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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Confédération Nationale du Crédit Mutuel contre Echt Nach, Isco Nacho

Litige No. D2020-1430

1. Les parties

Le Requérant est Confédération Nationale du Crédit Mutuel, France, représenté par MEYER & Partenaires, France.

Les Défendeurs sont Echt Nach, France et Isco Nacho, France.

2. Noms de domaine et unité d’enregistrement

Les noms de domaine litigieux <creditmutueil.immo> et <creditmutuels.immo> sont enregistrés auprès de Key-Systems GmbH (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Confédération Nationale du Crédit Mutuel auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 4 juin 2020. En date du 4 juin 2020, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 5 juin 2020, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité des titulaires des noms de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 9 juin 2020, le Centre a envoyé une demande de clarification à l’Unité d’enregistrement, à laquelle a répondu l’Unité d’enregistrement le 10 juin 2020. Le 10 juin 2020, le Centre a informé le Requérant des informations reçues par l’Unité d’enregistrement et a invité le Requérant à modifier la plainte en ajoutant les titulaires divulgués par l’unité d’enregistrement en tant que Défendeurs officiels et fournir des arguments ou preuves pertinents démontrant que tous les Défendeurs nommés sont, en fait, la même entité et / ou que tous les noms de domaine sont sous contrôle commun; et / ou déposer une plainte distincte pour tout nom de domaine pour lequel il n’est pas possible de démontrer que tous les Défendeurs nommés sont en fait la même entité et / ou que tous les noms de domaine sont sous contrôle commun. Le 18 juin 2020, le Centre a envoyé un rappel au Requérant. Le Requérant a déposé une plainte amendée le 18 juin 2020. Le 18 juin, le Centre a envoyé une demande de confirmation au Requérant, à laquelle il a répondu le 19 juin 2020.

L’Unité d’enregistrement a aussi indiqué que la langue du contrat d’enregistrement des noms de domaine litigieux est l’anglais. Le 10 juin 2020, la plainte ayant été déposée en français, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant, l’invitant à fournir la preuve suffisante d’un accord entre les Parties, la plainte traduite en anglais, ou une demande afin que le français soit la langue de la procédure. Les Défendeurs ont également été invité à soumettre des commentaires. Le Requérant a déposé une demande afin que le français soit la langue de la procédure le 18 juin 2020. Les Défendeurs n’ont pas soumis d’observations.

Le 23 juin 2020, le Centre a informé les parties qu’il semble qu’il y ait prima facie des arguments suffisants pour justifier l’acceptation de la plainte aux fins de la décision définitive de la commission administrative concernant la demande de consolidation des Défendeurs.

Le Centre a vérifié que la plainte et plainte amendée répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 23 juin 2020, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée aux Défendeurs en français et en anglais. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 13 juillet 2020. Les Défendeurs n’ont fait parvenir aucune réponse. En date du 14 juillet 2020, le Centre notifiait le défaut des Défendeurs.

En date du 29 juillet 2020, le Centre nommait Christophe Caron comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

4. Les faits

Le Requérant est la société La Confédération Nationale du Crédit Mutuel, l’organisme politique et central du groupe bancaire Crédit Mutuel.

Le Requérant est titulaire de plusieurs marques incluant la dénomination CREDIT MUTUEL, et notamment des marques suivantes :

- CREDIT MUTUEL : Marque française semi figurative déposée et enregistrée le 8 juillet 1988 sous le n° 1 475 940 puis dûment renouvelée.

- CREDIT MUTUEL : Marque française semi figurative déposée et enregistrée le 20 novembre 1990 sous le n° 1 646 012 puis dûment renouvelée.

- CREDIT MUTUEL : Marque verbale de l’Union Européenne déposée le 5 mai 2011 et enregistrée le 20 octobre 2011 sous le n° 009943135.

Le Requérant possède également des noms de domaine comprenant la dénomination “crédit mutuel”.

Les noms de domaine litigieux <creditmutueil.immo> et <creditmutuels.immo> ont été respectivement enregistrés le 23 mars 2020 et 18 mars 2020 par Echt Nach, France et Isco Nacho, France.

Au moment du dépôt de la plainte, le nom de domaine litigieux <creditmutueil.immo> renvoie vers une page de l’hébergeur Combell nv et le nom de domaine litigieux <creditmutuels.immo> est inactif.

