OMPI |
WIPO/IPTK/RT/99/7 |
ORGANISATION MONDIALE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE
GENÈVE
Genève, 1er et 2 novembre 1999
RAPPORT
Document établi par le Bureau international de l'OMPI
1. La Table ronde sur la propriété intellectuelle et les savoirs traditionnels (ci-après dénommée "table ronde") a eu lieu à Genève, les 1er et 2 novembre 1999.
2. Les États ci-après membres de l'OMPI étaient représentés à cette réunion : Afrique du Sud, Angola, Argentine, Bangladesh, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Burundi, Canada, Chine, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Égypte, El Salvador, Équateur, Espagne, États-Unis d'Amérique, Fédération de Russie, Fidji, France, Ghana, Guatemala, Guyana, Inde, Indonésie, Iran (République islamique d'), Italie, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kenya, Madagascar, Malaisie, Mali, Maroc, Mexique, Nigéria, Nouvelle-Zélande, Ouganda, Ouzbékistan, Panama, Paraguay, Pérou, Philippines, République de Corée, République de Moldova, République dominicaine, Roumanie, Royaume-Uni, Rwanda, Saint-Siège, Slovaquie, Slovénie, Suisse, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Viet Nam, Zambie.
3. Les organisations intergouvernementales ci-après étaient représentées à la réunion : Bureau Benelux des marques (BBM), Bureau international du travail (BIT), Communauté des Caraïbes (CARICOM), Communautés européennes (EC), Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Délégation permanente de la ligue des États arabes, Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCNUDH), Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), Organisation internationale de la francophonie (OIF), Organisation météorologique mondiale (OMM), Organisation mondiale de la santé (OMS), Organisation mondiale du commerce (OMC), Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (Union mondiale pour la nature) (UICN), Union postale universelle (UPU).
4. Les organisations non gouvernementales ci-après étaient représentées à la réunion : Alliance internationale des peuples indigènes des forêts tropicales, Arctic Council Indigenous Peoples' Secretariat, Asociación para los Derechos Humanos Secretario Coordinación Pueblos Indigenas Centre y Sud América (ALDHU), Association nouvelle pour la culture et les arts populaires (TAMAYNUT-ANCAP), Belgian Coordinated Collections of Micro Organisms (BCCM), Centre de documentation de recherche et d'information des peuples autochtones (DoCip), Centre de recherches pour le développement international (CRDI), Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, Chambre de commerce internationale (CCI), Comisión Jurídica de los Pueblos de Integración Tawantinsuyana (COJPITA), Commission internationale de juristes (CIJ), Conseil international des Associations de design graphique (ICOGRADA), Conseil international des sociétés de design industriel (ICSID), Conseil international des traités indiens (IITC), Consejo Indio de Sud América, Coordinadora de las Organizaciones Indígenas de la Cuenca Amazónica (COICA), Fédération ibéro-latino-américaine des artistes interprètes ou exécutants (FILAIE), Fédération internationale des conseils en propriété industrielle (FICPI), Fédération internationale des institutions d'arbitrage commercial (IFCAI), Fédération internationale des musiciens (FIM), Fonds mondial pour la nature (WWF), Foundation for Aboriginal and Islander Research Action (FAIRA), Institut Max-Planck de droit étranger et international en matière de brevets, de droit d'auteur et de concurrence (MPI), Institute of Problems of Northern Indigenous Peoples of Sakha Republic, International Working Group for Indigenous Affairs (IWGIA), Legal Committee for the Self-Development of Peoples of Andean Origin (CAPAJ), National Aboriginal and Islanders Legal Services Secretariat (NAILSS), National Secretariat Torres Strait Islander Organisations (NSTSIO), National Working Group-Intellectual Property and West Australian Environment Working Group, Organisation internationale de développement des ressources indigènes (IOIRD), Organización Nacional Indigena de Colombia (ONIC), Pacific Concerns Resource Centre (PCRC), Russian Association of the Indigenous Peoples of Northern Russia, Tebtebba Foundation-Indigenous Peoples' International Centre for Policy Research and Education, Tourism Alert, Union internationale des éditeurs (UIE).
5. La liste des participants figure dans l'annexe du présent rapport.
6. Les délibérations ont eu lieu sur la base du document intitulé "La protection des savoirs traditionnels : un enjeu mondial pour la propriété intellectuelle", établi par le Bureau international (WIPO/IPKT/RT/99/2), et des documents ci-après, soumis par les conférenciers invités par le Bureau international de l'OMPI : "Qu'est-ce-que le savoir traditionnel? Pourquoi faut-il le protéger? Par qui doit-il être protégé? Pour qui? Comprendre la chaîne des valeurs", établi par M. Michael Blakeney, professeur au Centre for Commercial Law Studies, Queen Mary and Westfield College, Université de Londres (Royaume-Uni) (WIPO/IPKT/RT/99/3), "Les savoirs traditionnels du point de vue concret d'un détenteur", établi par M. Shri Sundaram Varma, de la Société pour la recherche et les initiatives en faveur de techniques et d'institutions durables (SRISTI), Ahmedabad (Inde) (WIPO/IPKT/RT/99/4) "Accéder à des savoirs traditionnels et les exploiter : un point de vue d'entreprise", établi par M. Bo Hammer Jensen, conseil principal en brevets (stratégie d'entreprise et brevets) de Novo Nordisk A/s (Danemark) (WIPO/IPKT/RT/99/5), "Les efforts entrepris pour protéger les savoirs traditionnels : l'expérience des Philippines", établi par M. David Daoas, avocat, président de la Commission nationale pour les droits des peuples autochtones, Bureau de la présidence, Manille (Philippines) (WIPO/IPKT/99/6A), et "L'expérience péruvienne en matière de protection de savoirs traditionnels", établi par Mme Begoña Venero Aguirre, chef du Service des brevets à l'Institut national de protection de la concurrence et de la propriété intellectuelle (INDECOPI), Lima (Pérou) (WIPO/IPKT/99/6B).
7. Le Secrétariat de l'OMPI a pris note des interventions qui ont suivi chaque exposé et les a enregistrées sur bande magnétique. Le présent rapport constitue un résumé des délibérations et ne rend pas nécessairement compte de toutes les observations qui ont été faites. Certaines déclarations ont été soumises par écrit par des participants. Le présent rapport renvoie à certaines de ces déclarations, dont le texte pourra être obtenu sur demande auprès du Bureau international.
8. La table ronde a été ouverte par M. Shozo Uemura, vice-directeur général de l'OMPI, qui a souhaité la bienvenue aux participants et aux conférenciers, et a souligné qu'il appartient à l'OMPI de s'engager de façon constructive pour répondre à des besoins légitimes - même s'ils ne sont manifestes que depuis peu - en ce qui concerne la protection de la créativité et de l'innovation de l'homme.
9. À la suite d'une proposition de la délégation du Pérou, appuyée par la délégation du Mali, les participants ont élu par acclamation Mme Thu-Lang Tran Wasescha, directrice du Département des affaires internationales de l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle à Berne (Suisse), présidente de la table ronde. La présidente a remercié les participants de leur confiance et a souligné l'importance que son gouvernement accorde à cette table ronde. Elle a expliqué que, lors des assemblées des États membres de l'OMPI en septembre 1999, ceux-ci ont clairement exprimé leur volonté de voir l'OMPI s'engager davantage dans l'étude du lien entre les savoirs traditionnels et la propriété intellectuelle. Même si dans d'autres instances, telles que l'Organisation mondiale du commerce, la question de la protection des savoirs traditionnels fait l'objet d'un examen sérieux, il est difficile de savoir à quel consensus les différentes parties prenantes parviendront : on peut tout au moins affirmer qu'il existe un large consensus sur le fait que cette question ne peut pas être ignorée. Cette table ronde constitue un moyen approprié d'instaurer une situation favorable à toutes les parties en présence et marquée par un esprit constructif car elle permettra d'entendre et d'examiner des avis et des positions différents. En ce qui concerne l'organisation même de la table ronde, la présidente a fait observer que lors des trois premières séances l'exposé présenté sera suivi d'une intervention de trois experts invités, à savoir M. Joseph H. Kwabena Nketia, directeur de l'International Centre for African Music and Dance (ICAMD), Université du Ghana, Accra (Ghana), M. Graham Dutfield, coordonnateur du Working Group on Traditional Resource Rights, University of Oxford (Royaume-Uni) et M. Anil K. Gupta, coordonnateur du Centre for Management in Agriculture, Indian Institute of Management, Ahmedabad (Inde). Puis la parole sera donnée à l'ensemble des participants qui pourront faire connaître leurs points de vue et poser des questions aux conférenciers et aux experts. La quatrième séance sera consacrée aux déclarations de représentants d'États membres de l'OMPI, de détenteurs de savoirs traditionnels et de représentants d'organisations intergouvernementales ou non gouvernementales.
10. M. Richard Owens, directeur de la Division des questions mondiales de propriété intellectuelle, a présenté les travaux de l'OMPI sur les questions émergentes de propriété intellectuelle, en particulier sur la protection des savoirs traditionnels. Il a donné un aperçu du programme de sa division de 1998 à 2001 : identification de nouveaux bénéficiaires et utilisateurs de droits de propriété intellectuelle, analyse des questions de biodiversité et de biotechnologie en rapport avec la propriété intellectuelle, protection des expressions du folklore et examen des liens entre la propriété intellectuelle et le développement. Les travaux de l'OMPI sur les savoirs traditionnels et la propriété intellectuelle ont été menés en cinq étapes. Premièrement, il a fallu définir les savoirs traditionnels, notion présentant de nombreux aspects. Deuxièmement, il convenait de comprendre en quoi la protection des savoirs traditionnels est importante. Troisièmement, le rôle de la protection des savoirs traditionnels par le droit coutumier - et, à terme, son incorporation dans des systèmes juridiques officiels - a été examiné. La propriété intellectuelle vise à promouvoir et à diffuser la créativité et l'innovation en général. Mais lorsqu'il s'agit des savoirs traditionnels, cette même propriété intellectuelle constitue en outre un moyen d'en attester l'existence et de les préserver. Cependant, il ne faut pas oublier que les savoirs traditionnels ne sont pas nécessairement des savoirs anciens. En effet, ils sont aussi contemporains parce qu'ils constituent une réponse, faite par des individus et des communautés, à des défis posés par leur environnement. Quatrièmement, il a fallu évaluer les problèmes auxquels sont confrontés les détenteurs de savoirs traditionnels et, cinquièmement, définir la politique de l'OMPI face au défi que constitue la promotion de la protection des savoirs traditionnels par la propriété intellectuelle. Cette politique comprenait la table ronde sur la propriété intellectuelle et les peuples autochtones tenue en 1998, neuf missions d'enquête dans différentes régions du monde, une réunion-débat sur la propriété intellectuelle et les droits de l'homme, tenue à Genève en 1998 et organisée en coopération avec le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, la participation, dans d'autres instances telles que le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, la FAO et l'UNESCO, à des processus internationaux pouvant avoir une incidence sur la protection des savoirs traditionnels et la coopération avec des organisations intergouvernementales ou non gouvernementales. Il est finalement apparu que les travaux sur la protection des savoirs traditionnels devaient être intégrés aux activités de coopération pour le développement de l'OMPI. M. Richard Owens a souligné que les missions d'enquête ont permis à l'OMPI de comprendre que les problèmes auxquels sont confrontés les détenteurs de savoirs traditionnels sont les mêmes dans tous les pays, que les systèmes de savoirs traditionnels constituent des cadres de créativité et d'innovation permanentes, que les savoirs traditionnels représentent une source constamment renouvelée de richesses et que toutes les branches de la législation sur la propriété intellectuelle s'appliquent aux savoirs traditionnels. Il a aussi fait observer que les consultations régionales ont débouché sur plusieurs recommandations concernant la nécessité d'élargir le programme de travail de l'OMPI en prévoyant, par exemple, la fourniture d'une assistance technico-juridique, une formation à l'établissement de documents sur le folklore, un soutien financier aux institutions nationales ou régionales et un engagement suffisant pour mettre sur pied un régime international efficace de protection des expressions du folklore. En 2000-2001, le programme de travail de l'OMPI sur les savoirs traditionnels et la propriété intellectuelle sera axé sur la résolution de problèmes théoriques et la mise à l'essai de solutions pratiques. Ce programme comprend quatre points forts: des études de cas sur l'utilisation du système de la propriété intellectuelle pour protéger les savoirs traditionnels; une étude sur le lien entre le droit coutumier régissant les savoirs traditionnels et les systèmes officiels de propriété intellectuelle; des échanges d'information sur les répercussions qu'aura la propriété intellectuelle sur l'établissement de documents relatifs aux savoirs traditionnels et une intensification, à l'échelle mondiale, de la formation et de la sensibilisation à la propriété intellectuelle des détenteurs de savoirs traditionnels.
11. M. Michael Blakeney a présenté le document intitulé "Qu'est-ce que le savoir traditionnel? Pourquoi faut-il le protéger? Par qui doit-il être protégé? Pour qui? Comprendre la chaîne des valeurs", qui a été distribué aux participants de la table ronde (document WIPO/IPKT/RT/99/3). Dans sa conclusion, le conférencier a mentionné la proposition soumise par la Bolivie, la Colombie, l'Équateur, le Nicaragua et le Pérou au Conseil général de l'OMC, à savoir que la Conférence ministérielle de Seattle adopte les dispositions nécessaires pour la réalisation d'études et la conduite de négociations sur la protection des savoirs traditionnels en tant que droits de propriété intellectuelle (document WT/GC/W/362 de l'OMC, du 12 octobre 1999).
12. La présidente a fait observer qu'il est trop tôt pour dire si les savoirs traditionnels seront à l'ordre du jour du prochain cycle de négociations de l'OMC. Il ne fait toutefois aucun doute que les savoirs traditionnels ne peuvent pas être ignorés plus longtemps. C'est pour cette même raison, a-t-elle ajouté, que cette table ronde est d'une extrême importance.
13. Lors des débats sur la définition des savoirs traditionnels, M. Nketia a déclaré qu'on peut parler de "savoirs traditionnels" dans la mesure où ce terme comprend aussi la notion de "folklore". Il convient de distinguer les savoirs destinés à être partagés des savoirs "réservés". Les savoirs destinés à être partagés posent très peu de problèmes. Par contre, en ce qui concerne les savoirs "réservés", leur transmission, leur accès et leur utilisation étant limités, il convient de prévoir une protection. Le domaine d'application des savoirs traditionnels est également très important. S'ils sont utilisés dans le cadre de sociétés traditionnelles, il n'y a pas de problème, contrairement à ce qui risque de se produire lorsqu'ils sont utilisés dans le cadre de sociétés contemporaines. Et les choses se corsent lorsqu'un détenteur de savoirs traditionnels souhaite utiliser ceux-ci dans un contexte non traditionnel. Or, les savoirs traditionnels doivent pouvoir être utilisés dans un contexte non traditionnel si l'on veut que ceux-ci se développent.
14. M. Graham Dutfield a dit que le système de propriété intellectuelle en général ne convient pas aux savoirs traditionnels mais qu'il ne faut pas exagérer l'importance des raisons s'opposant à l'application des droits de propriété intellectuelle, notamment en ce qui concerne les marques de certification et les indications géographiques. De manière schématique, on peut dire que les droits de propriété sont des droits permettant d'exclure les autres. Dès lors, ils s'appliquent plus facilement aux savoirs traditionnels. Lorsqu'une communauté partage des savoirs traditionnels, cela ne signifie pas que des tiers peuvent ou sont en mesure d'obtenir des droits exclusifs sur ces savoirs. Les droits de propriété sur des connaissances ne constituent pas une notion inconnue. Il a souvent été dit que les droits de propriété intellectuelle sont individuels, au contraire des savoirs traditionnels qui, eux, sont collectifs. Selon M. Dutfield, cette conception est un peu trop simpliste. En effet, tous les droits de propriété intellectuelle ne sont pas individuels. Ainsi, les inventions sont de plus en plus souvent produites dans le cadre d'entreprises et si le groupe d'inventeurs peut être nommé dans les demandes de brevet, les brevets eux-mêmes sont détenus par l'entreprise. De même, les savoirs traditionnels ne sont pas tous collectifs. Les savoirs, intangibles, ne sont pas bien délimités contrairement aux biens corporels. Si les savoirs traditionnels ne sont pas suffisamment protégés contrairement aux inventions d'entreprises et aux "connaissances modernes", ce n'est pas parce que les systèmes sont incompatibles mais parce que les pouvoirs en jeu sont différents. M. Dutfield a cité à titre d'exemple deux pays dont la législation ne considère pas que l'information divulguée à l'étranger sous forme non écrite fait partie de l'état de la technique, ce qui fait que des brevets sont délivrés pour des inventions déjà connues de certaines communautés traditionnelles.
