- Loi n° 2005-87 du 15 août 2005, portant approbation de la réorganisationde certaines dispositions du « code des obligations et des contrats tunisien
- CODE DES OBLIGATIONSET DES CONTRATS
- LIVRE PREMIER DES OBLIGATIONS EN GENERAL
- LIVRE II DES DIFFERENTS CONTRATS DETERMINES ET DES QUASI-CONTRATSQUI S’Y RATTACHENT
- LIVRE IIDES DIFFERENTS CONTRATS DETERMINES ET DES QUASI-CONTRATSQUI S’Y RATTACHENT
REPUBLIQUE TUNISIENNE
Ministère de la justice et des Droit de l'Homme
Code des Obligations et des Contrats
Edition mise à jour et revue par le
conseil national chargé de la réorganisation des dispositions législatives et réglementaires en vigueur
(Conformément à la loi n° 2005-87 du 15 août 2005)
PREFACE
Le Changement s’est accompagné, depuis 1987, par la préservation des principes de souveraineté nationale et la consolidation de ses fondements dans les différents domaines et notamment dans le domaine législatif.
L’élan réformateur a porté sur les principaux codes dont le code des obligations et des contrats considéré comme étant la principale source de droit civil depuis sa promulgation en 1906.
L’importance de ce code réside dans la multiplicité de ses applications, ses liens étroits avec la plupart des actes de notre vie courante, la richesse et la diversité de ses sources et son influence sur plusieurs législations étrangères notamment les codes civils marocain et mauritanien.
Ainsi, le Président Zine El Abidine Ben Ali a-t-il décidé dès 1996 qu’une vaste opération de réorganisation de la législation en vigueur soit menée en vue d’en améliorer la terminologie et la structure et d’en éliminer les termes impropres liés à des modes politiques et sociaux ne s’accommodant plus avec la réalité. Il a été également procédé à l’abrogation de toutes les dispositions discriminatoires incompatibles avec les principes désormais consacrés dans le droit tunisien depuis 1987 notamment le principe de l’égalité entre l’homme et la femme et le respect de la dignité individuelle.
Le cadre juridique d’une telle action est le décret n°48 du 15 janvier 1996 portant création du conseil national pour la réorganisation des dispositions législatives et réglementaires en vigueur tel que modifié par le décret n°161 du 24 janvier 2000 et le décret n°262 du 4 février 2003. Un groupe de travail spécialisé composé de juristes confirmés a été chargé d’étudier le contenu du code sur la base exclusive de sa version originale publiée au Journal Officiel et ce en vue d’en améliorer les dispositions et d’en éliminer les expressions dialectales, intruses ou portant atteinte à la souveraineté nationale. Les travaux du groupe furent ensuite soumis à vérification par les soins de deux réviseurs particulièrement compétents dans le domaine des Obligations et des Contrats pour s’enquérir de la fidélité des propositions et de manière à s’assurer qu’aucune modification n’y a été apportée quant au fond ; toute cette entreprise étant menée sous le contrôle du conseil national pour la réorganisation des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, pour aboutir à l’élaboration du projet définitif approuvé par la loi n°87 du 15 août 2005.
En ce qui concerne le fond, la réforme s’est orientée en premier lieu vers le recensement de toutes les dispositions contraires aux principes des Droits de l’Homme et à la dignité des individus notamment les articles 93 bis, 831,1138, 1158, 1481 et 1524, qui furent abrogés, modifiés ou complétés et ce dans le but de consolider le principe de l’égalité entre l’homme et la femme. De même que fut abandonnée l’institution du « Khammès », à cause de sa connotation portant atteinte à la dignité du métayer agricole. La réforme s’est orientée en second lieu à compléter les dispositions du code pour les mettre en harmonie avec les progrès scientifiques notamment en y intégrant des dispositions ayant trait à la preuve électronique.
Le ministère de la justice et des Droits de l’Homme a le plaisir, au vu de la promulgation de toutes ces lois, en rapport avec la révision du code des obligations et des contrats, quant à la forme et au fond, de le présenter dans sa nouvelle version en témoignage de l’ampleur de l’œuvre réformatrice dont il fût l’objet pour en faire un code mis à jour reflétant fidèlement les fondements de la souveraineté nationale en parfaite harmonie avec les principes de la Tunisie nouvelle, pays de la dignité, des libertés et des Droits de l’Homme.
Tunis, le 16 septembre 2005
Béchir TEKARI Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme
Loi n° 2005-87 du 15 août 2005, portant approbation de la réorganisation de certaines dispositions du « code des obligations et des contrats tunisien » (1).
Au nom du peuple,
La chambre des députés ayant adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Article premier
Est approuvée la réorganisation des dispositions du « code des obligations et des contrats tunisien », et leur rédaction sous le titre « Code des Obligations et des Contrats » annexées à la présente loi.
Article 2
Il ne découle de la réorganisation du code des obligations et des contrats tunisien aucune modification de son contenu, ou abrogation ou modification des dispositions spéciales qui lui sont contraires.
La présente loi sera publiée au Journal Officiel de la République Tunisienne et exécutée comme loi de l’Etat.
Tunis le 15 août 2005. Zine El Abidine Ben Ali
(1) - Travaux préparatoires : Discussion et adoption par la chambre des députés dans sa séance du 27 juillet 2005.
- journal officiel n°68 du 15 août 2005.
CODE DES OBLIGATIONS ET DES CONTRATS(2)
LIVRE PREMIER
DES OBLIGATIONS EN GENERAL
TITRE PREMIER
DES CAUSES DES OBLIGATIONS
Article Premier
Les obligations dérivent des conventions et autres déclarations de volonté, des quasi-contrats, des délits et des quasi-délits.
TITRE II
Chapitre Premier
Des obligations qui dérivent des conventions et autres déclarations de volonté
Article 2
Les éléments nécessaires pour la validité des obligations qui dérivent d'une déclaration de volonté sont :
1) la capacité de s'obliger ;
2) une déclaration valable de volonté portant sur les éléments essentiels de l'obligation ;
3) un objet certain pouvant former objet d'obligation ;
4) une cause licite de s'obliger.
Section Première
De la capacité Article 3
Toute personne est capable d'obliger et de s'obliger si elle n'en est déclarée incapable par la loi.
Article 4
La différence de culte ne crée aucune différence entre les musulmans et les non musulmans, en ce qui concerne la capacité de contracter et les effets des obligations valablement formées par ces derniers et envers eux.
(2) Le décret portant promulgation du Code des Obligations et des Contrats en date du 15 décembre 1906 énonce essentiellement que son entrée en vigueur est fixée au 1er juin 1907 sans effet rétroactif.
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Article 5 (modifié par le décret du 3 août 1956).
Sont absolument incapables de contracter, si ce n'est par les personnes qui les représentent :
1) les mineurs jusqu'à l'âge de treize ans révolus ;
2) les majeurs atteints d'aliénation mentale qui les prive complètement de leurs facultés ;
3) les personnes morales que la loi assimile aux mineurs.
Article 6 (modifié par le décret du 3 août 1956).
Ont une capacité limitée :
1) les mineurs au-dessus de treize ans et jusqu'à vingt ans révolus, non assistés par leur père ou tuteur ;
2) les interdits pour faiblesse d'esprit ou prodigalité, non assistés par leur conseil judiciaire, dans les cas où la loi requiert cette assistance ;
3) les interdits pour insolvabilité déclarée ;
Et généralement tous ceux auxquels la loi défend certains contrats.
Article 7 (modifié par le décret du 3 août 1956).
Est majeur aux effets de la présente loi, tout individu de sexe masculin ou féminin, âgé de vingt ans révolus.
Article 8 (modifié par le décret du 3 août 1956).
Le mineur au-dessus de treize ans et l'incapable, qui ont contracté sans l'autorisation de leur père, tuteur ou curateur, ne sont pas obligés à raison des engagements pris par eux et peuvent en demander la rescision dans les conditions établies par le présent code.
Cependant, ces obligations peuvent être validées par l'approbation donnée par le père, tuteur ou curateur à l'acte accompli par le mineur ou l'incapable. Cette approbation doit être donnée en la forme requise par la loi.
Article 9 (modifié par le décret du 3 août 1956).
Le mineur au-dessus de treize ans et l'incapable peuvent améliorer leur situation, même sans l'assistance de leur père, tuteur ou curateur, en ce sens qu'ils peuvent accepter une donation ou tout autre acte gratuit qui les enrichit ou qui les libère d'une obligation, sans entraîner pour eux aucune charge.
Article 10
L'obligation peut être attaquée par le tuteur ou par le mineur après sa majorité, alors même qu'il aurait employé des manœuvres frauduleuses pour induire l'autre partie à croire à sa majorité, à l'autorisation de son tuteur ou à sa qualité de commerçant.
Le mineur demeure obligé, toutefois, à concurrence du profit qu'il a retiré de l'obligation, dans les conditions déterminées au présent code.
Article 11
Le mineur, dûment autorisé à exercer le commerce ou l'industrie, n'est point restituable contre les engagements qu'il a pris à raison de son commerce, dans les limites de l'autorisation qui lui a été donnée ; celle-ci comprend, dans tous les cas, les actes qui sont nécessaires à l'exercice du commerce qui fait l'objet de l'autorisation.
Article 12
L'autorisation d'exercer le commerce peut être révoquée à tout moment pour motifs graves, avec l'autorisation du tribunal, le mineur entendu. La révocation n'a point d'effet à l'égard des affaires qui étaient engagées au moment de la révocation.
Article 13
Le mineur et l'incapable sont toujours obligés, à raison de l'accomplissement de l'obligation par l'autre partie, jusqu'à concurrence du profit qu'ils en ont tiré. Il y a profit lorsqu’ils ont employé ce qu'ils ont reçu en dépenses nécessaires ou utiles ou lorsque la chose existe encore dans leurs patrimoines.
Article 14
Le contractant capable de s'obliger ne peut opposer l'incapacité de la partie avec laquelle il a contracté.
Article 15 (modifié par le décret du 3 août 1956).
Le père qui administre les biens de son enfant mineur ou incapable, le tuteur, le curateur et généralement tous administrateurs constitués par la loi, ne peuvent faire aucun acte de disposition sur les actes dont ils ont la gestion qu'après avoir obtenu une autorisation spéciale du juge compétent.
Article 16
Les actes accomplis dans l'intérêt d’un mineur, d'un interdit ou d'une personne morale, par les personnes qui les représentent, et dans les formes établies par la loi, ont la même valeur que ceux accomplis par les majeurs maîtres de leurs droits. Cette règle ne s'applique pas aux actes de pure libéralité, lesquels n'ont aucun effet, même lorsqu'ils sont faits avec l’autorisation requise par la loi, ni aux aveux faits en justice et portant sur des faits que le représentant du mineur n'a pu accomplir lui-même.
Article 17
Le représentant légal du mineur ou de l'interdit ne peut continuer à exercer le commerce pour le compte de ce dernier, s'il n'y est autorisé par l'autorité compétente, qui ne devra l'accorder que dans l’intérêt manifeste du mineur ou de l'interdit.
Section II
De la déclaration de volonté
(Parag. A –De la déclaration unilatérale)
Article 18
La simple promesse ne crée point d'obligation.
Article 19
La promesse faite par affiches ou autre moyen de publicité, d'une récompense à celui qui trouvera un objet perdu ou accomplira un autre fait est réputée acceptée par celui qui, même sans connaître l'avis, rapporte l'objet ou accomplit le fait ; l'auteur de la promesse est tenu, dès lors, de son côté, à accomplir la prestation promise.
Article 20
La promesse de récompense ne peut être révoquée lorsque la révocation survient après l'exécution commencée.
Celui qui a fixé un délai pour l'accomplissement du fait prévu est présumé avoir renoncé au droit de révoquer sa promesse jusqu'à l'expiration du délai.
Article 21
Si plusieurs personnes ont accompli en même temps le fait prévu par la promesse de récompense, le prix ou récompense promis est partagé entre elles. Si elles l'ont accompli en des temps divers, la récompense appartient à la première en date; si elles l'ont accompli chacune pour une part, la récompense est partagée dans la même proportion; si le prix ou récompense ne peut se partager mais peut se vendre, le prix en sera partagé entre les ayants droit; si ce prix ou récompense consiste en un objet qui n'a pas de valeur vénale ou ne peut être donné qu'à un seul, d'après les termes de la promesse, la décision est remise à la voie du sort.
Article 22
Dans les obligations unilatérales, les engagements sont obligatoires dès qu'ils sont parvenus à la connaissance de la partie envers laquelle ils sont pris.
(Parag. B – Des conventions ou contrats)
Article 23
La convention n'est parfaite que par l'accord des parties sur les éléments essentiels de l'obligation, ainsi que sur toutes les autres clauses licites que les parties considèrent comme essentielles.
Les modifications que les parties apportent d'un commun accord à la convention, aussitôt après sa conclusion, ne constituent pas un nouveau contrat, mais sont censées faire partie de la convention primitive, si le contraire n'est exprimé.
Article 24
Le contrat n'est point parfait lorsque les parties ont expressément réservé certaines clauses comme devant former objet d'un accord ultérieur; l'accord intervenu, dans ces conditions, sur une ou plusieurs clauses, ne constitue pas engagement, alors même que les préliminaires de la convention auraient été rédigés par écrit.
Article 25
Les réserves ou restrictions qui ne sont pas portées à la connaissance de l'autre partie ne peuvent ni infirmer ni restreindre les effets de la déclaration de volonté telle qu'elle résulte de son expression apparente.
Article 26
Les contre-lettres ou autres déclarations écrites n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes et leurs héritiers. Elles ne peuvent être opposées aux tiers, s'ils n'en ont eu connaissance ; les ayants cause et successeurs à titre particulier sont considérés comme tiers, aux effets du présent article.
Article 27
L'offre faite à une personne présente, sans fixation de délais, est non avenue, si elle n'est acceptée sur-le-champ par l'autre partie.
Cette règle s'applique aux offres faites au moyen du téléphone par une personne à une autre.
Article 28
Le contrat par correspondance est parfait au moment et dans le lieu où celui qui a reçu l'offre répond en l'acceptant.
Le contrat par le moyen d'un messager ou intermédiaire est parfait au moment et dans le lieu où celui qui a reçu l'offre répond à l'intermédiaire qu'il accepte.
Article 29
Lorsqu'une réponse d'acceptation n'est pas exigée par le proposant ou par l'usage du commerce, le contrat est parfait dès que l'autre partie en a entrepris l'exécution ; l'absence de réponse vaut aussi consentement, lorsque la proposition se rapporte à des relations d'affaires déjà entamées entre les parties.
Article 30
La proposition est révocable tant que le contrat n'est point parfait par l'acceptation ou le commencement d'exécution entrepris par l'autre partie.
Article 31
Une réponse conditionnelle ou restrictive équivaut au refus de la proposition, accompagné d'une proposition nouvelle.
Article 32
La réponse est réputée conforme aux offres, lorsque celui qui répond dit simplement qu'il accepte ou lorsqu'il exécute le contrat sans faire aucune réserve.
Article 33
Celui qui a fait une offre en fixant un délai pour l'acceptation est engagé envers l'autre partie jusqu'à l'expiration du délai. Il est dégagé si une réponse d'acceptation ne lui parvient pas dans le délai fixé.
Article 34
Celui qui fait une offre par correspondance sans fixer un délai est engagé jusqu'au moment où une réponse expédiée dans un délai raisonnable devrait lui parvenir régulièrement, si le contraire ne résulte expressément de la proposition.
Si la déclaration d'acceptation a été expédiée à temps, mais ne parvient au proposant qu'après l'expiration du délai suffisant pour qu'elle puisse parvenir régulièrement, le proposant n'est pas engagé, sauf recours de la partie en dommagesintérêts contre qui de droit.
Article 35
La mort ou l'incapacité de celui qui a fait une offre, lorsqu'elle survient après le départ de la proposition, n'empêche point la perfection du contrat, lorsque celui auquel elle est adressée l'a acceptée avant de connaître la mort ou l'incapacité du proposant.
Article 36
La mise aux enchères est une proposition de contrat ; elle est réputée acceptée par celui qui offre le dernier prix ; celui-ci est obligé en vertu de son offre si le vendeur accepte le prix offert.
Article 37
Nul ne peut engager autrui, ni stipuler pour lui, s'il n'a pouvoir de le représenter en vertu d'un mandat ou de la loi.
Article 38
Néanmoins, on peut stipuler au profit d'un tiers, même indéterminé, lorsque telle est la clause d'une convention à titre onéreux que l'ont fait soi-même ou d'une libéralité que l'on fait au promettant.
Dans ce cas, la stipulation opère directement en faveur du tiers ; celui-ci peut, en son nom, en poursuivre l'exécution contre le promettant, à moins que l'exercice de cette action n'ait été interdit par le contrat ou n'ait été subordonné à des conditions déterminées.
La stipulation est réputée non avenue lorsque le tiers en faveur duquel elle est faite refuse de l'accepter en notifiant son refus au promettant.
Article 39
Celui qui a stipulé en faveur d'un tiers peut poursuivre, concurremment avec ce dernier, l'exécution de l'obligation, s'il ne résulte de celle-ci que l'exécution ne peut en être demandée que par le tiers en en faveur duquel elle est faite.
Article 40
On peut stipuler pour un tiers sous réserve de ratification. Dans ce cas, l'autre partie peut demander que le tiers au nom duquel on a contracté déclare s'il entend ratifier la convention. Elle n'est plus tenue, si la ratification n'est pas donnée dans un délai raisonnable, et au plus tard quinze jours après la notification de la convention.
Article 41
La ratification équivaut au mandat. Elle peut être tacite et résulter de l'exécution par le tiers du contrat fait en son nom.
Elle a effet en faveur de celui qui ratifie et contre lui, à partir de l'acte qui en est l'objet, s'il n'y a déclaration contraire ; elle n'a effet à l'égard des tiers qu'à partir du jour où elle a été donnée.
Article 42
Le consentement ou la ratification peuvent résulter du silence, lorsque la partie, des droits de laquelle on dispose, est présente ou en est dûment informée, et qu'elle n'y contredit point sans qu'aucun motif légitime justifie son silence.
Parag. C – Des vices du consentement
Article 43
Est annulable le consentement donné par erreur, surpris par dol ou extorqué par violence.
Article 44
L'erreur de droit donne ouverture à la rescision de l'obligation :
1) lorsqu'elle en est la cause unique ou principale ;
2) lorsqu'elle est excusable.
