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Loi n° 2001-36 du 17 avril 2001, relative à la protection des marques de fabrique, de commerce et de services

 Loi n° 2001—36 du 17 avril 2001, relative à la protection des marques de fabrique, de commerce et de services

Loi n° 2001—36 du 17 avril 2001,
relative à la protection des marques de fabrique,
de commerce et de services[1]

Au nom du peuple,

La chambre des députés ayant adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit:

Chapitre premier
Dispositions générales

1. La présente loi a pour objet de fixer les règles relatives à la protection des marques de fabrique, de commerce et de services.

2. La marque de fabrique, de commerce ou de services est un signe visible permettant de distinguer les produits offerts à la vente ou les services rendus par une personne physique ou morale.

Peuvent notamment constituer un tel signe:

    a) Les dénominations sous toutes les formes, telles que les mots, les assemblages de mots, les noms patronymiques, les noms géographiques, les pseudonymes, les lettres, les chiffres et les sigles,

    b) Les signes figuratifs, tels que les dessins, les reliefs, les formes, notamment celles du produit ou de son conditionnement ou celles caractérisant les services, les dispositions, les combinaisons ou les nuances de couleurs,

    c) Les signes sonores, tels que les sons et les phrases musicales.

3. Le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l'égard des produits ou services désignés.

Sont dépourvus de caractère distinctif, les signes suivants:

    a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service,

    b) Les signes ou dénomination pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de la production du bien ou de la prestation de service,

    c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle.

Le caractère distinctif peut, sauf pour les signes et dénominations prévus au point (c) à l'alinéa deuxième de cet article, être acquis par l'usage.

4. Ne peut être adopté comme marque ou élément de marque, tout signe:

    a) Reproduisant ou imitant les armoiries, drapeaux et autres emblèmes, sigles, dénominations ou abréviations de dénominations de tout État ou de toute organisation internationale intergouvernementale ou de toute organisation créée par une convention internationale, à moins que cette utilisation ne soit autorisée par l'autorité compétente de l'État ou de l'organisation en cause.

    b) Reproduisant ou imitant des signes ou poinçons officiels de contrôle et de garantie adoptés par un État, à moins que cette utilisation ne soit autorisée par l'autorité compétente de cet État.

    c) Contraire à l'ordre public ou aux bonnes mœurs, ou dont l'utilisation est légalement interdite.

    d) De nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service.

5. Ne peut être adopté comme marque, un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment:

    a) À une marque enregistrée antérieure ou à une marque notoire,

    b) À une dénomination ou raison sociale susceptible de créer une confusion dans l'esprit du public,

    c) À un nom commercial ou à une enseigne distinctive connus sur l'ensemble du territoire tunisien, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public,

    d) À une appellation d'origine protégée,

    e) Aux droits d'auteur,

    f) Aux droits résultant d'un dessin ou modèle industriel protégé,

    g) Aux droits rattachés à la personnalité d'un tiers, notamment à son nom patronymique, à son pseudonyme ou à son image,

    h) Au nom ou à l'image d'une collectivité locale.

Chapitre II
De l'acquisition des droits relatifs à la marque

6. La propriété de la marque s'acquiert par l'enregistrement. La propriété de la marque peut être acquise en copropriété.

L'enregistrement produit ses effets à compter de la date de dépôt de la demande, et ce, pour une période de dix ans indéfiniment renouvelable.

7. La demande d'enregistrement d'une marque est déposée auprès de l'organisme chargé de la propriété industrielle, moyennant le paiement des redevances dont le montant sera fixé par décret.

Si le déposant est représenté par un mandataire, un pouvoir doit être joint à la demande.

Le déposant domicilié à l'étranger doit constituer un mandataire établi en Tunisie.

