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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Colas, société anonyme contre Jerome Morin

Litige No. DEU2020-0014

1. Les parties

La Requérante est Colas, société anonyme, France, représenté en interne.

Le Défendeur est Jerome Morin, France.

2. Nom de domaine, Registre et Unité d’enregistrement

Le Registre du nom de domaine litigieux est "European Registry for Internet Domains” (ci-après désigné "EURid” ou le "Registre”). Le nom de domaine litigieux <colasrails.eu> est enregistré auprès de NETIM (ci‑après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Colas, société anonyme auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 29 juillet 2020. En date du 29 juillet 2020 le Centre a adressé une requête au Registre aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 3 août 2020 le Registre a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 12 août 2020 le Centre a envoyé un courrier électronique à la Requérante avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par le Registre et invitant le Requérant à soumettre une plainte amendée. La Requérante n’a pas déposé une plainte amendée.

Le Centre a vérifié que la plainte répondait bien aux Règles relatives au règlement des litiges concernant les domaines .eu (ci-après dénommées les “Règles ADR”) et aux Règles supplémentaires de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle pour l’application des Règles relatives au règlement des litiges concernant les domaines .eu (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”).

Conformément au paragraphe B(2) des Règles ADR, le 25 août 2020 une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe B(3) des Règles ADR, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 7 octobre 2020. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 8 octobre 2020, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.

En date du 3 novembre 2020 le Centre nommait Christiane Féral-Schuhl comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Règles ADR. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance conformément au paragraphe B(4) des Règles ADR.

4. Les faits

La Requérante est la société Colas, société française créée en 1929 et qui est un des leaders mondiaux de la construction et de l’entretien des infrastructures de transport. Elle détient une filiale dénommée Colas Rails, créée en 1955 et spécialisée dans les infrastructures ferroviaires, et qui est implantée dans plus de 20 pays et emploie plus de 5,600 personnes à travers le monde, le Groupe en employant environ 57,000. La filiale exerce ses activités sous la marque COLAS RAIL.

En 2019, le chiffre d’affaires consolidé de la Requérante a atteint EUR 13.6 milliards, l’activité de la filiale Colas Rails représentant quant à elle EUR 1.1 milliards sur le chiffre d’affaires total du Groupe.

La Requérante est ainsi titulaire notamment des droits de propriété intellectuelle suivants:

- la marque française COLAS RAIL n°3516360, enregistrée le 26 juillet 2007;
- la marque française COLAS RAIL n°3516646, enregistrée le 27 juillet 2007;
- la marque française COLAS RAIL n°4228105, enregistrée le 23 novembre 2015;
- la marque française COLAS RAIL n°4525733, enregistrée le 15 février 2019;
- la marque internationale désignant l’Union européenne COLAS RAIL n°1327574, enregistrée le 17 mai 2016;
- la marque de l’Union européenne COLAS RAIL ITALIA n°017930159, enregistrée le 23 novembre 2018;
- la marque internationale désignant l’Union européenne COLAS RAIL n°1487381, enregistrée le 8 juillet 2019;
- la marque irlandaise COLAS n°53093, enregistrée le 12 février 1924;
- la marque irlandaise COLAS n°53094, enregistrée le 12 février 1924;
- la marque irlandaise COLAS n°53507, enregistrée le 7 mai 1924;
- la marque de l’Union européenne COLAS n°010799559, enregistrée le 11 janvier 2013;
- la marque internationale désignant l’Union européenne COLAS n°1380590, enregistrée le 26 juillet 2017;
- la marque internationale désignant l’Union européenne COLAS n°1379304, enregistrée le 12 juillet 2017.

La Requérante est en outre titulaire sur les dénominations COLAS RAIL et COLAS de plusieurs noms de domaine, notamment :

- le nom de domaine <colasrail.eu>;
- le nom de domaine <colasrail.com>, enregistré le 10 mai 2007;
- le nom de domaine <colasrail.biz>;
- le nom de domaine <colasrail.fr>;
- le nom de domaine <colasrail.info>;
- le nom de domaine <colasrail.net>;
- le nom de domaine <colasrail.org>;
- le nom de domaine <colas.com>, enregistré le 10 mars 1997;
- le nom de domaine <colas.fr>.

