la présente décision d’autres cas décidés par d’autres Commissions administratives du Centre qui sont invoqués par le Requérant à propos de ses marques, dont la validité ne fait pas l’objet du présent litige.

B. Droits ou intérêts légitimes

Aucun risque de confusion n’existant en l’occurrence, il n’est pas nécessaire pour la Commission administrative de prendre position sur les droits et intérêts en présence en droit civil ivoirien ou français.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

En l’absence de risque de confusion la Commission administrative ne prendra pas position au fond sur les griefs des Parties concernant l’enregistrement et l’usage du nom de domaine. Il est simplement possible de constater sans préjudice, pour permettre aux Parties de réaliser quelle est la situation juridique dans la présente cause, que le droit de la concurrence déloyale comme celui des marques s’appliquent séparément pour chaque territoire, et non de plein droit à travers le monde entier. Par conséquent, en l’absence alléguée d’activité commerciale du requérant en Côte d’Ivoire, celui-ci ne dispose en principe pas de moyens dérivés de ces autres sources de droit. Il en va a fortiori de même pour contester l’enregistrement du nom de nom de domaine litigieux devant une Commission administrative du Centre, laquelle est liée uniquement par les Principes directeurs et les textes d’application qui en découlent.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission administrative rejette la plainte.

Prof. François Dessemontet
Expert Unique
Le 22 juillet 2019