Article 45
L'erreur de fait peut donner ouverture à la rescision lorsqu'elle porte sur l'identité ou sur l'espèce, ou bien sur la qualité de l'objet qui a été la cause déterminante du consentement.
Article 46
L'erreur portant sur la personne de l'une des parties ou sur sa qualité ne donne pas ouverture à résolution, sauf le cas où la personne ou sa qualité ont été l'une des causes déterminantes du consentement donné par l'autre partie.
Article 47
Les simples erreurs de calcul ne sont pas une cause de résolution, mais elles doivent être rectifiées.
Article 48
Dans l'appréciation de l'erreur et de l'ignorance soit de droit, soit de fait, les juges devront toujours avoir égard à l'âge, au sexe, à la condition des personnes et aux circonstances de la cause.
Article 49
Lorsque l'erreur a été commise par l'intermédiaire dont l’une des parties s'est servie, cette partie pourra demander la résolution de l'obligation dans les cas des articles 45- 46 ci-dessus, sauf l'application des principes généraux relatifs à la faute et de l'article 457 dans le cas spécial des télégrammes.
Article 50
La violence est la contrainte exercée sans l'autorité de la loi, et moyennant laquelle on amène une personne à accomplir un acte qu'elle n'a pas consenti.
Article 51
La violence ne donne ouverture à la rescision de l'obligation que :
1) lorsqu'elle en a été la cause déterminante ;
2) lorsqu'elle est constituée de faits de nature à produire chez celui qui en est l'objet, soit une souffrance physique, soit un trouble moral profond, soit la crainte d'exposer sa personne, son honneur ou ses biens à un préjudice notable, eu égard à l'âge, au sexe, à la condition des personnes et à leur degré d'impressionnabilité.
Article 52
La crainte inspirée par la menace d'exercer des poursuites ou d'autres voies de droit ne peut donner ouverture à la rescision que si on a abusé de la position de la partie menacée pour lui extorquer des avantages excessifs ou indus à moins que ces menaces ne soient accompagnées de faits constituant une violence, au sens de l'article précédent.
Article 53
La violence donne ouverture à la rescision de l'obligation, même si elle n'a pas été exercée par celui des contractants au profit duquel la convention a été faite.
Article 54
La violence donne ouverture à la rescision, même lorsqu'elle a été exercée sur une personne avec laquelle la partie contractante est étroitement liée par le sang.
Article 55
La crainte révérencielle ne donne pas ouverture à rescision à moins que des menaces graves ou des voies de fait se soient ajoutées à cette crainte révérencielle.
Article 56
Le dol donne ouverture à la rescision lorsque les manœuvres ou les réticences de l'une des parties, de celui qui la représente ou qui est de complicité avec elle, sont de telle nature que, sans ces manœuvres ou ces réticences, l'autre partie n'aurait pas contracté. Le dol pratiqué par un tiers a le même effet, lorsque la partie qui en profite en avait connaissance.
Article 57
Le dol qui porte sur les accessoires de l'obligation et qui ne l'a pas déterminée ne peut donner lieu qu'à des dommages-intérêts.
Article 58
Il y a lieu à rescision lorsque la partie qui a contracté se trouvait dans un état d'ivresse qui a troublé ses facultés.
Article 59
Les motifs de rescision fondés sur l'état de maladie et autres cas analogues, sont soumis à l'appréciation des juges.
Article 60
La lésion ne donne pas lieu à la rescision, à moins qu'elle ne soit causée par le dol de l'autre partie ou de celui qui la représente ou qui a traité pour elle, et sauf l'exception ci-après.
Article 61
La lésion donne ouverture à la rescision lorsque la partie lésée est un mineur ou un incapable, alors même qu'il aurait contracté avec l'assistance de son tuteur ou conseil judiciaire dans les formes déterminées par la loi et bien qu'il n'y ait pas dol de l'autre partie. Est réputé lésion, toute différence au-delà du tiers entre le prix porté au contrat et la valeur effective de la chose.
Section III
De l'objet des obligations contractuelles
Article 62
Les choses, les faits et les droits incorporels qui sont dans le commerce peuvent seuls former objet d'obligation ; sont dans le commerce toutes les choses au sujet desquelles la loi ne défend pas expressément de contracter.
Article 63
La chose qui forme l'objet de l'obligation doit être déterminée au moins quant à son espèce.
La quotité de la chose peut être incertaine pourvu qu'elle puisse être déterminée par la suite.
Article 64
Est nulle l'obligation qui a pour objet une chose ou un fait impossible, physiquement ou en vertu de la loi.
Article 65
La partie qui savait ou devait savoir, au moment du contrat, que la prestation était impossible, est tenue à réparation des dommages envers l'autre partie.
Il n'y a pas lieu à indemnité lorsque l'autre partie savait, ou devait savoir, que l'objet de l'obligation était impossible.
On doit appliquer la même règle :
1) au cas où, l'impossibilité étant partielle, la convention est valable en partie ;
2) aux obligations alternatives, lorsque l'une des prestations promises est impossible.
Article 66
L'obligation peut avoir pour objet une chose future et incertaine, sauf les exceptions établies par la loi.
Néanmoins, on ne peut, à peine de nullité absolue, renoncer à une succession non encore ouverte, ni faire aucune stipulation sur une pareille succession ou sur l'un des objets qui y sont compris, même avec le consentement de celui de la succession duquel il s'agit.
Section IV
De la cause des obligations contractuelles Article 67
L'obligation sans cause, ou fondée sur une cause illicite, est non avenue.
La cause est illicite quand elle est contraire aux bonnes mœurs, à l'ordre public ou à la loi.
Article 68
Toute obligation est présumée avoir une cause certaine et licite, quoiqu'elle ne soit pas exprimée.
Article 69
La cause exprimée est présumée vraie jusqu'à preuve contraire.
Article 70
Lorsque la cause exprimée est démontrée fausse ou illicite, c'est à celui qui soutient que l'obligation à une autre cause licite à le prouver.
Chapitre II
Obligations résultant des quasi-contrats Article 71
Celui qui a reçu ou se trouve posséder une chose, ou autre valeur appartenant à autrui, sans une cause qui justifie cet enrichissement, est tenu de la restituer à celui aux dépens duquel il s'est enrichi.
Article 72
Celui qui, de bonne foi, a retiré un profit du travail ou de la chose d'autrui, sans une cause qui justifie ce profit, est tenu d'indemniser celui aux dépens duquel il s'est enrichi dans la mesure où il a profité de son fait ou de sa chose.
Article 73
Celui qui, se croyant débiteur, par une erreur de droit ou de fait, a payé ce qu'il ne devait pas, a droit à répétition contre celui auquel il a payé. Mais celui-ci ne doit aucune restitution si, de bonne foi et en conséquence de ce paiement, il a détruit ou annulé le titre, s'est privé des garanties de sa créance ou a laissé son action se prescrire contre le véritable débiteur. Dans ce cas, celui qui a payé n'a de recours que contre le véritable débiteur.
Article 74
Il n'y a pas lieu à répétition lorsqu'on a acquitté volontairement et en connaissance de cause ce qu'on savait ne pas être tenu de payer.
Article 75
On peut répéter ce qui a été payé pour une cause future qui ne s'est pas réalisée ou pour une cause déjà existante, mais qui a cessé d'exister.
Article 76
Il n'y a pas lieu à répétition de ce qui a été payé pour une cause future qui ne s'est pas réalisée, lorsque celui qui a payé savait déjà que la réalisation était impossible ou lorsqu'il en a empêché la réalisation.
Article 77
Ce qui a été payé pour une cause contraire à la loi, à l'ordre public ou aux bonnes mœurs, peut être répété.
Article 78
Si le paiement a été fait en exécution d'une dette prescrite ou d'une obligation morale, il n'y a pas lieu à répétition, lorsque celui qui a payé avait la capacité d'aliéner à titre gratuit encore qu'il eût cru par erreur qu'il était tenu de payer ou qu'il ignorât le fait de la prescription.
Article 79
Equivaut au paiement, dans les cas prévus ci-dessus, la dation en paiement, la constitution d'une sûreté, la délivrance d'une reconnaissance de dette ou d'un autre titre ayant pour but de prouver l'existence ou la libération d'une obligation.
Article 80
Celui qui s'est indûment enrichi au préjudice d'autrui est tenu de lui restituer identiquement ce qu'il a reçu, si cela existe encore, ou sa valeur au jour où il l'a reçu, si cela a péri ou a été détérioré par son fait ou sa faute ; il est même tenu de la perte ou de la détérioration par cas fortuit, depuis le moment où la chose lui est parvenue, s'il l'a reçue de mauvaise foi. Le détenteur de mauvaise foi doit, en outre, restituer les fruits, accroissements et bénéfices qu'il a perçus à partir du jour du paiement ou de l'indue réception, et ceux qu'il aurait dû percevoir s'il avait bien administré. Il ne répond que jusqu'à concurrence de ce dont il a profité, et à partir du jour de la demande s'il était de bonne foi.
Article 81
Si celui qui a reçu de bonne foi a vendu la chose, il n'est tenu qu'à restituer le prix de vente ou à céder les actions qu'il a contre l'acheteur, s'il était encore de bonne foi au moment de la vente.
Chapitre III
Des obligations provenant des délits et quasi-délits
Article 82
Tout fait quelconque de l'homme qui, sans l’autorité de la loi, cause sciemment et volontairement à autrui un dommage matériel ou moral, oblige son auteur à réparer le dommage résultant de son fait, lorsqu'il est établi que ce fait en est la cause directe.
Toute stipulation contraire est sans effet.
Article 83
Chacun est responsable du dommage moral ou matériel qu'il a causé, non seulement par son fait, mais par sa faute, lorsqu’il est établi que cette faute en est la cause directe.
Toute stipulation contraire est sans effet.
La faute consiste, soit à omettre ce qu'on était tenu de faire, soit à faire ce dont on était tenu de s'abstenir, sans intention de causer un dommage.
Article 84
La responsabilité établie aux deux articles ci-dessus s'applique également à l'Etat, même lorsqu'il agit comme puissance publique, aux communes et aux administrations publiques, pour les faits ou les fautes imputables à leurs représentants, agents et fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions, sans préjudice de la responsabilité directe de ces derniers envers les parties lésées.
Article 85
Le fonctionnaire ou employé public qui, par son dol ou sa faute lourde, cause à autrui un dommage matériel ou moral dans l'exercice de ses fonctions ou de son service, est tenu de réparer le dommage, lorsqu'il est établi que son dol ou sa faute en sont la cause directe ; cependant, en cas de faute simple, les parties lésées n'ont action contre le fonctionnaire qu'à défaut de tout autre moyen de se faire indemniser.
Le présent article ne s'applique pas aux notaires dont les rapports avec les parties sont régis par les règles du louage d'ouvrage.
Article 86
Le fonctionnaire de l'ordre judiciaire qui forfait aux devoirs de sa charge en répond civilement envers la partie lésée, dans le cas où, d'après la loi pénale, il y a lieu à prise à partie contre lui.
Article 87
Celui qui, contrairement à la vérité, affirme ou répand, par voie de presse ou autrement, des faits qui sont de nature à nuire au crédit, à la considération ou aux intérêts de la personne ou du corps auquel le fait est imputé, est tenu envers la partie lésée des dommages résultants de son fait, lorsqu'il savait ou devait savoir la fausseté des faits imputés, le tout sans préjudice des peines édictées par la loi.
Cette règle s'applique à celui qui, par des paroles, des écrits ou des actes, commet le délit d'injure au sens de la loi pénale et de la loi sur la presse.
La même responsabilité s'applique à celui qui aura imprimé un écrit calomnieux, diffamatoire ou injurieux, solidairement avec l'auteur.
L'action résultant des faits prévus par le présent article se prescrit après cinq mois révolus à compter du jour où ils ont été commis ou du jour du dernier acte de poursuite, s'il en a été fait. Lorsque le fait dommageable n'est pas accompagné de publicité, la prescription s'accomplit par cinq mois à partir du jour où la partie lésée en a eu connaissance.
Article 88
Celui qui, de bonne foi, et sans qu'il y ait faute lourde ou imprudence grave de sa part, donne des renseignements dont il ignore la fausseté, n'est tenu d'aucune responsabilité envers la personne qui est l'objet de ces renseignements :
1) lorsqu'il y avait, pour lui ou pour celui qui a reçu les renseignements, un intérêt légitime à les obtenir ;
2) lorsqu'il était tenu, par suite de ses rapports d'affaires ou d'une obligation légale, de communiquer les informations qui étaient à sa connaissance.
Article 89
Un simple conseil ou une recommandation n'engage pas la responsabilité de son auteur, si ce n'est dans les cas suivants :
1) s'il a donné ce conseil dans le but de tromper l'autre partie ;
2) lorsque, étant intervenu dans une affaire, en raison de ses fonctions, il a commis une faute lourde, ne pouvant être commise par une personne dans sa position, et qu'il en est résulté un dommage pour l'autre partie ;
3) lorsqu'il a garanti le résultat de l'affaire.
Article 90
Peut donner lieu à des dommages-intérêts, sans préjudice de l'action en suppression et des poursuites pénales :
1) le fait de celui qui aura, soit apposé, soit fait apparaître, par addition, retranchement ou altération quelconque, sur des objets fabriqués ou des produits industriels ou agricoles, le nom ou la marque de fabrique, le cachet, le timbre ou l'étiquette d'un fabricant ou d'un producteur autre que celui qui en est l'auteur ou la raison commerciale d'une fabrique autre que celle où lesdits objets auront été fabriqués ou le nom d'un lieu autre que celui de fabrication ou de production ;
2) le fait de celui qui, sans y être autorisé, aura apposé le nom, la marque de fabrique, l'étiquette ou autre signe distinctif du fabricant dont il a acquis les produits lorsque les produits n'étaient pas marqués par leur auteur ou producteur au moment où il les a acquis.
Article 91
Tout marchand, commissionnaire, ou débitant quelconque, supportera les effets civils de la poursuite, lorsqu'il aura sciemment exposé en vente ou mis en circulation des objets marqués de noms supposés ou altérés. Il n'aura, dans ce cas, aucun recours contre son vendeur ou mandant pour se faire indemniser des condamnations prononcées contre lui.
Article 92
Peuvent donner lieu à des dommages-intérêts, sans préjudice de l'action pénale, les faits constituant une concurrence déloyale, et par exemple :
1) le fait d'user d'un nom ou d'une marque à peu près similaire à ceux appartenant légalement à une maison ou fabrique déjà connue, ou à une localité ayant une réputation collective, de manière à induire le public en erreur sur l'individualité du fabricant et la provenance du produit ;
2) le fait d'user d'une enseigne, tableau, inscription, écriteau ou autre emblème quelconque, identique ou semblable à celui déjà adopté légalement par un négociant, ou fabricant, ou établissement du même lieu, faisant le commerce de produits semblables, de manière à détourner la clientèle de l'un au profit de l'autre ;
3) le fait d'ajouter au nom d'un produit les mots : façon de… , d'après la recette de … , ou autres expressions analogues, tendant à induire le public en erreur sur la nature ou l'origine du produit ;
4) le fait de faire croire par des publications ou autres moyens, que l'on est le cessionnaire ou le représentant d'une autre maison ou établissement déjà connu.
Article 93 (modifié par la loi n° 95-95 du 9 novembre 1995).
Toute personne doit garantir le préjudice résultant des malades et des handicapés mentaux qui cohabitent avec elle, même majeurs sauf preuve de l'une des conditions suivantes :
- -
- qu'elle les a pourvus de la surveillance requise ;
- -
- qu'elle ignorait l'état grave de la victime ;
- -
- que l’accident est survenu suite à une faute de la victime.
Ces dispositions sont applicables à toute personne qui par contrat s'est engagée à surveiller et à protéger les malades cités au présent article.
Article 93 bis (ajouté par la loi n° 95-95 du 9 novembre 1995).
Le père et la mère sont solidairement responsables de l'acte préjudiciable émanant de l'enfant, à condition qu'il réside chez eux, cette responsabilité a lieu à moins que l'un d'eux prouve :
- -
- qu'il a pourvu l'enfant de la surveillance requise ;
- -
- que le préjudice résulte d'une faute de la victime ;
- -
- en cas de partition des attributions de la tutelle les dispositions de cet article s'appliquent à celui qui en a la garde ;
- -
- en cas de décès des parents ou de leur perte de la capacité, le tuteur sera responsable de l'acte préjudiciable émanant de l'enfant tant qu'il n'a pas prouvé :
- -
- qu'il a pourvu l'enfant de la surveillance requise ;
- -
- que le préjudice résulte d'une faute de la victime. Les employeurs et les instituteurs sont responsables des préjudices résultant de
leurs apprentis et élèves durant la période où ils sont sous leur contrôle. Cette responsabilité peut être écartée si les employeurs prouvent :
- -
- qu'ils les ont pourvus de la surveillance requise ;
- -
- que le préjudice résulte d'une faute de la victime. Concernant les instituteurs, la faute, ou l'inattention ou la négligence qui leur
incombe en qualité d'auteur du préjudice, doit être prouvée par le demandeur à l'instance, conformément au droit commun.
Article 94
Chacun doit répondre du dommage causé par l'animal qu'il a sous sa garde, même si ce dernier s'est égaré ou échappé, s'il ne prouve :
1) qu'il a pris les précautions nécessaires pour l'empêcher de nuire ou pour le surveiller ;
2) ou que l'accident provient d'un cas fortuit ou de force majeure, ou de la faute de celui qui en a été victime.
Article 95
Le propriétaire, fermier, ou possesseur du fonds, n'est pas responsable du dommage causé par les animaux sauvages ou non sauvages provenant du fonds, s'il n'a rien fait pour les y attirer ou les y maintenir.
Il y a lieu à responsabilité :
1) s'il existe dans le fonds une garenne, un bois, un parc ou des ruches destinés à élever ou à entretenir certains animaux, soit pour le commerce, soit pour la chasse, soit pour l'usage domestique ;
2) si le fonds est spécialement destiné à la chasse.
Article 96
Chacun doit répondre du dommage causé par les choses qu'il a sous sa garde, lorsqu'il est justifié que ces choses sont la cause directe du dommage, s'il ne démontre :
1) qu'il a fait tout ce qui était nécessaire afin d'empêcher le dommage ;
2) et que le dommage dépend, soit d'un cas fortuit, soit d'une force majeure, soit de la faute de celui qui en est victime.