Le nom de domaine litigieux <colasrails.eu> a été enregistré le 29 juin 2020.

Au jour de la présente décision, le nom de domaine litigieux pointe vers une page indiquant qu’il a été enregistré auprès de l’Unité d’enregistrement Netim.

La Requérante a décidé de s’adresser au Centre afin d’obtenir le transfert du nom de domaine litigieux à son profit.

5. Argumentation des parties

A. Requérante

Les éléments factuels et légaux sur lesquels se fonde la plainte conformément au paragraphe B(1)(b) des Règles ADR, sont rappelés ci-après.

La Requérante soutient en premier lieu que le nom de domaine litigieux est identique et similaire au nom sur lequel elle a un droit reconnu ou établi sur le fondement du droit national d’un État Membre et/ou le droit de l’Union Européenne.

La Requérante souligne d’abord que les marques et noms de domaines sur lesquels elle est titulaire de droits sont antérieurs à l’enregistrement du nom de domaine litigieux.

La Requérante constate ensuite que le nom de domaine litigieux reproduit à l’identique la marque COLAS RAIL sur laquelle elle est titulaire de droits, et qu’elle n’en diffère que par l’ajout de la lettre “s” à la fin, créant un risque de confusion évident puisque le terme “rail” reste inchangé et que la lettre “s” passe inaperçue, ses clients et partenaires se retrouvant ainsi facilement confondus quant à l’origine de ce nom de domaine litigieux.

La Requérante rappelle encore que selon un principe établi, les ccTLD ne sont pas pris en compte dans la comparaison des marques et noms de domaine, de sorte que l’ajout du “.eu” n’a aucune incidence sur la comparaison des dénominations COLAS RAIL et “colarails”.

La Requérante considère également que le nom de domaine litigieux reproduit et porte atteinte à la marque notoire COLAS, dont la notoriété a été reconnue dans une décision OMPI précédente en vertu Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (les “Principes UDRP”), en associant le terme distinctif COLAS au terme faiblement distinctif “rails”, au point de prêter à confusion le public qui associera certainement le nom de domaine litigieux à la Requérante du fait de la notoriété de la marque COLAS et de l’existence de sa filiale Colas Rail aussi bien connue par ledit public, rappelant d’ailleurs que cette confusion avec le Défendeur s’est déjà produite.

La Requérante argue en second lieu de l’absence de droit et d’intérêt légitime du Défendeur sur le nom de domaine litigieux.

La Requérante insiste sur le fait que le Défendeur n’a jamais utilisé le nom de domaine litigieux en relation avec une offre de bonne foi de produits ou de services mais au contraire pour mener une activité frauduleuse de toute mauvaise foi.

La Requérante souligne également que le Défendeur n’est pas communément connu sous le nom de domaine litigieux.

La Requérante affirme enfin que le nom de domaine litigieux ne fait l’objet d’aucun usage légitime et non commercial ou d’usage loyal du nom de domaine litigieux par le Défendeur puisqu’au contraire, il porte atteinte à la réputation de la Requérante et de sa filiale Colas Rail, et à ses marques COLAS et COLAS RAIL.

La Requérante allègue en dernier lieu que le Défendeur a enregistré et utilise le nom de domaine litigieux de mauvaise foi, tout d’abord compte tenu de la réputation et de la notoriété des marques COLAS et COLAS RAIL, qui font de la Requérante une cible très probable d’activités frauduleuses comme celles menées par le Défendeur.

La Requérante fait valoir que le Défendeur a réservé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi, dans le seul but de mener une activité de hameçonnage comme il ressort d’échanges de courriels qui lui ont été transmis par les sociétés destinataires de ces courriels envoyés par le Défendeur, qui pour les tromper a adopté le nom de l’ancien directeur des ventes de la filiale Colas Rail et a copié le nom, la marque et le logo de cette dernière ainsi que son adresse officielle.

La Requérante indique avoir été informée de ces activités frauduleuses par une société italienne et une société française que le Défendeur avait contactées pour passer commande en insistant, après réception du devis, sur la possibilité d’effectuer le paiement après livraison des marchandises.

