Le Requérant est Crédit Industriel et Commercial S.A de Paris, France, représenté par MEYER & Partenaires, France.
Le Défendeur est CIC Banq de Paris, France.
Le nom de domaine litigieux <cic-banq.com> est enregistré auprès de Ligne Web Services SARL (ci-après désigné "l'Unité d'enregistrement").
Une plainte a été déposée par Crédit Industriel et Commercial S.A auprès du Centre d'arbitrage et de médiation de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le "Centre") en date du 15 septembre 2016. En date du 15 septembre 2016, le Centre a adressé une requête à l'Unité d'enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 16 septembre 2016, l'Unité d'enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l'ensemble des données du litige.
Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés "Principes directeurs"), aux Règles d'application des Principes directeurs (ci-après dénommées les "Règles d'application"), et aux Règles supplémentaires de l'OMPI (ci-après dénommées les "Règles supplémentaires") pour l'application des Principes directeurs précités.
Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d'application, le 21 septembre 2016, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d'application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 11 octobre 2016. Le Défendeur n'a fait parvenir aucune réponse. En date du 12 octobre 2016, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.
En date du 26 octobre 2016, le Centre nommait William Lobelson comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu'elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d'application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d'acceptation et une déclaration d'impartialité et d'indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d'application.
Le Requérant est le Crédit Industriel et Commercial, en abrégé "CIC", établissement bancaire établi en France de longue date et qui compte aujourd'hui parmi les principales banques françaises.
Le Requérant exerce son activité sous le sigle CIC, et est titulaire de nombreux enregistrements de marques et de noms de domaines portant sur "CIC" ou "CIC BANQUE(S)", dont notamment les marques française et européenne "CIC" Nos. 1358525 et 005891411, ou les marques internationale et française "CIC BANQUES" Nos. 585099 et 1682713, ou les noms de domaine <cic.fr> / <cic.eu> et <cicbanque.com>, enregistrés et exploités en relation avec des services bancaires.
Le Défendeur s'est déclaré au registre WhoIs sous le nom de CIC BANQ et a enregistré le nom de domaine litigieux <cic-banq.com> en date du 1er août 2016.
Le nom de domaine pointe vers un site web rédigé en langue française, dans lequel il est fait référence à une banque dite CIC BANQ, laquelle est présentée comme un établissement bancaire de référence, opérant en France et dans le monde entier.
Le Requérant a présenté une plainte selon la procédure UDRP auprès du Centre en date du 15 septembre 2016. Une copie imprimée de la plainte a été signifiée au Défendeur par expédition au moyen d'un service privée de livraison, en l'espèce la société "DHL". Le pli n'a pu être livré à son destinataire, le nom et l'adresse déclarés par le Défendeur s'avérant être fantaisistes.
Le Requérant fait valoir le risque de confusion qui existe entre ses marques et noms de domaine, et le nom de domaine contesté.
Il énonce que non seulement le Défendeur n'a aucun droit ou intérêt légitime dans le nom de domaine, mais également qu'il a enregistré et exploite celui-ci dans un but frauduleux. Selon le Requérant, la banque présentée par le Défendeur sous le nom CIC BANQ est purement fictive; le Défendeur se livrerait à la pratique du "phishing", consistant à enregistrer à titre de nom de domaine un nom identique ou approchant de celui d'une banque de renommée, y associer une adresse de courrier électronique présentant les apparences d'une adresse officielle de la banque imitée, ainsi qu'un site Internet laissant croire à l'internaute que ce dernier est celui régulièrement exploité par la banque dont le nom est usurpé; ceci aux fins de soutirer des internautes dupés des données sensibles et confidentielles, dans le but de leur soustraire frauduleusement des sommes d'argent.
Le Requérant, indépendamment des poursuites qu'il annonce entreprendre contre le Défendeur, sollicite le transfert du nom de domaine litigieux à son profit.
Le Défendeur n'a pas répondu aux arguments du Requérant. Il a été déclaré en défaut par le Centre en date du 12 octobre 2016.
Le nom de domaine contesté est <cic-banq.com>.
Le Requérant justifie des droits privatifs qu'il détient, notamment à titre de marque, nom commercial et noms de domaine, sur sigle le CIC, et sur la dénomination CIC BANQUE(S).
Il fait également valoir la renommée de ce nom, notamment en France, dans le domaine des services bancaires. Cette renommée, qui n'est pas contestée par le Défendeur, a été reconnue par des décisions antérieures du Centre, voir BANKOA, S.A. contre Yokngshen Kliang, Litiges OMPI No. D2004-0005; Crédit Industriel et Commercial S.A. contre Jeongyong Cho, Litige OMPI No. D2013-1263; Crédit Industriel et Commercial contre. Mao Adnri, Litige OMPI No. D2013-2143.
Le nom de domaine contesté reprend à l'identique le sigle CIC dans lequel la Requérante détient des droits, et notamment des droits de propriété industrielle, et y adjoint le néologisme BANQ, évocateur du nom commun BANQUE.