15. M. Anil Gupta a fait observer que l'OMPI aurait avantage à se pencher sur la question du droit coutumier en tant que moyen de protection des savoirs traditionnels. Ainsi, au Nigéria, au Nouveau-Mexique et en Inde, des communautés traditionnelles ont mis au point un système de protection des savoirs traditionnels. À la base des savoirs traditionnels se trouve une certaine éthique, à savoir que, dans la plupart des cas, les peuples peuvent partager ces savoirs sans avoir à émettre de réserves particulières. Par conséquent, les principes moraux devraient suffire à l'octroi de certains droits exclusifs. Mais là où le bât blesse, c'est que la notion de principes moraux n'existe pas dans la législation moderne, telle que l'Accord sur les ADPIC. En outre, les savoirs traditionnels ne sont ni fixés, ni désuets. Chaque nouvelle génération est à l'origine de nouveaux savoirs. Les savoirs traditionnels constituent une tradition vivante, une tradition d'invention. Les nouveaux savoirs qui reposent sur des procédés traditionnels devraient être protégés : cela devrait être le cas pour la sélection de nouvelles variétés végétales parmi des variétés naturelles. Les détenteurs de savoirs traditionnels ont le droit de dire "non" mais aussi "oui" à l'utilisation de leurs connaissances, à certaines conditions, lesquelles peuvent varier considérablement. Pour finir, il a rappelé que les savoirs traditionnels ne sont pas tous nécessairement collectifs. Il existe, au sein de communautés, des personnes ingénieuses dotées de talents particuliers qui n'ont pas partagé leurs savoirs, ni fait connaître ceux-ci à la collectivité. Elles devraient se voir octroyer des droits car le talent doit être encouragé et récompensé. Si l'on veut que les jeunes soient plus enclins à préserver les savoirs traditionnels, il faut les encourager par des mesures appropriées. La dégradation constitue la menace la plus grande pour les savoirs traditionnels.
16. Les observations des experts ont été suivies d'interventions des participants. Une question a été posée sur le lien qui existe entre la nécessité d'établir des documents pour faciliter la protection des savoirs traditionnels et le risque de juguler l'évolution de ceux-ci. Le même participant a ajouté que la valeur des savoirs traditionnels est intimement liée à la terre et au territoire sur lesquels ils sont nés, ce que les rapports intérimaires des missions d'enquête, établis par l'OMPI, ont apparemment passé sous silence. Il a été observé que l'OMPI semble partir du principe que les pays en développement seront en mesure de mettre en _uvre l'Accord sur les ADPIC à partir du 1er janvier 2000, malgré le fait que plusieurs membres de l'OMC aient demandé une prolongation de la période de transition. La notion de demande de savoirs traditionnels doit aussi être examinée. Les savoirs traditionnels doivent être considérés comme des produits vendables, comme des biens internationaux. Toutefois, la question du mode de protection des savoirs traditionnels demeure : doivent-ils être protégés en tant qu'éléments de droit privé ou dans le cadre d'un système sui generis, répondant aux besoins concrets des détenteurs de ces savoirs. Parallèlement, l'OMPI devrait prendre en considération la formation juridique des détenteurs de savoirs traditionnels. Un participant a souligné que les droits de propriété intellectuelle sur les savoirs traditionnels doivent permettre d'en couvrir les différents aspects, c'est-à-dire aussi bien leur valeur économique, l'intérêt médical ou alimentaire qu'ils présentent dans le cas des plantes que leur expression artistique. Il doit y avoir un dénominateur commun afin que tous les intérêts soient protégés de la même manière. Un participant a demandé s'il est possible de protéger la médecine traditionnelle chinoise par le droit d'auteur. Il a été observé qu'il sera difficile de couvrir les coûts de protection des savoirs traditionnels qui n'ont aucune valeur commerciale.
17. Le Secrétariat de l'OMPI a expliqué que l'établissement de documents n'est pas la seule façon de protéger les savoirs traditionnels. Toutefois, il sera très difficile de les protéger s'il n'existe aucun document. Si des savoirs traditionnels sont déjà tombés dans le domaine public, les documents seront très utiles aux examinateurs de brevets qui pourront les utiliser pour définir l'état de la technique. Le fait qu'il existe un lien entre les savoirs traditionnels et la terre ou le territoire sur lesquels ils sont nés n'a pas été passé sous silence par l'OMPI : il en sera question dans le rapport final des missions d'enquête. Toutefois, il ne fait aucun doute qu'il ne s'agit pas là d'une question de propriété intellectuelle. En ce qui concerne la mise en _uvre de l'Accord sur les ADPIC, rares sont ceux qui n'ont pas compris que cela prendrait un certain temps, indépendamment de la longueur de la période de transition, compte tenu de la complexité des tâches à mener à bien par les gouvernements. S'agissant de la valeur des savoirs traditionnels - qu'il est extrêmement difficile de déterminer - l'OMPI envisage la possibilité de mettre au point une méthode d'évaluation.
18. M. Nketia a fait observer que les savoirs traditionnels sont des plus utiles et qu'ils ont besoin d'être protégé dans le cadre d'une certaine structure dont la définition ne devrait constituer aucun obstacle. Ainsi, au Ghana, le folklore, qui est considéré comme une culture vivante, donne lieu à un inventaire dans tout le pays. En conclusion, M. Anil Gupta a fait valoir que la protection des savoirs traditionnels devait se faire par l'octroi de deux types de droits : les droits privés et les droits collectifs. Dans plusieurs pays, une certaine expérience a été acquise dans le domaine de la délivrance de brevets pour des plantes. En Inde, il est prévu de créer un registre national des savoirs traditionnels, qui nécessitera l'établissement de documents.
19. M. Shri Sundaram Varma a présenté le document intitulé "Les savoirs traditionnels du point de vue concret d'un détenteur" (WIPO/IPTK/RT/99/4).
20. Un participant a fait observer qu'il existe deux catégories de savoirs traditionnels. Si la première n'a aucune valeur économique, la seconde constitue une contribution importante à l'économie : c'est ainsi que la médecine traditionnelle aide les États à accomplir leur devoir en tant que prestataires de soins de santé. Tout mécanisme visant à protéger les savoirs traditionnels devrait tenir compte de cet élément. On pourrait établir un parallèle avec la recherche qui, lorsqu'elle est scientifique, est conduite par des universités et, lorsqu'elle est industrielle, relève de la compétence des entreprises. Un participant a demandé comment on pourrait concilier les savoirs traditionnels et les savoirs "modernes". Un autre a souligné que la génération actuelle perd davantage de connaissances qu'elle n'en acquiert et s'est demandé comment les savoirs traditionnels tels que les conçoit le conférencier peuvent être protégés. L'évaluation des avantages pratiques conférés par les savoirs traditionnels par rapport à d'autres savoirs peut aussi poser problème. Les peuples autochtones devraient avoir la liberté de décider du mode d'utilisation et de transfert de leurs connaissances afin d'en garantir le développement. La question de l'intérêt que présente la propriété intellectuelle pour l'individu et pour la collectivité a été soulevée. Il a aussi été observé que si le système de propriété intellectuelle convient bien aux inventions mécaniques, il n'en va pas de même pour les formes de vie. En outre, la propriété intellectuelle, par définition, ne reconnaît pas les savoirs qui ont été mis au point collectivement. Ce serait peut-être faire preuve d'un optimisme excessif que d'appuyer un système mondial d'enregistrement des savoirs traditionnels, compte tenu du fait qu'une approche juridique engendrera des coûts élevés.
21. Le conférencier a expliqué qu'il a essayé de concilier les deux systèmes de savoirs d'une part, en sélectionnant des variétés traditionnelles et, d'autre part, en en mettant au point de nouvelles. Lorsque les agriculteurs font des cultures, ils ne se contentent pas, en règle générale, d'une seule variété. Les variétés mises au point à partir de variétés traditionnelles sont comparables aux variétés "modernes" et ont parfois des rendements supérieurs à celles-ci. Toutefois, son pays (l'Inde) ne prévoit pas de protection pour les obtentions végétales. Bien sûr, il est parfois difficile d'évaluer la stabilité des variétés. Mais il a lui-même obtenu d'excellents résultats au cours de la dernière décennie. Il est plus que favorable à un système où toutes les personnes qui ont contribué à la mise au point d'une variété seraient récompensées individuellement. La recherche demande du temps et de l'argent. Certes, la reconnaissance pourrait prendre d'autres formes mais les récompenses pécuniaires demeurent indispensables. En ce qui concerne les frais engendrés par la création d'un système d'enregistrement, le conférencier a expliqué que ceux-ci seraient réduits et non accrus dans la mesure où il ne s'agit pas de déterminer à qui appartiennent les savoirs mais comment une protection peut être obtenue.
22. M. Bo Hammer Jensen a commenté le document intitulé "Accéder à des savoirs traditionnels et les exploiter : un point de vue d'entreprise" (WIPO/IPTK/RT/99/5).
23. Un participant a demandé comment les entreprises pouvaient reconnaître les droits des peuples autochtones et des détenteurs de savoirs traditionnels. Il a été dit que les connaissances, et l'accès à celles-ci, ne devraient par être réglementés de manière stricte afin que tout le monde puisse en disposer. Un participant a demandé comment le cadre juridique actuel protège les communautés traditionnelles et leurs savoirs.
24. M. Anil Gupta a constaté que deux questions se sont posées. Premièrement, si la sélection au hasard de plantes destinées à la pharmacologie a donné de bons résultats sans qu'il soit nécessaire de recourir aux savoirs traditionnels de la communauté locale, cela ne signifie pas pour autant que celle-ci n'a pas apporté sa contribution : en effet, aucune sélection n'aurait été possible si la communauté n'avait pas entretenu la diversité végétale locale. Par conséquent, le partage des bénéfices tirés de l'utilisation de la diversité biologique végétale ne devrait pas être appliqué uniquement lorsque des savoirs traditionnels ont été utilisés. Deuxièmement, les nombreux brevets délivrés dans ce domaine par certains pays constituent déjà une reconnaissance de la source du matériel biologique et des savoirs traditionnels utilisés dans l'invention en question.
25. Un participant a demandé si les règles du secret de famille qui régissent la transmission des savoirs traditionnels par les titulaires de ceux-ci peuvent être comparées à celles du secret d'affaires. Il a ajouté que le principe des systèmes actuels de propriété intellectuelle selon lequel tout savoir doit tomber dans le domaine public à l'issue d'une période déterminée de protection peut ne pas être acceptable aux yeux de certains détenteurs de savoirs traditionnels. Un autre participant a souligné que, dans les discussions sur la protection des savoirs traditionnels par un système de propriété intellectuelle, il faut tenir compte non seulement de la valeur économique de ces savoirs mais aussi d'autres valeurs - non économiques -, qui ne peuvent pas être chiffrées.
26. Le conférencier a fait observer que dans certains pays où les biotopes, qui recèlent des ressources biologiques importantes, sont très fragiles, les personnes qui s'occupent de ces ressources ne souhaitent pas que l'emplacement de celles-ci soit divulgué dans des demandes de brevet.
27. Un participant a ajouté qu'outre les activités de bioprospection des entreprises commerciales, il faut tenir compte du rôle des établissements universitaires des pays en développement. Il a expliqué que les fonds et la formation offerts par des entreprises privées dans le cadre du partage des bénéfices et du développement du potentiel permettent souvent de faire sortir du pays d'origine de nombreux savoirs traditionnels sans qu'il y ait partage des bénéfices avec les détenteurs de ces savoirs. Il convient notamment de tenir compte du droit d'auteur sur les bases de données de savoirs traditionnels - et de l'accès à ces bases - qui ont été mises au point par ces établissements universitaires, des personnes qui ont fourni ces savoirs dans le cadre du processus d'élaboration de la base, et du lien entre ces bases de données et le domaine public. D'aucuns se sont interrogés, en ce qui concerne les plantes, sur la portée de la matière pouvant faire l'objet d'une protection par brevet. Un autre participant a signalé que les experts locaux constituent un troisième groupe de détenteurs de savoirs traditionnels, après l'État et les communautés. D'après ce participant, qui a travaillé avec des guérisseurs, il ne fait aucun doute que les savoirs traditionnels dans le domaine de la médecine sont, pour la plupart, considérés comme des secrets de famille dont le dépositaire est un membre de la famille qui, à son tour, les transmettra à un autre membre. En ce qui concerne le rapprochement des utilisateurs étrangers de savoirs traditionnels et des détenteurs de savoirs d'un pays, un plan en deux étapes a été proposé. Un participant a suggéré que les prospecteurs étrangers établissent le premier contact avec le pays concerné par l'intermédiaire du gouvernement ou d'organisations non gouvernementales. Lors de la seconde étape, ils se mettront en rapport avec les détenteurs de savoirs du pays par l'intermédiaire des institutions traditionnelles et des membres des structures de prise de décisions de la communauté, tels que les chefs, les aînés ou les dirigeants traditionnels.
28. Le conférencier a souligné qu'il n'existe actuellement aucune loi sur les brevets de plante en Europe. M. Graham Dutfield a ajouté qu'en Europe, des brevets ont été accordés pour des inventions faisant intervenir des plantes ne constituant pas des espèces botaniques. Il a cité à titre d'exemple un brevet sur la camomille, qui a été délivré récemment. Le conférencier a rappelé que compte tenu du fait que le secteur privé finance des établissements universitaires, ceux-ci ont souvent servi à mettre à la disposition des entreprises intéressées de nombreux savoirs traditionnels appartenant à des communautés locales. C'est ainsi que presque toutes les publications d'ethnobotanique omettent de rendre hommage à ceux qui leur ont fourni la matière, qu'il s'agisse de personnes ou de communautés. L'expert a proposé deux mesures pour remédier à cette situation. La première mesure consisterait à définir une ligne de conduite aux termes de laquelle les savoirs ne pourraient être recueillis que si leurs détenteurs sont reconnus, c'est-à-dire que leur nom et leur adresse sont mentionnés. La seconde mesure consisterait à définir une éthique qui prévoirait que les savoirs et les résultats de la recherche fondée sur ces savoirs doivent être partagés avec les détenteurs, dans la langue de ceux-ci. L'expert a ajouté que de nombreux établissements universitaires et entreprises de pays en développement ont usurpé les savoirs des communautés locales. En conclusion, il a proposé d'examiner la possibilité de délivrer des brevets de défense. Un participant a demandé si la délivrance de brevets pour des plantes est compatible avec une résolution de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) sur le statut des ressources phytogénétiques en tant que patrimoine commun de l'humanité.
29. Le conférencier a expliqué que la matière qui est actuellement brevetée se limite à des plantes nouvelles, qui sont le résultat du génie génétique. S'il n'était pas possible de protéger ces inventions par brevet, il n'y aurait aucun avantage à obtenir des innovations aussi chères. Le conférencier a rappelé que la protection par brevet d'une invention ne constitue pas un moyen de commercialisation d'un produit pour lequel il n'y a aucune demande. Il a aussi précisé que le petit inventeur profitera plus du système des brevets que l'inventeur professionnel.
30. Le conférencier a conclu en disant que même si les entreprises ont des objectifs économiques à atteindre, elles sont désireuses d'obtenir un dialogue avec des détenteurs de savoirs traditionnels. D'ailleurs, bon nombre d'entre elles reconnaît déjà les droits des peuples autochtones. Les communautés indigènes ont le droit de garder leurs secrets et, tout comme les entreprises, de les faire protéger. Il a ajouté que le secret n'est pas un droit exécutoire, ce qui pose problème lorsqu'un tiers acquiert un savoir similaire à celui du dépositaire du secret.
31. M. David Daoas a présenté le document intitulé "Les efforts entrepris pour protéger les savoirs traditionnels : l'expérience des Philippines" (document WIPO/IPTK/99/6A) et Mme Begoña Venero Aguirre "L'expérience péruvienne en matière de protection de savoirs traditionnels" (document WIPO/IPTK/99/6B).