Article 97
Le propriétaire d'un édifice ou autre construction est responsable du dommage causé par son écroulement ou par sa ruine partielle, lorsque l'un ou l'autre est arrivé par suite de vétusté, par défaut d'entretien, ou par le vice de la construction. La même règle s'applique au cas de chute ou ruine partielle de ce qui fait partie d'un immeuble tel que les arbres, les machines incorporées à l'édifice et autres accessoires réputés immeubles par destination. Cette responsabilité pèse sur le propriétaire de la superficie, lorsque la propriété de celle-ci est séparée de celle du sol.
Lorsqu'un autre que le propriétaire est tenue de pourvoir à l'entretien de l'édifice, soit en vertu d'un contrat, soit en vertu d'un usufruit ou autre droit réel, c'est cette personne qui est responsable.
Lorsqu'il y a litige sur la propriété, la responsabilité incombe au possesseur actuel du fonds.
L'action en dommages-intérêts n'est recevable, toutefois, dans les cas précités, que si elle a été précédée, en cas de danger apparent, par une mise en demeure adressée au propriétaire de l'immeuble.
Article 98
Le propriétaire d'un immeuble, qui a de justes raisons de craindre l'écroulement ou la ruine partielle d'un édifice voisin, peut exiger du propriétaire de l'édifice, ou de celui qui serait tenu d'en répondre, aux termes de l'article 97, qu'il prenne les mesures nécessaires afin de prévenir la ruine.
Article 99
Les voisins ont action contre les propriétaires d'établissements insalubres ou incommodes pour demander, soit la suppression de ces établissements, soit l'adoption des changements nécessaires pour faire disparaître les inconvénients dont ils se plaignent ; l'autorisation des pouvoirs compétents ne saurait faire obstacle à l'exercice de cette action.
Article 100
Toutefois, les voisins ne sont pas fondés à réclamer la suppression des dommages qui dérivent des obligations ordinaires du voisinage, tels que la fumée qui s'échappe des cheminées et autres incommodités qui ne peuvent être évitées, et ne dépassent pas la mesure ordinaire.
Article 101
L'acquittement prononcé par un tribunal pénal ne préjuge pas la question des dommages civils résultant du fait qui a donné lieu aux poursuites. La même règle s'applique au cas d'extinction de l'action pénale par le décès du prévenu ou par amnistie.
Article 102
L'état d'ivresse, lorsqu'elle est volontaire, n'empêche point la responsabilité civile dans les obligations dérivant des délits et quasi-délits. Il n'y a point de responsabilité civile lorsque l'ivresse était involontaire ; cette preuve incombe au prévenu.
Article 103
Il n'y a pas lieu à responsabilité civile lorsqu'une personne, sans intention de nuire, a fait ce qu'elle avait le droit de faire.
Cependant, lorsque l'exercice de ce droit est de nature à causer un dommage notable à autrui et que ce dommage peut être évité ou supprimé, sans inconvénient grave pour l'ayant droit, il y a lieu à responsabilité civile si on n'a pas fait ce qu'il fallait pour le prévenir ou pour le faire cesser.
Article 104
Il n'y a pas lieu à responsabilité civile dans le cas de légitime défense, ou lorsque le dommage a été produit par une cause purement fortuite ou de force majeure qui n'a été ni précédée, ni accompagnée, d'un fait imputable au défendeur.
Le cas de légitime défense est celui où l'on est contraint d'agir afin de repousser une agression imminente et injuste dirigée contre la personne ou les biens de celui qui se défend ou d'une autre personne.
Article 105
Le mineur dépourvu de discernement, ne répond pas civilement du dommage causé par son fait. Il en est de même de l'insensé, quant aux actes accomplis pendant qu'il est en état de démence.
Le mineur répond, au contraire, du dommage causé par son fait, s'il possède le degré de discernement nécessaire pour apprécier les conséquences de ses actes.
Article 106
Les sourds-muets et les infirmes répondent des dommages résultant de leur fait ou de leur faute s'ils possèdent le degré de discernement nécessaire pour apprécier les conséquences de leurs actes.
Article 107
Les dommages, dans le cas de délits et de quasi-délits, sont la perte effective éprouvée par le demandeur, les dépenses nécessaires qu'il a dû ou devait faire afin de réparer les suites de l'acte commis à son préjudice ainsi que les gains dont il est privé dans la mesure normale en conséquence de cet acte. Le tribunal devra d'ailleurs évaluer différemment les dommages, selon qu'il s'agit de la faute du débiteur ou de son dol.
Article 108
Si le dommage est causé par plusieurs personnes agissant de concert, chacune d'elles est tenue solidairement des conséquences, sans distinguer si elles ont agi comme instigateurs, complices ou auteurs principaux.
Article 109
La règle établie en l'article 108 s'applique au cas où, entre plusieurs personnes qui doivent répondre d'un dommage, il n'est pas possible de déterminer celle qui en est réellement l'auteur, ou la proportion dans laquelle elles ont contribué au dommage.
Article 110 (abrogé par la loi n° 65-5 du 12 février 1965 portant promulgation du Code des Droits Réels).
Article 111 (abrogé par la loi n° 65-5 du 12 février 1965 portant promulgation du Code des Droits Réels).
Article 112 (abrogé par la loi n° 65-5 du 12 février 1965 portant promulgation du Code des Droits Réels).
Article 113 (abrogé par la loi n° 65-5 du 12 février 1965 portant promulgation du Code des Droits Réels).
Article 114
Dans le cas des délits et quasi-délits, la succession est tenue des mêmes obligations que son auteur.
L'héritier auquel la chose est dévolue et qui connaissait les vices de la possession de son auteur, est tenu, comme lui, du cas fortuit et de la force majeure et doit restituer les fruits qu'il a perçus depuis le jour où la chose lui est parvenue.
Article 115
L'action en indemnité du chef d'un délit ou quasi-délit se prescrit par trois ans, à partir du moment où la partie lésée a eu connaissance du dommage et de celui qui est tenu d'en répondre. Elle se prescrit en tous les cas par quinze ans, à partir du moment où le dommage a eu lieu.
TITRE III
DES MODALITES DE L'OBLIGATION
Chapitre Premier
De la condition
Article 116
La condition est une déclaration de volonté, qui fait dépendre d'un événement futur et incertain, soit l'existence de l'obligation, soit son extinction.
L'événement passé ou présent, mais encore inconnu des parties, ne constitue pas condition.
Article 117
Toute condition d'une chose impossible ou contraire aux bonnes mœurs ou à la loi, est nulle et rend nulle l'obligation qui en dépend ; l'obligation n'est pas validée, si la condition devient possible par la suite.
Article 118
Est nulle et rend nulle l'obligation qui en dépend, toute condition ayant pour effet de restreindre ou d'interdire l'exercice des droits et facultés appartenant à toute personne humaine telle que celles de se marier, d'exercer ses droits civils.
Cette disposition ne s'applique pas au cas où une partie s'interdirait d'exercer une certaine industrie, pendant un temps ou dans un rayon déterminé.
Article 119
La condition incompatible avec la nature de l'acte auquel elle est ajoutée est nulle et rend nulle l'obligation qui en dépend.
Cette obligation peut être validée toutefois si la partie en faveur de laquelle la condition a été apposée renonce expressément à s'en prévaloir.
Article 120
Est nulle et non avenue la condition qui ne présente aucune utilité appréciable, soit pour son auteur ou pour toute autre personne, soit relativement à la matière de l'obligation.
Article 121
L'obligation est nulle lorsque l'existence même du lien dépend de la nue volonté de l'obligé (condition potestative). Néanmoins, chacune des parties, ou l'une d'elles, peut se réserver la faculté de déclarer, dans un délai déterminé, si elle entend tenir le contrat ou le résilier.
Cette réserve ne peut être stipulée dans la reconnaissance de dette, dans la donation et dans la remise de dette.
Article 122
Lorsque le délai n'est pas déterminé dans le cas prévu en l'article précédent, chacune des parties peut exiger que l'autre contractant déclare sa décision dans un délai raisonnable.
Article 123
Si le délai expire sans que la partie ait déclaré qu'elle entend résilier le contrat, celui-ci devient définitif à partir du moment où il a été conclu.
Si, au contraire, elle déclare formellement à l'autre partie sa volonté de se retirer du contrat, la convention est réputée non avenue.
Article 124
Si la partie qui s'est réservé la faculté de résiliation meurt avant le délai, sans avoir exprimé sa volonté, ses héritiers ont la faculté de maintenir ou de résilier le contrat pour le temps qui restait encore à leur auteur.
En cas de désaccord, les héritiers qui voudront maintenir le contrat ne pourront contraindre les autres à l'accepter, mais ils pourront prendre tout le contrat à leur compte personnel.
Article 125
Si la partie qui s'est réservé la faculté de résiliation tombe en démence ou est atteinte d'une autre cause d'incapacité, le tribunal nommera, à la requête de l'autre partie ou de tout autre intéressé, un curateur ad hoc lequel décidera, avec l'autorisation du tribunal, s'il y a lieu d'accepter ou de résilier le contrat, selon que l'intérêt de l'incapable l'exigera. En cas de faillite, le curateur sera de droit le syndic ou autre représentant de la masse.
Article 126
Lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement arrivera dans un temps fixé, cette condition est censée défaillie lorsque le temps est expiré sans que l'événement soit arrivé. Le tribunal ne pourra accorder, dans ce cas, aucune prorogation de délai.
Si aucun terme n'a été fixé, la condition peut toujours être accomplie ; et elle n'est censée défaillie que lorsqu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera pas.
Article 127
Lorsqu'une obligation licite est contractée sous la condition qu'un événement n'arrivera pas dans un temps fixé, cette condition est accomplie lorsque ce temps est expiré sans que l'événement soit arrivé ; elle l'est également si, avant le terme, il est certain que l'événement n'arrivera pas ; et, s'il n'y a pas de temps déterminé, elle n'est accomplie que lorsqu'il est certain que l'événement n'arrivera pas.
Article 128
La condition qui dépend pour son accomplissement du concours d'un tiers ou d'un fait du créancier est censée défaillie, lorsque le tiers refuse son concours, ou que le créancier n'accomplit pas le fait prévu, même lorsque l'empêchement est indépendant de sa volonté.
Article 129
Lorsque l'obligation est subordonnée à une condition suspensive, et que la chose qui fait la matière de l'obligation périt ou se détériore avant l'accomplissement de la condition, on appliquera les règles suivantes :
Si la chose a péri entièrement sans le fait ou la faute du débiteur, l'accomplissement de la condition demeure sans objet, et l'obligation sera considérée comme non avenue.
Si la chose s'est détériorée ou dépréciée sans la faute ou le fait du débiteur, le créancier doit la recevoir en l'état où elle se trouve sans diminution de prix.
Si la chose a péri entièrement par la faute ou par le fait du débiteur, le créancier a droit aux dommages-intérêts.
Si la chose a été détériorée ou dépréciée par la faute ou par le fait du débiteur, le créancier a le choix ou de recevoir la chose en l'état où elle se trouve, ou de résoudre le contrat, sauf son droit aux dommages-intérêts dans les deux cas.
Le tout sauf les stipulations des parties.
Article 130
La condition résolutoire ne suspend point l'exécution de l'obligation. Elle oblige seulement le créancier à restituer ce qu'il a reçu dans le cas où l'événement prévu par la condition s'accomplit ; il est tenu des dommages-intérêts, dans le cas où il ne pourrait faire cette restitution pour une cause dont il doit répondre ; il ne doit pas restituer les fruits et accroissements : toute stipulation qui l'obligerait à restituer les fruits est non avenue.
Article 131
La condition est réputée accomplie lorsque le débiteur, obligé sous condition, en a sans droit empêché l'événement ou est en demeure de l'accomplir.
Article 132
La condition accomplie ne produit aucun effet, lorsque l'événement a eu lieu par le dol de celui qui était intéressé à ce que la condition s'accomplit.
Article 133
La condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l'obligation a été contractée, lorsqu'il résulte de la volonté des parties ou de la nature de l'obligation qu'on a entendu lui donner cet effet.
Article 134
L'obligé sous condition suspensive ne peut, avant l'événement de la condition, accomplir aucun acte qui empêche ou rende plus difficile l'exercice des droits du créancier au cas où la condition s'accomplirait.
Après l'événement de la condition suspensive, les actes accomplis dans l'intervalle par l'obligé sont résolus, dans la mesure où ils peuvent porter préjudice au créancier, sauf les droits régulièrement acquis par les tiers de bonne foi.
La règle établie au présent article s'applique aux obligations sous condition résolutoire, à l'égard des actes accomplis par celui dont les droits doivent se résoudre par l'événement de la condition, et sauf les droits régulièrement acquis par les tiers de bonne foi.
Article 135
Le créancier peut, avant l'accomplissement de la condition, faire tous les actes conservatoires de son droit, et même requérir la saisie-arrêt sur les biens du débiteur, s'il y a péril en la demeure.
Chapitre II
Du terme Article 136
Lorsque l'obligation n'a pas d'échéance déterminée, elle doit être immédiatement exécutée, à moins que le terme ne résulte de la nature de l'obligation, de la manière ou du lieu indiqué pour son exécution.
Dans ces cas, le terme sera fixé par le tribunal.
Article 137 (modifié par le décret du 4 novembre 1922).
Le tribunal ne peut accorder aucun terme ni délai de grâce, s'il ne résulte de la convention ou de la loi.
Lorsque le délai est déterminé par la convention ou par la loi, le juge ne peut le proroger, si la loi ne l'y autorise.
Toutefois, et en dehors des cas où il s'agit du recouvrement d'une créance de l'Etat, d'une commune ou d'un établissement public d'Etat, un délai raisonnable pourra être accordé pour l'exécution du jugement avec la plus grande réserve et s'il ne doit en résulter aucun inconvénient grave pour le créancier, quand le débiteur aura justifié que ce terme favorise sa libération en lui permettant de conclure un emprunt à meilleures conditions, ou également quand il apparaîtra que l'inexécution de son obligation provient de circonstances indépendantes de sa volonté.
Le délai ne devra ni excéder la durée d'une année ni être renouvelé.
Le juge pourra accorder au débiteur la faculté de se libérer par paiements échelonnés.
Le jugement énoncera le motif du délai, lequel courra du jour de la signification.
Les dispositions de l'article 149 du présent code sont applicables au délai de grâce accordé par le juge.
Article 138
L'obligation est nulle, lorsque le terme a été remis à la volonté du débiteur ou dépend d'un fait dont l'accomplissement est remis à sa volonté.
Article 139
Le terme commence à partir de la date du contrat, si les parties ou la loi n'ont déterminé une autre date ; dans les obligations provenant d'un délit ou quasi-délit, il part du jugement qui liquide l'indemnité à payer par le débiteur.
Article 140
Le jour à partir duquel on commence à compter n'est pas compris dans le terme.
Le terme calculé par nombre de jours expire avec la fin du dernier jour du terme.
Article 141
Quand le terme est calculé par semaines, par mois ou par année, on entend par semaine un délai de sept jours entiers, par mois un délai de trente jours entiers, par année un délai de trois cent soixante-cinq jours entiers.
Article 142
Par commencement du mois, il faut entendre le premier jour de chaque mois ; par milieu ou moitié du mois, le quinzième jour ; par fin du mois, le dernier jour du mois.
Article 143
Lorsque l'échéance du terme correspond à un jour férié légal, le jour suivant non férié s'entend substitué au jour de l'échéance.
Article 144
Le terme suspensif produit les effets de la condition suspensive ; le terme résolutoire produit les effets de la condition résolutoire.
Article 145
Le terme est censé stipulé en faveur du débiteur. Celui-ci peut accomplir l'obligation, même avant l'échéance lorsque l'objet de l'obligation est du numéraire et s'il n'y a pas d'inconvénient pour le créancier à le recevoir. Lorsque l'obligation n'a pas pour objet du numéraire, le créancier n'est tenu de recevoir le paiement avant l'échéance que s'il y consent ; le tout à moins de dispositions contraires de la loi ou du contrat.
Article 146
Le débiteur ne peut répéter ce qu'il a payé d'avance, même lorsqu'il ignorait l'existence du terme.
Article 147
Si le paiement fait avant le terme est déclaré nul ou révoqué et qu'il y ait eu, en conséquence, restitution des sommes payées, l'obligation renaît, et dans ce cas le débiteur peut invoquer le bénéfice du terme stipulé, pour le temps qui restait à accomplir.
Article 148
Le créancier à terme peut prendre, même avant l'échéance du terme, toutes mesures conservatoires de ses droits ; il peut même demander caution ou autre sûreté, ou procéder par la voie de la saisie conservatoire, lorsqu'il a de justes motifs de craindre la déconfiture du débiteur, ou sa fuite.
Article 149
Le débiteur perd le bénéfice du terme s'il est déclaré en faillite, si, par son fait, il diminue les sûretés spéciales qu'il avait données par le contrat, ou s'il ne donne pas celles qu'il avait promises. La même règle s'applique au cas où le débiteur aurait frauduleusement dissimulé les charges ou privilèges antérieurs qui grèvent les sûretés par lui données.
Lorsque la diminution des sûretés spéciales données par le contrat provient d'une cause indépendante de la volonté du débiteur, celui-ci n'est pas déchu de plein droit du bénéfice du terme, mais le créancier a le droit de demander un supplément de sûretés et, à défaut, l'exécution immédiate de l'obligation.
Article 150
La mort du débiteur fait venir à échéance toutes ses obligations, même celles dont le terme n'est pas échu.
Chapitre III
De l'obligation alternative
Article 151
Chacune des parties, ou les deux parties à la fois, peut se réserver le choix dans un délai déterminé. L'obligation est nulle lorsqu'elle n'exprime pas la partie à laquelle le choix a été réservé.
Article 152
Le choix est opéré par la simple déclaration faite à l'autre partie ; dès que le choix est fait, l'obligation est censée n'avoir eu pour objet, dès le principe, que la prestation choisie.
Article 153
Cependant, lorsqu'il s'agit de prestations périodiques portant sur des objets alternatifs, le choix fait à une échéance n'empêche pas l'ayant droit de faire un choix différent à une autre échéance, si le contraire ne résulte du titre constitutif de l'obligation.
Article 154
Si le créancier est en demeure de faire son choix, l'autre partie peut demander au tribunal de lui impartir un délai raisonnable pour se décider : si ce délai expire sans que le créancier ait choisi, le choix appartiendra au débiteur.
Article 155
Si la partie qui avait la faculté de choisir meurt avant d'avoir choisi, le droit d'option se transmet à ses héritiers pour le temps qui restait à leur auteur. Si elle tombe en état d'insolvabilité déclarée, le choix appartient à la masse des créanciers.
