Au Japon, les producteurs locaux qui cultivent du thé vert de qualité peinent à vendre leur production à un prix équitable en raison de l’arrivée de grandes entreprises dans le secteur des boissons et d’une augmentation de la consommation de thé en bouteille. La donne est toutefois en train de changer grâce à Suil Hong, le fondateur d’une entreprise spécialisée dans la production et la vente de poudre de thé vert biologique japonais sous la marque NODOKA.
NODOKA en bref
- NODOKA produit du véritable thé vert japonais cultivé au Japon.
- De nombreux producteurs de thé n’ont aucune idée de la popularité du thé vert japonais à l’étranger.
- Le thé est vendu sous forme de poudre dans un emballage qui fait clairement ressortir la marque.
- Le logo de NODOKA a été conçu avec le concours d’un site Web de production collaborative et la demande d’enregistrement de la marque est en cours d’instruction.
Le thé est l’une des boissons les plus anciennes au monde. Initialement consommé en Chine pour ses vertus médicinales, il a rapidement été commercialisé en Europe et dans le reste du monde. Il en est résulté des mélanges de nombreux types de thés d’origine et de qualité différentes. Au Japon, les producteurs de thé vert continuent néanmoins de cultiver, selon des méthodes de production pluriséculaires, plusieurs types de thés verts qui leur sont propres.
Bien plus qu’une plante médicinale ou qu’un produit courant, le thé vert japonais est profondément ancré dans la culture et dans la société; il est traditionnellement consommé selon un rite religieux et méditatif (la cérémonie japonaise du thé) au cours duquel il est préparé et servi d’une façon très particulière. Le thé vert japonais est renommé et apprécié dans le monde entier non seulement pour ses qualités gustatives, mais également pour son rôle dans le développement de la culture japonaise.
Comme on pouvait s’y attendre, d’autres producteurs à l’étranger, alléchés par les bénéfices potentiels du produit, ont entrepris de vendre du thé vert japonais en tentant de reproduire ses caractéristiques naturelles et de tirer profit de la richesse culturelle dont il est porteur. Non contentes de cultiver du thé vert, de nombreuses multinationales tentent aussi d’imiter, pour leur propre compte, les éléments culturels associés au thé vert japonais.
Des noms trompeurs
Suil Hong est un ressortissant coréen de troisième génération qui est né et a grandi à Tokyo, au Japon. En 2016, il a créé l’entreprise NODOKA dans l’objectif d’élargir le marché du thé vert japonais de qualité, tant au Japon qu’à l’étranger. Son modèle commercial consiste principalement à promouvoir ce produit traditionnel japonais en vue de préserver la tradition et de partager la passion qu’il voue à la culture japonaise.
Le jeune chef d’entreprise a fait ses débuts à la Japan Expo USA, où s’est occupé de divers événements culturels japonais organisés aux États-Unis d’Amérique. Pendant cette période, il a constaté que les produits japonais, et particulièrement le thé vert, suscitaient un intérêt croissant à l’international. Il se trouvait pourtant que les entreprises qui vendaient ces produits n’étaient pas japonaises mais qu’elles prospéraient malgré tout, car les producteurs et les entreprises du Japon ne leur faisaient pas suffisamment concurrence.
Un très grand nombre d’entreprises japonaises tentent de promouvoir leurs produits à l’étranger, mais elles ne parviennent pas toujours à vendre.
Suil Hong, fondateur de NODOKA
M. Hong a également remarqué que le thé vert était souvent vendu comme provenant du Japon, même quand ce n’était pas le cas. Dans les faits, en dépit de son importante popularité, 98% du thé vert produit au Japon n’est pas exporté. Toujours est-il que les consommateurs ne savent généralement pas faire la distinction et que la plupart des producteurs japonais n’ont pas conscience de cette situation. Bien que M. Hong se réjouisse de l’intérêt croissant suscité par la cuisine et le thé japonais à l’étranger, il déplore la disponibilité insuffisante de produits authentiquement japonais.
Beaucoup de ces produits portent la dénomination “thé vert japonais” alors qu’ils ne viennent pas du Japon.
Suil Hong
Un regard extérieur
De retour au Japon, M. Hong a décidé de visiter plusieurs plantations de thé vert japonais afin de mieux comprendre le processus de production et d’évaluer la situation réelle des producteurs de thé vert.
Lors de ses visites, il a rencontré la famille de M. Yoshimitsu Masuda, un producteur qui cultive du thé vert biologique japonais à Shimada, dans la préfecture de Shizuoka, depuis plus de 20 ans. M. Hong et M. Masuda se sont entendus sur l’établissement d’un partenariat dans le cadre duquel M. Hong achèterait le thé vert produit par M. Masuda pour l’élaboration des produits NODOKA.
Aujourd’hui, M. Hong travaille en étroite collaboration avec cinq producteurs qui cultivent du thé biologique de qualité et qui peuvent dorénavant compter sur une source de revenu plus stable. Grâce à ces partenariats, M. Hong espère contribuer à l’établissement de liens entre les producteurs de thé vert japonais authentique et les consommateurs du monde entier en proposant à ces derniers non seulement un produit, mais aussi une histoire.