32. M. Nketia a dit que dans certaines régions de l'Afrique, le partage des savoirs dépasse les frontières de communautés déterminées. En outre, les savoirs traditionnels prennent différentes formes, certains d'entre eux étant tellement spécialisés qu'il est nécessaire de recourir à une approche particulière pour les appréhender. Il convient de distinguer les savoirs ayant une utilité commerciale de ceux qui n'en ont pas. Les savoirs traditionnels pouvant faire l'objet d'une utilisation commerciale doivent être protégés aussi bien contre les initiés que contre les profanes. Les savoirs traditionnels ont pour origine des inégalités et l'un des objectifs de cette table ronde est de réduire celles-ci. Il faudra s'intéresser tout particulièrement aux modalités des partenariats. Des pays en développement tels que le Ghana cherchent à attirer des investisseurs étrangers. Mais les possibilités qui existent et les modalités éventuelles de partenariats sont tout aussi importantes, notamment dans le domaine de la recherche universitaire.
33. M. Anil Gupta a dit qu'il a recensé six questions différentes. La première question concerne la définition du processus législatif visant à protéger les savoirs traditionnels. L'expérience a montré que, quel que soit ce processus, il convient d'établir un véritable dialogue avec les populations autochtones, qui reposera sur les moyens de communication de ces populations. La deuxième question porte sur les partenariats. Il existe différentes formes de partenariats, lesquelles peuvent impliquer les États, les communautés autochtones et les entreprises du secteur privé. Il est important que le rôle de l'État soit formellement reconnu et que les gouvernements ne définissent pas de manière trop rigide les règles d'accès aux ressources génétiques. On pourrait tenir compte de la différence qui existe entre, d'une part, les ressources extractives et les ressources non extractives et, d'autre part, les ressources commerciales et les ressources non commerciales. Les règles devraient peut-être être définies en fonction de la nature des ressources. La troisième question concerne le système d'enregistrement. Sans service d'enregistrement, les utilisateurs potentiels ne pourront pas identifier les détenteurs de connaissance. Ces services devraient être reconnus, au moins, comme d'importantes sources d'information. La quatrième question porte sur la durée des droits sur les savoirs traditionnels. On peut citer à titre d'exemple les baux publics de 99 ans qui existent dans certains pays. On peut aussi proposer que les savoirs traditionnels soient protégés pendant quatre générations. Les droits du preneur de licence et le caractère exclusif ou non exclusif des licences ne sont pas des notions clairement définies. Ce qui est sûr, c'est que les négociations doivent déboucher sur des compromis qui permettront de protéger les savoirs traditionnels. La cinquième question a trait à la nature des avantages. La propriété intellectuelle ne procure tout naturellement qu'un seul type d'avantage. Mais d'autres avantages existent, tels que la reconnaissance auprès du public ou l'accès à l'éducation ou à l'information. Ces avantages peuvent être soit individuels, soit collectifs. La dernière question concerne la diversité des cultures. Il faut faire preuve d'un certain pragmatisme et d'une certaine souplesse lorsqu'on se penche sur la question des savoirs traditionnels, qui ont pour caractéristique la diversité. Il y a une grande différence entre le droit aux connaissances et le droit aux ressources.
34. M. Graham Dutfield a dit qu'il peut résumer les délibérations en trois points. Le premier point porte sur le consentement préalable donné en toute connaissance de cause. Des négociations équitables ne débouchent pas toujours sur des résultats équitables. En fait, il y a une grande inégalité de pouvoir entre ceux qui ont accès aux ressources. Il s'agit de savoir comment mettre un terme à cette inégalité. Le deuxième point porte sur la réglementation de l'accès aux ressources qui sont utilisées dans la recherche commerciale par rapport aux ressources qui ne le sont pas. Et le troisième point concerne la nécessité ou non de codifier le droit coutumier.
35. Un participant a demandé si les communautés autochtones sont reconnues au Pérou. Un autre a fait observer que les savoirs traditionnels sont détenus aussi bien par des communautés traditionnelles que par des sociétés modernes. Selon lui, les gouvernements doivent participer au processus de négociation de la protection des savoirs traditionnels et partager les bénéfices qu'ils tirent de l'exploitation de ces savoirs. Un participant a voulu savoir si les législations sont suffisamment souples pour s'appliquer à des savoirs traditionnels qui peuvent ne pas entrer dans les catégories juridiques prévues par la loi. Il a aussi été observé que la notion de domaine public peut être inappropriée dans ce contexte car les communautés autochtones ne sont pas familiarisées avec le système de propriété intellectuelle et ont donc divulgué des informations sans savoir quelles conséquences cet acte aurait. C'est aux détenteurs de savoirs traditionnels de décider si ceux-ci doivent tomber dans le domaine public. Un autre participant a demandé si le terme "autochtone" convient aux communautés traditionnelles. Autre point à prendre en considération : la difficulté qu'ont les systèmes de protection des savoirs traditionnels à coexister avec les systèmes officiels de droits de propriété intellectuelle. Un participant a demandé si des législateurs ont déjà reconnu des savoirs dans le domaine de la médecine traditionnelle. Cette question est d'autant plus pertinente que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) encourage ses États membres à incorporer dans leur système de santé national la médecine traditionnelle.
36. Répondant aux questions posées par les participants, une conférencière a souligné l'importance du rôle des gouvernements dans la protection des savoirs traditionnels, qui ne doivent toutefois pas porter atteinte à la liberté des communautés de faire respecter leurs droits. Le projet de règlement péruvien reconnaît les droits des communautés autochtones. La décision de faire respecter ces droits appartient à celles-ci. En ce qui concerne les avantages individuels et les récompenses, les communautés ont le droit de les transmettre. Le Gouvernement péruvien, reconnaissant le caractère multiple des savoirs traditionnels, a créé un comité multidisciplinaire chargé d'aider et d'appuyer les communautés. Elle a précisé que les communautés autochtones sont reconnues en tant que telles par la constitution péruvienne. La question de la protection des savoirs traditionnels étant extrêmement complexe, le comité a mis beaucoup de temps à élaborer le projet de règlement. Deux représentants de communautés autochtones ont participé aux travaux de ce comité. Le projet de règlement ne couvre pas tous les types de savoirs traditionnels. Mais il s'agit d'une première étape. Dans l'avenir, d'autres mécanismes juridiques pourront être mis en place pour protéger d'autres formes de savoirs traditionnels tels que le folklore. En ce qui concerne l'expression "peuple autochtone", le Pérou s'est conformé à la Convention n° 169 du Bureau international du travail (BIT) mais il est clair qu'il ne s'agit pas là du résultat d'un consensus.
37. L'autre conférencier a dit que la nature et le nombre des avantages dont bénéficieront les détenteurs de savoirs traditionnels dépendront des contrats signés avec des entreprises étrangères, qui doivent être approuvés au préalable par les autorités gouvernementales. À son avis, le droit coutumier devrait être codifié afin d'être plus efficace même si, il en a convenu, il s'agit là d'une question pouvant donner lieu à d'autres débats. La législation des Philippines couvre uniquement les relations qu'ont les détenteurs de savoirs traditionnels avec des chercheurs ou des prospecteurs étrangers. Les communautés autochtones doivent donner au préalable leur consentement en toute connaissance de cause avant que des tiers puissent acquérir des ressources ou des savoirs traditionnels.
38. Un participant a déclaré que le caractère holistique des savoirs traditionnels doit être préservé et qu'il ne faut pas seulement protéger les savoirs traditionnels auxquels la société attribue une valeur économique. Il convient de ne pas courir le risque de diviser les savoirs traditionnels. En outre, la législation doit permettre de préserver l'intégrité culturelle. Il a ajouté que les délibérations ont permis de cerner certains problèmes et qu'il n'est peut-être pas nécessaire de trouver des solutions immédiatement. On pourrait peut-être consacrer davantage de temps à approfondir le débat. Un autre participant a dit que s'il est vrai que les États sont tenus de reconnaître et de protéger les droits des communautés, il n'en reste pas moins qu'ils omettent souvent de le faire. Il arrive même que ce soit le gouvernement lui-même qui viole les droits des détenteurs de savoirs traditionnels. Il est donc urgent de mettre en place un cadre juridique protégeant les savoirs traditionnels et l'accès aux ressources. Un participant a fait observer que le projet de règlement péruvien devrait comprendre une disposition sur les savoirs traditionnels du domaine pharmaceutique, notamment parce que ces savoirs évoluent et sont utilisés dans des domaines tels que l'ingénierie et la génétique. Par conséquent, il faut tenir compte, dans la législation, des applications modernes des savoirs traditionnels. En ce qui concerne le rôle de l'OMPI, ce participant a souligné que si l'on veut que le consentement préalable en toute connaissance de cause constitue un outil valable, l'OMPI doit mettre en place des mécanismes visant à informer les communautés traditionnelles de leurs droits. L'Organisation doit aussi contribuer à la création d'une politique internationale sur la protection des savoirs traditionnels par ses États membres.
39. Un participant a soumis un exposé écrit soulignant que la médecine traditionnelle chinoise constitue une partie importante du patrimoine culturel chinois. Il a rappelé quelles sont les origines de cette médecine traditionnelle qui a vu le jour il y a plus de 2000 ans et a rappelé qu'à l'heure actuelle, elle fait partie intégrante du système de soins de santé chinois et qu'elle égale en importance la médecine occidentale. Cependant, la législation chinoise en matière de propriété intellectuelle ne protège pas de manière adéquate la médecine traditionnelle en raison de la spécificité de celle-ci. Il a demandé instamment à l'OMPI de prendre des dispositions pour que la médecine traditionnelle soit protégée au niveau international.
40. Un autre participant a présenté les travaux du Crucible Group, qui suit ces délibérations de très près. Soixante-cinq personnes représentant des détenteurs de savoirs traditionnels, des organisations non gouvernementales, des gouvernements, des acteurs du secteur privé et, en qualité d'observateurs, des organisations multilatérales font partie de ce groupe qui s'est penché, entre autres, sur la question de savoir s'il vaudrait mieux protéger les savoirs traditionnels par des mécanismes de propriété intellectuelle ou par un système sui generis. Lorsqu'il est confronté à des questions controversées, le groupe préfère adopter différentes possibilités plutôt qu'essayer d'obtenir un consensus improbable. Il espère que les travaux finaux du Crucible Group seront bientôt disponibles.
41. Un autre participant a expliqué que les délibérations ayant lieu dans le cadre de cette table ronde l'intéressent d'autant plus qu'il est guérisseur au Sénégal. La médecine traditionnelle joue un rôle de plus en plus important dans l'ensemble du continent africain, notamment au Mali, au Burkina Faso, au Ghana, en Angola et au Sénégal. Il a donné des explications sur la formation qu'il a reçue dans le domaine de la médecine traditionnelle et sur le rôle de certaines plantes ou parties de plantes dans la médecine traditionnelle.
a) Déclaration des représentants de gouvernements
42. Le représentant du Canada a dit que son pays compte une importante population autochtone au sein de laquelle plus de 600 premières nations représentent une grande diversité culturelle et linguistique. D'après l'expérience du Canada, les questions débattues à la table ronde sont importantes et complexes. Des réunions de ce type sont essentielles car elles permettent de partager les expériences nationales et d'apprendre des autres États membres ainsi que des communautés indigènes et locales. Il reste beaucoup d'analyses à faire et le Canada considère que l'OMPI est la mieux placée pour faire avancer ce travail. De par sa fonction, l'OMPI dispose à la fois des connaissances spécialisées et de l'expérience des questions émergentes de propriété intellectuelle et elle bénéficie d'apports d'experts non gouvernementaux. L'OMPI est également très bien placée pour coopérer avec d'autres organisations internationales telles que le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique et le Conseil des ADPIC de l'OMC. Les savoirs traditionnels font leur apparition dans un certain nombre d'instances internationales et pour le Canada, le fait que l'OMPI ait un rôle prépondérant dans ces questions favoriserait une étude cohérente et concertée des problèmes complexes qui se posent. Les missions d'enquête régionales, les tables rondes et le plan de travail de l'OMPI montrent que l'Organisation recherche activement les points de vue et la participation des peuples autochtones et des communautés locales. Étant donné la diversité des cultures et des droits coutumiers régissant les savoirs traditionnels dans le monde entier, il est important que l'OMPI poursuive ces efforts.
43. Le représentant du Guyana a rappelé que le but de cette table ronde est de rechercher la compréhension et la coopération de toutes les parties intéressées. Il souhaite qu'elle soit le point de départ d'un processus qui aurait des répercussions positives et productives dans les mois et les années à venir. Il a souhaité souligner trois points importants. Tout d'abord, dans des pays comme le Guyana qui ont un long passé de colonialisme et de dépression économique véritablement pénalisante sur le plan psychologique, la population est conditionnée à penser que toutes les bonnes choses, dont les produits et les savoirs, proviennent de l'extérieur des communautés locales, en fait de l'extérieur du pays et de la société. Selon les termes de l'un des romanciers les plus connus du Guyana, "rien n'a jamais été créé aux Caraïbes", c'est donc une région du monde profondément insignifiante. Bien que ce ne soit bien sûr pas vrai et que ce ne l'ait jamais été, cela a néanmoins été admis comme tel jusqu'à ce que de nombreux pays en développement, en particulier ceux qui avaient un passé colonial écrasant, aient commencé à redécouvrir les vastes réservoirs de savoirs qui se trouvaient à l'intérieur de leurs frontières. Le Guyana a été peuplé il y a plus de 7000 ans. Par la suite, des mouvements forcés de population ont amené les ancêtres d'Afrique qui sont venus comme esclaves et les ancêtres de l'Inde, de la Chine et de Madère qui sont venus comme travailleurs immigrés. L'ironie de toute cette situation c'est que, bien sûr, loin d'être culturellement et intellectuellement pauvre, le peuple du Guyana a hérité des savoirs traditionnels de certaines des cultures les plus prestigieuses du monde, savoirs qui ont été adaptés et d'une certaine façon nationalisés pour se fondre dans le paysage naturel et social du Guyana. Il existe donc un besoin urgent de promouvoir les savoirs traditionnels à l'intérieur du pays pour des raisons qui vont au-delà de leur valeur économique. En fait, parce qu'ils sont source d'orgueil, d'authenticité, d'identité et de confiance en soi particulièrement lorsqu'il s'agit de retenir les jeunes qui considèrent actuellement leur propre pays comme un pauvre résidu du monde riche, mais aussi pour revaloriser les aînés. Ensuite, en matière de biodiversité, un domaine que l'intervenant connaît bien puisqu'il représente l'Agence pour la protection de l'environnement en tant que directeur de l'éducation, de l'information et de la formation, le Guyana est à l'avant-garde pour ce qui est de la protection, de la conservation et de l'utilisation durable des ressources biologiques en particulier avec le plan d'action national pour la biodiversité récemment mis en _uvre. Mais la diversité biologique, sa valeur et son utilisation commerciale, scientifique et autre suppose bien sûr un contexte local, national et mondial. L'article 8 de la Convention sur la diversité biologique qui a trait au respect, à la reconnaissance et au partage des avantages découlant de l'utilisation des connaissances, innovations et pratiques autochtones est l'un des principes majeurs du plan d'action national du Guyana pour la biodiversité. Enfin, les pays en développement comme le Guyana doivent d'abord recenser et répertorier toute la gamme des savoirs traditionnels qui existent à l'intérieur de leurs frontières - des produits de la biodiversité aux produits et aux objets culturels, à l'artisanat, à tous les types de savoirs qui n'ont même pas encore été reconnus ou recensés à ce jour. Il est en outre extrêmement important que cette tâche soit confiée à des experts locaux. L'intervenant veut parler d'experts locaux dans le domaine des savoirs traditionnels et pas nécessairement de ceux des universités ou autres instituts. De plus, ils doivent être originaires des communautés dans lesquelles ces savoirs et ces pratiques existent. Il doit s'agir essentiellement d'un mouvement qui s'effectue de bas en haut plutôt que de haut en bas. Les communautés locales pourraient alors noter les différentes formes de savoirs traditionnels car elles seraient bien informées des différents types d'exploitations qui ont lieu actuellement ou qui pourraient avoir lieu. Selon le représentant, c'est là que l'OMPI pourrait jouter un rôle très important. Le représentant souhaite exprimer le soutien résolu du Guyana aux activités de l'OMPI dans ce domaine et se dit impatient de partager les expériences et, il l'espère, les succès d'autres pays en développement qui aideront le Guyana à formuler ses propres plans.