Si les héritiers ou les créanciers ne peuvent s'accorder, l'autre partie pourra leur faire assigner un délai, passé lequel le choix appartiendra à cette partie.
Article 156
Le débiteur se libère en accomplissant l'une des prestations promises ; mais il ne peut pas forcer le créancier à recevoir une partie de l'une et une partie de l'autre.
Le créancier n'a droit qu'à l'accomplissement intégral de l'une des prestations, mais il ne peut pas contraindre le débiteur à exécuter une partie de l'une et une partie de l'autre.
Article 157
Lorsque l'un des modes d'exécution de l'obligation devient impossible ou illicite, ou l'était déjà dès l'origine de l'obligation, le créancier pourra faire son choix parmi les autres modes d'exécution, ou demander la résolution du contrat.
Article 158
L'obligation alternative est éteinte, si les deux prestations qui en font l'objet deviennent impossibles en même temps, sans la faute du débiteur, et avant qu'il soit en demeure.
Article 159
Si les deux prestations comprises dans l'obligation deviennent impossibles en même temps par la faute du débiteur ou après sa mise en demeure, il devra payer la valeur de l'une ou de l'autre, au choix du créancier.
Article 160
Lorsque le choix est déféré au créancier, et que l'une des prestations comprises dans l'obligation devient impossible par la faute du débiteur, ou après sa demeure, le créancier pourra exiger la prestation qui est encore possible, ou l'indemnité résultant de l'impossibilité d'exécution de l'autre.
Article 161
Si l'une des prestations comprises dans l'obligation devient impossible par la faute du créancier, il devra être considéré comme ayant choisi cet objet, et ne pourra plus demander celui qui reste.
Article 162
Si les deux prestations deviennent impossibles par la faute du créancier, il sera tenu d'indemniser le débiteur de celle qui sera devenue impossible la dernière, ou si elles sont devenues impossibles en même temps, de la moitié de la valeur de chacune d'elles.
Chapitre IV
Des obligations solidaires
(Parag. I – De la solidarité entre les créanciers)
Article 163
La solidarité entre créanciers ne se présume pas ; elle doit résulter de l'acte constitutif ou de la loi, ou être la conséquence nécessaire de la nature de l'affaire.
Cependant, lorsque plusieurs personnes stipulent une seule prestation conjointement et par le même acte, elles sont censées avoir stipulé solidairement, si le contraire n'est exprimé ou ne résulte de la nature de l'affaire.
Article 164
L'obligation est solidaire entre les créanciers lorsque chacun d'eux a le droit de toucher le total de la créance et le débiteur n'est tenu de payer qu'une seule fois à l'un d'eux. L'obligation peut être solidaire entre les créanciers, encore que la créance de l'un soit différente de celle de l'autre, en ce qu'elle est conditionnelle ou à terme, tandis que la créance de l'autre est pure et simple.
Article 165
L'obligation solidaire s'éteint à l'égard de tous les créanciers par le paiement, ou la dation en paiement, la consignation de la chose due, la compensation, la novation, opérés à l'égard de l'un des créanciers.
Le débiteur qui paie au créancier solidaire la part de celui-ci est libéré, jusqu'à concurrence de cette part, vis-à-vis des autres.
Article 166
La remise de la dette consentie par l'un des créanciers solidaires ne peut être opposée aux autres ; elle ne libère le débiteur que pour la part de ce créancier.
La confusion qui s'opère dans la personne de l'un des créanciers solidaires et du débiteur n'éteint l'obligation qu'à l'égard de ce créancier.
Article 167
N'ont aucun effet en faveur des autres créanciers ni contre eux : 1) le serment déféré par l'un des créanciers solidaires au débiteur ; 2) la chose jugée entre le débiteur et l'un des créanciers solidaires ; le tout si le contraire ne résulte des conventions des parties ou de la nature de
l'affaire.
Article 168
La prescription accomplie contre un créancier solidaire ne peut être opposée aux autres.
La faute ou la demeure d'un créancier solidaire ne nuit pas aux autres.
Article 169
Les actes qui interrompent la prescription au profit de l'un des créanciers solidaires profitent aux autres.
Article 170
La transaction intervenue entre l'un des créanciers et le débiteur profite aux autres, lorsqu'elle contient la reconnaissance du droit ou de la créance ; elle ne peut leur être opposée lorsqu'elle contient la remise de la dette ou lorsqu'elle aggrave la position des autres créanciers, à moins qu'ils n'y aient accédé.
Article 171
Le délai accordé au débiteur par l'un des créanciers solidaires ne peut être opposé aux autres, si le contraire ne résulte de la nature de l'affaire ou des conventions des parties.
Article 172
Ce que chacun des créanciers solidaires reçoit, soit à titre de paiement, soit à titre de transaction, devient commun entre lui et les autres créanciers, lesquels y concourent pour leur part. Si l'un des créanciers se fait donner une caution ou une délégation pour sa part, les autres créanciers ont le droit de participer aux paiements faits par la caution ou par le débiteur délégué : le tout si le contraire ne résulte de la convention des parties ou de la nature de l'affaire.
Article 173
Le créancier solidaire qui, après avoir reçu sa part, ne peut la représenter pour une cause imputable à sa faute, est tenu envers les autres créanciers jusqu'à concurrence de leur part et portion.
(Parag. II – De la solidarité entre les débiteurs) Article 174
La solidarité entre les débiteurs ne se présume point ; elle doit résulter expressément du titre constitutif de l'obligation, de la loi, ou être la conséquence nécessaire de la nature de l'affaire.
Article 175
La solidarité est de droit dans les obligations contractées entre commerçants, pour affaires de commerce, si le contraire n'est exprimé par le titre constitutif de l'obligation ou par la loi.
Article 176
Il y a solidarité entre les débiteurs lorsque chacun d'eux est personnellement tenu de la totalité de la dette, et le créancier peut contraindre chacun des débiteurs à l'accomplir en totalité ou en partie, mais n'a droit à cet accomplissement qu'une seule fois.
Article 177
L'obligation peut être solidaire, encore que l'un des débiteurs soit obligé d'une manière différente des autres, par exemple, si l'un n'est obligé que conditionnellement ou à terme, tandis que l'obligation de l'autre est pure et simple. L'incapacité de l'un des débiteurs ne vicie point l'engagement contracté par les autres.
Article 178
Chacun des débiteurs solidaires peut opposer les exceptions qui lui sont personnelles, et celles qui sont communes à tous les codébiteurs. Il ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles à un ou plusieurs de ses codébiteurs.
Article 179
Le paiement, la dation en paiement, la consignation de la chose due, la compensation opérée entre l'un des débiteurs et le créancier, libèrent tous les autres coobligés.
Article 180
La demeure du créancier à l'égard de l'un des coobligés produit ses effets en faveur des autres.
Article 181
La novation opérée entre le créancier et l'un des coobligés libère les autres, à moins que ceux-ci n'aient consenti à accéder à la nouvelle obligation. Cependant, lorsque le créancier a stipulé l'accession des autres coobligés et que ceux-ci refusent de la donner, l'obligation antérieure n'est pas éteinte.
Article 182
La remise de la dette faite à l'un des débiteurs solidaires profite à tous les autres, à moins que le créancier n'ait expressément déclaré ne vouloir faire remise qu'au débiteur et pour sa part : dans ce cas, les autres codébiteurs n'ont de recours contre celui à qui la remise a été faite que pour sa contribution à la part des insolvables.
Article 183
Le créancier qui consent à la division de la dette en faveur de l'un des débiteurs, conserve son action contre les autres pour le total de la dette, s'il n'y a clause contraire.
Article 184
La transaction faite entre le créancier et l'un des coobligés profite aux autres, lorsqu'elle contient la remise de la dette ou un autre mode de libération. Elle ne peut les obliger ou aggraver leur condition s'ils ne consentent à y accéder.
Article 185
La confusion qui s'opère dans la personne du créancier et de l'un des codébiteurs n'éteint l'obligation que pour la part de ce débiteur.
Article 186
Les poursuites exercées par le créancier contre l'un des débiteurs solidaires ne s'étendent pas aux autres débiteurs, et n'empêchent pas le créancier d'en exercer de pareilles contre eux.
La suspension et l'interruption de la prescription à l'égard de l'un des débiteurs solidaires ne suspend ni n'interrompt la prescription à l'égard des autres. La prescription de la dette accomplie par l'un des débiteurs ne profite pas aux autres.
Article 187
La faute ou la demeure de l'un des débiteurs solidaires ne nuit pas aux autres ; la déchéance du terme encourue par l'un des débiteurs dans les cas prévus en l'article 149 ne produit ses effets que contre lui ; la chose jugée ne produit ses effets qu'en faveur du débiteur qui a été partie au procès et contre lui, le tout si le contraire ne résulte du titre constitutif de l'obligation ou de la nature de l'affaire.
Article 188
Les rapports entre codébiteurs solidaires sont régis par les règles du mandat et du cautionnement.
Article 189
L'obligation contractée solidairement envers le créancier se divise de plein droit entre les débiteurs.
Le codébiteur d'une dette solidaire qu'il a payée ou compensée en entier ne peut répéter contre les autres que les parts et portions de chacun d'eux.
Si l'un d'eux se trouve insolvable ou absent de Tunisie, sa part se répartit par contribution entre tous les autres débiteurs présents et solvables, sauf leur recours contre celui pour qui ils ont payé ; le tout, à moins de stipulation contraire.
Article 190
Si l'affaire pour laquelle l'obligation solidaire a été contractée ne concerne que l'un des coobligés solidaires, celui-ci est tenu de toute la dette vis-à-vis des autres codébiteurs ; ces derniers ne sont considérés, par rapport à lui, que comme ses cautions.
Chapitre V
Des obligations divisibles et indivisibles
(Parag. I – Des obligations indivisibles)
Article 191
L'obligation est indivisible :
1) par la nature de la prestation qui en fait l'objet, lorsqu'elle consiste en une chose ou un fait qui n'est pas susceptible de division soit matérielle, soit intellectuelle ;
2) en vertu du titre qui constitue l'obligation ou de la loi, lorsqu'il résulte de ce titre ou de la loi que l'exécution ne peut en être partielle.
Article 192
Lorsque plusieurs personnes doivent une obligation indivisible, chacune d'elles est tenue pour le total de la dette. Il en est de même de la succession de celui qui a contracté une pareille obligation.
Article 193
Lorsque plusieurs personnes ont droit à une obligation indivisible, sans qu'il y ait entre elles solidarité, le débiteur ne peut payer qu'à tous les créanciers conjointement et chaque créancier ne peut demander l'exécution qu'au nom de tous et s'il y est autorisé par eux.
Cependant, chaque créancier conjoint peut exiger, pour le compte commun, la consignation de la chose due, ou bien sa remise à un séquestre désigné par le tribunal lorsqu'elle n'est pas susceptible de consignation.
Article 194
L'héritier ou le débiteur conjoint, assigné pour la totalité de l'obligation, peut demander un délai pour mettre en cause les autres codébiteurs, à l'effet d'empêcher qu'une condamnation au total de la dette ne soit prononcée contre lui seul. Cependant, lorsque la dette est de nature à ne pouvoir être acquittée que par le débiteur assigné, celui-ci peut être condamné seul, sauf son recours contre ses cohéritiers ou coobligés pour leur part, d'après l'article 189 ci-dessus.
Article 195
L'interruption de la prescription opérée par l'un des créanciers d'une obligation indivisible profite aux autres ; l'interruption opérée contre l'un des débiteurs produit ses effets contre les autres.
(Parag. II – Des obligations divisibles) Article 196
L'obligation qui est susceptible de division doit être exécutée, entre le créancier et le débiteur, comme si elle était indivisible (article 255).
On n'a égard à la divisibilité que par rapport à plusieurs coobligés qui ne peuvent demander une dette divisible et ne sont tenus de la payer que pour leur part.
La même règle s'applique aux héritiers. Ceux-ci ne peuvent demander et ne sont tenus de payer que leur part de la dette héréditaire.
Article 197
La divisibilité entre les codébiteurs d'une dette divisible n'a pas lieu :
1) lorsque la dette a pour objet la délivrance d'une chose déterminée par son individualité, qui se trouve entre les mains de l'un des débiteurs ;
2) lorsque l'un des débiteurs est chargé seul, par le titre constitutif, ou par un titre postérieur, de l'exécution de l'obligation ;
Dans les deux cas, le débiteur qui possède la chose déterminée ou qui est chargé de l'exécution, peut être poursuivi pour le tout, sauf son recours contre ses codébiteurs, dans le cas où le recours peut avoir lieu.
Article 198
Dans les cas énumérés en l'article précédent, l'interruption de la prescription opérée contre le débiteur qui peut être poursuivi pour la totalité de la dette, produit ses effets contre les autres coobligés.
TITRE IV
TRANSPORT DES OBLIGATIONS
Chapitre Premier
Du transport en général
Article 199
Le transport des droits et créances du créancier primitif à une autre personne peut avoir lieu, soit en vertu de la loi, soit en vertu d'une convention entre les parties.
Article 200
Le transport peut avoir pour objet des droits ou créances dont le droit n'est pas échu ; il ne peut avoir pour objet des droits éventuels.
Article 201
La cession est nulle :
1) lorsque la créance ou le droit ne peut être cédé en vertu de son titre constitutif ou de la loi ; il n'est rien innové à cet égard, aux dispositions du décret du 1er août 1898, 13 rebià-el-aoul 1316 ;
2) lorsqu'elle a pour objet des droits qui ont un caractère purement personnel ;
3) lorsque la créance ne peut former objet de saisie ou d'opposition ; cependant, lorsque la créance est susceptible d'être saisie à concurrence d'une partie ou valeur déterminée, la cession sera valable dans la même proportion.
Article 202
Est nul le transfert d'un droit litigieux, à moins qu'il n'ait lieu avec l'assentiment du débiteur cédé.
Le droit est litigieux, au sens du présent article : 1) lorsqu'il y a litige sur le fond même du droit ou de la créance au moment de la vente ou cession, 2) ou bien lorsqu'il existe des circonstances de nature à faire prévoir des contestations judiciaires sérieuses sur le fond même du droit.
Article 203
Est nulle la cession à titre onéreux ou gratuit, lorsqu'elle n'a d'autre but que de soustraire le débiteur à ses juges naturels, et de l'attirer devant une juridiction qui n'est pas la sienne, d'après la nationalité de la partie en cause.
Article 204
La cession contractuelle d'une créance, ou d'un droit ou d'une action, est parfaite par le consentement des parties, et le cessionnaire est substitué de droit au cédant, à partir de ce moment.
Article 205
Le cessionnaire n'est saisi à l'égard du débiteur et des tiers que par la signification du transport faite au débiteur, ou par l'acceptation du transport faite par ce dernier dans un acte ayant date certaine, sauf le cas prévu aux articles 219 et 220 ci-dessous.
Article 206
La cession des baux ou loyers d'immeubles ou autres objets susceptibles d'hypothèques, ou des rentes périodiques constituées sur ces objets, n'a d'effet à l'égard des tiers que si elle est constatée par écrit ayant date certaine, lorsqu'elle est faite pour une période excédant une année.
Article 207
Entre deux cessionnaires de la même créance, celui qui a le premier notifié la cession au débiteur cédé doit être préféré, encore que sa cession soit postérieure en date.
Article 208
Si, avant que la cédant ou le cessionnaire eut signifié le transport au débiteur, celui-ci avait payé le cédant, ou avait autrement éteint la dette, d'accord avec ce dernier, il serait valablement libéré, s'il n'y a dol ou faute lourde de sa part.
Article 209
Le cédant doit remettre au cessionnaire un titre établissant la cession, et lui fournir, avec le titre de créance, les moyens de preuve et les renseignements dont il dispose et qui sont nécessaires pour l'exercice des droits cédés. Il est tenu, si le cessionnaire le requiert, de fournir à ce dernier un titre authentique établissant la cession ; les frais de ce titre seront à la charge du cessionnaire.
Article 210
La cession d'une créance comprend les accessoires qui font partie intégrante de la créance, tels que les privilèges, à l'exception de ceux qui sont personnels au cédant. Elle ne comprend les gages, hypothèques et cautions que s'il y a stipulation expresse. Elle comprend également les actions en nullité ou en rescision qui appartenaient au cédant. Elle est présumée comprendre aussi les intérêts échus et non payés, sauf stipulation ou usage contraire : cette dernière disposition n'a pas lieu entre musulmans.
La caution ou sûreté ne peut être cédée sans l'obligation.
Article 211
Lorsque la cession comprend aussi le gage, le cessionnaire est substitué, dès la délivrance du gage entre ses mains, à toutes les obligations de son cédant envers le débiteur, en ce qui concerne la garde et la conservation de ce gage.
En cas d'inexécution de ces obligations, le cédant et le cessionnaire répondent solidairement envers le débiteur.
Cette règle n'a pas lieu lorsque la cession s'opère en vertu de la loi ou d'un jugement ; dans ce cas, le cessionnaire répond seul du gage envers le débiteur.
Article 212
La vente ou cession d'une créance ou d'un droit comprend les charges ou obligations dont la créance ou le droit sont grevés, s'il n'y a stipulation contraire.
Article 213
Celui qui cède à titre onéreux une créance ou autre droit incorporel doit garantir:
1) sa qualité de créancier ou d'ayant droit ;
2) l'existence de la créance ou du droit au temps de la cession ; 3) son droit d'en disposer ; le tout, quoique la cession soit faite sans garantie. Il garantit également l'existence des accessoires, tels que les privilèges et les
autres droits qui étaient attachés à la créance ou au droit cédé au moment de la cession, à moins qu'ils n'aient été expressément exceptés.
Celui qui cède à titre gratuit ne garantit même pas l'existence de la créance ou du droit cédé, mais il répond des suites de son dol.
Article 214
Le cédant ne garantit la solvabilité du débiteur que lorsqu'il a cédé une créance contre un débiteur qui n'était déjà plus solvable au moment de la cession. Cette garantie comprend le prix qu'il a touché pour la cession et les frais de poursuites que le cessionnaire a dû faire contre le débiteur, sans préjudice de plus amples dommages en cas du dol du cédant.
Article 215
Le créancier qui s'est engagé à garantir la solvabilité du débiteur cesse d'être tenu de cette garantie :
1) si le défaut de paiement provient, soit du fait, soit de la négligence du cessionnaire, par exemple, s'il avait négligé de prendre les mesures nécessaires pour recouvrer la dette ;
2) si le cessionnaire a accordé au débiteur une prorogation de terme après l'échéance de la dette.
