Un aperçu de l'avenir des sports paralympiques
Le dispositif Ghost, lauréat du concours, est disposé autour du
poignet et du coude. Il utilise les sons et les vibrations pour
indiquer à l'utilisateur s'il exécute correctement un mouvement
particulier. (Photo: Igor Safronov, Javier Soto & rb-create 2012)
par Catherine Jewell, Division des communications
À l'approche des Jeux paralympiques de Londres 2012, des étudiants en ingénierie et conception de l'Imperial College de Londres et du Royal College of Art de Londres ont récemment dévoilé une sélection de prototypes passionnants qui donnent un aperçu de ce à quoi pourraient ressembler les sports paralympiques du futur. Les dispositifs ont été conçus dans le cadre du Sports Innovation Challenge, créé par Rio Tinto, le fournisseur des métaux précieux servant à fabriquer les 4200 médailles d'or, d'argent et de bronze qui seront remises en 2012 à l'occasion des Jeux olympiques et paralympiques de Londres, et bénéficiant du soutien d'Ottobock, un important fabricant de prothèses. Ce dernier est le fournisseur officiel de services techniques pour les prothèses, orthèses et fauteuils roulants des Jeux paralympiques de Londres 2012.
Le Sports Innovation Challenge fait partie d'un programme de cinq ans dont le but est de mettre à profit la créativité des meilleurs étudiants en ingénierie et conception pour rendre le sport plus accessible aux personnes souffrant d'un handicap et de permettre aux étudiants de gérer des projets concrets. OMPI - Magazine examine de plus près quelques‑unes des innovations présentées, qui sont susceptibles de changer la donne.
Ghost
Dans le monde du sport d'élite, chaque fraction de seconde compte. "Un mauvais virage ou un mauvais départ peuvent nous faire passer de la première à la troisième place dans une course", fait observer le nageur aveugle médaillé de bronze Donovan Tildesley.
Les nageurs ayant des déficiences visuelles doivent relever des défis énormes pour corriger et perfectionner leur technique de nage et améliorer leur performance parce qu'ils ne peuvent simplement pas voir s'ils se déplacent de façon optimale. Ils dépendent d'une interaction physique et des commentaires vocaux de leurs entraîneurs pour perfectionner leurs mouvements. Ghost est un dispositif d'entraînement individuel pour athlètes handicapés conçu par Shruti Grover, Benedict Copping, Idrees Rassouli et Jason Cheah. Disposé autour du poignet et du coude, le dispositif utilise les sons et les vibrations pour indiquer à l'utilisateur s'il exécute correctement un mouvement particulier. Grâce à ce système, les athlètes peuvent également s'entraîner en utilisant les données de mouvement des meilleurs athlètes olympiques du monde.
Haptic Vision
Les étudiants Chin‑Wei Liao, Daniel McLaughlin et Igor Safronov ont imaginé Haptic Vision, un dispositif placé sur une courroie autour de la poitrine destiné à accroître l'autonomie des athlètes aveugles ou malvoyants. Les athlètes sont orientés pendant les courses à l'aide de vibrations, ce qui leur permettrait de se passer d'un guide.
Rainbow Touch utilise des textures
faites de points et de lignes de
tailles et d'épaisseurs différentes
pour représenter différentes couleurs
en fonction du spectre continu de
lumière visuelle afin de permettre aux
athlètes et aux fans ayant des
déficiences visuelles de reconnaître
les couleurs des équipes. (Photo: Igor
Safronov, Javier Soto & rb-create 2012)
Rainbow Touch
Des dispositifs destinés à améliorer l'expérience des fans de sports souffrant de handicaps visuels ont également été conçus. On citera, par exemple, le Rainbow Touch, défini comme étant un "système de traduction des couleurs en textures", qui permet aux athlètes et aux fans de reconnaître les couleurs des équipes. Selon les explications des étudiants l'ayant mis au point (Mi Eun Kim, Martin Jaere et Noriyaki Maetani), Rainbow Touch "utilise des textures faites de points et de lignes de tailles et d'épaisseurs différentes pour représenter les couleurs en fonction du spectre continu de lumière visuelle". Les trois étudiants sont convaincus que Rainbow Touch "peut être la base d'un nouveau langage universel de traduction des couleurs en textures".