44. La représentante du Pérou a dit qu'il doit être clair que son gouvernement considère la question des savoirs traditionnels comme très importante. C'est pourquoi le Gouvernement péruvien s'intéresse depuis plusieurs années à l'étude et à l'analyse de la question qui a conduit à la proposition présentée à cette table ronde. L'intervenante souhaite toutefois éclaircir quelques points. Elle souligne tout d'abord que le Gouvernement du Pérou n'a pas pour but de mettre en place un système de protection des savoirs traditionnels de type bureaucratique au formalisme pesant, mais plutôt d'adopter des règles claires et simples qui faciliteraient l'exploitation sous licence des savoirs traditionnels dans un cadre juridique établi. Un tel cadre s'inspirerait bien sûr des principes d'équité et de justice. Jusqu'ici, les débats ont essentiellement porté sur les savoirs traditionnels en rapport avec la biodiversité. Il ne faudrait pas pour autant ignorer l'importance et l'intérêt que présente la préservation d'autres types de savoirs traditionnels détenus par des communautés traditionnelles. Cependant, le Gouvernement péruvien souhaite tout d'abord évoquer un thème qu'il considère comme extrêmement important et peut-être plus urgent car il est lié à l'immense biodiversité et aux immenses ressources biologiques qui existent dans le pays. La représentante péruvienne pense que l'exposé de l'expert du Pérou a montré clairement que son pays s'oriente vers un régime de protection sui generis. Toutefois, certains liens avec le système de propriété intellectuelle subsistent et le Gouvernement péruvien a également fait quelques progrès sur ces questions. Comme cela a été dit, le projet de règlement sur la protection des savoirs traditionnels contient une disposition qui lie la protection des savoirs traditionnels à la protection de la propriété intellectuelle. En d'autres termes, le cas se produit lorsque les savoirs traditionnels sont utilisés pour réaliser une innovation qui sera vraisemblablement protégée par un brevet ou par d'autres mesures classiques de protection de la propriété intellectuelle. À ce propos l'intervenante souhaite informer les participants que dans l'examen en cours sur les normes de propriété industrielle de la communauté andine, l'adoption de dispositions faisant de la protection des savoirs traditionnels une exigence en matière de brevetabilité est à l'étude. On est par exemple en train d'inclure une disposition pour prouver qu'une licence d'utilisation des savoirs a été accordée. En matière d'accès aux ressources génétiques, lorsque ces ressources sont utilisées indépendamment du savoir, il y aura une disposition liant l'accès légitime aux droits de propriété intellectuelle. La délégation péruvienne estime qu'ainsi, tous les types de savoirs et d'utilisation de ces savoirs par des tiers sont pris en compte. Elle est consciente que c'est seulement au niveau multilatéral qu'on pourra obtenir une protection réelle et complète des savoirs traditionnels. C'est pourquoi elle souhaite à nouveau insister sur l'importance que représente pour le gouvernement péruvien le travail réalisé par l'OMPI dans ce domaine. De plus, deux autres initiatives méritent d'être commentées. Dans les négociations en cours au sujet de la zone de libre échange des Amériques, le Pérou a proposé avec d'autres pays de la communauté andine que la question des savoirs traditionnels et de l'accès aux ressources génétiques soit étudiée et analysée au sein du groupe de négociation sur la propriété intellectuelle. Cette proposition a été adoptée lors de la dernière réunion du groupe de négociation. De plus, le Pérou et d'autres pays ont proposé à l'OMC, que lors de la prochaine conférence ministérielle de Seattle soit abordée la question du lancement des études nécessaires pour assurer un cadre juridique international adapté à la protection des savoirs traditionnels. Pour la délégation péruvienne, le système de protection des droits de propriété intellectuelle peut s'adapter aux changements qui se produisent dans le monde et les propositions qui font l'objet de débats dans plusieurs instances internationales en sont l'illustration.
45. Le représentant de l'Inde a souhaité que les délibérations débouchent sur une utilisation des savoirs traditionnels qui respecte à la fois les intérêts de ceux qui les détiennent et de ceux qui les utilisent. Les communautés qui sont des réservoirs de savoirs traditionnels prennent de plus en plus conscience du besoin de protéger ces savoirs contre une commercialisation incontrôlée et inadaptée. Des pays ont fait part de l'inquiétude que leur cause la délivrance de brevets à des pays développés à partir de systèmes de savoirs traditionnels. On en a un exemple récent avec le brevet sur les propriétés cicatrisantes du cucurma, délivré par l'Office des brevets et des marques des États-Unis d'Amérique. On a pu contester ce brevet en apportant la preuve d'une antériorité. Le brevet a donc été annulé. À ce propos, l'intervenant a cité la première réunion régionale sur les questions de propriété intellectuelle dans le domaine des médecines traditionnelles qui a été organisée par l'OMPI à New Delhi en octobre 1998. Au cours de la même période, une mission d'enquête de l'OMPI a également visité l'Inde et la délégation indienne attend avec impatience son rapport final. Selon la délégation indienne, c'est souvent parce qu'ils ne disposent pas d'informations fiables en matière de savoirs et de pratiques médicales traditionnels que les offices de propriété intellectuelle des pays développés délivrent des brevets portant sur les pratiques de la médecine traditionnelle. Il est donc urgent de créer une base de données électronique des savoirs et des pratiques médicales traditionnels. Cette base de données pourrait servir de preuve d'antériorité aux examinateurs des offices de brevets aux niveaux national et international. Le Gouvernement indien est très attaché à la création d'une telle base de données. L'intervenant a aussi souhaité mentionner que le Bureau international de l'OMPI pourrait envisager de créer un système d'étude et d'exploration des aspects sociaux, culturels et de l'ensemble des aspects économiques des savoirs traditionnels, destiné à la fois aux producteurs et aux utilisateurs directs et indirects de ce type de propriété intellectuelle. Si l'on n'entreprend pas ce type de recherche, il ne sera pas possible de préciser objectivement le rôle et l'importance des savoirs traditionnels dans un système économique mondial de plus en plus axé sur la connaissance, car c'est la connaissance et la connaissance seule qui est à la base de tout développement économique.
46. Le représentant de la Chine a souligné que son pays est un vaste territoire avec une longue histoire, une riche culture et de nombreux groupes ethniques différents. La Chine dispose d'une grande quantité de savoirs traditionnels qui doivent être protégés. En fait, un travail intensif a été réalisé en matière de projets de règlements destinés à protéger le folklore. Mais le Gouvernement chinois s'est rendu compte qu'il existait d'autres types de savoirs traditionnels qui ne peuvent pas être couverts par les expressions du folklore comme la médecine et les traitements traditionnels chinois qui proviennent d'expériences créatrices de longue date mais qui sont extrêmement difficiles à protéger sur le plan juridique. Ils ne peuvent être protégés par le droit des brevets parce qu'ils ne répondent pas aux conditions requises. Ils ne peuvent pas non plus être protégés en tant que secrets d'affaires car ils ont déjà été divulgués. Quant au droit d'auteur, il ne s'applique pas à ce type de création car le droit d'auteur ne protège que les expressions et non les idées, les opérations et les procédés. Il semble donc que les savoirs traditionnels ne soient pas suffisamment protégés par les méthodes classiques de protection de la propriété intellectuelle. Il faut donc trouver un autre moyen de les protéger afin qu'un équilibre puisse être trouvé entre ceux qui ont un enjeu dans ce domaine et le public.
47. Le représentant du Brésil a fait observer que le concept de savoir traditionnel est extrêmement vaste mais qu'il peut être divisé en deux catégories qui se recoupent parfois : le savoir lié au folklore et le savoir en rapport avec les ressources génétiques. Le Brésil estime que ces deux catégories devraient être analysées en profondeur. La seconde présente un intérêt particulier pour ce pays qui jouit d'une grande biodiversité. Les savoirs traditionnels développés et détenus par les communautés autochtones et locales constituent une part importante du patrimoine culturel brésilien et peuvent également avoir une valeur économique non négligeable. La protection des savoirs traditionnels est essentielle pour reconnaître et divulguer ce type de savoirs avec l'approbation et la participation de ses détenteurs légitimes. Même si on associe généralement ces savoirs aux communautés autochtones, il existe de nombreux exemples de communautés non-autochtones du Brésil qui pourraient également tirer parti de cette protection comme par exemple les communautés d'anciens esclaves qui ont conservé des traditions spécifiques durant des siècles, les peuples qui habitent dans des régions particulières comme les rives de certains fleuves, etc. La protection des pratiques liées aux savoirs traditionnels présente un avantage supplémentaire important qui est la protection de l'environnement. Étant donné la structure et le contenu de ces savoirs, si profondément liés aux écosystèmes eux-mêmes, la protection des droits constitue un outil important pour l'amélioration des conditions générales de protection de l'environnement. Les zones habitées par les communautés locales et autochtones sont souvent relativement pauvres mais, d'un autre côté, elles sont riches en traditions en rapport avec leur biodiversité et leurs ressources biologiques. Étant donné ce qui précède, le Brésil est favorable à une étude approfondie de la question afin que soit mis en place un cadre réglementaire international conforme aux dispositions de la Convention sur la diversité biologique. Les discussions en cours sur la révision de l'article 27.3.b) de l'Accord sur les ADPIC ont fourni une tribune intéressante pour débattre la question et faire en sorte que l'Accord sur les ADPIC et la Convention sur la biodiversité se renforcent mutuellement. Au niveau national, comme il a été dit à cette table ronde, plusieurs pays ont travaillé à la création d'un cadre juridique sur ce thème. Dans le cas du Brésil, trois projets de loi différents qui ont trait à l'accès aux ressources génétiques et à la protection des savoirs traditionnels sont devant le Congrès. Au cours des débats, quelques questions délicates ont été soulevées comme celle de savoir quels droits fondamentaux peuvent être accordés à qui et à quelles conditions. Enfin, l'intervenant a souligné l'importance des débats qui se déroulent sur ce thème dans plusieurs autres instances telles que l'OMC, la FAO, l'UNESCO et la CNUCED.
48. Le représentant du Mexique a dit que son gouvernement est bien conscient de la complexité de la question de la protection des savoirs traditionnels. Pour des pays comme le Mexique avec une grande diversité de peuples autochtones qui ont accumulé une richesse inestimable en matière de savoirs traditionnels, de biodiversité et de médecine traditionnelle, il est clair qu'il faut soutenir toute tentative de mener à bien des études spécifiques dans ce domaine. Conformément à la nouvelle vision stratégique de l'OMPI, la promotion de la créativité est l'un des piliers de l'Organisation. La délégation mexicaine est favorable, dans le cadre des savoirs traditionnels, à une promotion de la créativité permettant la réalisation de projets avec plusieurs objectifs différents. Le premier de ces objectifs consisterait à donner aux peuples autochtones, aux gouvernements et à d'autres parties prenantes accès à l'information juridique pertinente sur ce thème. Le second serait de développer des stratégies visant à diffuser les connaissances liées à la propriété intellectuelle en matière de savoirs traditionnels, en tenant compte des valeurs éthiques et communautaires des peuples autochtones. Enfin, ce travail devrait viser à renforcer la mise en place d'une culture de la propriété intellectuelle destinée aux peuples autochtones et souligner les avantages éventuels que ces peuples pourraient obtenir s'ils acceptaient d'instaurer des normes de propriété intellectuelle pour les savoirs traditionnels.
49. La représentante de la Tunisie a dit que sa délégation est convaincue que l'une des ressources fondamentales de nombreux pays en développement est leur capital culturel. Pour protéger ce capital, à la fois au niveau national et au niveau international, il faut qu'existe une grande solidarité. L'intérêt que porte la Tunisie à la protection des savoirs traditionnels et du folklore en général, s'explique par deux raisons essentielles. La première c'est l'histoire, car l'histoire de la Tunisie présente des aspects très particuliers. La seconde est la conviction bien enracinée que la culture joue un rôle vital dans l'innovation future et qu'il faut laisser ces atouts culturels se développer afin d'enrichir le patrimoine national. On a établi un lien entre folklore et patrimoine et leur transmission, non pas en tant que pièce de musée, mais en tant qu'élément d'un développement durable. Cela a été fait grâce à la législation garantissant la protection du folklore et mettant en place les dispositions relatives au patrimoine national et au folklore. La loi tunisienne sur le droit d'auteur protège le folklore et subordonne son utilisation à une autorisation délivrée par le Ministère de la culture moyennant le paiement d'une taxe à l'organisme chargé de la protection du droit d'auteur. Les mêmes dispositions s'appliquent aux _uvres tirées du folklore. Le folklore a été défini par la loi comme une _uvre artistique associée à des coutumes et à des traditions et transmise d'une génération à l'autre. Les aspects liés au patrimoine culturel ont été réglementés par le code du patrimoine archéologique et historique adopté en 1994. Certaines institutions ont été créées pour mettre l'accent sur la nécessité de protéger les savoirs traditionnels et la culture, comme par exemple le Centre des arts traditionnels dont l'objectif est de rassembler différents exemples de l'art traditionnel et de veiller à ce qu'ils soient diffusés auprès du public. Ces dispositions s'appliquent également à certains articles de bijouterie et à des articles de la vie courante. La création, en 1992, du Centre de musique méditerranéenne et arabe avait pour objectif de protéger et de mettre en valeur la musique de cette région. La Tunisie possède différents centres qui veillent à la protection des différents aspects des arts. Depuis 1992, la Tunisie organise des manifestations annuelles pour célébrer son patrimoine culturel. Toutes les personnes concernées ont donc pris davantage conscience du fait que le patrimoine leur avait été transmis par leurs ancêtres. Pour ce qui est du travail des artisans, afin d'assurer que les vieux arts ne sont pas oubliés et que les nouveaux arts sont novateurs, une journée nationale de l'artisanat a été instaurée.
50. Le représentant de l'Indonésie a dit que, pour sa délégation, cette réunion constitue une étape importante dans le processus de définition de ce que l'on appelle le nouveau paradigme des droits de propriété intellectuelle. Il espère que ce travail continuera à être fait d'une façon approfondie, transparente et exhaustive qui encouragera encore davantage une large participation. Le fait que l'OMPI ait choisi ce thème est révélateur du vif intérêt et de l'inquiétude qu'il éveille dans la majorité des États membres, notamment en Indonésie. Étant une nation avec un très vaste territoire, une importante population et une telle diversité de cultures, l'Indonésie est tout à fait consciente de la complexité et du caractère sensible des questions qui sont en jeu. C'est pourquoi l'intervenant a beaucoup apprécié tous les points qui ont été évoqués au cours de cette table ronde, tant par les orateurs que par les autres participants, car ces points peuvent constituer pour l'Indonésie une base de départ extrêmement précieuse pour traiter la question.
51. La représentante des États-Unis d'Amérique a dit que la réunion a été très instructive et que sa délégation y a beaucoup appris. Pour la délégation américaine, cette réunion a montré que l'importance de la propriété intellectuelle est de plus en plus reconnue et qu'il faut concilier les questions de propriété intellectuelle avec les préoccupations des détenteurs de savoirs traditionnels. Les débats ont montré que les communautés autochtones et les détenteurs de savoirs traditionnels ont beaucoup à apporter en termes d'innovation et d'expression créatrice. Ils souhaitent donc, comme les détenteurs de n'importe quel autre type de propriété intellectuelle, que leurs innovations soient protégées. C'est pourquoi, la délégation américaine estime que la mise en _uvre de l'Accord sur les ADPIC offre à tous des opportunités pour tirer parti de cette richesse. Ces deux jours de réunion ont permis de proposer des solutions et de soulever des questions comme la définition, la propriété, l'objet et le droit des savoirs traditionnels. Aux États-Unis, les personnes concernées ont également dû s'efforcer de résoudre certaines de ces questions. En particulier, une loi relative aux droits des créateurs d'artisanat indien a été votée. Les sociétés américaines s'efforcent de trouver des solutions novatrices au partage des bénéfices.
52. Le représentant du Mali a déclaré que son gouvernement est conscient de l'importance que revêt la protection de la propriété intellectuelle dans tous les domaines en tant que facteur de développement. La loi sur le droit d'auteur de 1984 protégeait déjà certains aspects des savoirs traditionnels tels que les expressions du folklore. Cette réunion constitue une première étape vers un nouveau système qui, bien que nécessaire, pose néanmoins quelques problèmes. La délégation malienne en voit deux en particulier : la définition des savoirs traditionnels en tant qu'élément de propriété intellectuelle et le travail de documentation à effectuer.
