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Les tribunaux américains aux prises avec la question des objets susceptibles de protection par brevet

Novembre 2012

Par Susie S. Cheng, associée chez Leason Ellis LLP-Intellectual Property Attorneys (États-Unis d’Amérique)

Ces dernières années, les objets susceptibles de protection par brevet sont devenus l’un des aspects du droit des brevets qui a le plus retenu l’attention aux États-Unis d’Amérique. Le 20 mars 2012, la Cour suprême des États-Unis d’Amérique a rendu sa décision dans l’affaire Mayo c. Prometheus, 132 S. Ct. 1289 (2012) (affaire dite “Mayo”). Elle a estimé que les revendications de procédés globalement orientées vers une réaction naturelle à un traitement n’étaient pas susceptibles de protection par brevet au titre de l’article 101 de la loi américaine sur les brevets (35 U.S.C. §101). La décision de la Cour suprême dans l’affaire Mayo ne contenait pas seulement des directives en matière de délivrance de brevets pour des inventions relatives à des procédés pharmaceutiques, elle soulevait aussi des questions quant à l’effet de blocage inhérent aux brevets. Peu après cette décision, la Cour suprême a renvoyé l’affaire Association for Molecular Pathology c. U.S. Patent and Trademark Office (affaire dite “Myriad”), qui portait sur la brevetabilité de molécules d’ADN isolées, devant la Cour d’appel des États-Unis d’Amérique pour le Circuit fédéral (ci-après dénommée “Circuit fédéral”). La récente décision du Circuit fédéral dans l’affaire Myriad indique de quelle manière la jurisprudence Mayo est appliquée et interprétée par les tribunaux.

L’article 101 de la loi américaine sur les brevets (35 U.S.C. §101) définit globalement l’objet susceptible de protection par brevet comme désignant : “un procédé, une machine, un article manufacturé ou une composition de matières, nouveau et utile, ou un perfectionnement nouveau et utile de ceux-ci”. Les tribunaux américains admettent depuis longtemps trois exceptions jurisprudentielles concernant les objets susceptibles de protection par brevet, qui portent sur : “les lois de la nature, les phénomènes naturels et les idées abstraites”, comme par exemple dans l’affaire Diamond c. Diehr, 450 U.S. 175, 185 (1981). L’évolution de la médecine personnalisée et l’innovation dans le domaine thérapeutique ont cependant ravivé l’intérêt pour la question de savoir quelles inventions pharmaceutiques et biotechnologiques sont susceptibles de protection par brevet.


Dans l’affaire Mayo c. Prometheus, la Cour suprême
des États-Unis d’Amérique a déclaré que “pour
transformer une loi de la nature non brevetable en
une application de cette loi susceptible de protection
par brevet, un brevet ne doit pas se contenter
d’énoncer une loi de la nature qui serait accompagnée
des mots “l’appliquer”. Il doit limiter sa portée à une
application particulière, inventive, de la loi.
(Photo: iStockphoto @ Picsfive / @ dra_schwartz)

La décision Mayo

Les revendications de brevet considérées dans cette affaire portent sur une méthode d’optimisation de l’efficacité thérapeutique d’un traitement grâce à l’administration d’un médicament à un patient et à la surveillance de son taux de métabolites en vue de déterminer le meilleur dosage du médicament. On peut résumer la méthode en trois étapes : a) l’administration du médicament au patient, b) la détermination du taux de métabolites dans les globules rouges du patient et c) la comparaison entre les taux de métabolites mesurés et les taux de métabolites prédéfinis, de manière à augmenter ou diminuer le dosage du médicament pour réduire la toxicité et maximiser l’efficacité du traitement. Voir Mayo, 132 S. Ct., 1295-96.