De nombreux producteurs n’ont pas d’accès à l’Internet. Ils n’ont aucune idée de la popularité du thé vert à l’étranger.
Suil Hong
M. Hong a décidé de mobiliser des fonds en lançant une campagne de financement participatif sur le site Indiegogo, grâce à laquelle son projet a reçu le soutien financier de personnes intéressées dans plus de 15 pays. Le rêve de M. Hong, qui souhaitait commercialiser du thé vert japonais biologique sous la marque “NODOKA”, signifiant “calme” et “paisible” en japonais, était en passe de se réaliser.
Du thé même sans théière
Après avoir analysé les débouchés potentiels, M. Hong a constaté que la plupart des consommateurs étrangers ne possédaient pas les ustensiles nécessaires pour préparer le thé selon la tradition, qui consiste à laisser infuser des morceaux de feuilles dans de l’eau chaude. Afin de rendre ses produits accessibles à un plus large public, il a décidé de s’orienter vers du thé en poudre, plus simple à préparer.
Selon lui, le thé biologique procure davantage de bienfaits pour la santé, car les insectes sont enlevés manuellement, un par un, au lieu d’être aspergés de pesticides. En outre, le thé en poudre permet d’ingérer la totalité de la feuille de thé, et en quantités plus importantes. Cela confère au thé une meilleure valeur nutritive et le rétablit dans son utilisation médicinale originelle.
Outre le matcha (poudre de thé cultivé à l’abri du soleil), qui est un type de thé japonais bien connu, M. Hong a décidé d’introduire d’autres types de thé biologiques japonais : le sencha (thé cultivé en plein soleil et traité selon une méthode qui est employée pour plus des trois quarts du thé produit au Japon), le genmaicha (mélange de riz soufflé et de thé ramassé à la fin de la période de récolte) et le hojicha (thé grillé à faible teneur en caféine).
Création de l’identité visuelle de NODOKA
Contrairement à l’image dont il peut jouir auprès du public occidental, le thé vert est considéré par les consommateurs japonais comme un produit relativement courant – perception que M. Hong entend bien faire évoluer grâce à NODOKA. Afin d’accroître les ventes sur le marché intérieur, il a décidé de nouer des partenariats avec des entreprises qui utilisent le thé vert d’une façon moins conventionnelle, par exemple dans la préparation de smoothies ou de pâtisseries.
Pour l’image de marque, M. Hong a souhaité doter ses produits d’une apparence à la fois épurée et moderne susceptible de plaire aux consommateurs ciblés, qui ont tendance à rechercher des produits plus naturels. Il a également collaboré avec Crew, un fournisseur de services en ligne qui met en relation les personnes porteuses de projets avec des professionnels de la création. Crew lui a permis d’entrer en contact avec un graphiste canadien qui avait déjà travaillé pour des entreprises du secteur de l’alimentation et des boissons, et qui l’a aidé à concevoir le logo et l’emballage de NODOKA. Enfin, M. Hong a aussi demandé l’autorisation d’utiliser deux marques de certification bien reconnaissables : Organic JAS (normes agricoles japonaises) et USDA Organic (Ministère de l’agriculture des États-Unis d’Amérique), qui attestent que ses produits sont biologiques.
Par ailleurs, après avoir investi autant d’argent, de temps et d’efforts dans ce projet, M. Hong avait pleinement conscience de la nécessité de protéger les actifs incorporels de NODOKA. Cependant, il n’avait pas de connaissances en matière de propriété intellectuelle et il n’était pas sûr de bien comprendre ce qu’il était possible de protéger ou comment il fallait procéder.
Interrogé au sujet de cette difficulté, M. Hong a répondu : “Cela n’a pas été facile. Je ne savais pas comment m’y prendre ni à qui demander de l’aide. J’ai pensé m’adresser à des avocats, mais je n’en connaissais aucun.” En effectuant des recherches sur l’Internet pour trouver des conseils en matière de propriété intellectuelle, M. Hong a appris l’existence de l’Organisation japonaise du commerce extérieur (JETRO), organisme public chargé de promouvoir le commerce et qui propose un programme de conseils juridiques dans le domaine de la propriété intellectuelle. L’appui de la JETRO lui a permis de faire avancer son projet.
Muni du logo conçu en collaboration avec le graphiste engagé via Crew, M. Hong a déposé auprès de l’Office des brevets du Japon (JPO) une demande d’enregistrement de marque figurative pour les produits de la classe 30 (thé, boissons à base de thé et produits alimentaires connexes) de la classification de Nice. Si tout se déroule comme prévu (en particulier l’examen quant au fond, lors duquel la marque sera comparée à d’autres marques enregistrées), la marque sera enregistrée d’ici à la fin de l’année 2018.
Un accueil favorable
Tous les efforts déployés par M. Hong ont commencé à porter leurs fruits, et la marque suscite l’adhésion des clients et des médias. Grâce à la démarche qu’il a entreprise pour remettre à l’honneur la production traditionnelle de thé vert japonais, M. Hong fait souvent parler de lui, en japonais et en anglais, dans des journaux japonais de grande diffusion tels que le Japan Times ou dans de nouveaux médias plus spécialisés tels que le World Tea News.