53. Le représentant du Maroc a souligné que, pour sa délégation, les savoirs traditionnels sont l'un des éléments les plus importants du fondement de la culture nationale. Au Maroc, les lois ont tenu compte de cet aspect, essentiellement en protégeant le folklore en tant que "domaine public payant". Un projet de loi sur le droit d'auteur étend actuellement ce traitement aux expressions du folklore. La délégation marocaine est toutefois consciente qu'il ne s'agit là que de solutions préliminaires qui n'empêchent pas le Maroc de soutenir les efforts entrepris par l'OMPI pour rechercher les solutions adaptées à la protection des savoirs traditionnels. C'est pourquoi, la délégation marocaine suit avec grand intérêt les débats sur ce thème qui se déroulent sous les auspices de l'OMPI.
b) Déclarations des représentants des détenteurs de savoirs traditionnels
54. Le représentant du National Institute for Pharmaceutical Research and Development (NIPRD) du Nigéria a fait une communication écrite dans laquelle il relate l'expérience du NIPRD en ce qui concerne la collaboration entre détenteurs et utilisateurs de savoirs médicaux traditionnels. Il a souligné que le premier aspect dont il faut tenir compte est l'instauration d'un climat de confiance et de crédibilité, conditions essentielles pour que les deux parties puissent travailler ensemble. L'accord sur lequel le NIPRD fonde d'ordinaire cette collaboration place clairement les détenteurs devant leurs responsabilités, à savoir : l'obligation de divulguer la recette dans son intégralité; le devoir de réserve vis-à-vis des tiers; le droit de continuer à pratiquer leurs savoirs. L'utilisateur doit, quant à lui, soumettre les échantillons qui lui sont livrés aux études types de recherche-développement en vue d'établir leur innocuité et leur efficacité, puis il doit informer le détenteur, par écrit, de tous les résultats obtenus. Les utilisateurs doivent déposer une demande de brevet qui, si elle est acceptée, leur permet de rentrer dans leurs frais. Dans son exposé, le représentant du NIPRD a décrit les accords en détail et donne également quelques exemples de succès obtenus dans l'élaboration de nouveaux médicaments et l'obtention d'une protection par brevet. Il a noté que l'autorisation d'exploitation commerciale de produits pharmaceutiques soulève quelques problèmes pratiques relatifs à la nécessité de procéder à des essais cliniques d'efficacité et d'innocuité. L'expérience du NIPRD démontre essentiellement la volonté du gouvernement nigérian de reconnaître l'importance des savoirs médicaux traditionnels dans le pays.
55. La représentante de la Organización National Indígena de Colombia (ONIC) a déclaré que même si l'Organisation qu'elle représente travaille avec une frange très représentative de la population autochtone de la Colombie, il est nécessaire de disposer d'un cadre dans lequel tous les détenteurs de savoirs traditionnels puissent se rencontrer. En fait, la question des savoirs traditionnels est très complexe et en Colombie elle se situe à plusieurs niveaux. Une partie de ces savoirs est détenue par toute la communauté et une autre par une partie de la communauté. Certains sont aussi des détenteurs de savoirs traditionnels spécifiques tels que les médecins et les sages-femmes. D'autres formes de savoirs sont détenues par des familles ou des groupes particuliers. Il peut donc être difficile d'élaborer un procédé d'enregistrement couvrant tous les domaines des savoirs traditionnels. L'intervenante a souligné que très souvent, le concept de propriété intellectuelle se concilie mal avec celui de savoirs traditionnels parce que la notion de propriété évoque l'appropriation. Cependant, lorsqu'il s'agit de la vie, d'un animal, d'une plante ou d'un être humain, l'appropriation ne peut être conçue dans ce sens. L'intervenante a ensuite présenté un document résumant les rapports entre savoirs traditionnels et conservation de la biodiversité et retraçant les efforts consacrés à la formation et au renforcement des capacités dans ce domaine.
56. La représentante de Transmission du patrimoine, en Suisse, a raconté sa propre expérience en matière de médecine traditionnelle et d'utilisation de plantes naturelles. Elle a notamment évoqué les efforts déployés pour créer un centre, situé dans la région du Valais en Suisse, consacré à la transmission des savoirs médicaux traditionnels.
57. Le représentant du Groupe de recherches sur la médecine traditionnelle en Afrique du Sud, de l'Université du Cap a déclaré que la mission du groupe qu'il représente consiste à mener des recherches dans le domaine de la médecine traditionnelle et à introduire ce type de science dans les universités sud-africaines afin de stimuler l'intérêt des jeunes chercheurs pour ce sujet; à conserver ces données précieuses; et, surtout, à travailler en étroite collaboration avec les praticiens traditionnels, en favorisant les échanges fructueux, dans le but d'améliorer la qualité de vie des populations. L'objectif du groupe est de mener des recherches réellement adaptées aux besoins du pays et de ses habitants, de faire reconnaître la valeur de la pharmacopée traditionnelle et de rendre aux praticiens traditionnels et à la médecine traditionnelle le respect qu'ils méritent. Le groupe souhaite collaborer étroitement avec les praticiens traditionnels dans plusieurs domaines, en particulier pour les questions relatives aux soins de santé primaires, car le rôle des praticiens traditionnels est reconnu au sein de la population. Le groupe a admis le besoin de reconnaissance et de protection, par le gouvernement, des soins et de la pharmacopée traditionnels, ce qui est réalisable. Les praticiens traditionnels n'ont pas besoin d'être formés par quelqu'un accomplissant le travail à leur place, mais d'être formés de manière à se suffire à eux-mêmes. Les praticiens traditionnels ont aussi besoin d'un système d'enregistrement de leur pharmacopée et de sa prise en compte dans les mesures de réglementation des médicaments au niveau national. L'intervenant a rappelé quelques initiatives visant la conservation et la protection de la pharmacopée traditionnelle, telles que l'organisation de plusieurs ateliers en collaboration avec les praticiens traditionnels, la publication d'un livre sur les soins de santé primaires traditionnels et la préparation, par le Ministère des arts, de la culture, de la science et de la technologie, d'une charte sur la protection des savoirs et des arts traditionnels. Par l'intermédiaire du Ministère de la santé et du Conseil de réglementation des médicaments, le gouvernement a formé un comité de la médecine alternative qui, à l'heure actuelle, essaie de procéder au recensement de la pharmacopée traditionnelle. Avec l'aide du gouvernement, le Groupe de recherches sur la médecine traditionnelle en Afrique du Sud est également en train de mettre en place un Centre de référence national sur la pharmacopée traditionnelle. L'intervenant a reconnu qu'il y a des problèmes auxquels il est difficile de trouver une solution : tout d'abord instaurer et maintenir la confiance; la gestion et l'attribution des droits posent aussi problème, comme par exemple la répartition des redevances et des droits d'auteur. L'intervenant a également signalé les efforts consentis par son groupe pour mettre au point de nouveaux médicaments sur la base de l'information recueillie auprès des praticiens traditionnels. Il a terminé en évoquant le travail de son groupe dans d'autres domaines, notamment la collaboration avec le South African Museum.
58. Le représentant du Comitê Intertribal - Memória e Ciência Indígena (ITC), au Brésil, a déclaré que les savoirs traditionnels représentent, pour les peuples autochtones, une forme de richesse qu'ils ne transmettent pas contre de l'argent. Un accord est simplement passé entre peuples autochtones en vue d'échanger des informations leur permettant d'assurer leur survie. Il est en outre très important de souligner que les savoirs traditionnels sont associés à la protection de l'environnement. Les peuples autochtones essaient d'établir quelques règles, de passer un engagement éthique afin de réguler l'accès du monde occidental aux savoirs traditionnels. Les machines et laboratoires occidentaux permettent d'acquérir l'information, les connaissances et la sagesse, mais pour les peuples autochtones, les savoirs traditionnels représentent une force que les machines ne peuvent ébranler. Elles peuvent les tuer, mais cela signifierait la fin de l'humanité. Les peuples autochtones ont la garde de ces savoirs. Les gouvernements se sont engagés à délimiter les frontières des territoires des peuples autochtones, ce qui doit être fait. C'est le seul moyen d'assurer non seulement la survie des peuples autochtones mais aussi celle de l'environnement ainsi que la protection des éléments naturels sur ces territoires. Il faut comprendre que les peuples autochtones ont toujours mis en _uvre des techniques de développement saines et axées sur l'autosuffisance. L'orateur a conclu en invitant toutes les parties prenantes aux savoirs traditionnels à échanger des données en vue d'amorcer l'établissement de nouvelles règles. Elles ne doivent pas rester dans ce qui ressemble à un labyrinthe. Elles doivent en émerger et s'engager ensemble sur une route droite, non seulement en tant que source unique de sagesse, mais aussi comme partie d'un mouvement scientifique général destiné à protéger la terre et ses habitants.
59. La représentante du Centro de Culturas Indias, au Pérou, a brièvement commenté la proposition de régime de protection présentée par la représentante du Pérou. Elle s'est inquiétée de l'attitude prédatrice de l'industrie pharmaceutique ou d'autres industries à l'égard de la biodiversité. Elle s'est aussi demandée si les savoirs traditionnels transformés par la technologie occidentale peuvent bénéficier d'une protection et a appelé à une protection s'appliquant aux innovateurs traditionnels actuels et non pas seulement aux savoirs traditionnels dans un sens statique, en tant que concept dépassé. L'intervenante a poursuivi en proposant la création d'une instance internationale où les gouvernements et les peuples autochtones pourraient procéder à des échanges de vues. En outre, l'OMPI doit étudier la possibilité de définir une politique internationale de protection des savoirs traditionnels étant donné que les législations nationales, aussi élaborées soient-elles, se révèlent insuffisantes.
60. Le représentant de Indigenous Peoples Biodiversity Network (IPBN), au Pérou, a déclaré qu'à son sens, l'objectif de la table ronde est de favoriser la promotion et la protection des savoirs autochtones qui doivent être respectés dans leur ensemble. Cet aspect global doit être pris en compte de sorte que toute régulation future ne se limite pas à l'utilisation des savoirs traditionnels auxquels la société accorde une valeur économique. L'intervenant a souligné qu'il est important, en adoptant des mesures de protection, de ne pas établir de distinction entre les savoirs parce que certains savoirs, qui couvrent plusieurs formes d'expression telles que la musique ou les plantes médicinales, sont étroitement liés dans certaines cultures. Accorder une place importante aux brevets ou à d'autres modes de protection par la propriété intellectuelle peut remettre en question cette unité. La législation doit respecter l'intégrité culturelle des peuples autochtones. D'une certaine manière, les systèmes juridiques doivent renforcer les liens sociaux et culturels dans les communautés traditionnelles de manière à assurer leur continuité. Il est en particulier nécessaire de respecter, autant que possible, la conception cosmique autochtone afin que ces communautés puissent directement tirer parti de ces savoirs grâce à des mesures d'incitation compatibles avec les cultures locales. L'intervenant a conclu en insistant sur le besoin urgent de former les détenteurs de savoirs traditionnels à la protection de ces savoirs par la propriété intellectuelle.
61. Le représentant du Department on Political and Legal Issues of Mejlis of Crimean Tatar People of Ukraine a souhaité faire part d'une expérience très négative en ce qui concerne l'utilisation ou peut-être la destruction des savoirs traditionnels en Crimée. Il a déclaré que faute d'un cadre juridique adéquat protégeant les savoirs traditionnels et les détenteurs de ces savoirs, l'État, par ses changements de politique et d'orientation dans le domaine culturel, peut détruire l'héritage culturel des peuples autochtones. Il a cité comme exemple les livres d'histoire qui reflètent nécessairement le point de vue officiel, étant donné qu'ils sont publiés par l'État, et une campagne de lutte contre l'alcool qui a entraîné l'arrêt de la production traditionnelle de certains types de vinaigres par des communautés locales. Ces exemples illustrent la nécessité de mettre en place un cadre réglementaire garantissant aux détenteurs de savoirs traditionnels l'accès, sur une base juridique, à ces savoirs.
c) Déclarations de représentants d'organisations intergouvernementales et non gouvernementales et de particuliers
62. Le représentant de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) a déclaré que l'UNESCO, eu égard à l'étendue de ses compétences, est très étroitement impliquée dans toutes les activités liées au patrimoine culturel traditionnel. Il ne souhaite pas évoquer les différents domaines dans lesquels l'Organisation a joué un rôle actif à cet égard, mais aimerait rappeler un événement marquant récent, à savoir la Conférence mondiale sur la science qui s'est tenue du 6 juin au 1er juillet 1999 à Budapest (Hongrie). La question des savoirs et des sciences traditionnels figurait au programme de cette réunion. Ces thèmes ont fait l'objet de débats et la résolution finale contient cinq recommandations sur les savoirs traditionnels, en vue du futur programme de travail. Ces recommandations ont principalement pour objet d'appeler les États à promouvoir les savoirs traditionnels, à les renforcer et à les développer. Cependant, les savoirs traditionnels ne devraient pas seulement être considérés comme un centre d'intérêt ou un apport pour la science, mais comme des éléments décisifs du développement des peuples concernés. L'UNESCO, en collaboration avec l'OMPI, participe à la protection de la propriété intellectuelle et des savoirs traditionnels. Les deux organisations ont une vaste expérience dans ce domaine et mènent des études sur le folklore et la culture populaire depuis des décennies. Les recherches ont démontré que la protection du patrimoine culturel révèle deux choses. D'une part, le patrimoine doit pouvoir être identifié pour être préservé en tant qu'élément de l'histoire des nations et, d'autre part, le patrimoine culturel tel qu'il est utilisé dans la vie quotidienne à l'heure actuelle doit être protégé contre toute utilisation illicite et frauduleuse. Vu les risques existants dans ce domaine, l'UNESCO et l'OMPI se concentrent sur la protection juridique des expressions de la culture traditionnelle et populaire et sur sa préservation. Entre 1973 et 1982, les organisations ont rassemblé des juristes et d'autres spécialistes afin de déterminer la nature du patrimoine, de déterminer la meilleure manière de le protéger ce qui doit réellement être protégé. Un patrimoine commun de l'humanité a été défini, qui faisait à l'époque l'objet d'une utilisation frauduleuse et abusive. Un moyen juridique de protéger le patrimoine à l'heure actuelle est de créer un système garantissant une certaine forme de protection. À l'époque, les deux organisations ne s'intéressaient qu'aux aspects artistiques des savoirs traditionnels, à savoir les expressions qui ont trait à la musique, à la poésie, à la littérature populaire et aux arts. Les débats ont débouché sur l'élaboration de la loi type de 1982 par l'OMPI et l'UNESCO. Le texte regroupe de très nombreuses questions qui ont été examinées et expliquées, et pour lesquelles certaines solutions proposées peuvent servir de base à une action future. L'autre aspect, à savoir la conservation et la préservation du patrimoine, est envisagé à l'initiative de l'UNESCO dès 1989, lorsque la Conférence générale de l'UNESCO adopte une recommandation sur la sauvegarde de la culture traditionnelle et populaire. Depuis lors, l'UNESCO encourage ses États membres à adopter un système fiable permettant d'identifier et de protéger le patrimoine national. D'importants travaux ont été réalisés en ce sens. En 1999, plusieurs réunions se sont tenues dans diverses régions du monde, en Amérique latine, en Asie et en Afrique, au cours desquelles des débats ont eu lieu sur différents aspects des savoirs traditionnels. On est parvenu aux conclusions suivantes. S'agissant des aspects de propriété intellectuelle des savoirs traditionnels qui touchent aux arts, il est nécessaire d'instaurer un système similaire à celui du droit d'auteur, et la loi type de 1982 pourrait constituer une base de départ à cet égard. S'agissant des savoirs traditionnels, il est envisagé de déterminer quels sont, dans le système de propriété intellectuelle, les aspects qui devraient relever de cette nouvelle catégorie. Cela permet d'identifier plusieurs approches et au cours du prochain exercice biennal, l'UNESCO va tenter d'aider les États membres à mettre en place des systèmes nationaux adaptés à la réalité de leur situation en intégrant les deux aspects de la protection du patrimoine : d'une part, l'identification et la protection du patrimoine, et d'autre part, la création d'un système juridique de protection des diverses formes d'exploitation de ce patrimoine tenant compte d'un juste équilibre d'intérêts entre les innovateurs et les peuples qui utilisent les savoirs.