Augestra
Bien que de nombreux sports paralympiques soient agréables à pratiquer, ils ne sont pas forcément très excitants pour les spectateurs. Le goalball, par exemple, est un sport où des joueurs aux yeux bandés essaient de marquer un but à l'équipe adverse en faisant rouler le ballon sur le sol. Les spectateurs ne doivent pas faire de bruit pour que les joueurs puissent localiser le ballon, qui contient des clochettes. Yuta Sugawara, Tim Bouckley et Jenny Shih ont conçu un dispositif à réalité augmentée, Augestra, qui permet aux spectateurs de profiter de l'expérience vécue par les joueurs en les connectant avec ces derniers au moyen de capteurs qui transmettent sans fil les signes vitaux des sportifs (battements du cœur et respiration) à des dispositifs audio portés par les spectateurs. "Nous avons cherché à utiliser la technologie pour connecter le public aux sportifs et ainsi permettre aux spectateurs de vivre l'expérience du sport de compétition et de s'enthousiasmer pour le sport paralympique en général", déclarent les concepteurs du projet.
Endura
Lemembre artificiel, Endura, mis au point par Millie Clive‑Smith, Sebastiaan Wolzak et Seitaro Taniguchi, vise à résoudre les problèmes causés par les prothèses durant l'entraînement. Actuellement, les athlètes doivent interrompre les sessions d'entraînement toutes les 30 minutes environ pour retirer leur prothèse et essuyer la transpiration accumulée. Le trio d'étudiants a résolu ce problème en concevant une structure ouverte et solide pour une ventilation et un support maximaux obtenus au moyen d'un algorithme de bone morphing® breveté qui permet d'obtenir un ajustement optimal. On obtient ainsi une dissipation de la chaleur et une transpiration efficaces. Par ailleurs, Endura est conçu de manière à permettre aux athlètes de serrer ou desserrer la prothèse afin de l'adapter à une dilatation musculaire résultant d'une activité physique intense et de la rendre ainsi plus confortable que les appareils contemporains.
À propos des Jeux paralympiques
Les Jeux paralympiques sont la deuxième plus importante manifestation sportive au monde. Les Jeux paralympiques de Londres, qui se tiendront du 30 août au 9 septembre 2012, réuniront quelque 4200 athlètes de 150 pays participant à 20 différents sports. La première manifestation sportive pour personnes handicapées, les Jeux internationaux en fauteuil roulant, a été organisée à Londres par le Dr. Ludwig Guttman de l'Hôpital de Stoke Mandeville pour les vétérans de guerre souffrant de blessures de la moelle épinière; elle a eu lieu le jour de l'ouverture des Jeux olympiques de Londres de 1948. L'objectif était de créer une manifestation sportive d'élite pour les personnes handicapées équivalente aux Jeux olympiques. Les premiers Jeux paralympiques officiels ont eu lieu à Rome en 1960 et ont réuni 400 athlètes de 23 pays. Quant aux premiers Jeux paralympiques d'hiver, ils ont eu lieu en 1976 à Örnsköldsvik (Suède).
Supprimer les obstacles à la compétition
Les étudiants ont également imaginé des innovations destinées à permettre aux athlètes valides et aux athlètes handicapés de se retrouver côte à côte dans des compétitions en utilisant le même équipement et en suivant les mêmes règles.
Headshot
Brainsled donne aux personnes souffrant d'un handicap sévère
la possibilité de concourir à égalité avec les sportifs valides.
L'athlète dirige le bob à l'aide d'impulsions cérébrales captées
au moyen d'un casque spécial.
(Photo: Igor Safronov, Javier Soto & rb-create 2012)
Headshot, par exemple, revisite le tir au pigeon d'argile. Ce dispositif permet aux athlètes de déplacer, de viser et de déclencher un mécanisme d'arme à feu avec leur tête et leur bouche. Les sportifs s'asseyent sur une plate‑forme, leur arme montée devant eux. Un casque spécialement conçu suit le mouvement de leur tête – lorsqu'elle se déplace vers la droite, la gauche, le haut et le bas, la plate‑forme se déplace également – de façon qu'il puisse viser la cible. Pour tirer un coup de feu, le sportif doit souffler dans une embouchure rattachée au casque. "Toute personne jouissant d'une mobilité au‑dessus de la nuque est à même de concourir au plus haut niveau. "Je pense que l'aspect le plus important de cette technologie est qu'il n'est plus nécessaire de séparer les handisports et les sports pratiqués par les personnes valides et qu'il est possible d'introduire des sports qui permettent à de beaucoup plus larges sections de la population de participer", indique Colin McSwiggen, qui, avec Jeffrey Gough et Juhye Lee, a mis au point ce dispositif afin de démontrer que les tétraplégiques pouvaient participer aux mêmes compétitions de tir au pigeon d'argile que les personnes valides.