Le pouvoir du mandataire doit spécifier l'étendue du mandat. Sauf stipulations contraires, ce pouvoir s'étend à tous les actes affectant la marque, y compris les notifications prévues par la présente loi, sauf les cas de retrait ou de renonciation au dépôt auxquels un pouvoir spécial doit obligatoirement être joint. En cas de pluralité de déposants pour une même demande, un mandataire commun doit en être constitué.

8. Toute demande d'enregistrement de marque est présentée selon des modalités fixées par décret.

Tout dépôt donne lieu à vérification par l'organisme chargé de la propriété industrielle:

    – qu'il a été présenté conformément aux modalités prévues à l'alinéa premier du présent article.

    – que le signe peut constituer une marque au sens des articles 2, 3 et 4 de la présente loi.

L'organisme chargé de la propriété industrielle remet au déposant un récépissé de dépôt.

En cas de non-conformité de la demande d'enregistrement aux dispositions de l'alinéa deuxième du présent article, notification motivée en est faite au déposant. Un délai d'un mois à compter de la notification lui est imparti pour régulariser la demande d'enregistrement ou contester les objections de l'organisme chargé de la propriété industrielle.

À défaut de régularisation ou de présentation d'observations permettant de lever les objections, la demande d'enregistrement est rejetée.

Lorsque les motifs de rejet n'affectent la demande d'enregistrement qu'en partie, il n'est procédé qu'à son rejet partiel.

La décision de rejet doit être motivée.

Aucune régularisation effectuée conformément aux dispositions du présent article ne peut avoir pour effet d'étendre la portée de l'enregistrement.

9. Tout dépôt reconnu recevable est publié au bulletin officiel de l'organisme chargé de la propriété industrielle, et ce, dans un délai maximum de douze mois à partir de la date de dépôt.

10. Du jour du dépôt de la marque et jusqu'à sa publication conformément aux dispositions de l'article 9 de la présente loi, le déposant peut être autorisé, sur requête justifiée, à rectifier les erreurs matérielles relevées dans les pièces de dépôt moyennant le paiement d'une redevance dont le montant sera fixé par décret.

11. Peuvent faire opposition à la demande d'enregistrement:

    – Le propriétaire d'une marque enregistrée ou déposée antérieurement ou le bénéficiaire du droit de priorité à l'enregistrement d'une marque prévu à l'article 18 de la présente loi,

    – Le propriétaire d'une marque notoire antérieure,

    – Le bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation, sauf stipulation contraire du contrat.

L'opposition doit être présentée, dans les deux mois suivant la publication de la demande d'enregistrement de la marque, auprès du représentant légal de l'organisme chargé de la propriété industrielle, et ce, selon des modalités qui seront fixées par décret.

Est déclarée irrecevable, toute opposition soit formée hors délai, soit présentée par une personne qui n'a pas qualité pour le faire, soit non conforme aux conditions de forme de la demande d'opposition.

12. Dans le cas où la demande d'opposition est conforme aux conditions prévues par l'article 11 de la présente loi, l'organisme chargé de la propriété industrielle tente la conciliation des deux parties selon une procédure qui sera fixée par décret.

13. L'organisme chargé de la propriété industrielle tient un registre appelé “Registre national des marques”. Les modalités d'inscription sur ce registre seront fixées par décret.

L'organisme chargé de la propriété industrielle inscrit sur le registre des marques toute marque enregistrée tant que la demande d'enregistrement n'a pas fait l'objet d'un refus ou d'un retrait et remet au déposant un certificat d'enregistrement de la marque moyennant le paiement d'une redevance dont le montant sera fixé par décret.

L'enregistrement est publié au bulletin officiel de l'organisme chargé de la propriété industrielle dans un délai maximum de douze mois à partir de la date d'enregistrement.

Tout acte modifiant ou transmettant les droits attachés à une marque n'est opposable aux tiers que s'il a été inscrit sur le registre.

Les inscriptions portées au registre sont soumises au paiement des redevances dont les montants seront fixés par décret.

Toute inscription portée au registre national des marques fait l'objet d'une mention au bulletin officiel de l'organisme chargé de la propriété industrielle.

