Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI
DÉCISION DE L’EXPERT
Michel Simond Developpement contre Jack Van Zandt
Litige n° DFR2008-0032
1. Les parties
Le Requérant est la société Michel Simond Developpement, La Roche sur Foron, France, représentée par Cabinet Verniau Selarl, France.
Le Défendeur est Jack Van Zandt, Paris, France.
2. Nom de domaine et prestataire Internet
Le litige concerne le nom de domaine <michelsimmond.fr> enregistré le 21 juin 2007.
Le prestataire Internet est la société EuroDNS SA.
3. Rappel de la procédure
Une demande déposée par le Requérant auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) a été reçue le 24 juin 2008, par courrier électronique et le 27 juin 2008, par courrier postal.
Le 25 juin 2008, le Centre a adressé à l’Association Française pour le Nommage Internet en Coopération (ci-après l’“Afnic”) une demande aux fins de vérification des éléments du litige, de gel des opérations et de levée de l’anonymat du titulaire du nom de domaine, dont les coordonnées étaient en “diffusion restreinte” dans le registre Whois de l’Afnic. Le 26 juin 2008 l’Afnic a confirmé ‘ensemble des données du litige.
Le 3 juillet 2008, le Centre informait le Requérant de la levée de l’anonymat du titulaire du nom de domaine litigieux et lui demandait en conséquence d’amender sa demande afin de tenir compte de ces éléments d’identification tels que transmis par l’Afnic.
Le Centre recevait la demande amendée du Requérant le 7 juillet 2008, par courrier électronique et le 10 juillet 2008, par courrier postal.
Le Centre a vérifié que la demande répond bien au Règlement sur la procédure alternative de résolution des litiges du “.fr” et du “.re” par décision technique (ci-après le “Règlement”) en vigueur depuis le 11 mai 2004, et applicable à l’ensemble des noms de domaine du “.fr” et du “.re” conformément à la Charte de nommage de l’Afnic (ci-après la “Charte”).
Conformément à l’article 14(c) du Règlement, une notification de la demande, valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur le 16 juillet 2008. Le Défendeur n’ayant adressé aucune réponse dans le delai imparti, le Centre a notifié le défaut du Défendeur en date du 6 août 2008.
Le 19 août 2008, le Centre nommait Christiane Féral-Schuhl comme Expert dans le présent litige. L’Expert constate qu’il a été nommé conformément au Règlement. L’Expert a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément à l’article 4 du Règlement.
4. Les faits
Le Requérant est une société qui propose aux acheteurs et vendeurs de fonds de commerce, des services, notamment des conseils juridiques et fiscaux, une aide dans les démarches administratives et dans les relations avec les établissements bancaires, ainsi que des prestations de formation et d’assistance.
Le Requérant est titulaire de la marque française semi-figurative n° 06 3 454 751 MICHEL SIMOND, le 1er réseau national en transactions de commerces, déposée le 4 octobre 2006, auprès de l’INPI, sous les classes 35, 36 et 41.
Le Requérant a également déposé les noms de domaine <michelsimond.com>, <michelsimond.fr> et <msimond.fr>, respectivement les 20, 26, et 24 octobre 2000.
Le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux <michelsimmond.fr>, le 21 juin 2007.
C’est dans ce contexte que le Requérant a engagé la présente procédure à l’encontre du Défendeur.
5. Argumentation des parties
A. Requérant
Le Requérant invoque tout d’abord que l’enregistrement et l’utilisation du nom de domaine par le Défendeur constituent une atteinte aux droits des tiers.
En effet, le Requérant indique être titulaire de droits sur les signes “michel simond” au titre de :
- sa dénomination sociale,
- la marque française semi-figurative MICHEL SIMOND, le 1er réseau national en transactions de commerces qu’il a déposée auprès de l’INPI le 4 octobre 2006, étant précisé que si la marque comprend la phrase “Le 1er réseau national spécialisé en transactions de fonds de commerces”, le Requérant est surtout connu auprès de la clientèle par le signe “michel simond”,
- des noms de domaine <michelsimond.com>, <michelsimond.fr> et <msimond.fr>, qu’il a déposés en octobre 2000.
Le Requérant considère ainsi que l’enregistrement et l’utilisation du nom de domaine litigieux par le Défendeur constituent une atteinte aux droits des tiers, à savoir à ses propres droits. En effet, le nom de domaine litigieux reproduit quasiment à l’identique la marque MICHEL SIMOND, la dénomination sociale “michel simond developpement”, ainsi que les noms de domaine <michelsimond.com> et <michelsimond.fr>, et prête donc nécessairement à confusion avec chacun de ces signes distinctifs, et particulièrement avec la marque. Le Requérant précise à ce titre que la présence du suffixe “.fr” dans le nom de domaine litigieux et l’ajout d’un second “m” dans le terme SIMOND n’écarte pas le risque de confusion entre les deux signes pour l’internaute d’attention moyenne. Il s’agirait ainsi, selon le Requérant, d’un cas de typosquatting, visant à profiter des erreurs de frappe des internautes.