Cette garantie est régie, au demeurant, par des dispositions spéciales, insérées au chapitre «de la vente».
Article 216
En cas de cession partielle d'une créance, le cédant et le cessionnaire concourent également, proportionnellement à leurs parts, dans l'exercice des actions résultant de la créance cédée. Le cessionnaire a, toutefois, le droit de priorité :
1) lorsqu'il l'a stipulé expressément ;
2) lorsque le cédant a garanti la solvabilité du débiteur cédé, ou s'est engagé à payer à défaut de ce dernier.
Article 217
Le débiteur peut opposer au cessionnaire toutes les dispositions qu'il aurait pu opposer au cédant, si elles étaient déjà fondées au moment de la cession ou de la signification.
Il ne peut opposer l’exception de simulation, ni les contre-lettres et traités secrets échangés entre lui et le cédant, lorsque ces conventions ne résultent pas du titre constitutif de l'obligation, et que le cessionnaire n'en a pas obtenu connaissance.
Article 218
Le transfert des lettres de change, des titres à l'ordre et au porteur est régi par des dispositions spéciales.
Du transfert d'un ensemble de droits ou d'une hérédité
Article 219
Celui qui cède une hérédité n'est tenu de garantir que sa qualité d'héritier. Cette cession n'est valable que si les deux parties connaissent la valeur de l'hérédité.
Par l'effet de cette cession, les droits et obligations dépendant de l'hérédité passent de plein droit au cessionnaire.
Article 220
Le cessionnaire d'un fonds de commerce, qui continue à l'exploiter sous le même nom ou la même raison commerciale, est tenu de plein droit de toutes les obligations de son cédant, et dérivant de l'exploitation du fonds cédé ; les créances faisant partie du fonds cédé profitent également de plein droit à l'acquéreur ; la publicité usitée dans le commerce tient lieu, vis-à vis des tiers, de la signification prescrite à l'article 205.
Toute convention contraire n'a d'effet, vis-à-vis des tiers que si elle a été personnellement notifiée aux tiers par le cessionnaire ou par le cédant.
Article 221
Lorsque le cessionnaire ne continue pas la raison de commerce sous le même nom, il ne répond des obligations antérieures à la cession que dans les cas suivants :
1) lorsqu'il a notifié, dans les formes usitées dans le commerce, qu'il assumait les obligations antérieures ;
2) ou bien lorsque le fonds de commerce fait partie d'un patrimoine ou d'une hérédité, et a été transmis avec eux au cessionnaire, aux termes de l'article 219.
Article 222
Dans tous les cas de cession d'un fonds de commerce, d'une hérédité ou d'un patrimoine, les créanciers du fonds de commerce, de l'hérédité ou du patrimoine cédé peuvent, à partir de la cession, exercer leurs actions telles que de droit contre le précédent débiteur et contre le cessionnaire conjointement, à moins qu'il n'aient consenti formellement à la cession.
L'acquéreur ne répond, toutefois, qu'à concurrence des forces du patrimoine à lui cédé tel qu'il résulte de l'inventaire de l'hérédité. Cette responsabilité du cessionnaire ne peut être restreinte ni écartée par des conventions passées entre lui et le précédant débiteur.
Chapitre II
De la subrogation Article 223
La subrogation aux droits du créancier peut avoir lieu soit en vertu d'une convention, soit en vertu de la loi.
Article 224
La subrogation conventionnelle a lieu lorsque le créancier, recevant le paiement d'un tiers, le subroge aux droits, actions, privilèges ou hypothèques qu'il a contre le débiteur ; cette subrogation doit être expresse et faite en même temps que le paiement.
Article 225
La subrogation conventionnelle a lieu également lorsque le débiteur emprunte la chose ou la somme qui fait l'objet de l'obligation afin d'éteindre sa dette, et subroge le prêteur dans les garanties affectées au créancier. Cette subrogation s'opère sans le consentement du créancier, et au refus de celui-ci de recevoir le paiement, moyennant la consignation valablement faite par le débiteur.
Il faut, pour que cette subrogation soit valable :
1) que l'acte d'emprunt et la quittance soient constatés par acte ayant date certaine ;
2) que dans l'acte d'emprunt il soit déclaré que la somme ou la chose à été empruntée pour faire le paiement, et que dans la quittance il soit déclaré que le paiement a été fait des deniers ou de la chose fournie à cet effet par le nouveau créancier ; en cas de consignation, ces énonciations devront être portées sur la quittance délivrée par le receveur des consignations ;
3) que le débiteur ait subrogé expressément le nouveau créancier dans les garanties affectées à l'ancienne créance.
Article 226
La subrogation a lieu, de droit, dans les cas suivants :
1) au profit du créancier soit hypothécaire ou gagiste, soit chirographaire, remboursant un autre créancier même postérieur en date, qui lui est préférable à raison de ses privilèges, de ses hypothèques ou de son gage ;
2) au profit de l'acquéreur d'un immeuble, jusqu'à concurrence du prix de son acquisition, lorsque ce prix a servi à payer des créanciers auxquels cet immeuble était hypothéqué ;
3) au profit de celui qui a payé une dette dont il était tenu avec le débiteur, ou pour lui, comme débiteur solidaire, caution, cofidéjusseur, commissionnaire ;
4) au profit de celui qui, sans être tenu personnellement de la dette, avait intérêt à son extinction, et, par exemple, en faveur de celui qui a fourni le gage ou l'hypothèque.
Article 227
La subrogation établie aux articles précédents a lieu tant contre les cautions que contre le débiteur. Le créancier qui a été payé en partie, et le tiers qui l'a payé, concourent ensemble dans l'exercice de leurs droits contre le débiteur, à proportion de ce qui est dû à chacun.
Article 228
La subrogation est régie quant à ses effets, par les principes établis aux articles 200- 203- 204- 205- 206- 213 ci-dessus.
Chapitre III
De la délégation Article 229
La délégation est l'acte par lequel un créancier transmet ses droits sur le débiteur à un autre créancier en paiement de ce qu'il doit lui-même à ce dernier ; il y a aussi délégation dans l'acte de celui qui charge un tiers de payer pour lui, encore que ce tiers ne soit pas débiteur de celui qui lui donne mandat de payer.
Article 230
La délégation ne se présume pas ; elle doit être expresse. Les personnes qui n'ont pas la capacité d'aliéner ne peuvent déléguer.
Article 231
La délégation est parfaite par le consentement du déléguant et du délégataire, même à l'insu du débiteur délégué. Néanmoins, lorsqu'il existe des causes d'inimitié entre le délégataire et le débiteur délégué, l'assentiment de ce dernier est requis pour la validité de la délégation, et le débiteur demeure libre de la refuser.
Article 232
La délégation n'est valable :
1) que si la dette déléguée est juridiquement valable ;
2) si la dette à la charge du créancier déléguant est également valable.
Des droits aléatoires ne peuvent être délégués.
Article 233
Il n'est pas nécessaire pour la validité de la délégation que les deux dettes soient égales quant à la quotité, ni qu'elles aient une cause analogue.
Article 234
Le débiteur délégué peut opposer au nouveau créancier tous les moyens et exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier déléguant, même celles qui sont personnelles à ce dernier.
Article 235
La délégation valable libère le déléguant, sauf stipulation contraire et les cas énumérés en l'article suivant.
Article 236
La délégation ne libère point le déléguant, et le délégataire a recours contre lui pour le montant de sa créance et des accessoires :
1) lorsque l'obligation déléguée est déclarée inexistante ou est résolue, pour l'une des causes de nullité ou de résolution établies par la loi ;
2) dans le cas prévu aux articles 365 et 366 ;
3) lorsque le débiteur délégué démontre qu'il s'est déjà libéré avant d'avoir eu connaissance de la délégation. Le débiteur délégué qui a payé le déléguant après avoir eu connaissance de la délégation, demeure responsable envers le délégataire, sauf la répétition de ce qu'il a payé au déléguant.
Article 237
Les règles établies aux articles 203- 207- 208- 210- 211- 212- 214 s'appliquent à la délégation.
Article 238
Lorsque la délégation est faite à deux personnes sur le même débiteur, celui dont le titre a une date antérieure précède l'autre. Lorsque les deux délégations sont datées du même jour et qu'on ne peut établir l'heure à laquelle chacune d'elles a été donnée, on partage la somme entre les deux créanciers, chacun à proportion de la créance.
Article 239
Le délégué qui a payé à recours contre le déléguant à concurrence de la somme qu'il a payé, d'après les règles du mandat, s'il n'était pas débiteur du déléguant.
TITRE V
DES EFFETS DES OBLIGATIONS
Chapitre Premier
De l'effet des obligations en général
Article 240
Les obligations n'engagent que ceux qui ont été parties à l'acte : elles ne nuisent point aux tiers et elles ne leur profitent que dans les cas exprimés par la loi.
Article 241
Les obligations ont effet non seulement entre les parties elles-mêmes, mais aussi entre leurs héritiers ou ayants cause, à moins que le contraire ne soit exprimé ou ne résulte de la nature de l'obligation, ou de la loi. Les héritiers ne sont tenus, toutefois, que jusqu'à concurrence des forces héréditaires, et proportionnellement à l'émolument de chacun d'eux.
Lorsque les héritiers refusent d'accepter la succession, ils ne peuvent y être contraints et ils ne sont nullement tenus des dettes héréditaires : les créanciers ne peuvent, dans ce cas, que poursuivre leurs droits contre la succession.
Article 242
Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi.
Article 243
Tout engagement doit être exécuté de bonne foi, et oblige, non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que la loi, l'usage ou l'équité donnent à l'obligation d'après sa nature.
Article 244
On ne peut stipuler d'avance qu'on ne sera pas tenu de sa faute lourde ou de son dol.
Article 245
Le débiteur répond du fait et de la faute de son représentant et des personnes dont il se sert pour exécuter son obligation, dans les mêmes conditions où il devrait répondre de sa propre faute, sauf son recours tel que de droit contre les personnes dont il doit répondre.
Article 246
Nul ne peut exercer l'action naissant d'une obligation s'il ne justifie qu'il a accompli ou offert d'accomplir tout ce qu'il devait de son côté d'après la convention ou d'après la loi et l'usage.
Article 247
Dans les contrats bilatéraux, l'une des parties peut refuser d'accomplir son obligation jusqu'à l'accomplissement de l'obligation corrélative de l'autre partie, à moins que, d'après la convention ou l'usage, l'un des contractants ne soit tenu d'exécuter le premier sa part de l'obligation.
Lorsque l'exécution doit être faite à plusieurs personnes, le débiteur peut refuser d'accomplir la prestation due à l'une d'elles jusqu'à l'accomplissement intégral de la prestation corrélative qui lui est due.
Chapitre II
De l'exécution des obligations
Article 248
Le débiteur peut exécuter l'obligation soit personnellement soit par l'intermédiaire d'une autre personne. Il doit l'exécuter personnellement :
1) lorsqu'il est expressément stipulé que l'obligation sera accomplie par lui personnellement : dans ce cas, il ne pourra se faire remplacer, même si la personne qu'il veut se substituer est préférable à la sienne ;
2) lorsque cette réserve résulte tacitement de la nature de l'obligation ou des circonstances: par exemple, lorsque l'obligé a une habilité personnelle qui a été l'un des motifs déterminants du contrat.
Article 249
Lorsque l'obligation ne doit pas être exécutée par le débiteur lui-même, elle peut être accomplie par un tiers même contre le gré du créancier, et cet accomplissement libère le débiteur, pourvu que le tiers agisse au nom et en l'acquit du dit débiteur.
L'obligation ne peut être accomplie contre le gré du débiteur et du créancier à la fois.
Article 250
L'exécution doit être faite dans les mains du créancier, de son représentant dûment autorisé ou de la personne indiquée par le créancier comme autorisée à recevoir ; l'exécution faite à celui qui n'a pas pouvoir de recevoir ne libère le débiteur, que :
1) si le créancier l'a ratifiée, même tacitement, ou s'il en a profité ;
2) si elle est autorisée par justice.
Article 251
Celui qui présente une quittance ou décharge du créancier, ou un acte l'autorisant à recevoir ce qui est dû à celui-ci, est présumé autorisé à recevoir l'exécution de l'obligation, à moins qu'en fait, le débiteur ne sût ou ne dût savoir que cette autorisation n'existait pas.
Article 252
Est valable l'exécution faite de bonne foi entre les mains de celui qui est en possession de la créance, tel que l'héritier apparent, encore qu'il en soit évincé par la suite.
Article 253
Lorsque l'exécution est faite par un débiteur qui n'est pas capable d'aliéner, ou à un créancier qui n'est pas capable de recevoir, on appliquera les règles suivantes :
1) le paiement ou exécution d'une chose due qui ne nuit pas à l'incapable qui l'a fait, éteint l'obligation, et ne peut être répété contre le créancier qui l'a reçue ;
2) le paiement fait à un incapable est valable, si le débiteur prouve que l'incapable en a profité, au sens de l'article 13.
Article 254
Le débiteur ne se libère qu'en délivrant la quantité, et la qualité portées dans l'obligation.
Il ne peut contraindre le créancier à recevoir une autre prestation que celle qui lui est due, ni d'une manière différente de celle déterminée par le titre constitutif de l'obligation ou à défaut par l'usage.
Article 255
S'il n'y a qu'un seul débiteur, le créancier ne peut être tenu de recevoir l'exécution de l'obligation par prestations partielles, même lorsqu'elle est divisible, sauf s'il en est autrement convenu, et sauf s'il s'agit de lettres de change.
Article 256
Lorsque la chose n'est déterminée que par son espèce, le débiteur n'est pas tenu de la donner de la meilleure espèce, mais il ne pourra l'offrir de la plus mauvaise.
Article 257
Le débiteur d'une chose déterminée par son individualité est libéré par la chose en l'état où elle se trouve lors du contrat. Il répond, toutefois, des détériorations survenues depuis cette date :
1) lorsqu'elles proviennent d'un fait ou d'une faute qui lui est imputable d'après les règles établies pour les délits et quasi-délits ;
2) lorsqu'il était en demeure au moment où ces détériorations sont survenues.
Article 258
Lorsque l'objet de l'obligation consiste en choses fongibles, le débiteur ne doit que la même quantité, qualité et espèce portée dans l'obligation, quelle que soit l'augmentation ou la diminution de la valeur.
Si, à l'échéance, les choses faisant l'objet de l'obligation sont devenues introuvables, le créancier aura le choix d'attendre qu'elles puissent se trouver, ou bien de résoudre l'obligation et de répéter les avances qu'il aurait faites de ce chef.
Article 259
Si une dette payable en Tunisie est exprimée en monnaie étrangère, le paiement pourra être fait en espèces ayant cours légal dans l'Etat tunisien, à moins qu'il ne soit expressément stipulé qu'il doit être effectué en espèces étrangères.
La réduction doit être faite au cours de la monnaie étrangère, dans le lieu du paiement, au jour où l'obligation devait être exécutée.
Article 260
Lorsque les espèces portées dans l'obligation sont hors cours ou deviennent introuvables au moment où le paiement doit être effectué, l'obligation sera exécutée en espèces ayant cours en Tunisie ; le débiteur devra l'équivalent de la valeur intrinsèque calculée au moment du contrat.
Article 261
Lorsque le nom des espèces portées dans l'obligation s'applique à plusieurs monnaies ayant également cours, mais de valeurs différentes, le débiteur se libère, en cas de doute, en payant la monnaie de valeur inférieure.
Cependant, dans les contrats commutatifs, le débiteur est présumé devoir la monnaie qui est le plus en usage ; lorsque les monnaies ont toutes également cours, il y a lieu à la rescision du contrat.
Article 262
L'obligation doit être exécutée dans le lieu déterminé par la nature de la chose ou par la convention. A défaut, de convention, l'exécution est due au lieu du contrat, lorsqu'il s'agit de choses dont le transport est onéreux ou difficile. Lorsque l'objet de l'obligation peut être transporté sans difficulté, le débiteur peut se libérer partout où il trouve le créancier, à moins que celui-ci n'ait une raison plausible de ne pas recevoir le paiement qui lui est offert.
Dans les obligations provenant d'un délit, l'exécution a lieu au siège du tribunal qui a été saisi de l'affaire.
Article 263
Les règles relatives au temps dans lequel l'exécution doit être faite sont énoncées aux articles 136 et suivants.
Article 264
Les frais de l'exécution sont à la charge du débiteur, ceux de la réception à la charge du créancier, s'il n'y a stipulation ou usage contraire, et sauf les cas où il en est autrement disposé par la loi.
Article 265
Le débiteur qui a exécuté l'obligation a le droit de demander la restitution du titre établissant sa dette, dûment acquitté ; si le créancier ne peut faire cette restitution, ou s'il a un intérêt légitime à garder le titre, le débiteur peut exiger, à ses frais, une quittance notariée établissant sa libération.
Article 266
Le débiteur qui acquitte partiellement l'obligation a le droit de se faire délivrer un reçu et d'exiger, en outre, la mention du paiement partiel sur le titre.
Article 267
Lorsqu'il s'agit de rentes, de baux, ou d'autres prestations périodiques, la quittance délivrée sans réserve pour l'un des termes fait présumer le paiement des termes échus antérieurement à la date de la quittance.
Chapitre III
De l'inexécution de l'obligation et de ses effets
Section Première
De la demeure du débiteur
Article 268
Le débiteur est en demeure lorsqu'il est en retard d'exécuter son obligation, en tout ou en partie, sans cause valable.
Article 269
Le débiteur est constitué en demeure par la seule échéance du terme établie par l'acte constitutif de l'obligation.
Si aucune échéance n'est établie, le débiteur n'est constitué en demeure que par une interpellation formelle du représentant légitime de ce dernier. Cette interpellation doit exprimer :
1) la requête adressée au débiteur d'exécuter son obligation dans un délai raisonnable ;
2) la déclaration que, passé ce délai, le créancier se considèrera comme dégagé en ce qui le concerne.
Cette interpellation doit être faite par écrit ; elle peut résulter même d'un télégramme, d'une lettre recommandée, d'une citation en justice, même devant un juge incompétent.
Article 270
L'interpellation du créancier n'est pas requise :
1) lorsque le débiteur a refusé formellement d'exécuter son obligation ;
2) lorsque l'exécution est devenue impossible.
Article 271
Lorsque l'obligation échoit après la mort du débiteur, ses héritiers ne sont constitués en demeure que par l'interpellation formelle à eux adressée par le créancier ou par le représentant de celui-ci, d'exécuter l'obligation de leur auteur ; si parmi les héritiers il y a des mineurs ou des incapables, l'interpellation doit être adressée à celui qui les représente légalement.
