Le Requérant est Sodexo, France, représenté par Areopage, France.
Le Défendeur est franck gauthier, France.
Le nom de domaine litigieux <sodexo-group-sa.com> est enregistré auprès de Wix.com Ltd. (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).
Une plainte a été déposée par Sodexo auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 9 novembre 2021. En date du 9 novembre 2021, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 10 novembre 2021, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignés dans la plainte. Le 17 novembre 2021, le Centre a envoyé un courrier électronique au Requérant avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant le Requérant à soumettre un amendement à la plainte. Le Requérant a déposé une plainte amendée le 17 novembre 2021.
Le Centre a vérifié que la plainte et la plainte amendée répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.
Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 18 novembre 2021, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 8 décembre 2021. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 9 décembre 2021, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.
En date du 17 décembre 2021, le Centre nommait Michel Vivant comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.
La société Sodexo, société française, est originairement titulaire de diverses marques Sodexho. Celle-ci ayant décidé de simplifier l’orthographe de sa dénomination sociale pour se dénommer Sodexo, la société est désormais titulaire de plusieurs marques SODEXO dont une marque française enregistrée le 16 juillet 2007, une marque internationale n° 964615 enregistrée le 8 janvier 2008 sous priorité de la marque française, ainsi que diverses marques de l’Union européenne ultérieures. La société Sodexo est également titulaire de nombreux noms de domaine <Sodexo> à travers le monde.
Le nom de domaine litigieux <sodexo-group-sa.com> a été enregistré le 12 octobre 2021, soit postérieurement aux marques susmentionnées. Il est à ce jour inactif.
Le Requérant fait valoir que sa marque SODEXO est une marque renommée, renommée reconnue “à de nombreuses reprises” par le Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI, et que le nom de domaine <sodexo-group-sa.com> reproduit à l’identique sa marque SODEXO (et reproduit quasiment à l’identique sa première marque SODEXHO). Il observe que “l’ajout du mot générique Group fait clairement référence à une affiliation au groupe SODEXO”, “l’élément SA” correspondant simplement à la forme juridique du Requérant. Il considère qu’en conséquence le public sera trompé, croyant à un site officiel.
Le Requérant affirme ensuite que le Défendeur “n’a aucun droit sur le signe Sodexo ou Sodexho, en tant que raison sociale, nom commercial, enseigne de magasin, marque ou nom de domaine antérieurs à ceux du Requérant”, qu’il n’est pas connu sous de telles dénominations et qu’il “n’a aucun lien d’affiliation, association, de parrainage ou autre lien avec le Requérant et n’a pas été autorisé par ce dernier ou par une filiale ou une société affiliée à enregistrer le nom de domaine contesté et à l’utiliser”.
Enfin, le Requérant fait observer que le Défendeur ne pouvait que connaître la marque SODEXO lorsqu’il a enregistré le nom de domaine litigieux. L’enregistrement est ainsi fait de mauvaise foi, et cela, ajoute-t-il, “très probablement dans le but de créer une confusion avec cette marque afin d’induire les tiers en erreur”. Il relève aussi que le nom de domaine litigieux est inactif et met en avant que “la détention passive d’un nom de domaine n’empêche pas une constatation de mauvaise foi”. Il y a ainsi pour lui enregistrement et usage de mauvaise foi.
Le Défendeur n’a pas répondu aux arguments du Requérant.
Comme il a été indiqué plus haut, le Requérant est titulaire de plusieurs marques SODEXO.
Le nom de domaine litigieux <sodexo-group-sa.com> reprend donc dans leur entièreté les marques SODEXO du Requérant. Or la reprise d’une marque dans son entièreté est jugée aujourd’hui par les commissions administratives de l’OMPI comme suffisant à établir le caractère identique ou similaire au point de prêter à confusion d’un nom de domaine avec une marque tel qu’exigé par les Principes directeurs (voir la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux Principes UDRP, troisième édition (“Synthèse de l’OMPI, version 3.0”), sections 1.7 et 1.8).
En conséquence, la Commission administrative considère que le nom de domaine litigieux est semblable aux marques du Requérant au point de prêter à confusion, au sens du paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs.
Rien ne rattache a priori le Défendeur à l’appellation Sodexo.
Le Requérant déclare ne lui avoir accordé aucune autorisation d’utiliser ses marques SODEXO. Ce qui, comme il convient de le rappeler, à défaut de démonstration contraire par le Défendeur, doit, selon les commissions administratives, être tenu pour exact (ainsi Croatia Airlines d.d. contre Modern Empire Internet Ltd., Litige OMPI No. D2003-0455 ; ou Boursorama S.A. contre Pharpentier Gildas, Litige OMPI No. D2016‑2248 ; CIC contre S.A. contre John, Finanfast, Litige OMPI No. D2021-0259 ; ou encore Alstom contre Contact Privacy Inc. Customer 12410865156 / damien anistor, Litige OMPI No. D2021-3111).
Par ailleurs, le nom de domaine litigieux débouche sur un site inactif, ce qui ne permet pas de croire à l’existence d’un intérêt légitime chez le Défendeur.
La Commission administrative observe en outre que, si le Défendeur avait effectivement des droits ou intérêts légitimes à faire valoir, il aurait été bien simple pour lui de ne pas faire défaut et de produire ses arguments.
Aussi la Commission administrative estime-t-elle que le Défendeur n’a aucun droit sur les noms de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache au sens du paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs.
Le Requérant fait justement valoir que sa marque est une marque notoire ou renommée, reconnue comme telle par de nombreuses décisions des commissions administratives (par exemple Sodexo v. Daniela Ortiz, Litige OMPINo. D2021-0628 ; ou Sodexo v. Yang Zhichao, Litige OMPI No. D2021-0902). Ainsi faut-il considérer que le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux en toute connaissance de cause et donc en méconnaissance des droits du Requérant.
La Commission administrative tient par ailleurs à souligner que le fait d’adjoindre à une marque, et plus encore à une marque renommée, une indication telle que le terme “group” qui suggère le rattachement à un groupe ou bien “sa” qui se comprend comme le renvoi à une forme sociétaire, doit indiscutablement être compris comme manifestant une volonté renforcée de tromper les Internautes, en donnant au nom enregistré l’apparence d’un nom de domaine authentique inséré dans un ensemble Sodexo plus vaste.
Quant à l’usage fait du nom de domaine litigieux, il ne peut être considéré comme un usage de bonne foi. La présente situation de passive holding correspond très exactement aux observations figurant à la Synthèse de l’OMPI, version 3.0, section 3.3, à savoir : notoriété de la marque ; défaut du Défendeur (se dispensant donc de répondre) ; masquage de l’identité du Défendeur et fournitures de fausses indications (telle qu’en l’occurrence les données d’identification fournies mêlant Etats-Unis d’Amérique, Paris et Alsace).
Ainsi, pour la Commission administrative, l’enregistrement comme l’usage de mauvaise foi du nom de domaine litigieux au sens du paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs, sont caractérisés.
Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <sodexo‑group‑sa.com> soit transféré au Requérant.
Michel Vivant
Expert Unique
Le 31 décembre 2021