L’adoption d’un traité historique donne un nouvel élan à l’accès des déficients visuels du monde entier aux livres
Marrakech/Genève,
27 juin 2013
PR/2013/741
Des négociateurs venus du monde entier réunis sous les auspices de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) ont adopté aujourd’hui un nouveau traité historique qui vise à donner un nouvel élan à l’accès de centaines de millions d’aveugles, de déficients visuels et de personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés aux livres.
Le traité, adopté après plus d’une semaine d’intenses débats entre les négociateurs réunis à Marrakech (Maroc), marque l’aboutissement de plusieurs années de travaux en vue d’améliorer l’accès des aveugles, des déficients visuels et des autres personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées dans des formats comme le braille, les gros caractères ou les enregistrements audionumériques.
“Ce traité constitue une victoire pour les aveugles, les déficients visuels et les personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés, mais aussi pour le système multilatéral. Avec l’adoption de ce traité, la communauté internationale a démontré sa capacité à trouver une solution à des problèmes spécifiques et à parvenir à un consensus. Il s’agit d’un traité équilibré, qui représente un excellent compromis entre les intérêts des différentes parties prenantes”, a déclaré Francis Gurry, Directeur général de l’OMPI.
“Il s’agit d’un traité historique qui apportera des avantages concrets aux déficients visuels”, a-t-il ajouté.
La légende de la musique, Stevie Wonder, prendra part aux célébrations prévues le vendredi 28 juin, en donnant un concert au Palais des Congrès de Marrakech, où les négociateurs ont été accueillis par le Royaume du Maroc.
“Il n’y a ni gagnants, ni perdants, c’est un traité pour tous”, a déclaré le Ministre marocain de la communication et porte-parole du gouvernement, Mustapha Khalfi, qui a signifié, par un coup de marteau, l’adoption du traité. “Grâce à la bénédiction de cette ville de Marrakech, que nous appelons la ‘Cité des sept saints’, et grâce à vous tous, nous avons été en mesure d’accomplir ce que nous pouvons appeler le ‘Miracle de Marrakech’”.
Réunissant plus de 600 négociateurs venus de ses 186 États membres, l’OMPI a convoqué, le 18 juin, la Conférence diplomatique pour la conclusion d’un traité visant à faciliter l’accès des déficients visuels et des personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées. La conférence devrait officiellement achever ses travaux le 28 juin 2013.
Le traité, dénommé Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées, a pour objectif de remédier à la “pénurie de livres” en faisant obligation à ses parties contractantes d’adopter dans leur législation nationale des dispositions permettant, grâce à des limitations et exceptions aux droits des titulaires du droit d’auteur, la reproduction, la distribution et la mise à disposition dans des formats accessibles d’œuvres publiées.
Il porte aussi sur les échanges transfrontières de ces œuvres en format accessible par des organisations fournissant des services aux aveugles, déficients visuels et personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés. Il permettra d’harmoniser les limitations et exceptions de sorte que ces organisations puissent mener des activités au-delà des frontières. Ce partage d’œuvres en format accessible devrait augmenter globalement le nombre d’œuvres disponibles dans la mesure où il éliminera le chevauchement d’activités et renforcera l’efficacité. Là où, auparavant, cinq pays devaient produire différents exemplaires en format accessible de la même œuvre, ces cinq pays pourront dorénavant produire chacun un exemplaire en format accessible d’une œuvre différente, qu’ils pourront ensuite s’échanger entre eux.
À l’heure actuelle, la définition des limitations ou exceptions autorisées incombe aux différents pays. Dans la pratique, les limitations et exceptions prévues dans les législations nationales connaissent de grandes variations. Dans de nombreux pays, la copie pour usage privé est libre, mais quelques pays seulement prévoient des exceptions pour l’enseignement à distance, par exemple. En outre, ces exceptions ne s’appliquent que sur le territoire du pays concerné.
Le traité a également pour objet de garantir aux auteurs et aux éditeurs que le système n’exposera pas leurs œuvres publiées à un usage abusif ou à la distribution à des personnes autres que les bénéficiaires visés. Le traité énonce à nouveau la condition selon laquelle les échanges transfrontières d’œuvres créées sur la base de limitations ou d’exceptions doivent être limités à certains cas spéciaux où il n’est pas porté atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit.
Le traité préconise la coopération entre ses parties contractantes en vue de stimuler les échanges transfrontières. Les parties s’engagent à mettre à disposition dans les meilleurs délais un nombre croissant d’œuvres publiées et cette coopération constituera un pas important vers la réalisation de cet objectif.
Le traité doit être signé vendredi par les délégations des différents pays. Il entrera en vigueur après qu’il aura été ratifié par 20 États membres de l’OMPI acceptant d’être liés par ses dispositions.
Rappel
Selon l’Organisation mondiale de la santé, il existe plus de 314 millions d’aveugles et de déficients visuels dans le monde, dont 90% dans les pays en développement. Une enquête de l’OMPI menée en 2006 a fait apparaître que moins d’une soixantaine de pays prévoyaient dans leur législation nationale relative au droit d’auteur des dispositions expresses relatives aux limitations et exceptions en faveur des déficients visuels, par exemple pour les versions en braille, en gros caractères ou audionumériques des œuvres protégées par le droit d’auteur.
En outre, compte tenu de la nature “territoriale” du droit d’auteur, ces exceptions ne s’appliquent généralement pas à l’importation ou à l’exportation d’œuvres converties en formats accessibles, même entre des pays ayant des règles similaires. Dans chaque pays, les organisations compétentes doivent négocier des licences avec les titulaires de droits pour échanger des œuvres en format spécial d’un pays à l’autre, ou produire leurs propres versions accessibles, entreprise coûteuse qui limite sérieusement l’accès des déficients visuels aux œuvres imprimées de tous ordres.
Selon l’Union mondiale des aveugles, sur le million d’ouvrages qui sortent chaque année dans le monde, moins de 5% sont publiés dans des formats accessibles aux déficients visuels.
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