Article 272
L'interpellation du créancier n'a aucun effet si elle est faite à un moment ou dans un lieu où l'exécution n'est pas due.
Article 273
Lorsque le débiteur est en demeure, le créancier a le droit de contraindre le débiteur à accomplir l'obligation si l'exécution en est possible ; à défaut, il pourra demander la résolution du contrat ainsi que des dommages-intérêts dans les deux cas.
Lorsque l'exécution n'est plus possible qu'en partie, le créancier pourra demander soit l'exécution du contrat pour la partie qui est encore possible, soit la résolution du contrat avec dommages-intérêts dans les deux cas.
On suivra, au demeurant, les règles établies dans les titres relatifs aux contrats particuliers.
La résolution du contrat n'a pas lieu de plein droit, mais doit être prononcée en justice.
Article 274
Si les parties sont convenues que le contrat sera résolu dans le cas où l'une d'elles n'accomplirait pas ses engagements, la résolution du contrat s'opère de plein droit par le seul fait de l'inexécution.
Article 275
L'obligation de faire se résout en dommages-intérêts en cas d'inexécution. Cependant, si l'obligation consiste en un fait dont l'accomplissement n'exige pas l'action personnelle du débiteur, le créancier peut être autorisé à la faire exécuter luimême aux dépens de ce dernier.
Cette dépense ne pourra excéder, toutefois, ce qui est nécessaire pour obtenir l'exécution de l'obligation : lorsqu'elle dépasse la somme de cent dinars, le créancier devra se faire autoriser par le juge compétent.
Article 276
Lorsque l'obligation consiste à ne pas faire, le débiteur est tenu des dommagesintérêts par le seul fait de la contravention ; le créancier peut, en outre, se faire autoriser à supprimer, aux dépens du débiteur, ce qui aurait été fait contrairement à l'engagement.
Article 277
Les dommages-intérêts sont dus, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, et encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de la part du débiteur.
Article 278 (complété par la loi n° 59-148 du 7 novembre 1959).
Les dommages sont la perte effective que le créancier a éprouvée et le gain dont il a été privé et qui sont la conséquence directe de l'inexécution de l'obligation. L'appréciation des circonstances spéciales de chaque espèce est remise à la prudence du tribunal ; il devra évaluer différemment le montant des dommages-intérêts, selon qu'il s'agit de la faute du débiteur ou de son dol.
Toutefois, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts ne consistent que dans la condamnation aux intérêts fixés par la loi, sauf les règles particulières au droit commercial.
Ces dommages-intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Ils ne sont dus que du jour de l'interpellation faite par le créancier au débiteur.
Le créancier auquel son débiteur a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.
Article 279
Si le créancier a traité pour le compte d'un tiers, il aura action du chef des dommages éprouvés par le tiers dans l'intérêt duquel il a traité.
Article 280
Le débiteur en demeure répond du cas fortuit et de la force majeure.
Article 281
Dans le cas de l'article précédant, si la chose a péri, il est tenu de l'estimation de la chose selon la valeur qu'elle avait à l'échéance de l'obligation. Si le demandeur ne fait pas la preuve de cette valeur, l'estimation doit en être faite sur la description donnée par le défendeur, pourvu que cette description soit vraisemblable et corroborée par serment. Si le défendeur refuse le serment, on s'en rapporte à la déclaration du demandeur, à charge du serment.
Section II
De la force majeure et du cas fortuit
Article 282
Il n'y a lieu à aucuns dommages-intérêts, lorsque le débiteur justifie que l'inexécution ou le retard proviennent d'une cause qui ne peut lui être imputée, telle que la force majeure, le cas fortuit ou la demeure du créancier.
Article 283
La force majeure est tout fait que l'homme ne peut prévenir, tel que les phénomènes naturels (inondations, sécheresses, orages, incendies, sauterelles), l'invasion ennemie, le fait du prince, et qui rend impossible l'exécution de l'obligation.
N'est point considérée comme force majeure la cause qu'il était possible d'éviter, si le débiteur ne justifie qu'il a déployé toute diligence pour s'en prémunir.
N'est pas également considérée comme force majeure la cause qui a été occasionnée par une faute précédente du débiteur.
Section III
De la demeure du créancier
Article 284
Le créancier est en demeure lorsqu'il refuse, sans juste cause, de recevoir la prestation que le débiteur ou un tiers agissant en son nom, offre d'accomplir de la manière déterminée par le titre constitutif ou par la nature de l'obligation.
Le silence ou l'absence du créancier dans les cas où son concours est nécessaire pour l'exécution de l'obligation constituent un refus.
Article 285
Le créancier n'est pas constitué en demeure lorsque, au moment où le débiteur offre d'accomplir son obligation, ce dernier n'est réellement pas en état de l'accomplir.
Article 286
Le créancier n'est pas constitué en demeure par le refus momentané de recevoir la chose :
1) lorsque l'échéance de l'obligation n'est pas déterminée ;
2) ou lorsque le débiteur a le droit de s'acquitter avant le terme établi.
Cependant, si le débiteur l'avait prévenu, dans un délai raisonnable, de son intention d'exécuter l'obligation, le créancier serait constitué en demeure même par un refus momentané de recevoir la chose qui lui est offerte.
Article 287
A partir du moment où le créancier est constitué en demeure, la perte ou la détérioration de la chose sont à ses risques, et le débiteur ne répond plus que de son dol et de sa faute lourde.
Article 288
Le débiteur ne doit restituer que les fruits qu'il a réellement perçus pendant la demeure du créancier, et il a, d'autre part, le droit de répéter les dépenses nécessaires qu'il a dû faire pour la conservation et la garde de la chose, ainsi que les frais des offres par lui faites.
Section IV
Des offres d'exécution et de la consignation
Article 289
La demeure du créancier ne suffit pas pour libérer le débiteur.
Si l’objet de l’obligation est une somme d’argent, le débiteur doit faire des offres réelles et, au refus du créancier de les accepter, il se libère en consignant la somme offerte dans le dépôt indiqué par le tribunal ; si l’objet de l’obligation est une quantité de choses qui se consomment par l’usage ou un corps déterminé par son individualité, le débiteur doit inviter le créancier à le recevoir au lieu déterminé par le contrat ou par la nature de l’obligation, et, faute par le créancier de le recevoir, il se libère en les consignant dans le dépôt indiqué par le tribunal du lieu de l’exécution, lorsque la chose est susceptible de consignation.
Article 290
Si l’objet de l’obligation est un fait, le débiteur ne se libère pas en offrant de l’accomplir. Mais si l’offre a été faite en temps opportun, et dans les conditions déterminées par la convention ou par l’usage des lieux, et si elle a été dûment constatée au moment même, le débiteur aura recours contre le créancier à concurrence de la somme qui lui aurait été due s’il avait accompli son engagement.
Le tribunal pourra cependant réduire cette somme, d’après les circonstances de l’affaire.
Article 291
Aucune offre réelle n’est nécessaire de la part du débiteur :
1) lorsque le créancier lui a déjà déclaré qu’il refuse de recevoir l’exécution de l’obligation ;
2) lorsque le concours du créancier est nécessaire pour l’accomplissement de l’obligation et que le créancier s’abstient de le donner ; tel est le cas où la dette est payable au domicile du débiteur, si le créancier ne se présente pas pour la recevoir.
Dans ces cas, une simple invitation adressée au créancier peut tenir lieu d’offres réelles.
Article 292
Le débiteur est également affranchi de la nécessité de faire des offres réelles et se libère en consignant ce qu’il doit :
1) lorsque le créancier est incertain ou inconnu ;
2) dans tous les cas où, pour un motif dépendant de la personne du créancier, le débiteur ne peut pas accomplir son obligation ou ne peut l’accomplir avec sécurité ; tel est le cas où les sommes dues sont frappées de saisie ou d’opposition à l’encontre du créancier ou du cessionnaire.
Article 293
Pour que les offres réelles soient valables, il faut :
1) qu’elles soient faites au créancier ayant la capacité de recevoir, ou à celui qui a pouvoir de recevoir pour lui. En cas de faillite du créancier, les offres doivent être faites à celui qui représente la masse ;
2) qu’elles soient faites par une personne capable de payer, même par un tiers
agissant au nom et en l’acquit du débiteur ;
3) qu’elles soient de la totalité de la prestation exigible ;
4) que le terme soit échu, s’il a été stipulé en faveur du créancier ;
5) que la condition sous laquelle la dette a été contractée soit arrivée ;
6) que les offres soient faites au lieu dont on est convenu pour le paiement ; et, à défaut, à la personne du créancier ou au lieu du contrat ; elles peuvent même être faites à l’audience.
Article 294
L’offre non suivie de la consignation effective de la chose ne libère pas le débiteur. La consignation ne libère le débiteur des conséquences de sa demeure que pour l’avenir ; elle laisse subsister à sa charge les effets de la demeure acquis au jour de la consignation.
Article 295
Le débiteur d’une chose mobilière peut, après les offres et même après le dépôt, se faire autoriser à vendre la chose offerte pour le compte du créancier, et à consigner, s’il y a lieu, le produit de la vente, dans les cas suivants :
1) s’il y a péril en la demeure ;
2) lorsque les frais de la conservation de la chose dépasseraient sa valeur ;
3) lorsque la chose n’est pas susceptible de consignation.
La vente doit être faite aux enchères publiques ; cependant, lorsque la chose a un prix de bourse ou de marché, le tribunal peut autoriser la vente par l’entremise d’un courtier ou d’un officier public à ce autorisé, et au prix courant du jour. Le débiteur doit notifier sans délai le résultat de la vente à l’autre partie, à peine des dommages ; il aura recours contre l’autre partie, à concurrence de la différence entre le produit de la vente et le prix convenu entre les parties, sans préjudice de plus amples dommages. Les frais de la vente sont à la charge du créancier.
Article 296
Le débiteur doit notifier sur-le-champ au créancier la consignation opérée pour son compte, à peine des dommages-intérêts ; cette notification peut être omise dans les cas où elle serait superflue ou impossible, aux termes des articles 291 et 292, cidessus.
Article 297
A partir du jour de la consignation, la chose consignée demeure aux risques du créancier, lequel jouit aussi des fruits. Les intérêts, dans les cas où il en serait dû, cessent de courir, les gages et hypothèques s’éteignent, les codébiteurs et les cautions sont libérés.
Article 298
Tant que la consignation n’a pas été acceptée par le créancier, le débiteur peut la retirer. Dans ce cas, la dette renaît avec les privilèges et hypothèques qui y étaient attachés et les codébiteurs ou cautions ne sont point libérés.
Article 299
Le débiteur n’a plus la faculté de retirer sa consignation :
1) lorsqu’il a obtenu un jugement passé en force de chose jugée, qui a déclaré ses offres et sa consignation bonnes et valables ;
2) lorsqu’il a déclaré qu’il renonçait au droit de retirer sa consignation.
Article 300
En cas d’insolvabilité déclarée du débiteur, la consignation ne peut être retirée par ce dernier ; elle ne peut l’être que par la masse des créanciers dans les conditions indiquées aux articles précédents.
Article 301
Les frais des offres réelles et de la consignation sont à la charge du créancier, si elles sont valables. Ils sont à la charge du débiteur, s’il retire sa consignation.
Article 302
Après quinze ans révolus, à compter du jour où la consignation a été notifiée au créancier, celui-ci n’a plus le droit de retirer la somme ou la chose consignée pour son compte s’il ne l’a pas réclamée pendant ce délai, et le débiteur pourra la retirer encore qu’il y eût renoncé.
Chapitre IV
De quelques moyens d’assurer l’exécution des obligations
Section Première
Des arrhes
Article 303
Les arrhes sont ce que l’un des contractants donne à l’autre afin d’assurer l’exécution de son engagement.
Article 304
En cas d’exécution du contrat, le montant des arrhes sera porté en déduction de ce qui est dû par la partie qui les donne ; par exemple, du prix de vente ou du loyer lorsque celui qui a donné les arrhes est l’acheteur ou le preneur ; elles seront restituées après l’exécution du contrat lorsque celui qui a donné les arrhes est le vendeur ou le bailleur. Elles seront également restituées lorsque le contrat est résilié de commun accord.
Article 305
Lorsque l’obligation ne peut être exécutée ou est résolue par la faute de la partie qui a donné les arrhes, celui qui les a reçues a le droit de les retenir et ne doit les restituer qu’après la prestation des dommages alloués par le tribunal si le cas y échet.
Section II
De l’action révocatoire et subrogatoire
Article 306 (modifié par le décret du 15 septembre 1923).
Les créanciers peuvent, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur, en fraude de leurs droits, sans toutefois qu’il soit dérogé aux règles du statut personnel ou successoral.
Lorsque les créanciers ne peuvent obtenir ce qui leur est dû et que le débiteur a des droits sur d’autres personnes, les créanciers peuvent soumettre leur affaire au juge ; après avoir fait la preuve de leurs droits, ils pourront obtenir la saisie des droits et créances appartenant à leur débiteur et exercer tous les droits et actions de celui-ci, sauf les droits exclusivement personnels tels que ceux de puissance paternelle, d’usage, d’habitation, d’aliments, les droits résultant des délits ou des quasi-délits commis contre la personne, et généralement tous ceux qui ne peuvent être ni saisis ni cédés ; les actions rescisoires fondées sur l’incapacité ou la minorité du débiteur ne sont pas des actions personnelles au sens du présent article, et peuvent être exercées par les créanciers.
Article 307
Le créancier qui agit aux lieu et place de son débiteur exerce les droits de ce dernier, mais dans son propre intérêt. En conséquence :
1) on peut lui opposer toutes les exceptions qui pourraient être opposées à son débiteur, pourvu qu’elles aient une cause antérieure à l’action judiciaire formée par le créancier.
2) la chose jugée entre le créancier et le tiers contre lequel il agit au nom de son débiteur, peut être opposée à ce dernier, pourvu que le débiteur ait été mis en cause, dès le début de l’action, et encore qu’il se soit abstenu d’intervenir.
Article 308
Le créancier qui agit au nom de son débiteur profite seul du paiement qu’il a obtenu ; mais les actes conservatoires par lui faits profitent également à tous les autres créanciers.
Section III
Du droit de rétention
Article 309
Le droit de rétention est celui de posséder la chose appartenant au débiteur, et de ne s’en dessaisir qu’après paiement de ce qui est dû au créancier. Il ne peut être exercé que dans les cas spécialement établis par la loi.
Article 310
Le droit de rétention est reconnu en faveur du possesseur de bonne foi :
1) pour les dépenses nécessaires à la chose, jusqu’à concurrence de ces dépenses ;
2) pour les dépenses qui ont amélioré la chose, pourvu qu’elles soient antérieures à la demande en revendication, jusqu’à concurrence de la plus-value acquise par le fonds ou par la chose ; après la demande en revendication, il ne sera tenu compte que des dépenses strictement nécessaires. Ce droit ne peut être exercé pour les dépenses simplement voluptuaires ;
3) dans tous les autres cas exprimés par la loi.
Article 311
Le droit de rétention ne peut être exercé :
1) par le possesseur de mauvaise foi ;
2) par le créancier dont la créance a une cause illicite ou prohibée par la loi.
Article 312
Le droit de rétention peut avoir pour objet les choses tant mobilières qu’immobilières, ainsi que les titres nominatifs, à l’ordre ou au porteur.
Article 313
Le droit de rétention ne peut être exercé :
1) sur les choses qui n’appartiennent pas au débiteur telles que les choses perdues ou volées, revendiquées par leur possesseur légitime ;
2) sur les choses à l’égard desquelles le créancier savait ou devait savoir, à raison des circonstances ou de l’accomplissement des publications prescrites par la loi, qu’elles n’appartenaient pas au débiteur ;
3) sur les choses soustraites à l’exécution mobilière telles que les choses nécessaires à la vie.
Article 314
Il ne peut être exercé que dans les conditions suivantes : 1) si le créancier est en possession de la chose ; 2) si la créance est échue. Lorsqu’elle n’est pas liquide, le tribunal fixera au
créancier un délai, le plus bref possible, pour liquider ses droits ;
3) si la créance est née des rapports d’affaires existant entre les parties, ou de la chose même qui est l’objet de la rétention.
Article 315
Le créancier est censé nanti de la chose lorsqu’elle est à sa disposition, dans ses magasins ou navires, dans ceux de son commissionnaire, facteur ou agent, à la douane ou dans un entrepôt public, ou lorsqu’il en est saisi, avant l’arrivé de la chose, moyennant un connaissement ou lettre de voiture.
Article 316
Lorsque les objets retenus par le créancier ont été déplacés clandestinement ou malgré son opposition, il aura le droit de les revendiquer afin de les rétablir au lieu où ils se trouvaient, dans les trente jours à partir du moment où il a eu connaissance du déplacement.
Passé ce délai, il est déchu du droit de suite.
Article 317
Le droit de rétention peut être exercé même à raison de créances non échues :
1) lorsque le débiteur a suspendu ses paiements ou est en état d’insolvabilité déclarée ;
2) lorsqu’une exécution poursuivie sur le débiteur a donné un résultat négatif.
Article 318
Le droit de rétention ne peut être exercé lorsque les choses appartenant au débiteur ont été remises au créancier avec une affectation spéciale, ou lorsque le créancier s’est engagé à en faire un emploi déterminé. Cependant, lorsque, postérieurement à ces faits, le créancier apprend la suspension des paiements ou l’insolvabilité de son débiteur, il est autorisé à faire usage du droit de rétention.
Article 319
Quand le droit de rétention est éteint par la dépossession, il renaît si, par un fait postérieur, le créancier est remis en possession de la chose.
Article 320
Le créancier qui exerce le droit de rétention répond de la chose, d’après les règles établies pour le créancier gagiste.
Article 321
Lorsque la chose retenue par le créancier est sujette à dépérissement ou court le risque de se détériorer, le créancier peut se faire autoriser à la vendre dans les formes prescrites pour la vente du gage ; le droit de rétention s’exerce sur le produit de la vente.
Article 322
Le tribunal pourra, d'après les circonstances, ordonner la restitution des choses retenues par le créancier, si le débiteur offre de déposer entre les mains de ce dernier une chose ou une valeur équivalente ou de consigner la somme réclamée jusqu’à la solution du litige. Il peut aussi ordonner la restitution partielle de ces choses dans les cas où elle peut se faire, lorsque le débiteur offre d’en déposer l’équivalent ; l’offre d’une caution ne suffirait pas à libérer le gage.
