Un regard nouveau sur les propriétés olympiques
Par Carlos Castro, Responsable du droit d’auteur et contenu, Comité international olympique
Les Jeux olympiques sont la manifestation la plus célèbre au monde. En février, des milliards de spectateurs dans le monde entier suivront trois semaines d’événements sportifs spectaculaires à l’occasion des XXIIIes Jeux olympiques d’hiver qui se dérouleront à Pyeongchang (République de Corée). Du 9 au 25 février, les yeux du monde entier seront rivés sur les symboles bien connus qui sont associés aux Jeux olympiques.
Le système de propriété intellectuelle joue un rôle important dans la protection de ces symboles et la préservation du caractère unique des Jeux olympiques, ainsi que dans l’obtention des fonds nécessaires à l’organisation de l’un des événements sportifs les plus importants et les plus complexes au monde. Cet article examine les différents facteurs qui font des Jeux olympiques un événement d’une telle importance.
Définition des propriétés olympiques
Conformément à la Charte olympique, les propriétés olympiques comprennent le drapeau, la devise, l’hymne, les désignations, les emblèmes, la flamme et les torches olympiques ainsi que les identifications (y compris, mais pas uniquement, “Jeux olympiques” et “Jeux de l’Olympiade”). Toutes ces propriétés sont bien connues, en particulier le symbole des anneaux olympiques qui bénéficie d’un taux de reconnaissance de 93%.
Les propriétés olympiques recouvrent tous les droits se rapportant aux Jeux olympiques relatifs à l’organisation, à l’exploitation et à la commercialisation de cet événement de premier plan. Ces droits s’appliquent également à la saisie d’images fixes et à l’enregistrement de séquences audiovisuelles de l’événement pour une utilisation par les médias dans le cadre de leurs publications, radio-télédiffusions ou plateformes.
En tant qu’œuvres de l’esprit prenant la forme de symboles et de noms distinctifs qui peuvent être utilisés dans le commerce, les propriétés olympiques remplissent les conditions nécessaires pour pouvoir bénéficier d’une protection au titre de la propriété intellectuelle en vertu des lois régissant le droit d’auteur, les marques et les dessins et modèles industriels, lesquels, associés aux brevets, aux modèles d’utilité et aux secrets commerciaux constituent la palette d’actifs de propriété intellectuelle présentant un intérêt pour les Jeux olympiques.
L’ensemble des droits de propriété intellectuelle attachés aux propriétés olympiques sont détenus et contrôlés exclusivement par le Comité international olympique (CIO), qui est chargé de promouvoir les valeurs de l’olympisme et d’apporter un soutien matériel aux fins de l’organisation et de la tenue, dans les villes hôtes, des Jeux olympiques.
Un instrument de financement essentiel
Le CIO et toutes les organisations constituant le Mouvement olympique (les comités nationaux olympiques, les fédérations internationales de sports et les comités d’organisation des Jeux olympiques notamment) sont intégralement financés par le secteur privé. Les actifs de propriété intellectuelle jouent un rôle déterminant pour le bon déroulement des différents programmes du CIO visant à générer les revenus nécessaires au financement des Jeux olympiques. Il s’agit notamment des programmes destinés à administrer la vente des droits de retransmission des Jeux olympiques aux médias, à attirer des partenaires privés dans le cadre du programme mondial des partenaires olympiques (TOP) et à tirer des revenus de la concession de licences grâce aux programmes de concession de licences officielles et de fournisseurs officiels.
Quatre-vingt-dix pour cent des recettes obtenues grâce à ces programmes sont distribués par le CIO à des organisations au sein du Mouvement olympique en vue de financer la tenue des Jeux olympiques et de promouvoir le développement du sport dans le monde. En vertu de la Charte olympique, le CIO est chargé d’assurer la célébration des Jeux olympiques à intervalles réguliers. Les contributions importantes qu’il verse aux comités d’organisation des Jeux olympiques pour le financement et le fonctionnement de ces derniers sont essentielles afin qu’ils puissent mener leur mandat à bonne fin. À titre d’exemple, les contributions versées par le CIO dans le cadre des Jeux olympiques qui se tiendront à Paris en 2024 sont estimées à 1,7 milliard de dollars des États-Unis d’Amérique. Sur les 10% que le CIO conserve pour créer et gérer ces ressources et programmes, environ 3,4 millions de dollars É.-U. sont redistribués quotidiennement aux athlètes et aux organisations sportives de tous niveaux dans le monde entier.
Propriétés olympiques et médias numériques
Les Jeux olympiques sont la manifestation la plus suivie au monde. De nos jours, les amateurs de sport disposent de moyens toujours plus nombreux pour vivre les sensations fortes et les rebondissements qui font des Jeux olympiques un événement aussi passionnant. La diffusion télévisée ainsi que les plateformes des médias numériques et sociaux offrent des possibilités sans précédent pour suivre cet événement. Les entreprises de médias s’acquittent de sommes conséquentes pour bénéficier du droit exclusif de rendre compte des Jeux olympiques ou pour les diffuser, et la vente de ces droits représente 47% des revenus du CIO (soit 4157 millions de dollars É.-U. pour l’exercice 2013-2016).