63. La représentante de la Fédération internationale des conseils en propriété industrielle (FICPI) a reconnu que les droits de propriété industrielle et plus particulièrement les brevets, pour lesquels certaines conditions doivent être remplies, comme la nouveauté, ne constituent pas le bon mécanisme de protection des savoirs traditionnels. Souvent, les savoirs traditionnels ne répondent pas au critère de nouveauté. De plus, certains savoirs traditionnels, comme l'exploitation de certaines plantes, peuvent être connus dans plusieurs pays, ce qui peut poser des problèmes. Par conséquent, il est encourageant d'entendre le récit d'autres expériences, comme celle des Philippines, où les droits de propriété industrielle et le droit coutumier peuvent coexister. Selon la représentante, c'est la bonne manière d'aborder la question très importante des savoirs traditionnels. Les brevets permettent au propriétaire d'empêcher les tiers d'utiliser une invention à des fins commerciales. Ce point est très important. Seule l'exploitation commerciale est interdite. Toute personne peut faire des expériences sur une invention brevetée et la perfectionner. De plus, d'autres lois nationales peuvent tout à fait interdire l'utilisation d'une invention brevetée. Par exemple, l'utilisation d'inventions qui enfreignent des lois relatives à l'environnement ou d'autres lois, comme les lois coutumières, peut être exclue. Même si la création et l'utilisation de droits de propriété industrielle peuvent se révéler onéreuses, la représentante de la FICPI a suggéré d'encourager les pays en développement à élaborer des lois de propriété industrielle adaptées ainsi que d'autres lois de protection des savoirs traditionnels. Dès l'existence d'une législation efficace sur la propriété industrielle, le lien entre les inventions, les investissements et les entreprises se fera de lui-même. L'histoire révèle que les lois de propriété industrielle adaptées stimulent l'inventivité et aident à diriger l'intérêt des inventeurs et des entrepreneurs vers des inventions, et qu'un plus grand nombre d'inventions sont créées lorsqu'il existe des lois de propriété industrielle adaptées et fiables. Selon la théorie économique proposée par R. W. Fogel et D.C. North, lauréats du prix Nobel en 1993, les lois efficaces, y compris les lois de propriété industrielle, sont considérées comme une explication de la richesse de certains pays. Cette richesse ne provient pas du statut politique d'un pays, ni même des ressources nationales qui permettent un bon rendement économique, mais plutôt de lois efficaces, fiables et prévisibles. Ainsi, il peut s'avérer très important pour tous les pays d'avoir des lois de propriété industrielle adaptées et d'autres lois nationales, par exemple pour la protection des savoirs traditionnels. La représentante de la FICPI espère que l'OMPI aidera ses membres à adopter des lois de propriété industrielle n'allant pas à l'encontre du droit coutumier afin de protéger les savoirs traditionnels.
64. Le représentant du Conseil international des traités indiens a annoncé que l'objectif fondamental de l'Organisation est de lutter pour l'élaboration et l'application de politiques et de mesures légales permettant aux peuples autochtones de maintenir, de recréer, de développer, de programmer et de transmettre aux générations futures, l'ensemble de leur patrimoine culturel sous toutes ses formes particulières et spécifiques sans ingérence extérieure d'aucune sorte. Cependant, l'existence de garanties et de mesures légales et l'adoption de politiques permettant aux peuples autochtones de continuer à vivre sur leur terre, grâce et avec leur terre est une condition sine qua non pour qu'ils puissent mettre en _uvre en toute liberté leurs propres politiques de développement dans le respect de leurs coutumes et de leurs traditions. Cette lutte représente à la fois un rêve pour les peuples autochtones et quelque chose dont ils veulent réussir la mise en _uvre. Cependant, elle se déroule dans un environnement discriminatoire où les contributions que les peuples autochtones ont apportées et continuent d'apporter à la société sont niées. Cela signifie que la science, la technologie et les formes d'art indigène ont été sous-évaluées et que les savoirs traditionnels des peuples autochtones ont été volés et détournés. Sur le plan juridique, le Conseil international des traités indiens considère que, tout d'abord, l'alinéa 2 de l'article 27 de la Déclaration universelle des droits de l'homme est important. L'article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques est une autre disposition importante, de même que l'interprétation qu'en fait la Commission des droits de l'homme. Parmi les autres instruments, on relève : le cinquième paragraphe de l'introduction de la Déclaration des principes de la coopération culturelle internationale adoptée par l'UNESCO; l'esprit et la lettre de la Convention sur l'élimination de la discrimination raciale adoptée par les Nations Unies; l'esprit et la lettre de la Convention 169 de l'OIT; le raisonnement juridique et philosophique qui sous-tend le projet de Déclaration sur les droits des peuples autochtones, actuellement examiné par l'ONU; et enfin les dispositions pertinentes de l'Agenda 21, en particulier le chapitre 26, et la Convention sur la diversité biologique. Selon le Conseil international des traités indiens, ces instruments précisent la demande des populations autochtones en vue d'une reconnaissance à titre correctif de leurs formes particulières et spécifiques de propriété intellectuelle. Le représentant déclare que le Conseil international des traités indiens a donné son accord à la déclaration élaborée par des représentants et des organisations de peuples autochtones le 25 juillet 1999 et l'a signée. Cette déclaration s'intitule "Non aux brevets sur la vie" et le représentant souhaite qu'elle fasse partie intégrante de sa propre déclaration. Il propose que l'OMPI entreprenne des activités visant à apporter une assistance technique aux peuples autochtones pour leur apprendre à utiliser les mécanismes existants en matière de droits de propriété intellectuelle et favoriser la reconnaissance des savoirs traditionnels dans des domaines comme la science et la technologie. Toute autre discussion ou norme législative sur ces questions doit tenir compte du fait que les peuples autochtones demandent une garantie établissant qu'ils peuvent se réserver le droit de ne pas communiquer ou de ne pas partager certains aspects ou certaines parties de leurs savoirs traditionnels.
65. La représentante de la fondation Tebtebba (Indigenous Peoples' International Centre for Policy Research and Education), des Philippines, a déclaré que, selon son organisation, les droits et obligations des États membres font l'objet d'une grave contradiction entre l'Accord sur les ADPIC et la Convention sur la diversité biologique, notamment entre l'article 8.j) de la Convention sur la diversité biologique et l'article 27.3.b) de l'Accord sur les ADPIC. L'article 8.j) lance un appel aux gouvernements pour qu'ils respectent, préservent et maintiennent les connaissances, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales qui ont trait à la conservation de la diversité biologique, et encouragent le partage équitable des avantages découlant de l'utilisation de ces connaissances. Par ailleurs, l'article 27.3.b) de l'Accord sur les ADPIC accorde une légitimité aux droits de propriété privée en prévoyant des droits de propriété intellectuelle sur les formes de vie et des processus visant à modifier les différentes formes de vie. Mais les droits en question sont destinés aux particuliers, aux sociétés et aux gouvernements, pas aux peuples autochtones et aux communautés locales. Il a été demandé aux gouvernements de modifier leurs législations nationales sur les droits de propriété intellectuelle pour permettre la protection par brevet de micro-organismes, de procédés non biologiques et microbiologiques. Les gouvernements de nombreux pays en développement admettent eux-mêmes l'existence d'une incompatibilité et, en fait, ils ont déjà formulé des propositions dans le cadre de l'OMC sur la nécessité de rendre les deux accords compatibles, propositions qui figurent dans le projet révisé du texte ministériel sur la préparation de la conférence ministérielle de l'OMC de 1999. La représentante de la fondation Tebtebba s'inquiète de constater que la table ronde semble organisée de manière à renforcer le mandat de l'OMPI visant à promouvoir et à mettre en _uvre le régime dominant des droits de propriété intellectuelle et à affirmer que ces derniers constituent le seul moyen valable de protéger les savoirs traditionnels. Elle a réaffirmé que tout débat sur les savoirs traditionnels et indigènes doit faire référence aux articles du projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones, en particulier aux articles 24, 25, 29 et 26. Ces articles établissent clairement les droits des peuples autochtones sur leurs savoirs, leurs innovations et leurs pratiques, que l'on désigne aussi sous le concept de patrimoine intellectuel et culturel. Ces droits ne peuvent faire l'objet d'un débat indépendamment de la question des droits des peuples autochtones sur leurs territoires et leurs ressources. La fondation Tebtebba voit un problème dans le fait que, d'une part, des efforts sont déployés pour protéger les droits des autochtones et les savoirs traditionnels, par exemple avec la Convention sur la diversité biologique et l'engagement international de la FAO, et que, d'autre part, des accords internationaux comme l'Accord de l'OMC compromettent ces efforts. Cela se produit aussi au niveau national, comme c'est le cas aux Philippines. Ainsi, les perspectives ne sont pas très bonnes s'agissant de la lutte des peuples autochtones pour obtenir des droits sur leurs savoirs autochtones et leur patrimoine culturel, en raison des intérêts économiques et politiques puissants qui motivent les efforts pour entraver cette lutte. Dans ce contexte, la représentante de la fondation Tebtebba pense que l'OMPI et les gouvernements, ainsi que d'autres organisations internationales, doivent relever le défi qui consiste à garder l'esprit ouvert et à faire preuve de plus d'audace dans la recherche d'autres moyens de protection et de promotion des droits autochtones et des savoirs traditionnels au-delà du régime dominant des droits de propriété intellectuelle. L'OMPI ne devrait pas insister pour imposer le régime des droits de propriété intellectuelle afin de protéger les savoirs des peuples autochtones. La question doit cependant être étudiée et développée en collaboration avec les peuples autochtones et les autres détenteurs de savoirs traditionnels. Toute tentative de négociation d'un cadre multilatéral de protection des savoirs indigènes et traditionnels doit prendre en compte les pratiques indigènes dans le droit coutumier qui sont utilisées pour protéger et alimenter les savoirs indigènes aux niveaux local, national et régional. La représentante de la fondation Tebtebba souhaite présenter un document rédigé au cours de la réunion du groupe de travail, qui s'est tenue à Genève en juillet 1999. Ce document regroupe quelques propositions de révision de l'article 27.3.b) de l'Accord sur les ADPIC qui reprennent certaines des propositions présentées à l'OMC par les pays africains, Cuba, le Honduras et d'autres pays d'Amérique latine. Enfin, elle propose que l'OMPI réalise des études, en collaboration avec d'autres organisations concernées, pour formuler des recommandations sur les moyens les plus appropriés de reconnaître et de protéger les savoirs traditionnels, les pratiques médicales et les expressions du folklore des communautés autochtones et locales. Elle propose aussi que le programme d'assistance technique de l'OMPI englobe les détenteurs de savoirs traditionnels. Tout futur mécanisme de protection des savoirs traditionnels doit prévoir un consentement éclairé préalable. En outre, les populations autochtones doivent recevoir un dédommagement pour le détournement de leurs savoirs.
66. La représentante de la Pauktuutit Inuit Women's Association (association des femmes inuits Pauktuutit), du Canada, a annoncé que son organisation représente toutes les femmes inuits du Canada. Cette association encourage la participation pleine et égale des femmes inuits aux niveaux régional et national de la communauté. Les inuits vivent essentiellement dans 53 communautés, dispersées dans le vaste tiers nord du Canada. La culture riche et extraordinaire des inuits est reconnue dans le monde entier pour son adaptation inventive à un environnement arctique hostile. Cependant, les préoccupations et questions que la représentante souhaite aborder ne sont pas réservées aux inuits mais rejoignent les préoccupations d'autres femmes autochtones aux Amériques et celles de tous les peuples autochtones du Canada. Son organisation a eu l'occasion de faire entendre les préoccupations des femmes inuits dans un certain nombre d'enceintes nationales et internationales. Mieux encore, en tant que membre des Indigenous Women of the Americas (femmes autochtones des Amériques), elle a participé aux efforts déployés pour promouvoir la compréhension des femmes autochtones d'Amérique du nord, d'Amérique centrale et d'Amérique du sud en ce qui concerne les droits juridiques et économiques associés à la commercialisation de leurs créations artistiques. En tant que membre de l'Indigenous Peoples Caucus (groupe des peuples autochtones) du groupe de travail canadien à composition illimitée sur l'article 8.j), l'organisation a envoyé des délégués à diverses réunions de l'Organisation des Nations Unies sur la Convention sur la diversité biologique et participé à la promotion de la mise en _uvre de cette convention au Canada. En outre, elle s'est vue accorder le statut consultatif auprès du Conseil économique et social de l'Organisation des Nations Unies. Depuis 1994, l'organisation travaille avec des centaines de femmes inuits vivant dans les communautés pour promouvoir les modèles et motifs artistiques des costumes inuits traditionnels. Ceci consiste à transmettre les méthodes traditionnelles de couture des femmes plus âgées aux femmes plus jeunes pour la production des vêtements traditionnels contemporains faits à la main et destinés aux consommateurs du Sud. Ceci devrait offrir aux femmes inuits de solides possibilités économiques, une indépendance financière et un contrôle sur leurs produits, tout en respectant l'intégrité culturelle des communautés inuits. Cependant, si les droits de propriété intellectuelle des femmes inuits ne sont pas précisés et protégés, ces créations seront exploitées par des tiers comme les autres produits inuits que sont le kayak, la parka et le kamik. Ce processus se poursuit. Récemment, une créatrice de mode new-yorkaise s'est aventurée dans les Territoires du Nord-Ouest pour acheter des vêtements inuits traditionnels avec l'intention d'incorporer ces dessins et modèles dans ses propres créations de mode; après avoir assisté aux débats qui se sont déroulés hier et aujourd'hui, la représentante est impatiente de voir quelle action spécifique son organisation peut entreprendre dans l'immédiat. Elle a annoncé que le groupe de travail à composition illimitée a déterminé un certain nombre de points d'intérêt ou d'études de cas qui traitent de divers thèmes relatifs à la diversité biologique en relation avec l'article 8.j), dans le contexte du Canada. Ces thèmes couvrent la foresterie, l'agriculture, le milieu aquatique, les droits, les politiques et la législation en matière de propriété intellectuelle et des principes directeurs d'ordre éthique. Le projet Pauktuutit sur les droits de propriété intellectuelle sera utilisé comme une étude de cas portant sur les questions, les procédures et les obstacles liés à la protection juridique d'un produit spécifique, l'amauti, un manteau de femme inuit conçu pour porter un bébé ou un jeune enfant. Ce produit est idéal pour un projet de cette nature car il a trait aux savoirs traditionnels et aux expressions culturelles inuits. Ce projet concerne la récolte et l'utilisation traditionnelles des ressources ainsi que le rôle des femmes inuits. En outre, il aborde les questions de la commercialisation d'un produit traditionnel et la manière dont il influe sur les conditions économiques des femmes inuits modernes. La consultation des femmes inuits pourrait constituer un élément essentiel pour déterminer la meilleure façon de protéger, de commercialiser et de partager les bénéfices tirés de leurs produits, au niveau collectif. Les femmes inuits sont victimes de discrimination et ne bénéficient pas de la reconnaissance et de la rémunération économiques qu'elles méritent malgré leur participation sur un pied d'égalité aux débats portant sur l'utilisation et la protection de la propriété intellectuelle et des savoirs traditionnels. Le concept du projet a été largement appuyé dans tout le nord du pays et l'organisation est très sensible au soutien manifesté par un certain nombre d'organisations politiques inuits régionales au Canada. Les inuits ont une tradition et une connaissance orales, dont une grande partie leur appartient de manière collective et non pas individuelle. Cet aspect va à l'encontre des législations et régimes relatifs à la propriété intellectuelle en vigueur. Il est donc important que l'OMPI aborde ces questions. L'organisation souhaite exprimer sa profonde préoccupation quant à l'incapacité des régimes en vigueur à protéger les savoirs traditionnels et la propriété intellectuelle des peuples autochtones. Les événements récents survenus au Conseil des ADPIC ont mis en évidence certaines de ces préoccupations. L'article 27.3)b) ne protège pas les savoirs traditionnels et la conception des choses vivantes, l'Accord sur les ADPIC est en contradiction avec la Convention sur la diversité biologique. Par exemple, les savoirs indigènes sur la santé, l'agriculture et la diversité biologique sont susceptibles d'appropriation. Plutôt que de protéger les droits et les savoirs des peuples autochtones, cette disposition a pour objet de limiter leurs droits au contrôle et à la gestion de leur patrimoine. Pour conclure, la représentante a souligné que, d'une part, l'appui financier permettant aux représentants des populations autochtones de continuer à participer aux réunions internationales et, d'autre part, le fait qu'ils ne soient pas représentés au sein du personnel du Bureau international de l'OMPI sont des points très importants pour l'Organisation.