14. Toute personne peut consulter le registre national des marques. Elle peut également, moyennant le paiement des redevances dont les montants seront fixés par décret, obtenir de l'organisme chargé de la propriété industrielle les pièces suivantes:

    – Un certificat comprenant une copie du modèle de la marque et les indications relatives au dépôt et à l'enregistrement.

    – Une reproduction des inscriptions portées au registre relatives à une marque.

    – Un certificat constatant qu'il n'existe aucune inscription.

15. Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut en revendiquer la propriété en justice.

A moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la date de publication de l'enregistrement.

16. L'enregistrement d'une marque peut être renouvelé pour une période de dix ans par déclaration écrite, s'il ne comporte ni modification du signe ni extension de la liste des produits ou services.

Pour être acceptée, la déclaration doit:

    – Être présentée au cours des six derniers mois de validité de l'enregistrement par le propriétaire ou son mandataire, lequel doit y joindre un pouvoir spécial.

    – Comporter l'identification du propriétaire de la marque et de la marque à renouveler.

    – Être accompagnée de la justification du paiement de la redevance prescrite.

En cas de non-conformité de la déclaration aux dispositions de l'alinéa deuxième du présent article, notification motivée en est faite au déposant par l'organisme chargé de la propriété industrielle par lettre recommandée avec accusé de réception et un délai d'un mois lui est imparti à partir de la réception de la notification pour régulariser la déclaration ou contester les objections de l'organisme chargé de la propriété industrielle.

La déclaration est rejetée à défaut de régularisation ou de présentation d'observations permettant la levée des objections.

Le renouvellement de l'enregistrement n'est soumis ni à la vérification de sa conformité aux dispositions des articles 2, 3 et 4 de la présente loi ni à la procédure d'opposition prévue à l'article 11 de la présente loi.

La nouvelle période de dix ans court à partir de la fin de la période antérieure.

Toute modification du signe ou extension de la liste des produits ou services désignés doit faire l'objet d'un nouveau dépôt.

17. Sous réserve des dispositions des conventions internationales auxquelles la Tunisie est partie, l'étranger qui n'est ni établi ni domicilié sur le territoire tunisien bénéficie des dispositions de la présente loi à condition qu'il justifie avoir déposé la marque régulièrement ou obtenu son enregistrement dans le pays de son domicile ou de son établissement et que ce pays reconnaît le principe de la réciprocité en matière de protection des marques tunisiennes.

18. Le droit de priorité prévu aux conventions internationales auxquelles la Tunisie est partie est étendu à toute marque préalablement déposée dans un pays étranger.

Sous réserve des dispositions des conventions internationales auxquelles la Tunisie est partie, le droit de priorité est subordonné à la nécessaire reconnaissance par ledit pays du même droit lors du dépôt des marques tunisiennes.

19. La revendication d'un droit de priorité attaché à un précédent dépôt étranger comporte l'obligation de faire parvenir à l'organisme chargé de la propriété industrielle, dans les trois mois du dépôt en Tunisie, une copie du dépôt antérieur certifiée conforme à l'original par l'organisme chargé de la propriété industrielle auprès duquel le dépôt a été fait et, s'il y a lieu, la justification du droit de revendiquer la priorité.

Si cette condition n'est pas respectée, la revendication de priorité est réputée non avenue.

20. Le demandeur qui n'a pas respecté les délais mentionnés aux articles 16 et 19 de la présente loi, et qui justifie d'une excuse légitime peut être relevé des déchéances qu'il a pu encourir, et ce, sur présentation d'une demande au représentant légal de l'organisme chargé de la propriété industrielle.

Est déclarée irrecevable, toute demande:

    – Non précédée de l'accomplissement des formalités omises,

    – Présentée plus de deux mois à compter de la cessation de l'empêchement,

    – Non accompagnée de la justification du paiement de la redevance prescrite.

