Valoriser les ressources naturelles de Nouvelle-Calédonie
11 février 2021
En 2015, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution dans laquelle elle proclame le 11 février de chaque année Journée internationale des femmes et des filles de science. Consciente que la science et l’égalité entre les sexes sont toutes deux essentielles à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, convenu à l’échelle internationale, la communauté internationale s’emploie à encourager et à inviter les femmes et les filles à faire carrière dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM).
D’après les données recueillies par l’Institut de statistique de l’UNESCO, moins de 30% des chercheurs dans le monde sont des femmes et seuls 30% environ d’étudiantes de l’enseignement supérieur choisissent des domaines liés aux STIM au début de leur cursus. Pourtant, les femmes et les filles jouent un rôle déterminant dans la communauté des sciences et dans celle de la technologie.
À l’occasion de la Journée internationale des femmes et des filles de science de l’Organisation des Nations Unies, nous mettons à l’honneur Subama Mapou, l’une des participantes au Programme de formation et de mentorat de l’OMPI à l’intention des femmes chefs d’entreprise originaires de peuples autochtones, qui s’investit pour donner aux femmes et aux filles néo-calédoniennes les moyens de se lancer dans l’enseignement, la formation et les activités de recherche scientifiques à tous les échelons.
Quand science et tradition se rencontrent
Issue d’une famille mêlant plusieurs ethnies et cultures (kanake, japonaise et indienne), Subama Mapou s’est passionnée pour la biodiversité dès son plus jeune âge. Sa Nouvelle-Calédonie natale, collectivité d’outre-mer située dans le sud-ouest du Pacifique, est réputée pour ses ressources naturelles abondantes associées à un taux d’endémisme très élevé (76%).
La faune et la flore très riches de l’archipel présentent de nombreux groupes taxonomiques uniques qui alimentent les connaissances locales des usages traditionnels fondés sur les plantes. Au fil des siècles, les peuples autochtones et les communautés locales, qui vivent dans cet environnement, ont acquis une connaissance pointue de la biodiversité qui les entoure.
Issue de la tribu d’Unia, de la chefferie Djawari, Subama a été initiée très jeune par son arrière-grand-père, guérisseur traditionnel et sage de la tribu, aux savoirs traditionnels attachés aux ressources naturelles de Nouvelle-Calédonie ainsi qu’à leur importance pour la tribu.
Elle s’est engagée auprès de sa famille à poursuivre ses études, a mené des études universitaires de biologie des plantes et a obtenu une licence de biologie ainsi qu’un master de biologie des plantes et des micro-organismes à l’Université de Montpellier.
La biodiversité et les savoirs traditionnels de Nouvelle-Calédonie attirent l’attention des chercheurs du monde entier. Elle-même chercheuse, Subama s’appuie sur son expérience unique pour militer en faveur de la gestion durable des ressources naturelles locales. Selon elle, toute collaboration entre les dépositaires locaux de savoirs traditionnels et les laboratoires de recherche devrait être fondée sur le respect mutuel.
Afin de joindre le geste à la parole, Subama s’efforce de mettre en place de bonnes pratiques au travers d’un nombre croissant d’activités. Dans le cadre de ses recherches de doctorat, elle a dressé un inventaire de toutes les espèces végétales issues de la cosmétopée de Nouvelle-Calédonie. Elle a mené ses enquêtes ethnobotaniques après avoir obtenu l’autorisation des peuples autochtones et des communautés locales au moyen d’un consentement préalable en connaissance de cause.
Ses travaux ont permis de recenser 109 plantes pouvant faire l’objet d’un usage cosmétique.
Gardenia Cosmétique: canaliser l’esprit de création d’entreprise
Subama a fondé sa propre entreprise, Gardenia Cosmétique, pour mettre en avant les applications de la biodiversité et des savoirs traditionnels de Nouvelle-Calédonie dans la pratique.
Ma start-up, Gardenia Cosmétique, a pour but de promouvoir la biodiversité et les savoirs traditionnels à travers un procédé d’éco-extraction écologique et innovant.
Subama Mapou
L’entrepreneuse indique que l’objectif de Gardenia Cosmétique est d’ouvrir des perspectives de création d’entreprises grâce au savoir acquis sur le terrain. Elle fonde ses travaux sur le respect des droits des peuples autochtones et des communautés locales et est convaincue que la commercialisation de ces produits aura de fortes retombées sur la création d’emplois dans les secteurs artisanal et industriel.
Comment les travaux de Subama sur les savoirs traditionnels kanaks soutiennent-ils les femmes de Nouvelle-Calédonie dans le domaine des sciences?
Subama a cofondé l’Institut kanak des plantes, de l’artisanat et des langues autochtones (IKAPALA) dans le prolongement du projet qu’elle a présenté dans le cadre du programme mis en place par la Division des savoirs traditionnels. IKAPALA est une organisation non gouvernementale qui met en réseau des acteurs investis pour valoriser et protéger les savoirs traditionnels kanaks.
À ce jour, quelque 30 associations de femmes, représentant chacune des huit aires coutumières qui composent le territoire, ont rejoint IKAPALA. En collaboration avec Gardenia Cosmétique, l’institut a d’ores et déjà organisé plus de vingt-quatre ateliers axés sur la création de produits sûrs, naturels et de haute qualité.
Je ne cesserai jamais d’encourager les femmes et les jeunes filles à se lancer dans les domaines scientifiques afin de mettre au point des pratiques et des programmes de recherche visant à créer des synergies.
Subama Mapou
Dans le cadre de ces ateliers, les femmes apprennent à fabriquer des produits biologiques, notamment des savons et d’autres produits d’hygiène, des gels d’aloe vera et de l’huile de coco pressée à froid à des fins cosmétiques et alimentaires. Tous les ingrédients et techniques de préparation reposent sur les plantes endémiques et les savoirs traditionnels de Nouvelle-Calédonie.
Quelles sont les prochaines étapes pour Subama?
Si d’autres entreprises ont rencontré des difficultés du fait de la pandémie de Covid-19, Subama n’a pas laissé cette période l’éloigner du travail qui lui est si cher. Pendant la pandémie, Gardenia Cosmétique a distribué gratuitement plus de 1000 litres de savon et 200 litres de gel hydroalcoolique à des écoles, des tribus et des groupes de personnes handicapées de Nouvelle-Calédonie.
Outre les formations et les séminaires qu’elle organise, Subama nourrit de grandes ambitions pour IKAPALA. En collaboration avec les peuples autochtones et les communautés locales de Nouvelle-Calédonie, elle prévoit de créer des jardins botaniques mettant en valeur les ressources naturelles de l’archipel ainsi qu’une base de données des ressources naturelles en langues vernaculaires.
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