Non seulement le nom de domaine <cic-banq.com> est-il similaire, visuellement, phonétiquement et conceptuellement aux marques et noms de domaine antérieurs CICBANQUES et <cicbanque.com> de la Requérante, mais loin de dissimuler l'emprunt du sigle CIC, l'élément BANQ contribue davantage encore à rapprocher le nom de domaine litigieux des marques et noms de domaine du Requérant, dont l'activité est notoirement connue comme étant celle d'une banque.
L'adjonction du radical suffixe technique ".com" étant parfaitement inopérante, la Commission Administrative est en mesure de conclure que le nom de domaine est similaire, au point de prêter à confusion, avec les marques et autres signes distinctifs du Requérant, de sorte que les conditions posées au paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs sont satisfaites.
Le Requérant affirme que le Défendeur lui est inconnu et qu'il ne l'a jamais autorisé à faire usage de sa marque; que le Défendeur n'exerce aucune activité de bonne foi sous le nom de domaine litigieux.
Le Défendeur n'a présenté aucun argument en réponse aux allégations du Requérant et ne justifie donc pas de ses droits ou intérêts légitimes dans le nom de domaine.
Au vu des arguments avancés par le Requérant et des pièces produites à l'appui du dossier, la Commission Administrative peut raisonnablement conclure que le Défendeur ne saurait prétendre à aucun droit ou intérêt légitime dans le nom de domaine contesté au sens du paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs, et ce nonobstant le fait que ce dernier pointe vers un site Internet dans lequel il est bien fait usage de la dénomination CIC BANQ, et que le nom de domaine est enregistré au nom d'une entité dite CIC BANQ.
Les éléments versés au dossier par le Requérant, que le Défendeur n'a pas jugé utile de contester, autorisent la Commission Administrative à conclure à un enregistrement et à un usage de mauvaise foi du nom de domaine.
Le Requérant a démontré que le nom et l'adresse indiqués par le Défendeur lors de l'enregistrement du nom de domaine sont fantaisistes.
Selon les affirmations du Requérant, non contredites par le Défendeur, il n'existe aucune banque du nom de CIC BANQ. Le Défendeur s'est donc déclaré sous un nom fictif, identique au nom de domaine contesté, pour tenter de justifier le choix de ce dernier.
Il est constant que la dissimulation de sa véritable identité pour les besoins de l'enregistrement d'un nom de domaine fait peser sur le réservataire un soupçon de fraude, voir BHP Billiton Innovation Pty Ltd contre Domains By Proxy, LLC and BHP Online, Litige OMPI No. DCO2012-0028; SOPRA GROUP contre "Pierre Pasquier", Litige OMPI No. D2013-0170.
La Commission Administrative remarque encore, à l'examen des pièces produites par le Requérant, que le Défendeur a déclaré au registre WhoIs un numéro de téléphone correspondant à la numérotation applicable en France, une boite postale "BP 254" sans doute imaginaire mais également semblable aux désignations des boites postales des services postaux français, un code postal correspondant au troisième arrondissement de la ville de Paris, et surtout que l'unité d'enregistrement et le serveur IP d'hébergement du nom de domaine contesté sont localisés en France.
Enfin le site web accessible par le nom de domaine contesté est entièrement rédigé en langue française, et contient les reproductions des marques semi-figuratives des principales banques françaises, dont le Requérant.
Il apparait plus que probable à la Commission Administrative que le Défendeur qui se dissimule derrière le nom usurpé de CIC BANQ opère en France; il ne peut dès lors ignorer le réseau bancaire CIC du Requérant, dont la notoriété sur le sol français n'est pas sérieusement contestable.
Il ne fait donc aucun doute pour la Commission Administrative que le Défendeur avait bien à l'esprit la marque CIC du Requérant lors de l'enregistrement du nom de domaine, voir Crédit Industriel et Commercial S.A. contre Festi Addict/ Sebastien Voiriot, Litige OMPI No. D2011-1421.
Le nom de domaine contesté a bien été enregistré de mauvaise foi.
Au vu des affirmations du Requérant, non contredites, et des pièces produites, dont notamment des impressions des pages web accessibles par le nom de domaine contesté, la Commission Administrative ne peut que faire le constat que la démarche du Défendeur s'inscrit manifestement dans une logique de "phishing".
Le Défendeur a enregistré un nom de domaine similaire à celui d'une grande banque française, publie un site web reproduisant toutes les apparences et caractéristiques de celui d'une véritable banque, et utilise un nom de domaine <contact@cic-banq.com>, dans le but évident d'obtenir d'internautes dupés, pensant avoir à faire au Requérant, des données sensibles et/ou confidentielles.
Cette pratique est régulièrement jugée frauduleuse, voir Aperam S.A. contre Jean Paul Rouffiac, Litige OMPI No. D2015-1925; Crédit Industriel et Commercial S.A. contre Zabor Mok, Litige OMPI No. D2015-1432 ; Sanofi contre Benoit Menetrieux, Litige OMPI No. D2014-1288.
La Commission Administrative est donc ainsi en mesure de conclure que le nom de domaine a été enregistré et utilisé de mauvaise foi.
Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d'application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <cic‑banq.com> soit transféré au Requérant.
William Lobelson
Expert Unique
Le 4 novembre 2016