67. Le représentant du Groupe de travail national intitulé Propriété intellectuelle et Groupe de travail sur l'environnement en Australie Occidentale, d'Australie, s'exprimant au nom de l'Aboriginal and Torres Strait Islander Commission (ATSIC, Commission insulaire des autochtones et du Détroit de Torres), de la Foundation for Aboriginal and Islander Reseach Action (FAIRA), du National Aboriginal and Torres Strait Islander Legal Services Secretariat (NAILSS), du National Secretariat of Torres Strait Islander Organizations (NSTSIO), du Groupe de travail national sur la propriété intellectuelle et du Groupe de travail sur l'environnement en Australie Occidentale, a annoncé que les délégués autochtones australiens ont déclaré au cours d'un atelier sur les savoirs traditionnels et la diversité biologique qui s'est tenu à Adélaide (Australie) les 25 et 26 septembre 1997, que "les autochtones australiens (peuples aborigènes et insulaires du Détroit de Torres) sont tout à fait conscients de l'état critique de la diversité biologique en Australie et désirent jouer un rôle actif dans son exploitation et sa gestion. Nous avons le droit de prendre part à l'exploitation et à la gestion de la diversité biologique en Australie parce que nous n'avons jamais cédé nos droits sur la terre, la mer et ses ressources. Nous pouvons contribuer à l'exploitation et à la gestion de la diversité biologique en Australie par une pratique continue de notre culture et un accès négocié à nos savoirs sur la diversité biologique". Les lois protégeant les innovations au moyen de droits de propriété intellectuelle doivent, selon les organisations autochtones qu'il représente, s'adapter à la nature évolutive des savoirs traditionnels et aux besoins de la population dont elles sont censées protéger les droits. Au contraire, il arrive plus souvent que l'on dise aux peuples autochtones de faire des concessions sur leurs droits ou de modifier leurs savoirs traditionnels pour obtenir la protection des lois sur les droits de propriété intellectuelle. En d'autres termes, il semble que ce soient les peuples autochtones qui doivent changer pour se conformer à la loi et non pas les lois qui changent pour se conformer aux peuples autochtones. Selon le représentant, les peuples autochtones doivent avoir un système d'éducation leur permettant de transmettre eux-mêmes les savoirs indigènes aux générations futures. Ils doivent avoir le droit de décider quels sont les savoirs traditionnels qui peuvent, et ceux qui ne peuvent pas, faire l'objet d'une exploitation commerciale. Ces droits devraient être exercés par les peuples autochtones eux-mêmes plutôt que par un gouvernement ou un système judiciaire. De plus, les peuples autochtones doivent avoir le droit de rattacher les savoirs traditionnels et l'exercice de ces savoirs à des zones géographiques constituées de terre, de mers et de territoires. Il s'agit en fait d'un droit dont les peuples autochtones demandent toujours la reconnaissance juridique au niveau mondial. Les droits de propriété intellectuelle sur les savoirs traditionnels doivent être fondés sur la simple vérification que les peuples autochtones en tant que communauté ont reconnu la continuité de ces savoirs. Les peuples aborigènes et insulaires du Détroit de Torres continueront à demander la reconnaissance de leur propriété sur la terre, les mers et les ressources qui en découlent ainsi que le droit d'être indemnisé pour leur utilisation. Le droit de protéger les systèmes de savoirs autochtones ne doit pas être considéré comme représentant une menace ou un défi à l'encontre des organismes de gestion ou des fondements de la connaissance scientifique. Il devrait plutôt être vu comme alimentant et élargissant les structures de gestion collective et les connaissances écologiques de base. Le représentant a ajouté que la loi ne doit pas craindre les savoirs traditionnels des peuples autochtones. Les peuples autochtones doivent être convaincus que leurs savoirs traditionnels n'ont rien à craindre des lois relatives aux droits de propriété intellectuelle. Ils attendent toujours que les juristes, les universitaires, les gouvernements et les médias leur demandent la permission d'utiliser leurs savoirs traditionnels. Enfin, l'intervenant a réaffirmé la promesse faite par les organisations qu'il représente qu'elles continueront à lutter pour la reconnaissance et la protection des droits des peuples autochtones sur leurs savoirs traditionnels, leurs terres et leurs ressources. Il a demandé à l'OMPI de contribuer à la promotion des droits des peuples autochtones à l'autodétermination. Il a fait une seule recommandation, à savoir que l'OMPI nomme, en consultation avec les peuples autochtones, un expert autochtone sur la propriété intellectuelle indigène et les savoirs traditionnels.
68. Le représentant de l'Inuit Circumpolar Conference (ICC, Conférence circumpolaire inuit) a annoncé qu'il représente une organisation non gouvernementale autochtone créée en 1977, au service d'environ 150 000 inuits au Cjukotcka (Fédération de Russie), en Alaska (États-Unis d'Amérique), au Canada et au Groenland. L'ICC cherche à atteindre un certain nombre d'objectifs essentiels énoncés dans un document intitulé "The Principles and Elements for a Comprehensive Arctic Policy" (les principes et éléments d'une politique générale de l'Arctique), élaboré par l'ICC. Ces principes et éléments sont destinés à s'appliquer à l'Arctique dès aujourd'hui comme à l'avenir, puisqu'ils vont évoluer. Il a déclaré que la culture inuit est héritée des ancêtres inuits. Les anciens donnent une identité aux inuits et sont chargés de transmettre la culture et la langue. Sans eux, ce serait la perte de l'identité qui lie les inuits à travers le monde circumpolaire. Dans la société inuit, la tradition orale est le principal moyen de transmission des savoirs de génération en génération. On trouve parmi les catégories de savoirs traditionnels qui sont hérités des anciens et doivent être transmis aux jeunes, les croyances spirituelles, les coutumes et les traditions inuits, les compétences en matière de récoltes, l'histoire, les arts, la médecine et la connaissance de l'environnement arctique. En ce qui concerne la gestion et la conservation de la culture matérielle, l'organisation pense que les inuits doivent être impliqués à tous les égards, étant donné que a) les droits collectifs et individuels sur la culture matérielle des inuits doivent être respectés et protégés contre le retrait abusif, la contrefaçon, la copie ou le commerce illicite; b) la propriété culturelle doit toujours être manipulée et traitée en respectant pleinement la sensibilité et les valeurs des inuits concernés; c) les États concernés devront fournir aux inuits une assistance financière leur permettant de gérer leurs propres ressources culturelles et de concevoir et d'administrer leurs propres programmes; d) la culture et la tradition inuits doivent être conservées par l'usage et la représentation cartographique officielle des noms de lieu inuits qui ont été, et sont toujours, créés par les inuits après des générations d'utilisation et d'occupation des terres et des eaux arctiques; e) il faudra encourager les accords être entre les inuits et les musées et autres institutions qui sont en possession de la propriété culturelle inuit. En ce sens, les délais de garde, d'exposition et de retour de cette propriété pourront être déterminés de manière satisfaisante. De plus, les chercheurs et les scientifiques qui travaillent sur des questions liées à la culture inuit devront être en mesure de fournir aux inuits des copies de leurs travaux, qui devront être disponibles dans les langues inuits. Il est particulièrement important de prendre en compte les connaissances scientifiques traditionnelles des inuits lorsque l'on détermine les modalités et méthodes de recherche à employer. Il faudra offrir aux inuits et à leurs organisations la possibilité de commenter les résultats des recherches, avant qu'ils soient finalisés. Enfin, le représentant a souhaité souligner que les peuples autochtones ne doivent pas être considérés comme des mendiants, mais comme des gardiens d'une partie très importante du patrimoine mondial. C'est ce que sont les savoirs traditionnels en réalité. Il s'est félicité des projets de l'OMPI visant à évaluer les implications des savoirs traditionnels liés à la propriété intellectuelle et à accroître la formation et la sensibilisation au niveau mondial en ce qui concerne les personnes qui ont un intérêt dans les savoirs traditionnels.
69. Le représentant de l'Arctic Council Indigenous Peoples' Secretariat a fait savoir que son organisation défend les intérêts de quatre organisations de peuples autochtones arctiques, à savoir la Conférence circumpolaire inuit, le Saami Council, la Russian Association of Indigenous Peoples of the North (RAIPON) et l'Aleut International Association. L'Arctic Council est une instance gouvernementale de haut niveau, créée par huit États arctiques (Fédération de Russie, Norvège, Suède, Finlande, Danemark/Groenland, Islande, ainsi que les États-Unis d'Amérique et le Canada) en vue de coopérer dans le domaine de la protection de l'environnement arctique selon les principes du développement durable et en prenant en considération les savoirs traditionnels des peuples autochtones de l'Arctique. D'après l'intervenant, il existe un besoin urgent de protéger les droits des peuples autochtones de posséder et de contrôler leur patrimoine culturel et intellectuel. À cet effet, il a jugé absolument nécessaire d'élaborer et d'établir une convention éthique sur les droits de propriété intellectuelle aux termes de laquelle seraient reconnues diverses valeurs de propriété, y compris les droits de propriété intellectuelle des peuples autochtones. Il a estimé qu'il est de toute première importance d'inclure la reconnaissance des droits à l'autodétermination des peuples autochtones de manière à les reconnaître comme des peuples distincts possédant leur propre patrimoine culturel. Par conséquent, il a instamment invité la table ronde à recommander aux organes compétents de l'Organisation des Nations Unies d'adopter immédiatement le projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones dans sa version actuelle en vue de promouvoir la reconnaissance et la protection des droits de propriété intellectuelle et des savoirs traditionnels des peuples autochtones. Plusieurs dispositions de ce projet de déclaration sont particulièrement adéquates pour permettre aux peuples autochtones de faire valoir leurs droits sur leur propriété culturelle et intellectuelle. Il a exprimé l'espoir que ces dispositions seront sérieusement prises en considération pour adoption.
70. Le représentant du Center for Orang Asli Concerns, de Malaisie, a déclaré qu'il arrive souvent que les partisans du système de droit de propriété intellectuelle ramènent le sujet des savoirs traditionnels à une simple question matérielle, soit en attribuant une valeur à une propriété déjà définie, soit en s'intéressant uniquement aux mécanismes d'une compensation financière équitable. D'après lui, cela expliquerait peut-être le fait qu'on s'intéresse autant à la protection de la propriété intellectuelle en ce qui concerne les produits biologiques et très peu à d'autres éléments des savoirs traditionnels qui ont également besoin de protection. Pour le comprendre, il suffit de se rappeler que les savoirs traditionnels des peuples autochtones ont été qualifiés de nouvelles frontières de l'occident dans la ruée vers les ressources naturelles. Pourtant, il arrive que l'expropriation de savoirs traditionnels n'implique aucun produit commercial et ne comporte aucun gain financier pour l'expropriateur. Cependant, la perte de certains éléments de savoirs traditionnels risque d'avoir des conséquences sérieuses pour la survie de la communauté en tant que peuple distinct. À titre d'exemple, le représentant a mentionné la présentation déformée par les médias des légendes des peuples autochtones, qui est de nature à contribuer à la dilution du patrimoine culturel des minorités, à l'enrichissement du patrimoine culturel du groupe dominant, mais non des individus. Il a tenu à souligner que les questions relatives aux droits de propriété intellectuelle des peuples autochtones ne se traduisent pas en dollars perdus par la communauté ou gagnés par des gens de l'extérieur. Très souvent, elles touchent au fondement de l'autonomie et de l'identité des peuples autochtones. Étant donné que les systèmes juridiques modernes des États n'ont pas permis de garantir qu'il soit mis fin à la dépossession graduelle des peuples autochtones de leurs territoires traditionnels, son organisation n'attend pas du régime juridique actuel des droits de propriété intellectuelle qu'il prenne en considération et protège les intérêts des peuples autochtones en ce qui concerne leurs savoirs traditionnels. Il a pris note que l'OMPI est chargée de prendre les initiatives qui s'imposent en vue de garantir concrètement et de manière appropriée les droits des peuples autochtones sur leurs savoirs traditionnels. Il s'agit là d'une lourde responsabilité, mais l'orateur s'est dit confiant que l'OMPI remplira sa mission. La première mesure, cependant, qui s'impose est de reconnaître que l'actuel régime des droits de propriété intellectuelle n'est pas en mesure de garantir les intérêts des peuples autochtones et que, par conséquent, il est nécessaire d'aller au-delà de ce système et de ne pas être lié par lui.
71. La représentante des Traditional and Modern Health Practitioners Against Aids (THETA), de l'Ouganda, a déclaré que son organisation regroupe en son sein les guérisseurs et herboristes traditionnels ainsi que les praticiens de la médecine moderne de l'Ouganda. L'idée est de reconnaître que les détenteurs d'un savoir médical traditionnel ont un rôle important à jouer dans l'édification du système de santé de son pays. La représentante a ajouté que d'après l'expérience faite par son organisation, les détenteurs de connaissances médicales traditionnelles ne demandent pas de l'argent ou d'autres récompenses financières; ce qu'il demandent c'est d'être reconnus. Ils demandent que soient reconnus leur rôle et leur importance pour le développement des pays. Pour ce faire, il est nécessaire d'adapter les législations existantes aux nouvelles réalités. Par conséquent, elle a instamment demandé que des organisations intergouvernementales, telles que l'OMPI, coopèrent avec les gouvernements des États aux fins de réviser les lois qui régissent actuellement l'exercice de la médecine traditionnelle et d'établir les modalités d'identification et de documentation de la grande diversité des savoirs traditionnels.
72. Le représentant de l'Association nouvelle pour la culture et les arts populaires (TAMAYNUT-ANCAP), du Maroc, a soumis une déclaration écrite mettant l'accent sur le fait que les instruments internationaux tout comme les lois nationales en matière de propriété intellectuelle ont eu tendance à ignorer la situation spécifique des minorités que sont les peuples autochtones en les privant d'instruments juridiques qui reconnaissent leur identité culturelle et linguistique. Il a proposé plusieurs actions concrètes destinées à protéger les droits de propriété intellectuelle des peuples autochtones.
73. Le représentant de la Chambre de commerce internationale (CCI) a déclaré que son organisation représente le secteur privé industriel et commercial du monde entier, y compris des particuliers et des sociétés, grandes et petites, et qu'elle possède des comités nationaux dans tous les pays du monde. La CCI soutient depuis très longtemps la propriété intellectuelle, en fait, depuis la Convention de Paris de 1883, et elle est par conséquent tout à fait favorable au principe du respect de la propriété intellectuelle indigène. Son organisation tient beaucoup à savoir ce que cela signifie concrètement, car il ressort de la réunion que les choses sont loin d'être claires. D'autre part, il a souligné la nécessité que toutes les parties intéressées s'écoutent et essaient de se comprendre. L'objectif fondamental doit être la recherche d'un système équilibré dont les bénéfices seraient répartis de manière équitable entre les détenteurs des savoirs traditionnels, les utilisateurs, les collectivités et le public dans son ensemble. La notion de protection des droits sur les savoirs traditionnels représente un autre élément de l'équilibre visé. D'après le représentant, la question est extrêmement sensible et exige un examen minutieux, surtout dès l'instant où il est question d'autoriser l'exploitation commerciale. En ce qui concerne le domaine public, il a souligné l'importance que celui-ci revêt pour l'industrie du fait qu'il élargit la liberté commerciale et renforce la sécurité juridique. Néanmoins, certaines exceptions spécifiques mériteraient à tout le moins une discussion. Le représentant a suggéré que l'OMPI entreprenne des études pour déterminer les incidences potentielles de l'idée de domaine public sur la protection des savoirs
traditionnels et définir le genre d'exceptions qui pourraient être appropriées et réalisables. Enfin, il a fait savoir que son organisation a publié une déclaration de principe expliquant son point de vue sur les rapports entre la CBD et l'Accord sur les ADPIC et il a demandé que cette déclaration soit considérée comme partie intégrante de son intervention.
74. Mme Monica Castelo, expert juridique de l'Uruguay, a déclaré que les peuples autochtones et les communautés traditionnelles devraient avoir le droit de promouvoir l'échange de savoirs traditionnels dans les limites du possible, d'une manière acceptable pour eux et dans la mesure où cela profite au reste de l'humanité. Elle a constaté que les efforts visant à protéger les savoirs traditionnels sont animés par un sentiment d'urgence étant entendu que les systèmes de savoirs traditionnels sont extrêmement fragiles et que personne ne souhaite qu'ils subissent d'autres dommages. Elle a ajouté que des conflits risquent de survenir au sein des communautés ou entre des communautés partageant le même savoir au sujet de la répartition des redevances. Elle a proposé d'étudier d'autres moyens de rémunération matérielle ou de compensation en n'oubliant pas que des valeurs matérielles et immatérielles doivent être prises en considération.