Chapitre III
Des droits conférés par l'enregistrement

21. L'enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits et services qu'il a désignés lors du dépôt.

22. Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire:

    a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que: “formule, façon, système, imitation, genre, méthode”, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement,

    b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée.

23. Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public:

    a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.

    b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.

24. L'emploi d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur s'il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cet emploi constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.

Les dispositions de l'alinéa premier du présent article sont applicables à l'emploi d'une marque notoirement connue au sens des conventions internationales ratifiées par la République Tunisienne.

25. L'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme:

    a) Dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est, soit antérieure à l'enregistrement, soit le fait d'un tiers de bonne foi employant son nom patronymique,

    b) Référence nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée, à condition qu'il n'y ait pas de confusion sur l'origine du produit ou du service.

Toutefois, si cette utilisation porte atteinte à ses droits, le titulaire de l'enregistrement peut présenter une requête auprès du tribunal compétent pour limiter cette utilisation ou l'interdire.

Chapitre IV
De la transmission et de la perte des droits sur la marque

26. Toute cession ou modification des droits attachés à une marque enregistrée doit, pour être opposable aux tiers, être inscrite au registre national des marques.

27. Les droits attachés à une marque peuvent faire l'objet, en tout ou en partie, d'une cession ainsi que d'une mise en gage. La cession, même partielle, ne peut comporter de limitation territoriale. La cession ou la mise en gage est constatée par écrit à peine de nullité.

28. Les droits attachés à une marque peuvent faire l'objet d'une licence d'exploitation exclusive ou non exclusive.

29. Le déposant d'une demande d'enregistrement d'une marque ou le titulaire de la marque peut obtenir le retrait de la licence d'exploitation d'une marque à l'encontre d'un licencié qui enfreint les clauses du contrat de licence, et ce, en vertu d'une requête présentée au tribunal compétent.

30. Le déposant d'une demande d'enregistrement peut retirer sa demande pour tout ou partie des produits ou services pour lesquels l'enregistrement est demandé, et ce, avant la délivrance de la marque.

Le retrait est effectué par une déclaration écrite formulée par le déposant ou son mandataire.

Une demande d'enregistrement déposée par plusieurs personnes ne peut être retirée que par l'ensemble des déposants ou par une personne ayant un pouvoir légal émanant de l'ensemble des déposants.

S'il a été concédé des droits d'exploitation ou de gage, la demande de retrait doit être accompagnée du consentement écrit du bénéficiaire du droit d'exploitation ou du créancier gagiste.

Le retrait ne fait pas obstacle à la publication de la demande d'enregistrement au bulletin officiel de l'organisme chargé de la propriété industrielle.

31. Le propriétaire d'une marque enregistrée peut renoncer aux effets de cet enregistrement pour tout ou partie des produits ou services pour lesquels s'applique la marque.

32. L'action en nullité est exercée devant le tribunal compétent.

L'enregistrement d'une marque est déclaré nul par décision de justice s'il n'est pas conforme aux dispositions des articles 2, 3, 4 et 5 de la présente loi.

La décision d'annulation a un effet absolu.

33. Le ministère public peut agir d'office en nullité dans les cas prévus aux articles 2, 3 et 4 de la présente loi.

Seul le titulaire d'un droit antérieur peut agir en nullité sur le fondement de l'article 5 de la présente loi. Toutefois, son action n'est pas recevable si la marque a été déposée de bonne foi et s'il en a toléré l'usage pendant cinq ans.

L'action en nullité ouverte au propriétaire d'une marque notoirement connue se prescrit par cinq ans à compter de la date d'enregistrement, à moins que ce dernier n'ait été demandé de mauvaise foi.

34. Le titulaire d'une marque peut être déchu de ses droits, si sans juste motif, pendant une période ininterrompue de cinq ans, n'en a pas fait un usage sérieux pour l'un au moins des produits ou services visés dans l'enregistrement.