La Requérante estime que, bien que l’on ne sache pas quel type d’informations le Défendeur cherchait ainsi à obtenir, il est évident que la réservation du nom de domaine litigieux n’était pas une simple coïncidence mais une tentative délibérée de profiter du nom et de la réputation de la Requérante, de sa filiale Colas Rail et des marques sur lesquelles elles sont titulaires de droits, aux fins de mener une activité frauduleuse.

La Requérante précise enfin qu’un particulier avait déjà, plus tôt dans l’année, réservé le nom de domaine <colasrails.fr> pour, de la même façon, l’utiliser dans des échanges avec d’autres sociétés en copiant le nom de la filiale Colas Rail, son logo, sa marque et son adresse, ainsi que le nom de l’ancien directeur des ventes également utilisé dans la présente affaire. Le 24 juin 2020, ce nom de domaine était bloqué à la suite d’un dépôt de plainte par la Requérante auprès des autorités françaises compétentes; le 29 juin 2020 le nom de domaine litigieux <colasrails.eu> était enregistré.

C’est au regard de l’ensemble de ces arguments que la Requérante sollicite le transfert du nom de domaine litigieux à son profit.

B. Défendeur

Le Défendeur n’a pas répondu aux arguments de la Requérante.

6. Discussion et conclusions

Le paragraphe B(11)(d) des Règles ADR précise que la Commission administrative statuera sur les demandes formulées par la Requérante dans l’hypothèse où celle-ci aura justifié que :

(i) le nom de domaine est identique ou similaire au nom sur lequel le droit national d’un État Membre et/ou le droit de l’Union européenne reconnaît ou établit un droit, et que
(ii) le nom de domaine a été enregistré par le Défendeur sans droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine, ou que
(iii) le nom de domaine a été enregistré ou est utilisé de mauvaise foi.

A. Identité ou similitude prêtant à confusion à un nom sur lequel la Requérante a un droit reconnu ou établi en vertu du droit national d’un État Membre et/ou du droit de l’Union européenne

D’après le paragraphe B(11)(d)(1)(i), la Requérante doit prouver que le nom de domaine litigieux est identique ou similaire au nom sur lequel le droit national d’un État Membre et/ou le droit de l’Union européenne reconnaît ou établit un droit.

La Commission administrative estime que la Requérante a fourni des éléments prouvant qu’elle est titulaire de droits sur les marques COLAS et COLAS RAIL.

En l’espèce, le nom de domaine litigieux <colasrails.eu> reprend intégralement les marques COLAS et COLAS RAIL, auxquelles ont été ajoutés (i) selon la marque considérée, le terme descriptif “rails” ou la seule lettre “s”, ainsi que (ii) le suffixe “.eu”.

De nombreuses décisions ont déjà constaté, sur le fondement des Règles ADR, que l’incorporation d’une marque reproduite à l’identique au sein d’un nom de domaine est suffisante pour établir que le nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion à la marque sur laquelle le requérant a des droits reconnus et établis en vertu du droit national d’un État Membre et/ou du droit de l’Union européenne, même si elle est combinée à un terme descriptif (voir également la section 1.8 de la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux Principes UDRP, troisième édition (“Synthèse OMPI, version 3.0”)).1

La Commission administrative estime que la reproduction intégrale et à l’identique dans le nom de domaine litigieux des marques COLAS et COLAS RAIL, dont la première a d’ailleurs été reconnue notoire (voir Colas c. Benjamin Bouillot, Litige OMPI No. D2015-092), rend le nom de domaine litigieux similaire à ces marques COLAS et COLAS RAIL au point de prêter à confusion; l’ajout du terme “rails” à la marque COLAS ou de la lettre “s” à la marque COLAS RAIL ne permettant de toute évidence pas d’éviter cette confusion.

Par ailleurs, la Commission administrative rappelle que l’extension “.eu” n’est pas à prendre en considération dans la comparaison du nom de domaine litigieux et des marques COLAS et COLAS RAIL, comme les décisions fondées sur les Règles ADR le jugent depuis longtemps.