La Cour suprême a d’abord indiqué que les revendications énonçaient des lois de la nature, sous la forme de corrélations entre les taux de métabolites et la toxicité éventuelle ou l’inefficacité d’un dosage (id., 1296). Elle a ensuite conclu que les trois étapes faisant l’objet de revendications, considérées séparément ou ensemble, ne suffisaient pas à transformer des corrélations naturelles non brevetables en procédés brevetables (id., 1297-98). Plus précisément, les trois étapes représentent “une activité traditionnelle de routine, bien comprise et qui a déjà été exercée par les chercheurs dans le domaine visé” (id., 1298). Comme les procédés revendiqués ne présentent pas “les caractéristiques supplémentaires permettant de donner concrètement l’assurance requise”, les revendications constituent “une simple application des lois de la nature” (id.). En fait, dans l’affaire Mayo, la cour s’est fondée sur les articles de la loi sur les brevets qui ont trait à la brevetabilité, à savoir les articles sur la nouveauté (§ 102) et sur l’inventivité (§ 103), pour déterminer si l’objet revendiqué est susceptible de protection par brevet aux termes de l’article 101. Ainsi, l’analyse qu’a effectuée la cour pour déterminer si l’objet est susceptible de protection par brevet repose sur la réponse à la question de savoir si les étapes supplémentaires sont nouvelles et inventives, auquel cas elles seraient brevetables.

Se fondant sur des précédents, à savoir les affaires Diamond c. Diehr, 450 U.S. 175 (1981) et Parker c. Flook, 437 U.S. 854 (1978), la cour a déclaré que les revendications de brevet présentées dans l’affaire Mayo étaient plus faibles que la revendication susceptible de protection par brevet présentée dans l’affaire Diehr, dans laquelle les étapes supplémentaires du procédé permettaient d’intégrer l’équation dans le procédé pris dans sa globalité (id., 1299). Elle a aussi établi qu’elles n’étaient pas plus solides que la revendication non brevetable dans l’affaire Flook, qui n’ajoute rien aux lois de la nature (id., 1299). Il est à noter que toutes les inventions scientifiques reposent sur des lois de la nature et des phénomènes naturels et les utilisent. Dans l’affaire Mayo, la cour a déclaré que des revendications abstraites et générales empêcheraient et bloqueraient l’utilisation “des instruments fondamentaux des travaux scientifiques et technologiques” (id., 1301). Elle a estimé que, si les revendications de brevet étaient acceptées, la mise au point de recommandations pour de meilleurs traitements associant les corrélations fondamentales et des découvertes ultérieures serait compromise (id., 1302).

Prise en considération de la jurisprudence Mayo par le Circuit fédéral dans l’affaire Myriad sur les brevets relatifs à des gènes

L’impact de l’opinion de la Cour suprême sur les affaires ultérieures et sur l’interprétation et l’application de la décision Mayo par le Circuit fédéral est peut-être aussi important que la décision elle-même. Dans l’affaire Myriad, la Cour suprême a rendu une ordonnance de certiorari (examen juridique), infirmé le jugement et renvoyé l’affaire devant le Circuit fédéral pour réexamen à la lumière de l’affaire Mayo.

Au début de sa décision dans l’affaire Myriad, le Circuit fédéral a consacré plusieurs attendus aux éléments non visés par l’appel. De nombreux arguments invoqués dans l’affaire Mayo ont ainsi été court-circuités. Fait plus important, le Circuit fédéral a déclaré que l’appel ne portait pas sur la question de savoir si les revendications visées étaient nouvelles au sens de l’article 102 de la loi américaine sur les brevets (35 U.S.C. §102) ou non évidentes au sens de l’article 103 (35 U.S.C. §103), ou si l’invention était suffisamment divulguée pour étayer certaines revendications en vertu de l’article 112 (35 U.S.C. §112). Il a clairement indiqué que l’appel portait sur la question de savoir si les objets étaient susceptibles de protection par brevet et non sur la brevetabilité.


(Photos: iStockphoto @ Picsfive / @ dra_schwartz)

Dans son jugement rendu après renvoi, le Circuit fédéral indique que la question est de savoir si 1) les revendications sur la composition de matières en rapport avec la molécule d’ADN isolée BRCA (BCRA 1 et BCRA 2 sont respectivement des gènes indiquant une prédisposition au cancer du sein de types 1 et 2); 2) les revendications relatives à la méthode d’analyse et de comparaison des séquences d’ADN; et 3) les revendications relatives au procédé de sélection des traitements potentiels du cancer impliquant la croissance d’une cellule hôte transformée constituent des objets susceptibles de protection par brevet au titre de l’article 101 de la loi américaine sur les brevets (35 U.S.C. §101). Établissant une distinction entre cette affaire et l’affaire Mayo, le Circuit fédéral a estimé que les revendications relatives à la composition et au procédé étaient susceptibles de protection par brevet, tandis que les revendications de méthode ne l’étaient pas.