Article 323
A défaut de paiement de ce qui lui est dû, le créancier peut, après une simple sommation faite au débiteur, se faire autoriser par le tribunal à vendre les choses dont il est nanti, et à appliquer le produit de la vente au paiement de sa créance par privilège sur tous autres créanciers. Il est soumis, en ce qui concerne cette liquidation et ses suites, à toutes les obligations du créancier gagiste.
Article 324
Le droit de rétention peut être opposé aux créanciers et ayants cause du débiteur, dans les mêmes cas où il pourrait être opposé au débiteur lui même.
TITRE VI
DE LA NULLITE ET DE LA RESCISION DES OBLIGATIONS
Chapitre Premier
De la nullité des obligations
Article 325
L’obligation nulle de plein droit ne peut produire aucun effet, sauf la répétition de ce qui a été payé indûment en exécution de cette obligation.
L’obligation est nulle de plein droit :
1) lorsqu’elle manque d’une des conditions substantielles de sa formation ;
2) lorsque la loi en édicte la nullité dans un cas déterminé.
Article 326
La nullité de l’obligation principale entraîne la nullité des obligations accessoires, à moins que le contraire ne résulte de la loi ou de la nature de l’obligation accessoire.
La nullité de l’obligation accessoire n’entraîne point la nullité de l’obligation principale.
Article 327
La nullité d’une partie de l’obligation annule l’obligation pour le tout, à moins que celle-ci puisse continuer à subsister à défaut de la partie atteinte de nullité, auquel cas elle continuera à subsister comme contrat distinct.
Article 328
L’obligation qui est nulle comme telle, mais qui a les conditions de validité d’une autre obligation légitime, doit être régie par les règles établies pour cette obligation.
Article 329
La confirmation ou ratification d’une obligation nulle de plein droit n’a aucun effet.
Chapitre II
De la rescision des obligations
Article 330
L’action en rescision a lieu dans les cas prévus au présent code, articles 8, 43, 58, 60, 61 et dans les autres cas déterminés par la loi. Elle se prescrit par un an dans tous les cas où la loi n’indique pas un délai différent.
Cette prescription n’a lieu qu’entre ceux qui ont été parties à l’acte.
Article 331
Ce temps ne court, dans le cas de violence, que du jour où elle a cessé ; dans le cas d’erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts ; à l’égard des actes faits par les mineurs, du jour de leur majorité ; à l’égard des actes faits par les interdits et les incapables, du jour où l’interdiction est levée ou du jour de leur décès, en ce qui concerne leurs héritiers, lorsque l’incapable est mort en état d’incapacité ; en cas de lésion, lorsqu’il s’agit de majeurs, du jour de la prise de possession de la chose qui fait l’objet du contrat.
Article 332
La prescription d’un an s’applique également, dans les cas sus-énoncés, à l’Etat, aux communes et autres personnes morales, à partir du jour où l’acte susceptible d’être annulé est devenu définitif, d’après les lois et règlements administratifs.
Article 333
L’action en rescision se transmet aux héritiers pour le temps qui restait à leur auteur, sauf les dispositions relatives à l’interruption ou à la suspension de la prescription.
Article 334
L’action en rescision est prescrite dans tous les cas, par le laps de quinze ans à partir de la date de l’acte.
Article 335
L’exception de nullité peut être opposée par celui qui est assigné en exécution de la convention dans tous les cas où il aurait pu lui-même exercer l’action en rescision.
Cette exception n’est pas soumise à la prescription établie par les articles 330 à 334 ci-dessus.
Article 336
La rescision de l’obligation a pour effet de remettre les parties au même et semblable état où elles étaient au moment où l’obligation a été constituée, et de les obliger à se restituer réciproquement tout ce qu’elles ont reçu l’une de l’autre en vertu ou en conséquence de l’acte annulé ; en ce qui concerne les droits régulièrement acquis par les tiers de bonne foi, on suivra les dispositions spéciales établies pour les différents contrats particuliers.
Article 337
La confirmation ou ratification d’une obligation contre laquelle la loi admet l’action en rescision n’est valable que lorsqu’elle renferme la substance de cette obligation, la mention du motif qui la rend annulable et la déclaration qu’on entend réparer le vice qui donnerait lieu à la rescision.
Article 338
A défaut de confirmation ou de ratification expresse, il suffit que l’obligation rescindable soit exécutée volontairement, en tout ou en partie, par celui qui en connaît les vices, après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.
La confirmation, reconnaissance ou exécution volontaire, dans les formes à l’époque déterminées par la loi, emportent la renonciation aux moyens et exceptions, que l’on pouvait opposer contre l’obligation rescindable. Quant aux droits régulièrement acquis par les tiers de bonne foi, avant la ratification ou exécution, on suivra la règle établie par l’article 336 in fine.
TITRE VII
DE L’EXTINCTION DES OBLIGATIONS Article 339
Les obligations s’éteignent par :
1) le paiement ;
2) l’impossibilité de l’exécution ;
3) la remise volontaire ;
4) la novation ;
5) la compensation ;
6) la confusion ;
7) la prescription ;
8) la résiliation volontaire.
Chapitre Premier
Du paiement Article 340
L’obligation est éteinte lorsque la prestation qui en est l’objet est faite au créancier, dans les conditions déterminées par la convention ou par la loi.
Article 341
L’obligation est également éteinte lorsque le créancier consent à recevoir en paiement de sa créance une prestation autre que celle portée dans l’obligation ; ce consentement est présumé lorsqu’il reçoit sans réserve une prestation différente de celle qui était l’objet de l’obligation.
Article 342
Le débiteur qui donne en paiement à son créancier une chose, une créance ou un droit incorporel, est tenu de la même garantie que le vendeur à raison, soit des vices cachés de la chose, soit de l’insuffisance du titre.
Cette disposition ne s’applique pas aux libéralités et autres actes à titre gratuit.
Article 343
Les paiements s’imputent sur la dette que le débiteur désigne lorsqu’il paie ; s’il n’a rien dit, il conserve le droit de déclarer la dette qu’il a eu l’intention de payer ; en cas de doute, l’imputation se fait sur la dette qu’il a pour lors, le plus d’intérêt à acquitter, et de préférence sur celle qui est échue ; entre plusieurs dettes échues, sur celle qui offre le moins de garantie pour le créancier ; entre plusieurs dettes également garanties, sur celle qui est la plus onéreuse pour le débiteur ; entre plusieurs dettes également onéreuses, sur la plus ancienne en date.
Article 344
Lorsque le débiteur de diverses dettes a accepté une quittance par laquelle le créancier a imputé ce qu’il a reçu sur l’une de ses dettes spécialement, le débiteur ne peut plus demander l’imputation sur une dette différente, si l’imputation a été faite d’une manière conforme à ses intérêts.
Chapitre II
De l’impossibilité de l’exécution
Article 345
L’obligation s’éteint lorsque, depuis qu’elle est née, la prestation qui en fait l’objet est devenue impossible naturellement ou juridiquement, sans le fait ou la faute du débiteur et avant qu’il soit en demeure.
Article 346
Lorsque l’impossibilité n’est que partielle, l’obligation n’est éteinte qu’en partie ; le créancier a le choix de recevoir l’exécution partielle ou de résoudre l’obligation pour le tout, lorsque cette obligation est de telle nature qu’elle ne peut se partager sans préjudice pour lui.
Article 347
Lorsque l’obligation est éteinte par l’impossibilité de l’exécution, sans la faute du débiteur, les droits et actions relatifs à la chose due qui appartiennent à ce dernier passent au créancier.
Article 348
Lorsque l’inexécution de l’obligation provient d’une cause indépendante de la volonté des deux contractants, et sans que le débiteur soit en demeure, le débiteur est libéré, mais il n’a plus le droit de demander la prestation qui serait due par l’autre partie.
Si l’autre partie a déjà rempli son obligation, elle a le droit, selon les cas, d’en répéter la totalité, ou une partie, comme indue.
Article 349
Lorsque l’impossibilité d’exécution dépend du fait du créancier ou d’une autre cause qui lui est imputable, le débiteur conserve le droit d’exiger l’exécution de l’obligation pour ce qui lui est dû, mais il est tenu de faire raison à l’autre partie de ce qu’il épargne par suite de l’inexécution de son obligation ou du profit qu’il a retiré de la chose qui en fait l’objet.
Chapitre III
De la remise de l’obligation
Article 350
L’obligation est éteinte par la remise volontaire qu’en fait le créancier capable de faire une libéralité.
La remise de l’obligation a effet tant qu’elle n’a pas été refusée expressément par le débiteur.
Article 351
La remise peut être expresse et résulter d’une convention, d’une quittance, ou autre acte portant libération ou donation de la dette au débiteur.
Elle peut aussi être tacite et résulter de tout fait indiquant clairement chez le créancier la volonté de renoncer à son droit.
La restitution volontaire du titre original faite par le créancier au débiteur fait présumer la remise de la dette.
Article 352
La restitution par le créancier de la chose donnée en nantissement ne suffit point pour faire présumer la remise de la dette.
Article 353
La remise de l’obligation n’a aucun effet lorsque le débiteur refuse expressément de l’accepter. Il ne peut refuser :
1) lorsqu’il l’a déjà acceptée ;
2) lorsqu’elle a été donnée à la suite de sa demande.
Article 354
La remise faite par un malade, pendant sa dernière maladie, à l’un de ses héritiers, de tout ou partie de ce qui est dû par ce dernier, n’est valable que si les autres héritiers la ratifient.
Article 355
La remise accordée par un malade à un tiers pendant sa dernière maladie est valable jusqu’à concurrence du tiers de ce qui reste dans la succession après le paiement des dettes et des frais funéraires.
Article 356
La remise ou libération de toute dette en général et sans réserve ne peut être révoquée et libère définitivement le débiteur, alors même que le créancier ignorait le montant précis de sa créance ou que des titres à lui inconnus seraient découverts par la suite, à moins qu’il ne s’agisse de la remise d’une dette héréditaire faite par l’héritier et qu’il soit justifié de fraude ou de dol de la part du débiteur ou d’autres personnes de complicité avec lui.
Chapitre IV
De la novation
Article 357
La novation est l’extinction d’une obligation moyennant la constitution d’une obligation nouvelle qui lui est substituée.
Article 358
La novation ne se présume point ; il faut que la volonté de l’opérer soit exprimée.
Article 359
Il faut, pour opérer la novation :
1) que l’ancienne obligation soit valable ;
2) que l’obligation nouvelle qui lui est substituée soit aussi valable.
Article 360
La novation ne peut s’opérer que si le créancier est capable d’aliéner, et le nouveau débiteur capable de s’obliger. Les tuteurs, mandataires et administrateurs du bien d’autrui ne peuvent nover que dans le cas où ils peuvent aliéner.
Article 361
La novation s’opère de trois manières :
1) lorsque le créancier et le débiteur conviennent de substituer une nouvelle obligation à l’ancienne, laquelle est éteinte ou de changer la cause de l’obligation ancienne;
2) lorsqu’un nouveau débiteur est substitué à l’ancien qui est déchargé par le créancier ; cette substitution peut s’opérer sans le concours du premier débiteur ;
3) lorsque, par l’effet d’un nouvel engagement, un nouveau créancier est substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur se trouve déchargé.
La simple indication, faite par le débiteur, d’une personne qui doit payer à sa place, n’opère point novation ; il en est de même de la simple indication faite par le créancier d’une personne qui doit recevoir pour lui.
Article 362
La substitution d’une prestation à celle portée dans l’ancienne obligation peut constituer novation, si elle est de nature à modifier essentiellement l’obligation. L’indication d’un lieu différent pour l’exécution, les modifications portant soit sur la forme, soit sur les clauses accessoires, telles que le terme, les conditions ou les garanties de l’obligation, ne constituent pas novation, si les parties ne l’ont expressément voulu.
Article 363
La délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s’oblige envers le créancier opère novation, si le créancier a spécialement déclaré qu’il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation et qu’il renonçait à tout recours contre lui.
Article 364
Dans le cas de l’article ci-dessus, la délégation opère la libération du déléguant, et le créancier n’a aucun recours contre lui, même si le débiteur délégué devient insolvable, à moins qu’à l’insu du créancier, le débiteur délégué ne fût déjà en état d’insolvabilité au moment où la novation est intervenue.
Article 365
Le débiteur qui a accepté la délégation ne peut opposer au nouveau créancier de bonne foi, les exceptions qu’il aurait eues contre le créancier primitif, sauf son recours contre ce dernier. Il peut opposer, toutefois, au nouveau créancier les exceptions relatives à la capacité de la personne, lorsque ces exceptions étaient fondées au moment ou il a accepté la délégation et qu’il les ignorait à ce moment.
Article 366
Les privilèges et hypothèques de l’ancienne créance ne passent point à celle qui lui est substituée, si le créancier ne les a expressément réservés.
La convention qui transfère les garanties réelles de l’ancienne dette à la nouvelle n’a d’effet à l’égard des tiers que si elle est faite en même temps que la novation, et que si elle résulte d’un acte ayant date certaine.
Article 367
La novation éteint définitivement l’ancienne obligation, lorsque celle qui lui est substituée est valable et alors même que la nouvelle obligation ne serait pas exécutée.
Article 368
Cependant, lorsque la nouvelle obligation dépend d’une condition suspensive, l’effet de la novation dépend de l’avènement de la condition et si celle-ci vient à défaillir, la novation est non avenue.
Chapitre V
De la compensation
Article 369
La compensation s’opère, lorsque les parties sont réciproquement et personnellement créancières et débitrices l’une de l’autre. Elle n’a pas lieu entre musulmans dans le cas où elle constituerait une violation de la loi religieuse.
Article 370
Le juge ne doit tenir compte de la compensation que si elle est expressément opposée par celui qui y a droit.
Article 371
Le débiteur qui a accepté sans réserve la cession faite par le créancier à un tiers ne peut plus opposer au cessionnaire la compensation qu’il eût pu, avant l’acceptation, opposer au créancier primitif ; il peut seulement exercer sa créance contre le cédant.
Article 372
L’associé ne peut opposer à son créancier la compensation de ce qui est dû par le créancier à la société. Le créancier de la société ne peut opposer à l’associé la compensation de ce qui lui est dû par la société ; il ne peut opposer à la société ce qui lui est dû personnellement par l’un des associés.
Article 373
La compensation n’a lieu qu’entre dettes de même espèce, et par exemple, entre choses mobilières de même espèce et qualité, ou entre du numéraire et des denrées.
Article 374
Pour opérer la compensation, il faut que les deux dettes soient liquides et exigibles, mais il n’est pas nécessaire qu’elles soient payables au même lieu. La déchéance du terme produite par l’insolvabilité du débiteur et par l’ouverture de la succession a pour effet de rendre la dette compensable.
Article 375
Lorsque les dettes ne sont pas payables au même lieu, la compensation ne s’opère qu’en faisant raison de la différence du change, ou de prix, s’il s’agit de denrées, à la partie en faveur de laquelle la différence existe.
Article 376
Une dette prescrite ne peut être opposée en compensation.
Article 377
La compensation peut avoir lieu entre des dettes qui ont des causes ou des quotités différentes. Lorsque les deux dettes ne sont pas de même somme, la compensation s’effectue jusqu’à concurrence de la dette la moins forte.
Article 378
La compensation n’a pas lieu :
1) lorsque l’une des dettes a pour cause des aliments ou autres créances non saisissables ;
2) contre la demande en restitution d’une chose dont le propriétaire a été injustement dépouillé, soit par violence, soit par fraude ou d’une créance ayant pour cause un autre délit ou quasi-délit ;
3) contre la demande en restitution d’un dépôt, d’un prêt à usage ou d’un précaire ou contre la demande en dommages-intérêts résultant de ces contrats, au cas de perte de la chose due ;
4) lorsque le débiteur a renoncé dès l’origine à la compensation ou lorsque l’acte constitutif de l’obligation l’a prohibée ;
5) contre les créances de l’état et des communes pour contributions ou taxes, à moins que la créance de celui qui oppose la compensation ne soit due par la même caisse qui réclame la contribution ou la taxe.
Article 379
La compensation n’a pas lieu au préjudice des droits régulièrement acquis à des tiers.
Article 380
L’effet de la compensation opposée est d’opérer l’extinction des deux dettes, jusqu’à concurrence de leurs quotités respectives, à partir du moment où les deux dettes se sont trouvées exister à la fois, dans les conditions déterminées par la loi pour donner lieu à la compensation.
Article 381
Lorsqu’il y a plusieurs dettes compensables dues par la même personne, on suit, pour la compensation, les règles établies pour l’imputation (article 343).
Chapitre VI
De la confusion Article 382
Lorsque les qualités de créancier et de débiteur d’une même obligation se réunissent dans la même personne, il se produit une confusion de droits qui fait cesser le rapport de créancier et débiteur.
La confusion peut être totale ou partielle, selon qu’elle a lieu pour toute l’obligation ou pour une partie seulement.
Article 383
Lorsque la cause qui a produit la confusion vient à disparaître, la créance revit avec ses accessoires, à l’égard de toutes personnes, et la confusion est réputée n’avoir jamais eu lieu.
Chapitre VII
De la prescription Article 384
La prescription, pendant le laps de temps fixé par la loi, éteint l’action naissant de l’obligation.
Article 385
La prescription n’éteint pas l’action de plein droit ; elle doit être invoquée par celui qui y a intérêt.
Le juge ne peut suppléer d’office le moyen résultant de la prescription.
Article 386
On ne peut d’avance renoncer à la prescription. On peut renoncer à la prescription acquise.
Celui qui ne peut faire de libéralité ne peut renoncer à la prescription acquise.
Article 387
Le créancier, ou tout autre intéressé à opposer la prescription, tel que la caution, peut s’en prévaloir encore que le débiteur principal y renonce.
Article 388
Les parties ne peuvent, par des conventions particulières, proroger le délai de la prescription au-delà des quinze ans fixés par la loi.
Article 389
La prescription éteint les actions relatives aux obligations accessoires en même temps que celle relative à l’obligation principale, alors même que le temps fixé pour la prescription des obligations accessoires ne serait pas encore écoulé.
Article 390
La prescription n’a pas lieu, lorsque l’obligation est garantie par un gage ou une hypothèque.
Article 391
Aucune prescription n’a lieu : 1) entre époux pendant la durée du mariage; 2) entre le père ou la mère et leurs enfants; 3) entre l’incapable ou une personne morale, et le tuteur, curateur ou
administrateur, tant que leur mandat n’a pas pris fin et qu’ils n’ont pas définitivement rendu leurs comptes.
