Le Requérant est Christian Dior Couture de Paris, France, représenté par NOVAGRAAF, France.
Le Défendeur est Jean Guedj de Marseille, France.
Le nom de domaine litigieux <dior-france.com> est enregistré auprès de Register.IT SPA (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).
Une plainte a été déposée par Christian Dior Couture auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le « Centre ») en date du 11 avril 2017. En date du 12 avril 2017, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 14 avril 2017, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l’ensemble des données du litige. Le 24 mai 2017, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant lui notifiant d’une irrégularité de la plainte et l’invitant à corriger cette irrégularité. Le Requérant a déposé une plainte amendée le 29 mai 2017.
Le Centre a vérifié que la plainte et la plainte amendée répondent bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés « Principes directeurs »), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les « Règles d’application »), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les « Règles supplémentaires ») pour l’application des Principes directeurs précités.
Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 30 mai 2017, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 19 juin 2017. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 21 juin 2017, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.
En date du 11 juillet 2017, le Centre nommait Michel Vivant comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.
Après examen du dossier, la Commission administrative, en vertu du paragraphe 12 des Règles UDRP, a émis, le 18 juillet 2017, une ordonnance administrative demandant au Requérant de fournir de nouvelles pièces susceptibles d’apporter la preuve de l’usage du nom de domaine fait par le Défendeur tel que décrit à la page neuf, paragraphe C, de la plainte amendée. Il était indiqué au Requérant qu’il disposait de cinq jours calendaires à partir de la date de l’ordonnance pour déposer toutes pièces supplémentaires, un même délai de cinq jours a ensuite été octroyé au Défendeur pour répondre, la date pour le rendu de la décision étant reportée au 3 août.
Le Requérant a répondu à l’ordonnance et fourni des pièces supplémentaires le 31 juillet 2017. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse.
La Société Christian Dior Couture, mondialement connue, est titulaire de plusieurs marques DIOR dont certaines enregistrées. Parmi ces marques figure la marque internationale n° 313176 enregistrée en 1966, portant sur les classes 14, 18, 23, 24, 25 et 26, ainsi que de plusieurs noms de domaine déclinant le nom Dior.
Le nom de domaine litigieux <dior-france.com> a été enregistré le 21 mars 2017 par Jean Guedj, domicilié à Marseille.
Le Requérant fait observer que le Défendeur « reprend à l’identique la marque de renommée DIOR associée au mot France qui fait directement référence au pays d’enregistrement du nom de domaine » et qu’ainsi le nom de domaine litigieux est quasi-identique à ses droits antérieurs.
Il souligne que ses marques sont notoirement connues et que le Défendeur ne pouvait les ignorer au moment où il a enregistré le nom de domaine litigieux. Il indique par ailleurs que le Défendeur n’a obtenu de lui ni licence ni autorisation.
Enfin, le Requérant avance qu’ainsi le Défendeur a procédé à un enregistrement frauduleux et que, par la suite, il s’est servi de celui-ci pour créer une fausse adresse email, pour « se faire passer pour la société Christian Dior Couture » et détourner des sommes d’argent. Il ajoute que le Défendeur a offert à la vente le nom de domaine litigieux.
Il demande en conséquence la radiation du nom de domaine litigieux.
Le Défendeur a fait défaut.
A titre préliminaire, l’unité d’enregistrement a confirmé que la langue du contrat d’enregistrement du nom de domaine litigieux était le français et le Requérant a formé expressément une demande tendant à ce que le français soit la langue de la procédure. Le Requérant est une entreprise française, le Défendeur semble bien être français et son adresse, en toutes hypothèses, est en France, le nom de domaine litigieux fait expressément référence à la France et enfin l’hébergeur est une société française.
Le Défendeur qui a choisi de faire défaut n’a rien objecté à la demande du Requérant (sur ce point voir Sopra Group contre David Jordan, Litige OMPI No. D2014-0277 ; ou encore NC Numericable contre Registration private, Domains By Proxy, LLC / Annette Barbier, Litige OMPI No. D2015-0186).
Il sera donc fait droit à celle-ci quant à l’usage du français conformément aux dispositions du paragraphe 11 des Règles d’application.
Le nom de domaine litigieux <dior-france.com> reprend l’intégralité des marques DIOR détenues par le Requérant, pratique qui a toujours été considérée dans les décisions des commissions administratives en vertu des Principes directeurs comme un fort indice de cybersquatting (voir, par exemple, récemment encore Crédit Agricole S.A. contre Marconi Jessica, Litige OMPI No. D2017-0492). L’adjonction du terme « France » ne diminue pas le risque de confusion, tout au contraire, d’autant que la Maison Dior est mondialement connue comme une société française.
Le Requérant a raison par ailleurs d’observer que le nom de domaine litigieux présente la même structure que les noms de domaine qu’il détient de type <dior-couture.com> ou <dior-boutique.com>.
Le nom de domaine litigieux est donc indiscutablement similaire au point de prêter à confusion à la marque détenue par le Requérant au sens du paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs
Les marques DIOR sont des marques renommées que le Défendeur ne peut prétendre avoir ignorées au moment où il a enregistré le nom de domaine litigieux.
Il n’a reçu par ailleurs aucune autorisation pour y procéder.
La Commission administrative est ainsi d’avis que le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache au sens du paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs.
L’enregistrement d’un nom de domaine reprenant une marque renommée ne peut avoir été fait qu’en toute connaissance de cause, et ainsi être une circonstance caractérisant la mauvaise foi. La jurisprudence des Commissions administratives est bien, et fort raisonnablement, établie en ce sens.
S’agissant de l’usage fait de mauvaise foi, le simple fait de laisser inutilisé le nom de domaine litigieux dans certaines circonstances, qui plus est reprenant une marque renommée, est de nature à établir un comportement qui ne saurait être de bonne foi.
De plus, le Requérant fait encore état d’un usage frauduleux tendant à réaliser ce qu’on pourrait qualifier d’escroqueries, fondées sur une ou des usurpations d’identité. Or, s’il ne peut en l’état justifier de telles qualifications pénales, il produit des pièces propres à établir qu’une procédure pénale fondée sur ces faits a été initiée contre le Défendeur – ce qui démontre le sérieux du grief formulé.
La Commission administrative considère donc que l’enregistrement et l’usage du nom de domaine litigieux ont été faits de mauvaise foi au sens du paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs.
Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <dior-france.com> soit radié.
Michel Vivant
Expert Unique
Le 1er août 2017