Courrier des lecteurs
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Le système de la propriété intellectuelle n’est pas fait pour les petits concepteurs
Étant enseignant dans le domaine de la conception en trois dimensions, je vois un grand nombre de créateurs industriels et d’étudiants, et ils me disent souvent qu’ils ne peuvent pas avoir recours au système de la propriété intellectuelle pour protéger leurs intérêts, car il est beaucoup trop complexe et onéreux. S’ils ne disposent pas des moyens considérables qui sont nécessaires pour obtenir un brevet ou un enregistrement de dessin ou modèle national et international, les jeunes concepteurs n’ont aucune envie de se lancer dans un long processus d’élaboration ou de dévoiler leurs innovations sur le marché. Ils savent pertinemment que les grands fabricants pourront facilement les copier, y apporter quelques changements et les commercialiser comme s’ils les avaient créées eux-mêmes.
Les innovateurs qui souffrent le plus sont ceux qui ne sont pas liés à une grande entreprise. Prenez l’étudiant en design ou le concepteur indépendant qui a une idée ou un projet de conception de produit. Il devra en assumer lui-même les frais de développement et de lancement ou alors, passer un temps considérable – pendant lequel il ne sera pas rémunéré – à faire la tournée des fabricants pour leur présenter son produit. Les honoraires des agents de brevets et les taxes de recherche et de dépôt imposées dans les divers pays viendront le décourager encore un peu plus d’aller jusqu’au bout de son idée ou de son invention. Et si jamais il réussit, il devra éventuellement défendre un jour ses droits, toujours à grands frais, face aux contrefacteurs. Tôt ou tard, il risque de baisser les bras comme je l’ai fait moi-même.
Bien sûr, il n’y a pas que des échecs. Mais le système actuel de la propriété intellectuelle continuera de décourager un grand nombre de petits entrepreneurs et de concepteurs indépendants de commercialiser leurs innovations et leurs idées – au plus grand détriment de tous.Philip Hughes, Maître de conférences en conception en trois dimensions, The Arts Institute at Bournemouth, Royaume-Uni
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Femmes, hommes et brevets
Je relève, dans votre article sur le Réseau mondial des femmes auteurs d’inventions et d’innovations (GWIIN: Les femmes inventeurs à l’honneur, au Mexique et dans le monde, août 2006) la phrase suivante : "On pourrait être tenté, en voyant le nombre de femmes qui réussissent de nos jours… de se demander si un organisme entièrement dédié à la promotion des femmes inventeurs a encore sa raison d’être". L’article démontrait ensuite qu’au Mexique, les femmes déposent beaucoup moins de brevets que les hommes. Mais qu’en est-il des autres pays?
Je voudrais attirer votre attention sur une étude sur la répartition hommes-femmes des déposants de brevets aux États-Unis, publiée dans la revue Science Magazine du 4 août dernier*. On y découvre que les hommes d’un échantillon aléatoire de 4227 chercheurs en sciences de la vie examiné sur une période de 30 ans ont produit 14 fois plus de brevets que leurs consœurs. Une fois pris en compte les effets substantiels et complexes d’un certain nombre de facteurs, l’étude conclut que "l’appartenance au sexe féminin a un effet statistiquement significatif" et que les dépôts de brevets des femmes ayant un doctorat en sciences de la vie représentent 40% de ceux de leurs collègues masculins – bien que l’on ait observé une tendance légèrement plus encourageante chez les femmes plus jeunes.
Que de potentiel inexploité!
J’applaudis cette étude, car il existe actuellement très peu de données sur les effets de la qualité de femme ou d’homme en matière d’inventivité ou de dépôt de brevets – et encore moins sur les raisons de l’asymétrie qui existe à cet égard. Pour l’instant, ce sont des organisations telles que le réseau GWIIN qui répondent à ce qui est de toute évidence un besoin constant et mondial d’actions positives en ce qui concerne les questions de distinction homme-femme.
*Etude du Professeur Waverly Ding (Université de Californie), Fiona Murray (MIT), Tony E. Stuart (Harvard Business School)Anne Reynard, conseil en projets de l’UE et membre du réseau GWIIN
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Protection du droit à l’image
L’article Utilisation d’œuvres et de marques protégées par le droit d’auteur paru dans votre numéro d’avril 2006 ne fait pas allusion à un sujet apparenté et souvent source de confusion : l’utilisation de photographies de personnes.
Les législations nationales en matière de droit à l’image varient, mais vos lecteurs seront peut-être intéressés par quelques décisions récentes des tribunaux chiliens, en vertu desquelles l’action engagée par une personne dont l’image a été utilisée sans son consentement est recevable si l’image en question est clairement reconnaissable et si elle est utilisée à des fins de profit, même s’il s’agit d’une photographie prise dans un lieu public.
Le critère relatif au caractère reconnaissable de l’image est issu d’une affaire dans laquelle un homme poursuivait un journal pour avoir publié sa photographie sans son consentement dans un article sur l’obésité au Chili. Le tribunal a débouté le plaignant au motif qu’il s’est avéré impossible de l’identifier à partir de la photographie.
S’agissant de l’utilisation de l’image d’une personne à des fins de publicité ou de profit, ce critère a été établi dans une l’action engagée et gagnée par le joueur de tennis Fernando González contre une entreprise de presse qui avait utilisé sans son consentement sa photo dans une campagne de publicité. Le tribunal a statué que l’image corporelle constitue l’un des attributs d’une personne et que la décision d’utiliser ou de reproduire cette image à des fins de publicité ou de profit appartient, par conséquent, exclusivement à ladite personne.
Dans une troisième affaire, un journal qui avait publié sans autorisation la photographie d’une vacancière sur une plage publique faisait valoir que cette photographie avait été prise "dans un lieu public bondé" et avait seulement servi à "rendre hommage, une fois de plus, à la beauté légendaire des femmes du Chili". Le juge a souligné que le fait que l’on paraisse dans un lieu public ne peut pas être interprété comme un consentement à la diffusion de cet acte auprès du public. Il s’agit là de l’expression du principe même du droit au respect de la vie privée garantie par la Constitution politique du Chili.
Carmen Paz Alvarez, Sargent & Krahn, Chili
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