Sont considérés comme un usage sérieux d'une marque, notamment:

    a) L'apposition de la marque sur les produits, ou sur leur conditionnement en vue de leur commercialisation.

    b) L'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif.

    c) L'usage de la marque fait avec le consentement du titulaire ou par toute personne habilitée à utiliser une marque collective.

La déchéance ne peut être invoquée si, entre l'expiration de la période de cinq années visée à l'alinéa premier du présent article et la présentation de la demande de déchéance, la marque a fait l'objet d'un commencement ou d'une reprise d'usage sérieux.

Toutefois, cet usage sérieux ne fait pas obstacle à la déchéance s'il a été entrepris dans les trois mois avant la présentation de la demande et après que le titulaire a eu connaissance de l'éventualité de présentation de cette demande.

La preuve de l'exploitation de la marque incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tout moyen.

35. L'action en déchéance peut être exercée devant le tribunal par toute personne intéressée.

Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou des services visés dans l'enregistrement, la déchéance ne s'étend qu'aux produits ou services concernés.

La déchéance prend effet à partir de la date d'expiration du délai de cinq ans prévu à l'article 34 de la présente loi. Elle a un effet absolu.

36. Le titulaire d'une marque peut être déchu de ses droits:

    a) Lorsque la marque est devenue de son fait la désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service.

    b) Lorsque la marque est devenue propre à induire le public en erreur notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service, et ce, par suite de l'usage qui en est fait par le titulaire ou avec son consentement.

Chapitre V
Des recours

37. Le recours contre les décisions du représentant légal de l'organisme chargé de la propriété industrielle en matière de délivrance ou de rejet des marques est formé devant les tribunaux compétents.

38. Le délai de recours contre les décisions prévues à l'article 37 de la présente loi est d'un mois à partir de la date de la notification de la décision litigieuse.

39. Le recours est formé par une requête écrite déposée ou présentée au greffe du tribunal.

À peine d'irrecevabilité, la déclaration comporte obligatoirement les mentions suivantes:

    – Si le requérant est une personne physique: ses nom, prénom, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance.

    – Si le requérant est une personne morale: sa forme, sa dénomination, son siège social et les nom et prénom de son représentant légal.

    – La date et l'objet de la décision attaquée.

    – Les nom et prénom du propriétaire de la marque ou du titulaire de la demande et son adresse, si le requérant n'a pas l'une de ces qualités.

Une copie de la décision attaquée est jointe à la requête.

Si la requête ne contient pas l'exposé des moyens invoqués, le requérant doit déposer cet exposé au greffe dans les sept jours qui précèdent la tenue de l'audience.

40. Une copie de la requête est notifiée à l'organisme chargé de la propriété industrielle, par voie d'huissier notaire, par le requérant.

L'organisme chargé de la propriété industrielle transmet au greffe le dossier de la décision attaquée, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de la copie de la requête.

41. Lorsque le recours est formé par une personne autre que le propriétaire de la marque ou le titulaire de la demande, celui-ci est appelé en cause par le requérant par voie d'huissier notaire.

42. Le requérant peut, devant le tribunal, se faire représenter par un mandataire.

43. Le jugement du tribunal est notifié par la partie la plus diligente aux autres parties.

Chapitre VI
De la contrefaçon et des sanctions

44. Toute atteinte portée aux droits du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile et pénale de son auteur.

Constitue une atteinte aux droits sur la marque, la violation des dispositions prévues aux articles 22 et 23 de la présente loi.

45. Ne peuvent être considérés comme ayant porté atteinte aux droits attachés à une marque, les faits antérieurs à la publication de la demande d'enregistrement de cette marque. Cependant, si le déposant notifie au présumé contrefacteur une copie de la demande d'enregistrement, les faits postérieurs à cette notification peuvent être constatés et poursuivis.

Le tribunal saisi sursoit à statuer jusqu'à la publication de l'enregistrement.

