Généralités
M. Ovadje, inventeur de l’appareil d’autotransfusion d’urgence (EAT-SET) (photo: OMPI/Arrou-Vignod)
L’appareil d’autotransfusion d’urgence (EAT-SET) est un dispositif inventé en 1989 par le docteur Otu Oviemo Ovadje, médecin militaire nigérian, afin de résoudre les problèmes liés à une rupture de grossesse extra-utérine. Cette complication, fréquente dans les pays en développement, entraîne souvent une hémorragie interne, fatale pour de nombreuses parturientes. L’absence de service de transfusion sanguine bien organisé constitue un facteur d’augmentation de la morbidité et de la mortalité dans ce groupe de femmes. On peut réduire les cas de mortalité en se procurant du sang auprès des laboratoires, mais nombreux sont ceux qui ne peuvent pas s’offrir ce luxe dans les pays à bas revenus. Le dispositif EAT-SET permet de limiter les risques liés à une hémorragie interne grâce à la technique médicale dite d’autotransfusion.
Recherche-développement
L’appareil EAT-SET, inventé et breveté par M. Ovadje (OAPI, brevet n° 40893)
M. Ovadje conduit ses recherches à l’hôpital militaire de Lagos. Parfaitement conscient de la nécessité de trouver une solution économique aux risques pour la santé d’une hémorragie interne, il recherche un moyen efficace de réutiliser le sang du patient plutôt que de devoir dépendre du don de sang. Son dispositif, baptisé EAT-SET, est précisément conçu dans cette optique. Le processus d’autotransfusion permet de récupérer le sang dans les cavités du corps du patient durant une intervention chirurgicale et de lui réinjecter après filtration.
Il trouve son application première chez les patients souffrant d’hémorragie interne suite à une rupture de grossesse extra-utérine, un accident de la route, etc. Ce processus de retransfusion est médicalement sûr à condition de traiter le sang dans les premières 24 heures après le déclenchement de l’hémorragie. Dans la mesure où l’on réinjecte au patient son propre sang, il est non seulement immédiatement disponible, mais il permet d’éviter la transmission de maladies et les complications immunologiques des transfusions homologues. Ce dispositif subit ses premiers essais cliniques à Genève sous la direction de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 1996, puis des essais sont pratiqués dans trois hôpitaux nigérians.
Partenariats et financement
Au lancement du projet EAT-SET en 1989, M. Ovadje ne dispose que de la modeste somme de 18 000 Naira (environ 120 dollars É-U). Le Gouvernement nigérian apporte alors son appui au programme en mettant à sa disposition les laboratoires de recherche de l’hôpital militaire Ikoyi à Lagos. Dès le départ, le projet reçoit également le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Le PNUD fournit les fonds pour les recherches, le développement et l’expérimentation, alors que l’OMS joue le rôle d’agent d’exécution.
EAT-SET Industries est créée en avril 2001 afin de faciliter la commercialisation de ce dispositif médical. La société a déjà attiré plusieurs investisseurs, tant publics que privés, et les investissements s’élèvent à ce jour à quelque cent mille dollars américains. En outre les investisseurs seraient prêts, dit-on, à placer environ un million de dollars supplémentaire dans la société. À l’heure actuelle, EAT-SET Industries centre son activité sur la conception de nouveaux dispositifs médicaux adaptés aux pays en développement, lesquels disposent généralement de moyens limités pour acquérir des technologies complexes et onéreuses.
Pour M. Ovadje, la créativité est un don et chaque invention contribue au progrès de l’humanité.
Brevets et marques
M. Ovadje, avec l’appui du PNUD, obtient la protection de son invention grâce à un brevet délivré par l’Office africain de la propriété intellectuelle (OAPI) (brevet n° 40893). Le dispositif EAT-SET est actuellement protégé par des brevets déposés dans neuf pays africains. L’inventeur obtient également la protection de la marque dans neuf pays. M. Ovadje estime que les brevets et les marques détenus par EAT-SET Industries constituent un atout essentiel pour renforcer la confiance des investisseurs. Il considère toutefois qu’il n’est pas facile pour un inventeur africain de protéger sa propriété intellectuelle : “en Afrique, la plupart des inventeurs ne disposent pas des fonds nécessaires pour préserver leurs inventions par des demandes de brevet ou de marque. Cela revient très cher de déposer une demande de brevet … incontestablement l’inventeur doit faire face à des périodes de grande solitude et de frustration. Mais je pense que ce sont des étapes nécessaires à franchir si l’on veut faire avancer la créativité”.
Commercialisation
Jusque dans les premiers mois de 2006, une société indienne produisait trois mille dispositifs EAT-SET, vendus au détail 30 dollars É.-U. pièce. Le produit est commercialisé conjointement par EAT-SET Industries et First Medical and Sterile Products.
Résultats commerciaux
Dispositif EAT-SET en fonctionnement (Photo : OMPI/Arrou-Vignod).
De plus en plus nombreux sont ceux qui s’intéressent au dispositif EAT-SET à travers le monde. Nombre de patients sont sauvés grâce à ce dispositif. Le Professeur Denis R. Morel, médecin chef à l’hôpital universitaire de Genève, déclare avoir été “surpris par l’efficacité du dispositif”, et définit le projet de développement EAT-SET comme l’un de ceux “qui pourrait sauver un grand nombre de vies”.
La création de la société EAT-SET industries, la croissance de ses activités et de ses financements sont la démonstration vivante de la réussite du docteur Ovadje. L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) et l’Organisation de l’unité africaine (OUA) saluent l’invention du docteur Ovadje. En 1995, il est déclaré meilleur chercheur africain et se voit décerner la médaille d’or 1995 OMPI/OUA pour ses travaux scientifiques destinés à sauver des femmes qui auparavant mouraient d’une grossesse anormale. Il reçoit également un certain nombre d’autres distinctions, notamment le prix Sasakawa pour la santé (2000) décerné par l’OMS, le prix de l’Institut de la Banque mondiale (2000), et le prix pour la santé de la banque J.-P. Morgan Chase (2002).
La clé du succès : miser sur la propriété intellectuelle pour attirer les investissements
L’affaire EAT-SET est un bon exemple du rôle important que peut jouer une protection efficace de la propriété intellectuelle pour attirer les investissements.
Cette protection appropriée de la propriété intellectuelle a encouragé les investisseurs à soutenir le développement et la commercialisation du dispositif EAT-SET. La réussite du docteur Ovadje à faire vivre le projet EAT-SET contribuera à aider les pays en développement à sauver des patients souffrant d’hémorragie interne.