Les habitudes des téléspectateurs évoluent néanmoins rapidement à mesure que le recours aux technologies numériques devient une seconde nature pour un nombre croissant de personnes, en particulier pour les plus jeunes. Le taux de pénétration toujours plus élevé des smartphones et de l’Internet se traduit par une forte augmentation de la consommation de contenus liés au sport à l’échelle mondiale.
La moitié de la population mondiale a regardé les Jeux olympiques de Rio 2016 et les contenus en ligne ont été visionnés 7,2 milliards de fois sur les plateformes des médias sociaux, soit deux fois plus que pour les Jeux olympiques de Londres 2012. En moyenne, par rapport à Londres 2012, les téléspectateurs ont regardé 20% de contenu de plus pendant Rio 2016. Entre ces deux éditions, la couverture télévisuelle s’est accrue de 13,5% et la couverture numérique a enregistré une augmentation spectaculaire de 198,6%. La distribution d’un nombre inégalé d’heures de contenu (357 000 heures de couverture pour Rio 2016 contre 181 523 heures pour Londres 2012) a permis ce résultat.
La couverture numérique de Rio 2016 a atteint 243 000 heures, un nombre sans précédent, soit deux plus fois que la couverture télévisuelle habituelle et près de trois fois plus que la couverture numérique de Londres 2012. Les Jeux de Rio 2016 ont été les plus ouverts au monde numérique de l’histoire des Jeux olympiques.
Attirer les plus jeunes grâce aux sports électroniques
Faire en sorte que la diffusion des Jeux olympiques continue d’attirer les jeunes est un défi permanent. Conscient de la grande popularité des jeux vidéo, le CIO a lancé officiellement son jeu vidéo intitulé “Steep™ – En route pour les Jeux olympiques” à l’occasion des Jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang 2018. L’objectif est d’éveiller l’intérêt des jeunes et d’autres publics et de leur donner un aperçu des événements sportifs qui se déroulent pendant les Jeux d’hiver dans toutes les disciplines. Le lancement du jeu en tant que produit officiel sous licence des Jeux de Pyeongchang 2018 traduit l’intérêt du CIO à l’égard des sports électroniques, sur lesquels il souhaite se pencher davantage.
À l’heure où le développement des sports électroniques, toujours plus populaires, est appuyé par différentes parties prenantes du Mouvement olympique, les participants au Sommet olympique tenu en octobre 2017 ont débattu de l’importance de ces sports dans le cadre des Jeux olympiques. À cette réunion, il a été demandé au CIO et à l’Association mondiale des fédérations internationales de sport (GAISF) d’engager un dialogue avec l’industrie du jeu vidéo et la communauté des joueurs afin d’examiner la possibilité d’intégrer les sports électroniques dans le cadre des Jeux olympiques.
Les participants au Sommet olympique ont conclu que les sports électroniques pourraient être considérés comme une activité sportive pour autant que les joueurs qui les pratiquent se préparent et s’entraînent avec une intensité comparable à celle des athlètes d’autres sports plus traditionnels. Ils ont également affirmé que le contenu des sports électroniques ne devait pas enfreindre les valeurs olympiques, un point qui constituait un prérequis pour leur reconnaissance par le CIO en tant que sports de compétition. Les participants ont également décidé que, pour être reconnus en tant que sports, les sports électroniques devraient être structurés et représentés par une organisation garantissant leur conformité aux règles et réglementations du Mouvement olympique (antidopage, paris, manipulation, etc.).
Afin d’étudier de plus près la relation qui pourrait exister entre les sports électroniques et le Mouvement olympique à l’avenir, INTEL, partenaire mondial TOP du CIO, a présenté deux expériences distinctes avant les Jeux de Pyeongchang 2018 : le tournoi de sports électroniques Intel® Extreme Masters de Pyeongchang, qui comprend l’un des jeux électroniques les plus célèbres de tous les temps, StarCraft® II de Blizzard Entertainment, et “Steep™ – En Route pour les Jeux olympiques”.
La chaîne olympique
En vue de mettre encore davantage à profit les possibilités offertes par les médias numériques et de répondre aux attentes d’un public avide de contenu sportif passionnant, le CIO a récemment lancé la chaîne olympique, un outil médiatique mondial multiplateforme orienté vers le numérique qui permet aux passionnés de découvrir le pouvoir du sport, de se familiariser avec le Mouvement olympique et d’obtenir des informations sur les nombreux projets culturels et humanitaires menés par le CIO tout au long de l’année. La chaîne olympique fait partie intégrante de l’Agenda olympique 2020 du CIO, la feuille de route stratégique pour l’avenir du Mouvement olympique, qui mise sur les technologies numériques pour aller à la rencontre des jeunes en utilisant les outils qui leur sont familiers.