Brainsled
Brainsled donne également aux personnes souffrant d'un handicap sévère la possibilité de concourir sur un pied d'égalité avec les sportifs valides. L'athlète dirige le bob à l'aide d'impulsions cérébrales captées au moyen d'un casque spécial. Cette innovation demande courage, concentration et habileté. Selon l'équipe de concepteurs, "la force n'est plus un facteur essentiel". Même les personnes les plus sévèrement handicapées peuvent "sentir l'adrénaline et l'excitation physique d'une activité extrême". Brainsled a été conçue par Michele Tiberio, Victor Monserrate, Javier Soto et Sangwoo Park.
Mettre les connaissances acquises au service de la conception
Le triathlète handicapé Jimmy Goddard et le lanceur de javelot
Scott Moorhouse assistent à l'atelier pour athlètes organisé à
l'Imperial College de Londres. (Photos: Igor Safronov,
Javier Soto & rb-create 2012)
Lors de la conception de ces innovations qui promettent d'élargir la participation des compétitions aux athlètes handicapés, tout en améliorant les performances sportives en général, les étudiants ont travaillé en étroite collaboration avec des sportifs handicapés de haut niveau, dont Iain Dawson, Jimmy Goddard et Scott Moorhouse. Les étudiants et les membres du personnel ont ainsi pu acquérir des connaissances indispensables pour s'assurer que les dispositifs mis au point répondaient aux besoins des athlètes. "Sans l'aide des utilisateurs pour valider les décisions prises, il existe un risque réel de trouver une solution complètement inadaptée", déclare Rolf Thomas, un des tuteurs en matière de conception.
"Nous avons essayé d'amener les étudiants à concevoir des dispositifs susceptibles d'aider à l'avenir les athlètes paralympiques à participer à des compétitions", a déclaré Preston Chiaro, coordinateur en chef de la technologie et l'innovation chez Rio Tinto. "Ce concours est vraiment allé au‑delà de notre intention initiale en ce sens que les étudiants ont été très créatifs; ils ont imaginé des dispositifs qui non seulement aident les athlètes paralympiques mais également encouragent la participation du public à la compétition à laquelle ils assistent. C'est tout à fait remarquable", a‑t‑il ajouté.
Ce concours donnait aux étudiants la possibilité "d'explorer des possibilités en matière de conception et de créer des prototypes fonctionnels en s'inspirant des Jeux de Londres 2012 pour améliorer le futur des Jeux paralympiques et des personnes handicapées dans leur ensemble", a indiqué Peter Childs, professeur à l'Imperial College et directeur du cours commun de génie de la conception innovante. "D'après plusieurs enquêtes menées auprès des entreprises, la gestion créative est une composante essentielle du succès", a‑t‑il dit. "Nous voulions un projet passionnant qui encouragerait une activité productive. C'est quelque chose d'important dans le développement des concepteurs, des ingénieurs et des innovateurs capables de penser d'une manière suffisamment dérangeante pour contribuer à imprimer les futures directions pour les produits industriels", a‑t‑il ajouté.
Lauréat du concours
Le lauréat du concours Sports Innovation Challenge de cette année, le projet Ghost, a d'ores et déjà obtenu un financement ainsi qu'un mentor, Andy Brand, de faire progresser le projet avec le soutien d'Imperial Innovations. De nombreux autres étudiants poursuivent leurs efforts en vue de concevoir d'autres innovations prometteuses, telles que Rainbow Touch, Augestra et Haptic Vision.
À propos d'Imperial Innovations
Fondé en 1986, Imperial Innovations est une filiale à 100% de l'Imperial College de Londres. C'est un des premiers offices de transfert de technologie en Europe. Aujourd'hui, au Royaume‑Uni, Imperial Innovations est l'une des principales entreprises internationales de commercialisation de la technologie et l'un des investisseurs les plus actifs en matière d'entreprises émergentes. Son approche intégrée couvre tous les aspects du processus de commercialisation. En 2005, l'entreprise a signé un accord de 15 ans avec l'Imperial College en vue de commercialiser la technologie issue des recherches de ce dernier.
Modification des perceptions
De nos jours, les remarquables exploits des athlètes handicapés et les records qu'ils battent modifient la perception des handicaps. Ainsi que le fait remarquer Aimee Mullins – athlète, actrice, mannequin et double amputée –, en ce qui concerne le handicap "il ne s'agit plus de surmonter une déficience. Il s'agit de surpassement. Il s'agit de potentiel". Bien qu'on ne puisse pas attribuer les exploits sportifs des sportifs d'élite handicapés à l'innovation technologique, il ne fait pas de doute qu'elle joue un rôle fondamental pour traduire dans la réalité les rêves de nombreuses personnes. Elle porte également la promesse de rendre le sport plus accessible à tous ceux qui souffrent d'un handicap physique. Le Sports Innovation Challenge donne un vague aperçu des riches possibilités d'évolution du sport dans les prochaines années. Nul doute que l'aventure sera passionnante.
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