En ce qui concerne les revendications portant sur la composition de matières, par exemple des molécules d’ADN isolées, deux points sont à relever dans la décision Myriad. Premièrement, la décision Mayo s’applique à des affaires portant sur des revendications de méthode. Comme les revendications examinées par la Cour suprême dans le cadre de l’affaire Mayo ne portent pas directement sur la composition de matières, l’affaire Mayo ne constitue pas un précédent décisif, contrairement aux décisions de la même instance dans les affaires Diamond c. Chakrabarty 447 U.S. 303 (1979) et Funk Brothers Seed Co. c. Kalo Inoculant Co. 333 U.S. 127 (1948), qui définissent le cadre principal pour déterminer si des compositions de matières, notamment des molécules d’ADN isolées, sont susceptibles de protection par brevet. Le Circuit fédéral a déclaré que les molécules d’ADN isolées n’existaient pas dans la nature mais étaient obtenues en laboratoire, qu’elles étaient créées par l’homme et qu’elles étaient le fruit de l’ingéniosité humaine. Il a admis que les molécules d’ADN isolées étaient élaborées à partir de produits de la nature, comme toutes les autres “compositions de matières”, mais qu’elles se distinguaient toutefois des matières naturelles. Le Circuit fédéral a donc réaffirmé que les lois sur les brevets avaient pour objet d’encourager et de protéger l’activité visant à ramener un élément de la nature à une forme concrète.

Deuxièmement, le Circuit fédéral a répondu à la préoccupation relative à l’effet de blocage formulée dans l’affaire Mayo, c’est-à-dire à la crainte que la délivrance de brevets dans un domaine particulier empêche les tiers d’exploiter une loi de la nature. Il était d’avis qu’autoriser la délivrance de brevets pour des gènes isolés n’empêchait pas l’utilisation d’une loi de la nature puisqu’une composition de matières n’en était pas une. La cour a en outre reconnu que “tout brevet emporte un droit d’exclure pour une durée limitée”. Par ailleurs, le Circuit fédéral a rejeté les préoccupations faisant état d’une situation de blocage dans le contexte de la recherche scientifique. Il estimait que “les droits attachés aux brevets étaient rarement exercés aux dépens de la recherche scientifique, même pendant leur durée de validité”

S’agissant des revendications de méthode pour l’analyse et la comparaison de certaines séquences d’ADN dans l’affaire Myriad, le Circuit fédéral a confirmé son jugement antérieur dans lequel il avait estimé que les méthodes diagnostiques reposaient sur des lois de la nature et n’étaient pas susceptibles de protection par brevet. Il a estimé que ces revendications de méthode énuméraient simplement les étapes de la comparaison de deux séquences d’ADN, qui constituait l’intégralité du processus revendiqué. De fait, il est impossible de les distinguer de la revendication énonçant une méthode diagnostique dans l’affaire Mayo, et elles ne sont donc pas susceptibles de protection par brevet.

Enfin, le Circuit fédéral a décidé qu’une revendication de méthode de sélection de produits thérapeutiques possibles pour le traitement du cancer sur la base de changements intervenus dans les taux de croissance des cellules transformées était susceptible de protection par brevet. Les cellules étant élaborées par l’homme et n’existant pas à l’état naturel, la revendication ne porte pas uniquement sur un procédé qui consisterait à prendre deux chiffres et à “comparer” les taux de croissance de deux cellules hôtes. De fait, il ne s’agit pas uniquement d’appliquer une loi de la nature. En d’autres termes, dans ce type de revendication, les cellules considérées, transformées par l’homme, sont susceptibles de protection par brevet.

Pour le moment, le Circuit fédéral n’a donc pas étendu la portée des critères définis par la Cour suprême s’agissant des objets susceptibles de protection par brevet. Il faut toutefois s’attendre à ce que les critères juridiques relatifs aux objets susceptibles de protection par brevet continuent d’évoluer dans les domaines pharmaceutique et biotechnologique. Les conseils en brevets et les juristes attendent avec un vif intérêt les prochaines évolutions dans ce domaine du droit des brevets.

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