La chaîne olympique est disponible gratuitement en 11 langues à l’adresse www.olympicchannel.com et depuis des applications mobiles pour appareils Android et iOS. Elle compte actuellement plus de 6000 programmes couvrant toutes les disciplines olympiques et 206 pays. À ce jour, la chaîne a établi des partenariats avec 54 organisations sportives et a lancé en avant-première plus de 30 séries originales. Elle a également noué des partenariats avec différents groupes de médias afin de produire du contenu local, notamment NBCUniversal et le Comité national olympique des États-Unis d’Amérique (USOC), Eurosport en Europe et beIN Media Group dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.
Protection des propriétés olympiques
La protection des propriétés olympiques et des droits de propriété intellectuelle qui leur sont attachés est essentielle pour préserver l’exclusivité accordée aux partenaires commerciaux lorsqu’ils s’associent aux Jeux olympiques et pour obtenir ainsi les revenus connexes destinés au financement du Mouvement olympique. Tous les programmes du CIO liés aux droits relatifs au marketing et aux médias sont ancrés dans les conditions exclusives accordées aux partenaires marketing des Jeux olympiques en ce qui concerne le contenu, le média, le type de service ou de produit, ou le territoire. Tout contenu non autorisé ou toute association non autorisée avec les Jeux olympiques risque de porter préjudice à la valeur des propriétés olympiques et aux recettes tirées de ces dernières.
Au niveau international, le CIO s’appuie sur différents traités internationaux en matière de propriété intellectuelle, et en particulier sur le Traité de Nairobi adopté en 1981 et administré par l’OMPI. En vertu de ce traité, tous les États parties sont tenus de protéger le symbole olympique contre son utilisation à des fins commerciales (dans la publicité, sur les produits, en tant que marque, etc.) sans l’autorisation du CIO.
Conscients de l’importance économique croissante du sport, de nombreux pays (qui ont accueilli ou accueilleront une édition des Jeux olympiques) ont adopté une législation nationale destinée spécifiquement à protéger les propriétés olympiques et les droits des organisateurs de manifestations sportives. Cette législation énonce des mesures juridiques visant en particulier à empêcher le “marketing sauvage”, qui peut être défini comme toute tentative, intentionnelle ou non, de créer une association fausse ou non autorisée avec les propriétés olympiques ou les Jeux olympiques, au moyen de laquelle des entreprises ou organisations n’ayant pas de lien officiel avec un événement cherchent à l’exploiter dans le cadre de leur marketing. Les pays suivants ont adopté une telle législation : l’Argentine, qui accueillera les Jeux olympiques de la jeunesse de Buenos Aires 2018, l’Afrique du Sud, l’Australie, le Brésil, le Canada, la Chine, l’Égypte, les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, la France, la Grèce, l’Italie, la Pologne, la République tchèque et le Royaume-Uni.
S’agissant des Jeux olympiques de Pyeongchang 2018, outre la loi sur le droit d’auteur et la loi sur les marques déjà en vigueur, le Gouvernement de la République de Corée a adopté une loi spéciale sur le soutien aux Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de Pyeongchang 2018. Des discussions sont en cours sur la mise en œuvre d’une législation analogue en vue de Tokyo 2020, Beijing 2022 et Paris 2024.
De surcroît, le CIO établit des règlements qui s’appliquent spécifiquement aux Jeux olympiques. Il s’agit notamment des règles d’accès aux informations applicables aux XXIIIes Jeux olympiques d’hiver Pyeongchang 2018, 9 – 25 février 2018, des directives du CIO sur les médias sociaux et numériques destinées aux personnes accréditées aux XXIIIes Jeux olympiques d’hiver – Pyeongchang 2018 et des directives du CIO relatives à l’utilisation des propriétés olympiques à des fins éditoriales par des organisations médias (en anglais uniquement).
Ces règlements visent à préserver l’exclusivité requise au titre de tous les accords portant sur les droits relatifs au marketing et aux médias et garantissent que les recettes connexes seront générées pour financer le Mouvement olympique de manière appropriée. Ils permettent ainsi au grand public de profiter du spectacle multidisciplinaire que sont les Jeux olympiques.
Le Magazine de l’OMPI vise à faciliter la compréhension de la propriété intellectuelle et de l’action de l’OMPI parmi le grand public et n’est pas un document officiel de l’OMPI. Les désignations employées et la présentation des données qui figurent dans cette publication n’impliquent de la part de l’OMPI aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires ou zones concernés ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites territoriales. Les opinions exprimées dans cette publication ne reflètent pas nécessairement celles des États membres ou du Secrétariat de l’OMPI. La mention d’entreprises particulières ou de produits de certains fabricants n’implique pas que l’OMPI les approuve ou les recommande de préférence à d’autres entreprises ou produits analogues qui ne sont pas mentionnés.