46. Les actions civiles relatives aux marques sont portées devant le tribunal compétent.

47. Les dispositions de l'article 46 de la présente loi ne font pas obstacle au recours à l'arbitrage dans les conditions prévues par le code de l'arbitrage.

48. L'action civile en contrefaçon est engagée par le propriétaire de la marque.

Elle peut être engagée par le titulaire d'une demande d'enregistrement dans les conditions prévues par l'article 45 de la présente loi. Toutefois, le bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation peut agir en contrefaçon, sauf stipulation contraire du contrat, si, malgré sa mise en demeure, le titulaire n'exerce pas ce droit.

Toute partie à un contrat de licence est recevable à intervenir dans l'instance en contrefaçon engagée par une autre partie afin d'obtenir la réparation du préjudice qui lui est propre.

L'action en contrefaçon se prescrit à l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la réalisation des faits qui en sont la cause.

Est irrecevable toute action en contrefaçon d'une marque postérieure enregistrée dont l'usage a été toléré pendant cinq ans, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi. Toutefois, l'irrecevabilité est limitée aux seuls produits et services pour lesquels l'usage de la marque est toléré.

49. Lorsque le tribunal est saisi d'une action en contrefaçon, son président, saisi et statuant en la forme des référés, peut interdire, à titre provisoire, et sous astreinte, la poursuite des actes argués de contrefaçon, ou subordonner cette poursuite à la constitution de garanties destinées à assurer l'indemnisation du propriétaire de la marque ou du bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation.

La demande d'interdiction ou de constitution de garanties n'est admise que si l'action au fond apparaît sérieuse et a été engagée dans un délai d'un mois à compter du jour où le propriétaire de la marque ou le bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation a eu connaissance des faits sur lesquels elle est fondée. Le président du tribunal peut subordonner l'interdiction à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l'indemnisation éventuelle du préjudice subi par le défendeur si l'action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée.

50. Toute personne qui intente l'action en contrefaçon conformément à l'article 48 de la présente loi est en droit de faire procéder, en tout lieu, par huissier notaire assisté d'un expert et en vertu d'une ordonnance sur requête du président du tribunal compétent, soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d'échantillons, soit à la saisie réelle des produits ou des services qu'elle prétend marqués, offerts à la vente, livrés ou fournis à son préjudice ou en violation de ses droits.

Lorsque la saisie réelle est autorisée, elle doit se limiter à la mise sous main de justice des seuls échantillons nécessaires à la preuve de la contrefaçon.

La saisie réelle peut être subordonnée par le président du tribunal à la constitution de garanties par le demandeur, destinées à assurer l'indemnisation éventuelle du préjudice subi par le défendeur, si l'action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée.

A défaut par le requérant de s'être pourvu devant le tribunal dans un délai de quinze jours, la saisie ou la description est nulle de plein droit, sans préjudice, des dommages et intérêts. Le délai de quinze jours court à partir du jour où la saisie ou la description est intervenue.

51. Sous réserve des peines prévues par des textes spéciaux, sera puni d'une amende de 5000 à 50.000 dinars quiconque aura:

    a) reproduit, imité, utilisé, apposé, supprimé ou modifié une marque en violation des droits conférés par son enregistrement et des interdictions qui découlent de celui-ci,

    b) importé ou exporté des marchandises présentées sous une marque contrefaite.

52. Sous réserve des peines prévues par des textes spéciaux, sera puni de la peine prévue à l'article 51 de la présente loi quiconque aura détenu, sans motif légitime, des marchandises qu'il sait revêtues d'une marque contrefaite, ou aura sciemment vendu, mis en vente, fourni ou offert de fournir des produits ou des services sous une telle marque.

53. En cas de récidive pour ce qui est des infractions définies aux articles 51 et 52 de la présente loi, un emprisonnement de un à six mois peut être prononcé outre l'amende qui est portée au double.