75. Le représentant de l'Association internationale des éditeurs (AIE) s'est dit particulièrement intéressé par le débat sur les liens entre l'identité culturelle des communautés traditionnelles et la protection de leurs créations au titre de la propriété intellectuelle. D'après lui, il existe un exemple pertinent de ce lien dans l'utilisation, aujourd'hui très répandue, des modèles de tartans écossais qui représentaient traditionnellement le système clanique, détruit au XIXe siècle, des Highlands écossais. L'AIE est vivement intéressée par une documentation sur les savoirs traditionnels. Le représentant a tenu à souligner que l'OMPI se verrait confrontée aux difficultés inhérentes à l'existence de différentes versions orales, notamment en ce qui concerne l'authenticité; il s'agira de savoir ce qui mérite d'être consigné et ce qui ne le mérite pas. Ces questions exigent l'aide et les conseils d'éditeurs spécialisés. L'AIE est disposée à coopérer avec les communautés détentrices de savoirs traditionnels, de même qu'avec l'OMPI, si elles le souhaitent, dans le cadre de l'établissement d'une documentation des savoirs traditionnels en fournissant les conseils et l'assistance de spécialistes.
76. Le représentant du Iwokrama International Centre for Rain Forest Conservation and Development du Guyana a expliqué que son organisation a été créée il y a 10 ans à l'occasion de la réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth à Kuala Lumpur en 1989. Lors de cette réunion, le président du Guyana a proposé de mettre à la disposition de la communauté internationale une vaste zone de forêts vierges tropicales, à la condition que la communauté internationale soutienne la création d'un Centre international de recherche-développement au Guyana. Le centre a pour mission de démontrer comment il est possible de préserver les écosystèmes des forêts tropicales et de les utiliser de manière durable tout en contribuant de façon substantielle au développement économique, à la fois local et national. Le centre a acquis la personnalité juridique en mai 1996 et a commencé à fonctionner en juillet 1998. Il est dirigé par un conseil de fondation international et régi par une loi votée par le Parlement de la République du Guyana. En vertu de cette législation, le centre est responsable de la conservation et de la gestion des 360 000 hectares de la forêt d'Iwokrama. Aux termes des dispositions légales qui régissent le centre, la moitié à peu près de la forêt d'Iwokrama doit être conservée comme réserve naturelle stricte, tandis que l'autre moitié est considérée comme une zone d'utilisation durable. Les activités de recherche-développement du centre sont essentiellement concentrées sur cette forêt. Le centre est à la recherche de partenaires commerciaux pour une vaste gamme d'activités, y compris la bioprospection, l'écotourisme, la formation, la culture durable de produits forestiers ligneux et autres et, enfin, la commercialisation de services environnementaux en général. L'un des objectifs clés du centre est de devenir financièrement indépendant dans un délai de 10 ans pour ce qui concerne ses activités principales qui sont en grande partie fondées sur la forêt que le gouvernement et le peuple de la République du Guyana ont donnée au centre. En tête des priorités du centre figure l'élaboration de protocoles de travail et la protection des droits de propriété intellectuelle, ainsi que la promotion d'un système de partage équitable des bénéfices parmi les participants du centre. Ces participants comprennent notamment les populations qui vivent à l'intérieur et à proximité de la forêt ainsi que le public en général et le Gouvernement de la République du Guyana. Avec une aide financière du centre de recherche pour le développement international (CRDI) du Canada, le centre commence des études visant à faire la synthèse entre les enseignements du passé et les meilleures méthodes que font ressortir les expériences menées aux quatre coins du monde. L'orateur a ajouté que son organisation est en train d'établir des projets de protocoles régissant toutes ses opérations en matière de recherche, d'utilisation, de formation et de promotion. Avant d'être présenté au conseil de fondation pour adoption, les projets de protocole seront soumis pour avis à des experts juridiques et à des parties intéressées, sur les plans national et international. Il va sans dire que le centre ne considère pas que le débat sur ces questions importantes et complexes sera clos avec l'adoption de ces protocoles. Ces prochaines années, les travaux de recherche auront pour objectif principal de vérifier l'efficacité des protocoles dans l'optique des différentes parties intéressées. Étant donné la complexité des questions en jeu, le centre juge utile d'adopter une technique d'apprentissage active et de gestion souple en matière de développement, d'utilisation et de perfectionnement des protocoles. À cet égard, le centre tient à s'informer par l'intermédiaire du réseau de l'OMPI qui concerne la table ronde. De même, il souhaiterait partager l'expérience qu'il a acquise en matière de développement, de mise en _uvre, de surveillance et d'amélioration des protocoles.
77. Le représentant des National Art Development Industries of Mashrabeya, d'Égypte, a souhaité faire part aux autres participants de la table ronde d'une expérience de protection de savoirs traditionnels qui passe par la formation d'une nouvelle génération d'artisans traditionnels. Depuis plus de 20 ans, il s'occupe d'un projet de restauration et de conservation d'une maison cairote traditionnelle. Trouver des professeurs d'université comme consultants dans différentes branches spécialisées ne pose aucun problème. Ce qui fait véritablement problème, est la rareté des maîtres artisans traditionnels possédant les connaissances et l'expérience nécessaires pour restaurer une _uvre architecturale. Le style occidental prend le dessus du fait que les artisans traditionnels, en raison du rétrécissement du marché, se tournent vers le tourisme de bazar qui les encourage à confectionner des objets trouvant facilement leur place dans la valise d'un touriste qui, en règle générale, connaît peu de choses aux valeurs esthétiques des arts traditionnels. L'orateur a ajouté qu'en 1978, il a créé un institut de formation pour jeunes gens dans les arts traditionnels afin de faire naître une nouvelle génération d'artistes traditionnels capables de maîtriser les arts traditionnels en produisant des objets façonnés pour la famille égyptienne moderne et travaillant plus tard à la restauration d'anciens monuments. L'institut a commencé en 1978 avec seulement quatre maîtres artisans, installés dans un atelier occupant une seule pièce. Il applique le système d'apprentissage traditionnel, c'est-à-dire que les apprentis sont formés en travaillant directement sous la conduite des maîtres artisans jusqu'au moment où ils sont capables de réaliser des _uvres acceptables. Dès cet instant, ils forment leurs propres apprentis et ainsi de suite. Il a ajouté que l'institut occupe actuellement environ 500 personnes spécialisées dans différents arts traditionnels, tels que tournage sur bois, marqueterie, gravure sur bois, techniques d'ajustage d'objets en bois, tapisserie, arts appliqués, tissage de carpettes, ferronnerie d'art, reliure. Toutes ces techniques emploient des procédés et des modèles traditionnels afin de créer des objets de grande qualité. Parmi les succès importants de l'institut, il est à signaler que ses excellents artisans sont responsables depuis six ans de la restauration de tout un secteur d'un quartier traditionnel du Caire qui comprend quatre monuments. Le représentant a conclu en disant qu'en Égypte il est difficile de distinguer entre personnes indigènes et personnes qui ne le sont pas étant donné que les Égyptiens forment une seule collectivité culturelle depuis des milliers d'années. Par conséquent, il préférerait utiliser les termes "culture traditionnelle" plutôt que "savoirs indigènes".
78. La représentante de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a déclaré qu'elle représente une communauté de 15 États, à savoir les îles anglophones indépendantes des Caraïbes, Haïti, le Belize, qui est le membre le plus récent, en Amérique centrale, ainsi que le Guyana et le Suriname en Amérique du Sud. Bien qu'il soit exact que certains des États membres de la Communauté abritent sur leur territoire des peuples autochtones, dans de nombreux cas c'est en réalité la majorité de la population ou, à tout le moins, un important pourcentage de la population qui sont les détenteurs des savoirs traditionnels. Elle a ajouté qu'elle n'a aucune objection à l'emploi des termes "peuples autochtones" étant donné qu'elle est pleinement consciente des préoccupations qui animent ces communautés. Toutefois, son organisation demande qu'en discutant de la question, on n'oublie pas que dans certains cas, le terme "indigène" ne s'applique pas. S'agissant de l'histoire de sa région, elle souhaite soulever un second point. Les populations des Caraïbes sont les descendants de personnes qui sont venues dans la région souvent de leur propre gré, mais quelque fois contre leur volonté. Par conséquent, leurs savoirs traditionnels, bien qu'influencés par leurs ancêtres, ont été adaptés de manière à plaire aux habitants des Caraïbes et sont devenus un produit que les peuples de la région revendiquent comme leur propriété exclusive. Elle a tenu à souligner que tout effort visant à protéger les savoirs traditionnels doit rendre justice à la contribution que d'autres peuples ont apportée aux savoirs traditionnels des Caraïbes ou alors il faut prendre d'autres mesures. Avant toute décision, il est nécessaire d'approfondir l'étude de cette question.
79. Le représentant de l'Association Arc-En-Ciel, de France, a déclaré qu'il ne devrait pas être permis de s'approprier les formes de vie qui sont le patrimoine commun de l'humanité. Comme solution de rechange aux brevets, il a proposé de protéger les savoirs traditionnels au moyen d'une garantie exprimée sous forme de label, une sorte d'appellation d'origine contrôlée, qui indiquerait le territoire et serait reconnue par tout le monde. Bien qu'il ne s'agisse pas d'un brevet, ce label pourrait être déposé. Il appartiendrait à la communauté de décider si elle souhaite demander l'enregistrement. Un tel système rendrait aux détenteurs des savoirs traditionnels la possibilité de prendre les décisions appropriées quant à savoir comment protéger, utiliser et transférer leurs savoirs. En revanche, le représentant d'Arc-En-Ciel a estimé que les modifications de matériels vivants devraient être considérées comme brevetables, non seulement pour protéger les intérêts des inventeurs, mais également pour définir leurs responsabilités. Étant donné que l'OMPI a pour mission de protéger la propriété intellectuelle, il lui faut prendre une position éthique en ce qui concerne la protection des savoirs traditionnels. Mais quelle que soit cette position, les détenteurs de savoirs traditionnels devraient toujours avoir le pouvoir de décider de la manière de les transmettre et bénéficier du soutien des membres de l'OMPI dans leur choix.
80. La présidente a déclaré que la première conclusion à tirer de la table ronde est celle de l'unanimité quant au rôle dirigeant de l'OMPI dans les travaux consacrés à la place qu'occupe la propriété intellectuelle dans la protection des savoirs traditionnels. La table ronde a été très utile dans la mesure où elle a permis de consolider le travail exploratoire accompli par l'OMPI et d'élaborer des directives pour la suite des opérations. Les parties intéressées ont eu la possibilité d'un échange de vues très enrichissant, franc et instructif. Elle a ajouté que beaucoup de travail a été accompli auparavant et qu'aucune solution unique, applicable à toutes les situations ou à tous les aspects ne semble avoir été trouvée jusqu'ici. L'expérience de deux pays, les Philippines et le Pérou, est par conséquent du plus grand intérêt. Il serait intéressant de suivre l'évolution de ces expériences et d'en tirer les enseignements. Ceci étant dit, rien n'empêche d'autres pays d'adopter d'autres solutions créatives, à la condition qu'elles soient efficaces et praticables. Les savoirs traditionnels sont une question socio-économique aux multiples facettes. Tous les secteurs sont concernés. De plus, il existe différents types de savoirs traditionnels. Il ressort d'ailleurs des débats qu'il sera difficile de trouver une réponse unique. Il faut du temps pour approfondir l'étude de ces questions. La présidente a encore souligné le besoin de maintenir un dialogue avec les détenteurs de savoirs traditionnels, à la fois sur le plan national et international. Un point important qui a été soulevé est celui des formes de partenariat qui sont envisageables et des différents partenaires possibles. Un autre point à retenir est celui des règles d'accès, qui doivent être adaptées aux différents types de savoirs traditionnels, aux ressources et aux situations. Il faut d'abord définir ces situations avant d'élaborer des règles d'accès. Il est à noter aussi que les droits sont limités dans le temps et dans l'espace. La question de la durée des droits doit être examinée. Un autre point signalé concerne le fait que les savoirs traditionnels ne devraient pas être vus dans la simple perspective commerciale, mais également du point de vue de la reconnaissance sociale pour leur contribution à la communauté. Selon certaines opinions exprimées, les systèmes de protection des droits de propriété intellectuelle existants pourraient être utilisés très efficacement, chaque fois que possible, pour protéger les savoirs traditionnels. Dans les cas où les savoirs traditionnels ne peuvent pas être protégés au titre des droits de propriété intellectuelle, il faut trouver des solutions imaginatives et créatives. Trouver ces solutions a été au c_ur même de la table ronde et cette recherche sera également au c_ur de futures réunions. À cet égard, il faut continuer la collecte de données afin de pouvoir disposer d'une vue d'ensemble complète de la variété des situations qui existent dans le monde. Un système équilibré est un préalable à la mise en place de systèmes efficaces et opérationnels. La documentation est également un sujet important. À cet égard, le secteur privé a proposé son assistance. La présidente a tenu à souligner que la table ronde s'est consacrée au rôle de la propriété intellectuelle dans la protection des savoirs traditionnels. Cette table ronde a constitué une étape importante dans les activités de l'OMPI. La présidente s'est dite très heureuse que toutes les parties ayant pris part à la discussion aient fait preuve de bonne volonté. Néanmoins, elle comprend que des efforts pédagogiques réciproques restent nécessaires.
81. M. Richard Owens, directeur de la Division des questions mondiales de propriété intellectuelle de l'OMPI a déclaré qu'il est réellement gratifiant pour le Bureau international de l'OMPI d'assister à la naissance d'un processus. À la table ronde organisée par l'OMPI l'an passé, les deux systèmes juridiques de protection des connaissances se sont retrouvés pour la première fois au même endroit. On a eu l'habitude de les appeler des navires dans la nuit, des systèmes hautement développés, fonctionnant pleinement et efficacement, chacun dans son champ d'activité respectif, mais s'excluant virtuellement l'un l'autre. Cette année, les participants de la table ronde ont assisté, à l'occasion des deux jours de réunion, au commencement d'un dialogue constructif en vue de trouver un moyen pour la propriété intellectuelle de défendre certains des intérêts, mais probablement pas tous. Le travail qui attend le Bureau international ces deux prochaines années est fondé sur le mandat de l'OMPI qui est chargée, en sa qualité d'organisation internationale intergouvernementale membre de la famille des Nations Unies, de protéger les droits de propriété intellectuelle sur la créativité et l'innovation humaines partout dans le monde. Par conséquent, il est de la responsabilité de l'OMPI d'étudier de manière détaillée, dans la limite de ses ressources, la protection qu'il est possible d'offrir aux savoirs traditionnels au moyen du système de propriété intellectuelle existant. Une fois cette tâche accomplie, il sera plus facile qu'aujourd'hui de définir les lacunes, les vides, les zones où la propriété intellectuelle n'est pas en mesure de protéger les savoirs traditionnels, ainsi que certains des besoins et attentes exprimés par les participants. Il y aura alors un consensus parmi les pays industrialisés, les pays en développement, les titulaires de droits de propriété intellectuelle, les pays exportateurs de propriété intellectuelle, les nouveaux utilisateurs de propriété intellectuelle quant au besoin de créer quelque chose de nouveau. Toutes les parties intéressées s'engagent dans un processus qui sera très long et extrêmement technique. Mais il y a un engagement technique absolu qui a commencé ces deux derniers jours. M. Owens a salué les commentaires positifs et constructifs, y compris les critiques, qui ont été formulés à l'égard du système de propriété intellectuelle existant par des détenteurs de savoirs traditionnels et des gouvernements de pays en développement. S'exprimant au nom de ses collègues du Bureau international, il a ajouté qu'il se réjouit de coopérer avec tous ces groupes afin de faire avancer les choses de manière que le système de propriété intellectuelle dont l'OMPI est la gardienne au niveau international puisse accueillir les nouvelles formes de créativité et d'innovation qui ont été reconnues ces derniers temps. En tout cas, il est absolument vital que les efforts des parties intéressées aboutissent à une structure viable sur le plan international. En l'absence d'une protection au niveau international, il n'y a pas de protection du tout. M. Owens a exprimé ses remerciements à la présidente, aux orateurs et aux participants pour leur contribution au succès de la réunion. Il a également remercié ses collègues de la Division des questions mondiales de propriété intellectuelle qui ont coopéré à la préparation et à l'organisation de la table ronde.
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