En outre, le Requérant considère que le Défendeur utilise également le nom de domaine litigieux de mauvaise foi. En effet, le nom de domaine litigieux renvoie à une page parking laquelle comprend des liens commerciaux de sites et sociétés que le Requérant considère comme des concurrents.
Dès lors, le Défendeur utiliserait le nom de domaine litigieux de mauvaise foi, en s’appropriant indûment la notoriété du Requérant.
Le Requérant relève en outre que le Défendeur est coutumier de ce type d’activités, une décision rendue par un expert auprès du Centre dans une affaire similaire à l’encontre du Défendeur en témoignant (Groupe Auchan contre Jack Van Zandt, Litige OMPI No. DFR2007-0040).
Le Requérant se prévaut enfin de droits sur l’élément objet de l’atteinte pour solliciter la transmission du nom de domaine litigieux à son bénéfice.
B. Défendeur
Le Défendeur n’a adressé aucune réponse au Centre.
6. Discussion
L’Expert constate que le Requérant invoque un enregistrement et une utilisation des noms de domaine litigieux par le Défendeur en violation de ses droits et sollicite en conséquence la transmission de ce nom de domaine à son bénéfice.
Conformément aux dispositions de l’article 20(c) du Règlement, l’Expert “fait droit à la demande lorsque l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine par le défendeur constitue une atteinte aux droits des tiers telle que définie à l’article 1 du présent règlement et au sein de la Charte et si la mesure de réparation demandée est la transmission du nom de domaine, lorsque le requérant a justifié de ses droits sur l’élément objet de ladite atteinte et sous réserve de sa conformité avec la Charte”.
Par conséquent, l’Expert s’est attaché à vérifier si l’enregistrement et/ou l’utilisation du nom de domaine <michelsimmond.fr> portent atteinte aux droits de tiers, et si le Requérant justifie de droits lui permettant de solliciter la transmission de ce nom de domaine.
Enregistrement du nom de domaine litigieux
En application de l’article 1.1 du Règlement, l’atteinte au droit de tiers peut notamment être constituée lorsque le nom de domaine litigieux est identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), sauf si le défendeur fait valoir un droit ou un intérêt légitime sur le nom de domaine et agit de bonne foi.
En l’espèce, le Requérant justifie de ses droits de marque sur les termes MICHEL SIMOND, le 1er réseau national en transactions de commerces. Il prouve également avoir enregistré les noms de domaine <michelsimond.com>, <michelsimond.fr> et <msimond.fr>, et que les termes “michel simond développement” constituent sa dénomination sociale. Or, le nom de domaine litigieux reprend la partie essentielle de la marque du Requérant, y ajoutant le suffixe <.fr> et un <m> muet. Dès lors l’Expert est amené à considérer qu’il existe un risque de confusion avec les termes sur lesquels le Requérant justifie détenir des droits.
Il s’agit là d’un cas de “typosquatting” classique ayant pour objet de profiter d’une erreur de frappe de l’internaute pour détourner celui-ci vers un site Internet distinct, et ce à titre lucratif.
Enfin, le Défendeur ne fait valoir aucun droit ou intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux.
Dès lors, l’Expert considère que l’enregistrement du nom de domaine litigieux par le Défendeur porte atteinte aux droits du Requérant.
Utilisation du nom de domaine en violation des droits des tiers
Le nom de domaine litigieux est utilisé par le Défendeur pour renvoyer à une page parking, comprenant des liens commerciaux vers des sites de tiers intervenant dans le même domaine d’activité du Requérant et pouvant donc entrer en concurrence avec ce dernier.
Or, une telle utilisation du nom de domaine litigieux, démontre la volonté du Défendeur de tirer profit de la notoriété des droits antérieurs du Requérant par le trafic généré et constitue de ce fait une atteinte aux règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale.
En outre, au regard de la décision produite par le Requérant, il apparaît que le Défendeur est coutumier de ce type de comportements.
En conséquence, l’Expert considère que l’utilisation du nom de domaine litigieux par le Défendeur porte ainsi atteinte aux règles de la concurrence et au comportement loyal en matière commerciale.
7. Décision
Conformément aux articles 20(b) et (c) du Règlement, l’Expert ordonne la transmission au profit du Requérant du nom de domaine <michelsimmond.fr>.
Christiane Féral-Schuhl
Expert
Le 3 septembre 2008