À la découverte d’AZAM, l’une des plus grandes marques africaines
Edward Harris, Division des communications de l’OMPI
Nous sommes à Dar-es-Salaam, en République-Unie de Tanzanie, sous le soleil brûlant d’un dimanche après-midi. Dans cette cité portuaire de l’océan Indien, des badauds grignotent des biscuits, du pain ou des glaces, et luttent contre la chaleur en dégustant des sodas ou des jus de fruit. Au large, des bateaux transportent des touristes vers l’île de Zanzibar. Pendant ce temps, au Chamazi Stadium, une brillante équipe de football se rapproche inéluctablement de la ligne de but, tandis que des caméras de télévision retransmettent l’action à travers tout le pays.
Le fil conducteur de ce récit d’un paisible week-end à Dar-es-Salaam : AZAM. Les biscuits, les boissons, les bateaux, l’équipe de foot, la retransmission télévisée du match portent tous le sceau de cette marque, celle d’une petite entreprise familiale de Tanzanie qui, après des débuts modestes, s’est transformée en l’une des plus grandes marques d’Afrique.
Désormais, son propriétaire, le groupe Bakhresa, s’emploie à implanter AZAM en Afrique de l’Est et en Afrique australe, un nouvel épisode de la saga de cette marque née dans les années 70 au fond d’un petit restaurant donnant sur la rue où se vendaient des beignets.
Pour Abubakar Bakhresa, directeur général et fils de Said Salim Bakhresa, le fondateur de la société, l’odyssée d’AZAM est riche en enseignements pour tous les entrepreneurs d’Afrique (et du monde entier) qui cherchent à s’appuyer sur une marque pour promouvoir leurs produits.
Toute création de marque doit s’inscrire dans une perspective à long terme
“Développer une marque ne se fait pas en un claquement de doigts : c’est un véritable défi”, affirme M. Bakhresa. “Mais si vous inscrivez votre projet dans une perspective à très long terme, la prospérité de votre entreprise et de votre marque sera au rendez-vous. La clé, c’est de créer une marque qui ne se cantonne pas seulement à son marché. Ce qu’il faut, c’est se projeter au-delà de ce marché et croire en sa marque”.
Aujourd’hui, flâner à travers les marchés animés du centre de Dar-es-Salaam donne l’impression de découvrir la vitrine de la boutique AZAM. Des jeunes pédalent sur des triporteurs équipés de réfrigérateurs au logo de la marque qui renferment des glaces de la marque, des devantures des magasins proposent la gamme complète des produits AZAM – pain, lait, pâtes, farine, sodas et autres boissons non alcoolisées –, des camions Bakhresa transportent des produits AZAM des entrepôts aux restaurants, des télévisions reliées à des boîtiers de connexion de la marque diffusent des bulletins d’information AZAM, tandis que des commentateurs sportifs enjoués décrivent les prouesses de l’équipe de football AZAM.
Le groupe Bakhresa est aujourd’hui un conglomérat qui affiche un chiffre d’affaires annuel de 800 millions de dollars É.-U. et compte des milliers d’employés dans toute l’Afrique de l’Est.
Le défi du prix allié à la qualité
Ce n’a pas toujours été le cas. Le père d’Abubakar Bakhresa, Said Salim Bakhresa, a créé la société dans les années 70; il tenait alors un petit restaurant où il proposait des articles de boulangerie et d’autres produits alimentaires. Reflet du brassage culturel typique de la ville de Dar-es-Salaam en tant que carrefour commercial situé au cœur de l’océan Indien, le terme AZAM provient à la fois de l’arabe et de l’ourdou et signifie “le plus grand”.
Si le logo actuel, en forme de vague, est relativement récent, le nom de la marque, lui, a perduré au fil des décennies et de l’essor de la société. Comme l’explique M. Bakhresa, c’est parce que la perception de la marque par le public a coïncidé avec la préoccupation première de l’entreprise : allier le prix à la qualité, un facteur déterminant dans un pays comme la République-Unie de Tanzanie.
“Lorsqu’ils venaient en Afrique, les gens pensaient que la population se souciait davantage du prix que de la qualité. Or, nous avons réussi à trouver le parfait compromis en conjuguant prix et qualité, ce qui a fait le succès de notre marque”, déclare-t-il. “Y parvenir fut un véritable défi”, ajoute-t-il.
La réussite de la marque AZAM repose sur deux grands piliers : l’existence de vastes marchés, d’où des économies d’échelle et des prix plus avantageux, et une solide maîtrise de l’intégralité du processus de production, d’où une garantie de qualité. Pour proposer des produits de qualité, le groupe Bakhresa investit massivement dans du matériel de mouture, de transformation et d’emballage dernier cri.
De la marque à l’image de marque
C’est en 1999, alors qu’il élargissait sa gamme de produits et envisagerait de s’implanter à l’étranger, que le groupe finit par prendre la décision de protéger la marque AZAM. “À l’époque, l’entreprise familiale était en plein essor… et nous nous sommes dit que le moment était venu de faire d’AZAM une marque phare”, explique M. Bakhresa. “Notre objectif ultime a toujours été de conquérir l’ensemble de l’Afrique.”
