Patrimoine culturel dans le monde numérique
Par Jaime de Mendoza Fernández
M. Jaime de Mendoza Fernández, chef du service du droit d’auteur du Ministère espagnol de la culture, revient ici pour le Magazine de l’OMPI sur les principaux points abordés au cours d’une conférence organisée conjointement à Madrid par l’OMPI et le Gouvernement espagnol.
Dans tous les pays du monde, les peuples ont un riche patrimoine culturel qui mérite d’être découvert, apprécié et pris en exemple, bref, diffusé dans l’intérêt général. Mais en même temps, cette culture doit être préservée pour les générations futures. Les travaux de la conférence de l’OMPI sur la propriété intellectuelle et le patrimoine culturel dans le monde numérique, organisée conjointement avec le Ministère espagnol de la culture, avaient pour thème l’établissement d’un équilibre entre les droits de propriété intellectuelle et le droit du public à accéder à la culture.
Cette conférence réunissait des représentants d’institutions culturelles diverses, telles que services d’archives, bibliothèques et musées. Longtemps perçues comme des lieux hermétiquement clos, gardiens de trésors du patrimoine culturel mondial auxquels n’avaient accès que de rares privilégiés, les institutions culturelles sont devenues des moteurs de la culture et appliquent désormais une politique de portes ouvertes. Elles ont exposé à l’occasion de la conférence l’optique très particulière qui est la leur, en tant que dépositaires d’un patrimoine culturel qu’elles ont l’obligation et la responsabilité de protéger tout en le mettant à la disposition du public.
Changement de perspective
Le Musée national du Prado, à Madrid (Istockphoto.com)
Les représentants de divers organismes culturels ont donné un aperçu des enjeux et opportunités liés à la nouvelle politique de diffusion de la culture dans le monde numérique. Sans le moindre doute, l’un des obstacles qu’il sera essentiel de surmonter sera celui constitué par la recherche d’un équilibre entre la diffusion des collections et la nécessité de protéger les droits de propriété intellectuelle.
Les représentants des plus importantes institutions culturelles d’Espagne, dont notamment le Musée national du Prado et la Bibliothèque nationale, sont tombés d’accord avec leurs homologues d’Europe, d’Amérique du Nord et d’Amérique latine sur le fait que les droits de propriété intellectuelle constituent des actifs d’une importance grandissante, tant d’un point de vue culturel qu’économique. L’utilisation de la valeur ajoutée des droits de propriété intellectuelle à des fins de création de revenus a longtemps été considérée, en Europe continentale, comme incompatible avec la principale raison d’être des institutions culturelles publiques; elle est cependant perçue aujourd’hui d’une manière plus positive. La propriété intellectuelle offre aux institutions culturelles le moyen de s’assurer des revenus importants, leur permettant de progresser sur la voie de l’autofinancement.
Gérer les droits de propriété intellectuelle
Les institutions culturelles sont généreuses dans la mise à disposition des collections dont elles ont la responsabilité. Elles appellent cependant à un assouplissement des restrictions qui s’appliquent actuellement en matière de propriété intellectuelle, afin de pouvoir poursuivre leur travail de conservation du patrimoine culturel. La principale difficulté qu’elles rencontrent est la gestion des droits de propriété intellectuelle relatifs à leurs collections. L’absence de “guichet unique” pour les communications avec les organismes de gestion des droits, le manque de clarté entourant le domaine public et les difficultés liées à la gestion des œuvres dites “orphelines” (dont les titulaires de droits sont inconnus ou impossibles à joindre) sont parmi les sujets les plus vivement débattus au cours de la conférence.
Les solutions offertes par le cadre juridique actuel en ce qui concerne les œuvres orphelines, par exemple, ne répondent pas aux besoins des institutions culturelles. Ces dernières demandent donc que les règles existantes soient élargies de manière à ce qu’il leur soit permis d’utiliser ces œuvres dans certains cas, par exemple au profit des personnes handicapées ou à des fins éducatives.
Les participants sont convenus qu’il était essentiel, afin de mieux répondre à ces défis, d’instaurer un dialogue constructif entre les institutions culturelles, les industries de contenu et les fournisseurs de services de technologies de l’information. Tant l’OMPI que le Ministère espagnol de la culture ont un rôle fondamental à jouer dans l’établissement d’un climat de plus grande certitude juridique pour toutes les parties prenantes, et cela en favorisant l’harmonisation normative au niveau international.
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