54. Le tribunal peut, dans tous les cas ordonner, aux frais du condamné, la publication intégrale ou par extrait du jugement dans les journaux qu'il désigne ainsi que son affichage dans les lieux qu'il indique notamment aux portes principales des usines ou ateliers du condamné et à la devanture de ses magasins.

55. En cas de condamnation pour infraction aux dispositions des articles 51, 52 et 53 de la présente loi, le tribunal peut prononcer la confiscation des produits ainsi que celle des instruments ayant servi à commettre le délit.

Le tribunal peut également prescrire la destruction de ces produits.

Chapitre VII
Des mesures à la frontière

56. Le propriétaire d'une marque enregistrée ou ses ayants droit peut, s'il dispose de motifs sérieux l'incitant à soupçonner une opération d'importation de marchandises comportant des marques contrefaites, présenter aux services des douanes une demande écrite pour réclamer la suspension du dédouanement à l'importation de ces marchandises.

Le demandeur est tenu d'informer les services des douanes dans le cas où sont droit ne serait plus valablement enregistré ou serait arrivé à expiration.

57. La demande prévue à l'article 56 de la présente loi doit contenir:

    – Les nom et prénom ou la dénomination sociale du demandeur, son domicile ou son siège.

    – Une justification établissant que le demandeur est titulaire d'un droit sur les marchandises objet du litige,

    – Une description des produits suffisamment précise pour permettre aux services des douanes de les reconnaître.

En outre, le demandeur doit fournir toutes les autres informations utiles dont il dispose pour permettre aux services des douanes de prendre une décision en connaissance de cause, sans, toutefois, que la présentation de ces informations constitue une condition à la recevabilité de la demande.

Ces informations portent notamment sur:

    – l'endroit où les marchandises sont situées ou le lieu de destination prévu,

    – l'indication de l'envoi ou des colis,

    – la date d'arrivée ou de dépôt prévu des marchandises,

    – le moyen de transport utilisé,

    – l'identification de l'importateur, de l'exportateur ou du détenteur des marchandises.

La demande doit également contenir l'engagement du demandeur d'assumer sa responsabilité vis à vis de l'importateur s'il est formellement prouvé que les marchandises retenues par les services des douanes ne constituent pas une atteinte à la marque protégée.

58. Les services des douanes, saisis d'une demande établie conformément aux dispositions de l'article 56 de la présente loi, examinent cette demande et informent sans délai le demandeur par écrit de la décision prise. Cette décision doit être dûment motivée.

Les services des douanes peuvent exiger du demandeur, lorsque sa demande a été acceptée ou lorsque des mesures d'intervention ont été prises en application des dispositions de l'article 59 de la présente loi, la consignation d'un cautionnement destiné à assurer le paiement du montant des frais engagés du fait du maintien des marchandises sous contrôle douanier.

59. Lorsque les services des douanes constatent, le cas échéant, après consultation du demandeur, que des marchandises correspondent à celles indiquées dans sa demande, ils procèdent à la rétention de ces marchandises.

Les services des douanes informent immédiatement le demandeur et l'importateur de la rétention et leur accordent la possibilité d'examiner les marchandises qui ont été retenues et d'en prélever les échantillons nécessaires aux analyses et essais permettant de se prononcer sur la réalité de la contrefaçon, et ce, conformément aux dispositions du code des douanes et sans atteinte au principe de la confidentialité de l'information.

Au vu d'une ordonnance sur requête et aux fins de !'engagement d'actions en justice, les services des douanes informent le demandeur, des noms et adresses de l'exportateur, de l'importateur et du destinataire des marchandises s'ils leur sont connus ainsi que de la quantité des marchandises objets de la demande.

60. Sous réserve que toutes les formalités douanières aient été accomplies, la mesure de rétention des marchandises est levée de plein droit, à défaut pour le demandeur dans le délai de dix jours ouvrables à compter de la notification de la rétention des marchandises de justifier auprès des services des douanes qu'il s'est pourvu par la voie civile ou correctionnelle auprès du tribunal compétent et que des mesures conservatoires ont été décidées par le président du tribunal et d'avoir consigné un cautionnement suffisant pour couvrir sa responsabilité envers les personnes concernées.