Le Requérant a décidé de s’adresser au Centre afin que les noms de domaine litigieux lui soient transférés.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

En premier lieu, le Requérant considère que les noms de domaine litigieux <creditmutueil.immo> et <creditmutuels.immo> sont similaires au point de prêter à confusion avec les marques CREDIT MUTUEL, sur lesquelles il détient des droits. Il expose que les extensions génériques tels que “.immo” (pour immobilier) “n’apportent aucun élément distinctif et ne doivent pas être pris en compte dans la comparaison des noms de domaine litigieux et de la marque antérieure”. En outre, il souligne que les noms de domaine litigieux reproduisent presque intégralement la marque CREDIT MUTUEL et ne s’en distinguent que par l’adjonction d’éléments mineurs (les lettres “i” et “s”) ne permettant pas d’écarter de manière certaine un risque de confusion avec la marque. Il s’agit, selon lui, ici d’un cas typique de typosquattage de marque.

En second lieu, le Requérant considère que les Défendeurs doivent être considérés comme n’ayant aucun droit ni intérêt légitime sur les noms de domaine litigieux. Les Défendeurs ne sont ni des agents ni des salariés du Crédit Mutuel. Le Crédit Mutuel n’a accordé aux Défendeurs aucune autorisation ou licence d’exploitation aux fins d’enregistrer ou d’utiliser les noms de domaine litigieux. De surcroit, le Requérant souligne que le nom de domaine <creditmutueil.immo> renvoie vers une page de l’hébergeur Combell nv et le nom de domaine <creditmutuels.immo> est inactif. Selon le Requérant, de tels usages ne sauraient conférer un droit ou un intérêt légitime aux Défendeurs sur lesdits noms de domaine litigieux.

En troisième lieu, le Requérant considère que les noms de domaine litigieux ont été enregistrés de mauvaise foi compte tenu de la renommée du Crédit Mutuel que les Défendeurs ne pouvaient ignorer. Ils auraient donc volontairement choisi ces noms de domaine litigieux en vue de faire référence à cette marque. De plus, le Requérant rappelle qu’il est généralement admis que la pratique du typosquattage constitue en elle-même un indice d’enregistrement de mauvaise foi. Le Requérant relève que le nom de domaine litigieux <creditmutueil.immo> renvoie vers une page de l’hébergeur Combell nv et que le nom de domaine litigieux <creditmutuels.immo> est inactif. De tels usages ne sauraient être considérés de bonne foi. Ils revêtent en effet un caractère facilement réversible. Si les noms de domaine litigieux demeurent sous contrôle des Défendeurs, ceux-ci peuvent en faire un usage frauduleux. En outre, le Requérant relève que des serveurs de courriers électroniques (MX) ont été activés sur les deux noms de domaine litigieux <creditmutueil.immo> et <creditmutuels.immo>. Selon lui, cette configuration signifie que les Défendeurs peuvent également utiliser ces noms de domaine à titre de support de courrier électronique et désorganiser gravement les activités du Requérant ou détourner sa clientèle à son profit et à des fins potentiellement frauduleuses. En dernier lieu, le Requérant souligne qu’en tant que groupe bancaire, il est confronté de manière continue à des tentatives de contrefaçon et de d’hameçonnage.

B. Défendeurs

Les Défendeurs n’ont pas répondu aux arguments du Requérant.

6. Discussion et conclusions

6.1. Langue de la procédure

Le paragraphe 11 (a) des Règles d’application dispose :

“Sauf accord contraire des parties ou mention contraire dans le Contrat d’enregistrement, la langue de la procédure administrative sera la langue du Contrat d’enregistrement, à moins que la Commission administrative n’en décide autrement au regard des circonstances de la procédure administrative.”

La Commission administrative a choisi de rendre sa décision en français pour les raisons suivantes :

- La plainte a été déposée en français;

- Le Requérant est français;

- Les Défendeurs sont domiciliés en France ; et

- Le nom de domaine litigieux contient les termes « crédit mutuel » en langue française, ce qui fait référence au groupe bancaire français.

6.2. Consolidation

En vertu du paragraphe 3(c) des Règles d’application “[l]a plainte peut porter sur plusieurs noms de domaine, à condition que ces noms de domaine soient enregistrés par le même titulaire”.

Selon le paragraphe 10(e), la Commission administrative doit statuer sur la demande d’une partie de consolider plusieurs litiges portant sur des noms de domaine conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application

Le Requérant considère que les noms de domaine litigieux sont sous contrôle commun selon les arguments suivants :

- les noms de domaine sont construits de la même manière : le typosquattage de la marque CREDIT MUTUEL et l’extension “.immo” (faisant référence au domaine immobilier, l’un des cœurs d’activités du requérant);

- ils ont été enregistrés quasiment à la même date, le 18 et le 23 mars 2020;

- ils ont été enregistrés par l’intermédiaire de la même unité d’enregistrement;

- ils ont été enregistrés via le même service d’anonymat, REDACTED FOR PRIVACY;

- ils sont tous les deux détenus passivement par leur titulaire;

- les noms du défendeur (Echt Nach et Isco Nacho) indiqués au sein des WhoIs sont purement fantaisistes (le requérant n’a en effet identifié aucun résultat lié);

- la construction de leur adresse email est similaire avec une combinaison de lettres (qui plus est adresses email inexistantes, au vu des recherches du requérant).