La Commission administrative estime donc que le nom de domaine litigieux est similaire au point de prêter à confusion avec les marques sur lesquelles la Requérante a un droit reconnu ou établi par le droit national d’un État Membre et/ou le droit de l’Union européenne, au sens du paragraphe B(11)(d)(1)(i) des Règles ADR.

B. Droits ou intérêts légitimes

D’après le paragraphe B(11)(d)(1)(ii) des Règles ADR, la Requérante doit prouver que le nom de domaine a été enregistré par le Défendeur sans droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine.

Le paragraphe B(11)(e) des Règles ADR décrit les circonstances qui, si la Commission administrative estime qu’elles sont prouvées, doivent démontrer les droits ou les intérêts légitimes du Défendeur sur le nom de domaine litigieux.

Ces circonstances sont les suivantes :

(i) Avant la notification du litige, le Défendeur a utilisé le nom de domaine ou la dénomination correspondant au nom de domaine en relation à une offre de biens ou de services, ou démontre avoir effectué des préparatifs à une telle démarche;

(2) Le Défendeur, qu’il s’agisse d’une personne morale, d’une organisation ou d’une personne physique est généralement connu sous ce nom de domaine même s’il n’existe pas relativement au nom de domaine concerné un droit reconnu ou établi par le droit national et/ou par le droit de l’Union Européenne;

(3) Le Défendeur utilise le nom de domaine de manière légitime et à des fins non commerciales et équitables, sans que son objectif soit d’induire le consommateur en erreur ou de porter atteinte à la réputation de la dénomination sur laquelle porte un droit reconnu ou établi par le droit national et/ou par le droit de l’Union Européenne.

Au regard de décisions antérieures rendues par des commissions administratives sur le fondement des Règles ADR, s’agissant de la charge de la preuve de l’absence d’intérêt légitime du Défendeur, la Requérante doit seulement établir prima facie que le Défendeur n’a pas de droit ni d’intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux. Il incombe ensuite au Défendeur de renverser cette présomption. S’il n’y parvient pas, la Requérante est présumé avoir satisfait aux exigences posées par le paragraphe B(11)(d)(1)(ii) des Règles ADR (voir la section 2.1 de la Synthèse OMPI, version 3.0).

En l’espèce, la Commission administrative constate que la Requérante a démontré prima facie que le Défendeur n’avait aucun droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux. Il appartenait donc au Défendeur de démontrer ses droits ou intérêts légitimes sur le nom de domaine litigieux, ce qu’il n’a pas fait.

En tout état de cause, aucune des circonstances prévues à l’article B(11)(e) des Règles ADR n’est remplie en l’espèce.

Par conséquent, et conformément au paragraphe B(11)(d)(1)(ii) des Règles ADR, la Commission administrative considère que le Défendeur n’a aucun droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux <colasrails.eu>.

C. Enregistrement ou usage de mauvaise foi

D’après le paragraphe B(11)(d)(1)(iii) des Règles ADR, le Requérant doit prouver que le nom de domaine a été enregistré ou est utilisé de mauvaise foi.

Le paragraphe B(11)(f) des Règles ADR précise que chacune des circonstances mentionnées ci-après de manière non exhaustive peut démontrer un enregistrement ou une utilisation de mauvaise foi d’un nom de domaine, si la Commission administrative les considère comme prouvées:

(1) Les circonstances indiquant que le nom de domaine a été enregistré ou acquis avant tout dans le but de la vente, de la location ou d’un autre transfert du nom de domaine au titulaire d’une dénomination déterminée à l’égard de laquelle le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un doit, ou à une autorité publique, ou

(2) le nom de domaine a été enregistré dans l’objectif d’empêcher le titulaire d’une dénomination déterminée à l’égard de laquelle le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un droit, ou à une autorité publique, d’utiliser le nom de domaine correspondant à cette dénomination si:

(i) le Défendeur a adopté de manière récurrente un tel comportement déloyal, ou
(ii) le nom de domaine n’a pas été exploité d’une manière pertinente pendant une durée de deux ans au moins après la date de l’enregistrement ou
(iii) au moment de l’ouverture de la Procédure ADR, le Défendeur a déclaré avoir l’intention d’utiliser de manière effective le nom de domaine à l’égard duquel le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un droit ou qui correspond au nom d’une autorité publique, mais qu’il ne l’a pas fait dans les six mois à compter de la date de l’ouverture de la Procédure ADR ;

(3) le nom de domaine a été enregistré surtout dans le seul but de perturber l’activité professionnelle d’un concurrent, ou

(4) le nom de domaine a été intentionnellement utilisé pour capter la clientèle internaute sur le site internet du Défendeur ou sur un autre site et d’en tirer profit, ce en créant un risque de confusion avec la dénomination à l’égard de laquelle le droit national et/ou le droit de l’Union Européenne reconnaît ou établit un droit, ou avec la dénomination d’une autorité publique, ce risque de confusion étant établi compte tenu de la source, du financement, de l’affiliation ou du support des pages web, ou de la localisation, du produit ou du service sur les pages web concernées, ou de la localisation du Défendeur, ou

(5) le nom de domaine est le nom personnel et il n’existe aucun lien entre le Défendeur et le nom de domaine enregistré.

Tout d’abord, la Commission administrative rappelle que cette liste de circonstances devant permettre d’établir la mauvaise foi du Défendeur est non exhaustive.

En l’espèce, la Commission administrative considère en premier lieu que le Défendeur ne pouvait ignorer l’existence des marques antérieures de la Requérante au moment de l’enregistrement du nom de domaine litigieux, compte tenu de ce qu’il les reproduit intégralement, n’ajoutant à la marque COLAS que le terme “rails” qui est étroitement lié à l’activité de la Requérante, ce qu’indique d’ailleurs la deuxième marque antérieure visée ici qui n’est autre que la marque COLAS RAIL, à laquelle le nom de domaine litigieux n’adjoint dès lors que la lettre “s”.

Plus encore, la Requérante a démontré que le Défendeur avait, dans le cadre d’activités de hameçonnage, utilisé non seulement le nom de domaine litigieux mais également la marque, le logo, l’adresse et même le nom de l’ancien directeur des ventes de la Requérante, ce qui achève de prouver que le Défendeur connaissait l’existence des marques COLAS et COLAS RAIL et, plus encore, s’en servait à des fins frauduleuses.

De plus, comme l’a indiqué la Requérante, le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux cinq jours après que le nom de domaine <colasrails.fr>, qu’il avait auparavant enregistré, a été bloqué à la suite de la plainte déposée par la Requérante auprès des autorités françaises compétentes.

Il ressort de l’ensemble de ces circonstances et des éléments de preuve apportés par la Requérante que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine litigieux dans le but de tromper des fournisseurs, en se faisant passer pour un employé de la Requérante afin de passer des commandes en son nom.

Par conséquent, la Commission administrative considère que le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi par le Défendeur, conformément au paragraphe B(11)(d)(1)(iii) des Règles ADR.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément au paragraphe B(11) des Règles ADR, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <colasrails.eu> soit transféré à la Requérante.

8. Summary in English

In accordance with paragraphs B(12)(i) of the ADR Rules and 14 of the WIPO Supplemental Rules for the ADR Rules, below is a brief summary in English of WIPO Decision No. DEU2020-0014:

The Complainant is Colas, société anonyme, France, and the Respondent is Jerome Morin, France.

The Complainant owns several French and European Union Trade Marks for COLAS RAIL and COLAS.

The disputed domain name is <colasrails.eu>. The disputed domain name was registered on June 29, 2020, and was resolving to a parking page and was used for fraudulent email purposes.

The Panel finds that the disputed domain name is confusingly similar to the Complainant’s trademarks COLAS RAIL and COLAS; the Respondent has no rights or legitimate interests in respect of the disputed domain name; and, the disputed domain name was registered as well as used in bad faith.

Christiane Féral-Schuhl
Expert Unique
Le 9 novembre 2020


1 Compte tenu des similitudes de fond entre les Règles ADR et les Principes UDRP, la Commission administrative renvoie également à la jurisprudence et à l'analyse des Principes UDRP, le cas échéant.