Le montant de ce cautionnement est fixé par le tribunal.

Dans des cas appropriés, le délai mentionné à l'alinéa premier du présent article peut être prorogé de dix jours ouvrables au maximum.

Le propriétaire, l'importateur ou le destinataire des marchandises ont la faculté d'obtenir la levée de la rétention des marchandises en question moyennant la consignation d'un cautionnement dont le montant est fixé par le tribunal et qui sera suffisant pour protéger les intérêts du demandeur, et ce, à condition que toutes les formalités douanières aient été accomplies.

Le propriétaire, l'importateur, le destinataire ainsi que le demandeur doivent être informés, sans délai, par les services des douanes de la levée de la rétention des marchandises.

61. S'il s'avère, en vertu d'un jugement ayant acquis l'autorité de la chose jugée, que les marchandises sont contrefaites, le tribunal décide de la suite à réserver à ces marchandises:

    – Soit leur destruction sous contrôle des services des douanes;

    – Soit leur exclusion du circuit commercial à condition de ne pas porter atteinte aux droits du titulaire de la marque.

62. Les services des douanes peuvent de leur propre initiative suspendre le dédouanement des marchandises comportant une marque contrefaite.

Dans ce cas:

    – Les services des douanes informent immédiatement le titulaire de la marque, ou ses ayants droits, qui doit présenter une demande conformément à l'article 56 de la présente loi, et ce, dans un délai de trois jours à partir de la date de la notification qui lui est faite par les services des douanes et les dispositions du présent chapitre s'appliquent de plein droit.

    – La mesure de rétention des marchandises prise conformément aux dispositions du présent article est levée de plein droit si le titulaire de la marque, ou ses ayants droits ne procède pas au dépôt de la demande conformément à l'article 56 de la présente loi dans un délai de trois jours à partir de la notification qui lui en est faite par les services des douanes.

63. La responsabilité des services des douanes ne peut être engagée s'ils ne parviennent pas à reconnaître les marchandises présumées comporter une marque contrefaite.

64. Les dispositions du présent chapitre ne s'appliquent pas aux marchandises sans caractère commercial contenues dans les bagages personnels des voyageurs, et ce, dans la limite des quantités fixées par les lois et règlements en vigueur.

65. Les modalités d'application des dispositions du présent chapitre seront fixées par arrêté du ministre chargé des finances.

Chapitre VIII
Des marques collectives

66. La marque est dite collective lorsqu'elle peut être exploitée par toute personne respectant un règlement d'usage établi par le titulaire de l'enregistrement.

La marque collective est accordée par une licence non exclusive.

67. Les dispositions de la présente loi s'appliquent aux marques collectives.

Chapitre IX
Dispositions diverses

68. Sont abrogées, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, toutes dispositions contraires et notamment le décret du 3 juin 1889 sur les marques de fabrique et de commerce et les textes qui l'ont complété ou modifié.

69. Nonobstant l'abrogation du décret du 3 juin 1889 relatif aux marques de fabrique et de commerce, les marques enregistrées en vertu des dispositions de ce décret et les textes qui l'ont complété ou modifié restent valables et sont considérées comme ayant été enregistrées en vertu de la présent loi.

Le délai à l'expiration duquel les droits du titulaire de la marque sont éteints au sens de l'article 34 de la présente loi et enregistrés avant l'entrée en vigueur de la présente loi est de cinq ans à compter de son entrée en vigueur.

La présente loi sera publiée au Journal Officiel de la République Tunisienne et exécutée comme loi de l'État.

Tunis, le 17 avril 2001.
Zine El Abidine Ben Ali


[1] Travaux préparatoires
Discussion et adoption par la chambre des députés dans sa séance du 19 mars 2001.