En l’espèce, la Commission administrative fait droit à la demande de consolidation du Requérant et considère que les noms de domaine litigieux sont sous contrôle commun et peuvent ainsi faire l’objet d’une même procédure.

6.3. Sur le fond

La Commission administrative constituée pour trancher le présent litige se cantonnera à l’application des Principes directeurs. Il s’agit donc de vérifier, pour prononcer ou refuser un transfert ou une radiation de nom de domaine, que les conditions exprimées par les Principes directeurs sont cumulativement réunies.

En vertu du paragraphe 4(a) des Principes directeurs, la procédure administrative n’est applicable qu’en ce qui concerne un litige relatif à une accusation d’enregistrement abusif d’un nom de domaine sur la base des critères suivants :

i) Le nom de domaine enregistré par le détenteur est identique ou semblable au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou de services sur laquelle le requérant a des droits;

ii) Le détenteur du nom de domaine n’a aucun droit sur le nom de domaine, ni aucun intérêt légitime qui s’y attache;

iii) Le nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi, dont le paragraphe 4(b) des Principes directeurs donne quelques exemples non limitatifs.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Le Requérant a justifié de ses droits sur plusieurs marques ci-dessus rappelées contenant la dénomination CREDIT MUTUEL.

Il existe une similitude prêtant à confusion entre les noms de domaine litigieux <creditmutueil.immo> et <creditmutuels.immo> et les marques susvisées du Requérant. En effet, l’adjonction de la lettre “l” ou de la lettre “s” ne permettent pas d’écarter le risque de confusion entre les noms de domaine litigieux et les marques du Requérant. Une extension générique telle que “.immo” (pour immobilier) n’apporte aucun caractère distinctif aux noms de domaine litigieux et n’a pas à être prise en considération dans l’examen de la similitude entre les marques antérieures et les noms de domaine litigieux.

Pour ces raisons, la Commission administrative considère que la première condition du paragraphe 4(a) des Principes directeurs est remplie.

B. Droits ou intérêts légitimes

La Commission administrative n’a connaissance d’aucun droit ou intérêt légitime des Défendeurs sur les noms de domaine litigieux, étant donné que les Défendeurs n’ont présenté aucune défense.

Par ailleurs, le Requérant affirme qu’il n’existe aucune relation de quelque ordre que ce soit entre le lui et les Défendeurs pouvant justifier les enregistrements litigieux. Ainsi, aucune autorisation n’a été accordée aux Défendeurs de faire une quelconque utilisation des marques du Requérant leur permettant d’enregistrer les noms de domaine litigieux.

Pour ces raisons, la Commission administrative tient la deuxième condition posée par le paragraphe 4(a) des Principes directeurs comme remplie.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Il s’avère que le choix de ces noms de domaine litigieux par les Défendeurs ne peut être le fruit du hasard, étant donné que la marque CREDIT MUTUEL bénéficie d’une certaine notoriété en France. En conséquence, les Défendeurs, domiciliés en France, ne pouvaient, à la date de l’enregistrement des noms de domaine litigieux, ignorer la marque CREDIT MUTUEL du Requérant.

Par ailleurs, l’enregistrement par les Défendeurs de noms de domaine qui ne se différencient des marques du Requérant que par l’adjonction d’une seule lettre est caractéristique d’une pratique de typosquattage. Les Défendeurs profitent ainsi des éventuelles erreurs des internautes pour les attirer vers leur site.

Quant à l’usage des noms de domaine litigieux, il est également effectué de mauvaise foi puisque, comme le prouve le Requérant, les Défendeurs n’exploitent pas les noms de domaine litigieux qui renvoient vers la page d’un hébergeur pour l’un et est inactif pour l’autre. Or, il est de jurisprudence constante que la simple détention passive peut être assimilée à un usage de mauvaise foi.

Pour ces raisons, la Commission administrative considère que la troisième condition du paragraphe 4(i) des Principes directeurs est remplie.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que les noms de domaine litigieux <creditmutueil.immo> et <creditmutuels.immo> soient transférés au Requérant.

Christophe Caron
Expert Unique
Le 7 aout 2020