Protéger sa marque au niveau national est une étape fondamentale avant de chercher à s’implanter à l’étranger, affirme Leonila Kishebuka, directrice adjointe de l’enregistrement à la division de la propriété intellectuelle de l’Agence tanzanienne d’enregistrement des entreprises et de délivrance des licences.
Tout en consultant le dossier contenant la toute première demande d’enregistrement de la marque AZAM, Mme Kishebuka fait observer qu’il est particulièrement important de proposer une marque repère sur des marchés peu développés et très variés où plusieurs langues sont parlées, car les consommateurs sont souvent à la recherche de symboles capables de les aider à choisir le bon produit.
“Pour le consommateur, la marque est le moyen d’identifier immédiatement le produit de première qualité qu’il recherche”, explique-t-elle. “Au lieu d’entrer dans un magasin et de demander de la farine de maïs, il lui suffit de donner le nom de la marque pour obtenir le produit souhaité. La marque est ainsi un outil d’identification particulièrement utile pour le consommateur.”
D’après une étude publiée par Brand Africa, AZAM est l’une des rares marques d’Afrique de l’Est à s’être hissée au palmarès des 100 marques les plus prisées d’Afrique en 2015, aux côtés d’Apple, Samsung, Google, Microsoft et Coca-Cola.
La notoriété de la marque a une réelle incidence sur le plan économique, explique M. Bakhresa. Grâce à son image de marque, la société peut ainsi lancer de nouveaux produits sans avoir à mettre sur pied de vastes et coûteuses campagnes de marketing et de relations publiques.
“C’est ce qui fait la force de notre marque. Notre image de marque a si bien évolué que nous n’avons même plus à faire de gros efforts de marketing. Dès qu’un nouveau produit estampillé AZAM est mis sur le marché, il est synonyme aux yeux du consommateur de qualité et de prix abordable, et c’est ce qu’il attend de nous”, déclare-t-il. “Nous nous efforçons au quotidien de relever ce défi.”
De nouvelles cordes à son arc
Pénétrer le marché très concurrentiel des sports et des médias est le dernier défi en date de la marque AZAM. En 2004, le groupe a créé l’AZAM Football Club, en réaction au très grand nombre de matchs de foot étrangers retransmis par la télévision par satellite ou d’autres services télévisuels, explique M. Bakrhesa. L’équipe sert désormais de point d’ancrage au développement de l’activité de la société dans le domaine de la création et de la distribution de contenus. “En réalité, c’est ce club qui nous a permis de développer notre branche médias”, explique-t-il.
Dans des studios flambant neuf installés sur la route principale menant à la sortie de Dar-es-Salaam, juste après l’une des minoteries de la société, des réalisateurs d’AZAM mettent la dernière touche à la couverture d’après-match de la rencontre du jour. Sur un plateau de tournage, une jeune présentatrice portant un foulard plaisante avec un collègue en Swahili, la lingua franca de la République-Unie de Tanzanie. Le bulletin d’informations du soir est en cours de préparation. Les publicités pour AZAM se succèdent, toutes transmises vers les foyers des téléspectateurs au moyen de récepteurs aux couleurs d’AZAM.
La métamorphose d’AZAM, autrefois petite entreprise familiale de produits de boulangerie, en société de télécommunication à la pointe de la modernité est désormais bien engagée et, comme l’indique M. Bakhresa, elle pourrait servir de modèle à d’autres entreprises cherchant à développer leur marque.
“Il faut être bien conscient qu’aucune des activités liées à la marque ne pourra échouer et que vous devrez tout mettre en œuvre pour réussir. Mais si vous vous fixez un horizon sur cinq ou 10 ans maximum, votre marque a toutes les chances de ne pas évoluer.”
Un soutien à l’économie nationale
Selon M. Bakhresa, un réseau d’entreprises solides peut favoriser le développement économique de pays comme la République-Unie de Tanzanie.
“Notre rêve, c’est de voir d’autres personnes nous emboîter le pas, des personnes qui croient dans leur projet, qui cherchent à développer leur gamme de produits, qui s’inscrivent dans une perspective à long terme et qui ont à cœur de voir leur pays prospérer; nous rêvons aussi de voir le nombre des entrepreneurs se multiplier, de voir apparaître une classe moyenne au pouvoir d’achat plus élevé et de voir les gouvernements soutenir davantage le secteur privé”, affirme-t-il.
“Fortes de cette volonté, d’un plus grand nombre d’entrepreneurs à notre image, d’un plus grand nombre de marques inspirées du succès d’AZAM, je crois que l’Afrique comme la République-Unie de Tanzanie seront mieux armées pour lutter contre la pauvreté et améliorer leur niveau de vie. L’avenir s’annonce prometteur.”
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