Article 392
La prescription ne court point.
Contre les mineurs non émancipés et autres incapables, s’ils n’ont pas de tuteur, de conseil judiciaire ou de curateur, jusqu’après leur majorité, leur émancipation ou la nomination d’un représentant légal.
Article 393
La prescription ne court contre les droits que du jour où ils sont acquis ; par conséquent, elle n’a pas lieu :
1) en ce qui concerne les droits conditionnels jusqu’à ce que la condition arrive ;
2) à l’égard d’une action en garantie, jusqu’à l’éviction accomplie ou à la réalisation du fait donnant lieu à garantie ;
3) à l’égard de toute action dont l’exercice dépend d’un terme, avant que le terme soit échu ;
4) contre les absents jusqu’à la déclaration d’absence et à la nomination du curateur. Celui qui se trouve éloigné du lieu où s’accomplit la prescription est assimilé à l’absent ;
5) lorsque le créancier s’est trouvé en fait dans l’impossibilité d’agir, et, par exemple, dans le cas où, en raison de la vacance des tribunaux ou d’une autre cause indépendante de sa volonté, il n’a pu exercer son action dans le délai établi pour la prescription.
Article 394
La prescription n’a pas lieu à l’égard des droits résultant d’un jugement passé en force de chose jugée.
Article 395
Néanmoins, en matière de lettres de change, la prescription court même contre les mineurs et les incapables, sauf leur recours contre leurs tuteurs et curateurs.
Article 396
La prescription est interrompue :
1) par toute demande judiciaire ou extrajudiciaire, ayant date certaine, qui constitue le débiteur en demeure d’exécuter son obligation, même lorsqu’elle est faite devant un juge incompétent ou que l’acte est déclaré nul pour vice de forme ;
2) par la demande d’admission de la créance à la faillite du débiteur ;
3) par un acte conservatoire ou d’exécution entrepris sur les biens du débiteur, ou par toute requête afin d’être autorisé à procéder à un acte de ce genre.
Article 397
La prescription est également interrompue par tout acte par lequel le débiteur reconnaît le droit de celui contre lequel il avait commencé à prescrire, par exemple, s’il y a eu compte arrêté ; s’il paye un acompte, lorsque ce payement résulte d’un acte ayant date certaine ; s’il demande un délai pour payer ; s’il fournit une caution ou une autre garantie ; s’il oppose la compensation à la demande de paiement du créancier.
Article 398
Lorsque la prescription est valablement interrompue, le temps écoulé jusqu’à l’acte interruptif n’est pas compté aux effets de la prescription, et un nouveau délai de prescription commence à partir du moment où l’acte interruptif a cessé de produire son effet.
Article 399 (modifié par le décret du 15 septembre 1923).
L’interruption de la prescription, opérée par ou contre l’héritier apparent, produit ses effets à l’égard du véritable héritier.
Article 400 (modifié par le décret du 15 septembre 1923).
L’interruption de la prescription peut être opposée aux héritiers et ayants droit du débiteur.
Article 401
La prescription se calcule par jours entiers et non par heures ; le jour qui sert de point de départ à la prescription n’est point compté dans le calcul du temps requis pour prescrire.
La prescription s’accomplit, lorsque le dernier jour du terme est expiré.
Article 402
Toutes les actions naissant d’une obligation sont prescrites par quinze ans, sauf les exceptions ci-après, et celles qui sont déterminées par la loi dans les cas particuliers.
Article 403
Se prescrivent par une année de trois cent soixante cinq jours :
1) l’action des marchands, fournisseurs, fabricants, à raison des fournitures par eux faites;
2) celle des agriculteurs et producteurs de matières premières pour les fournitures par eux faites, lorsqu’elles ont servi aux usages domestiques du débiteur et ce, à partir du jour où les fournitures ont été faites ;
3) celle des instituteurs, professeurs, maîtres de pensions publiques ou privées, pour les honoraires à eux dus par leurs élèves, ainsi que pour les fournitures faites à ces derniers, à partir de l’échéance du terme fixé pour le paiement de leurs honoraires ;
4) celle des domestiques pour leurs gages, déboursés et autres prestations à eux dues, en vertu du louage des services, ainsi que celle des maîtres contre leurs serviteurs pour les avances faîtes à ceux-ci à ce même titre ;
5) celle des ouvriers, artisans, apprentis, pour leurs salaires, fournitures et journées, et pour les déboursés par eux faits, à raison de leurs services, ainsi que celle de l’employeur ou patron pour les sommes avancées à ses ouvriers, aux mêmes titres ;
6) celle des hôteliers ou traiteurs, à raison du logement et de la nourriture qu’ils fournissent, et des déboursés faits pour leurs clients ;
7) celle des loueurs de meubles et choses mobilières, à raison du prix du louage de ces choses ;
8) celle des établissements publics ou privés destinés au traitement des maladies physiques ou mentales, ou à la garde des malades, à raison des soins par eux donnés auxdits malades et des fournitures et déboursés faits pour ces derniers, à partir du jour où les soins ont été donnés, où les fournitures ont été faites.
Article 404
Se prescrivent également par une année de trois cent soixante-cinq jours :
1) les actions des médecins, chirurgiens, accoucheurs, dentistes, vétérinaires, pour leurs visites et opérations, ainsi que pour leurs fournitures et déboursés, à partir de la dernière visite ou opération ;
2) celles des pharmaciens pour les médicaments par eux fournis, à partir de la date de la fourniture ;
3) celles des notaires, pour leurs honoraires et déboursés, à partir du jour où ils ont remis à la partie les actes par eux dressés ;
4) celles des mandataires ad litem pour les honoraires et déboursés, à partir du jugement définitif ou de la révocation du mandat à eux conféré ;
5) celles des curateurs de succession et autres administrateurs, à partir du jour où leur administration a cessé ;
6) celles des architectes, ingénieurs, experts, géomètres, pour leurs devis ou opérations, et les déboursés par eux faits, à partir du jour où le devis a été remis, les opérations accomplies ou les déboursés effectués ;
7) celles des médiateurs, pour le paiement de leurs courtages, à partir de la conclusion de l’affaire.
Se prescrivent également par la même durée, les actions des parties contre les personnes ci-dessus dénommées, à raison des sommes avancées par les parties auxdites personnes pour l’accomplissement des affaires dont celles-ci sont chargées, à partir des mêmes dates établies pour chacune de ces catégories de personnes.
Article 405 (abrogé par la loi n° 59-129 du 5 octobre 1959, portant promulgation du Code de Commerce).
Article 406
Se prescrivent, dans le même délai d’un an, toutes les actions en faveur des entrepreneurs d’entrepôt et contre eux, à raison des obligations dérivant du contrat d’entrepôt.
En cas de perte totale de la chose, la prescription commence à partir du jour où l’entreposeur a donné avis de la perte au déposant.
Article 407
La prescription, dans les cas des articles 403 à 406 inclus, ci-dessus, a lieu, quoiqu’il y ait eu continuation de fournitures, livraisons, services et travaux.
Article 408
Les redevances, pensions, fermages, loyers, arrérages d’enzel, intérêts et autres prestations analogues, se prescrivent contre toutes personnes, par cinq années à partir de l’échéance de chaque terme.
Article 409
La prescription de cinq ans, dont il est parlé ci-dessus, s’applique également aux impôts publics et à ceux dus aux administrations communales.
Article 410
Toutes les actions entre les associés et entre ceux-ci et les tiers, à raison des obligations naissant du contrat de société, sont prescrites par cinq ans, à partir du jour où l’acte de dissolution de la société ou de renonciation de l’associé, a été publié.
Lorsque le droit du créancier de la société échoit seulement après la date de la publication, la prescription ne commence qu’à partir de l’échéance.
Il n’est pas dérogé aux prescriptions plus brèves établies par la loi en matière de société.
Article 411
Se prescrivent par cinq ans les actions dérivant des lettres de change et des chèques, à partir du jour de l’échéance de l’obligation ou du dernier jour du délai établi pour la présentation au tiré des lettres tirées à vue.
Article 412
L’action en paiement d’un titre au porteur se prescrit, quant au capital, par quinze ans, à partir de l’échéance.
Article 413
Les greffiers et syndics ne répondent plus des livres de commerce et papiers à eux remis dans le cours de la procédure d’insolvabilité, cinq ans après la clôture ou la cessation de la procédure.
Chapitre VIII
De la résiliation volontaire (distrat)
Article 414
Les obligations contractuelles s’éteignent lorsque, aussitôt après leur conclusion, les parties conviennent d’un commun accord de s’en départir, dans les cas où la résolution est permise par la loi.
Article 415
La résiliation peut être tacite ; tel est le cas où, après une vente conclue, les parties se restituent réciproquement la chose et le prix.
Article 416
La résiliation est soumise, quant à sa validité, aux règles générales des obligations contractuelles.
Les tuteurs, administrateurs et autres personnes agissant au nom d’autrui ne peuvent résilier que dans les cas et avec les formalités requises, pour les aliénations, par le mandat en vertu duquel ils agissent et lorsqu’il y a utilité pour les personnes au nom desquelles ils agissent.
Article 417
La résiliation ne peut avoir effet :
1) si le corps certain qui a fait l’objet du contrat a péri, a été détérioré ou s’il a été dénaturé par le travail de l’homme ;
2) si les parties ne peuvent, pour toute autre cause, se restituer exactement ce qu’elles ont reçu l’une de l’autre, à moins, dans les deux cas précédents, que les parties ne conviennent de compenser la différence.
Article 418
La résiliation remet les parties dans la situation où elles se trouvaient au moment de la conclusion du contrat.
Les patries doivent se restituer réciproquement ce qu’elles ont reçu l’une de l’autre en vertu de l’obligation résiliée.
Toute modification apportée au contrat primitif vicie la résiliation, et la transforme en un nouveau contrat.
Article 419
La résiliation amiable ne peut nuire aux tiers qui ont acquis régulièrement, des droits sur les choses qui font l’objet de la résiliation.
TITRE VIII
DE LA PREUVE DES OBLIGATIONS ET DE CELLE DE LA LIBERATION
Chapitre Premier
Dispositions générales
Article 420
La preuve de l’obligation doit être faite par celui qui s’en prévaut.
Article 421
Lorsque le demandeur a prouvé l ‘existence de l’obligation, celui qui affirme qu’elle est éteinte ou qu’elle ne lui est pas opposable doit le prouver.
Article 422
Aucune forme spéciale n’est requise pour la preuve de l’obligation, si ce n’est dans les cas où la loi prescrit une forme déterminée.
Article 423
Lorsque la loi prescrit une forme déterminée, la preuve de l’obligation ou de l’acte ne peut être faite d’aucune autre manière, sauf dans les cas spécialement exceptés par la loi.
Article 424
Lorsque la loi prescrit la forme écrite pour un contrat, la même forme est censée requise pour toutes les modifications de ce même contrat.
Article 425
Lorsque, dans un contrat non soumis à une forme particulière, les parties sont expressément convenues de ne tenir la convention comme définitive que lorsqu’elle aura été passée en une forme déterminée, l’obligation n’existe que si elle a revêtu la forme établie par les parties.
Article 426
La preuve de l’obligation ne peut être faite :
1) lorsqu’elle tendrait à établir l’existence d’une obligation illicite ou pour laquelle la loi n’accorde aucune action ;
2) lorsqu’elle tendrait à établir des faits non concluants ;
Article 427
Les moyens de preuve reconnus par la loi sont :
1) l’aveu de la partie ;
2) la preuve littérale ou écrite ;
3) la preuve testimoniale ;
4) la présomption ;
5) le serment et le refus de le prêter.
Section Première
De l’aveu de la partie Article 428
L’aveu est judiciaire ou extrajudiciaire. L’aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son représentant, à ce spécialement autorisé. L’aveu fait devant un juge incompétent ou émis au cours d’une autre instance, a les effets de l’aveu judiciaire.
Article 429
L’aveu judiciaire peut résulter du silence de la partie, lorsque, formellement invitée par le juge à s’expliquer sur la demande qui lui est opposée, elle persiste à ne pas répondre et ne demande pas le délai pour ce faire.
Article 430
L’aveu extrajudiciaire est celui que la partie ne fait pas devant le juge. Il peut résulter de tout fait qui est incompatible avec le droit que l’on réclame.
La simple demande de transaction sur une réclamation ne constitue pas aveu quant au fond du droit ; mais celui qui accepte une libération ou remise sur le fond du droit est présumé avouer.
Article 431
L’aveu doit être fait en faveur d’une personne capable de posséder, soit qu’il s’agisse d’un individu, d’une classe déterminée, ou d’une personne morale, telle qu’une mosquée : l’objet doit en être déterminé ou susceptible de détermination.
Article 432
L’aveu doit être libre et éclairé ; les causes qui vicient le consentement vicient l’aveu.
Article 433
L’aveu ne peut être fait que par les parties maîtresses de leurs droits.
L’aveu du père pour son enfant mineur, celui des tuteurs, conseils judiciaires et administrateurs, ne fait foi contre ceux qu’ils représentent que dans le cas où il s’agit d’actes accomplis personnellement, par eux dans la limite de leur administration. Le mineur autorisé à exercer le commerce peut avouer dans la limite de son autorisation : lorsque l’aveu constitue une libéralité de sa part, il n’a aucun effet.
Article 434
L’aveu judiciaire fait pleine foi contre son auteur, et contre ses héritiers et ayants cause ; il n’a d’effet contre les tiers que dans les cas exprimés par la loi.
Article 435
L’aveu d’un héritier ne fait pas foi contre les autres cohéritiers ; il n’oblige l’héritier que pour sa part et jusqu’à concurrence de sa part contributive.
Article 436
Le mandat donné par la partie à son représentant d’avouer une obligation fait pleine foi contre son auteur, même avant la déclaration du mandataire.
Article 437
L’aveu extrajudiciaire ne peut être prouvé par témoins toutes les fois qu’il s’agit d’une obligation pour laquelle la loi exige preuve par écrit.
Article 438
L’aveu ne peut être divisé contre celui qui l’a fait lorsqu’il constitue la seule preuve contre lui. Il peut être divisé :
1) lorsque l’un des faits est prouvé indépendamment de l’aveu ;
2) lorsque l’aveu porte sur des faits distincts et séparés ;
3) lorsqu’une partie de l’aveu est reconnue fausse.
L’aveu ne peut être révoqué, à moins qu’on ne justifie qu’il a été déterminé par une erreur matérielle.
L’erreur de droit ne suffit point pour autoriser la révocation d’un aveu à moins qu’elle ne soit excusable, ou causée par le dol de l’autre partie.
L’aveu ne peut être révoqué, alors même que la partie adverse n’en aurait pas pris acte.
Article 439
L’aveu ne peut faire foi : 1) lorsqu’il énonce un fait physiquement impossible, ou dont le contraire est
démontré par des preuves irrécusables ;
2) lorsque celui en faveur duquel il est fait y contre dit formellement ;
3) lorsqu’il tend à établir une obligation ou un fait contraire à la loi ou aux
bonnes mœurs ou pour lequel la loi n’accorde aucune action ou à éluder une disposition positive de la loi ;
4) lorsqu’une chose jugée est intervenue établissant le contraire de ce qui résulte de l’aveu.
Section II
De la preuve littérale
Article 440
L’aveu de la partie peut résulter de preuves écrites appelées aussi preuves littérales.
Article 441
La preuve littérale résulte d’un acte authentique ou d’une écriture sous seing privé. Elle peut résulter également de la correspondance, des télégrammes, et des livres des parties, des bordereaux des courtiers dûment signés par les parties, des factures acceptées, des notes et documents privés, et de toutes autres écritures, sauf au tribunal à donner à chacun de ces moyens la valeur qu’il mérite, selon les cas, et à moins que la loi ou les parties n’aient exigé expressément une forme spéciale.
(Parag. I – Du titre authentique)
Article 442
L’acte authentique est celui qui a été reçu avec les solennités requises par des officiers publics ayant le droit d’instrumenter dans le lieu où l’acte a été rédigé.
Article 443
Sont également authentiques :
1) les actes reçus officiellement par les juges, en leur tribunal ;
2) les jugements rendus par les tribunaux tunisiens et étrangers, en ce sens que ces derniers peuvent faire foi des faits qu’ils constatent, même avant d’avoir été rendus exécutoires.
Article 444
L’acte authentique fait pleine foi, même à l’égard des tiers et jusqu’à inscription de faux, des faits et des conventions attestés par l’officier public qui l’a rédigé comme passés en sa présence.
Cependant, lorsque l’acte est attaqué pour cause de violence, de fraude, de dol et de simulation ou d’erreur matérielle, la preuve peut en être faite par témoins, et même à l’aide de présomptions graves, précises et concordantes, sans recourir à l’inscription de faux.
Cette preuve peut être faite, tant par les parties que par les tiers ayant un intérêt légitime.
Article 445
L’acte authentique fait foi des conventions et des clauses intervenues entre les parties, des causes qui y ont été énoncées et des autres faits ayant un rapport direct à la substance de l’acte, ainsi que des constatations faites par l’officier public, lorsqu’il énonce comment il est parvenu à connaître ces faits. Toutes autres énonciations n’ont aucun effet.
Article 446
En cas de plainte en faux principal, l’exécution de l’acte argué de faux sera suspendue par la mise en accusation ; tant que la mise en accusation n’a pas été prononcée, ou en cas d’inscription de faux faite incidemment, le tribunal pourra, suivant les circonstances, suspendre provisoirement l’exécution de l’acte.
Article 447
L’acte authentique portant l’attestation dite « témoignage de surprise », est nul de plein droit et ne constitue même pas un commencement de preuve.
Est également nul et non avenu l’acte authentique portant une réserve ou protestation secrète, dite « el-hasterâa », ou «aidâa ».
Article 448
L’acte qui ne peut valoir comme authentique par suite de l’incompétence ou l’incapacité de l’officier, ou d’un défaut de forme, vaut comme écriture privée, s’il a été signé des parties dont le consentement est nécessaire pour la validité de l’acte.
(Parag. II – De l’acte sous seing privé)
Article 449
L’acte sous seing privé, reconnu par celui auquel on l’oppose, ou légalement tenu pour reconnu, fait la même foi que l’acte authentique, envers toutes personnes, des dispositions et énonciations qu’il renferme, dans les conditions énoncées aux articles 444 et 445 ci-dessus sauf en ce qui concerne la date, ainsi qu’il sera dit ciaprès.
Article 450
Les actes sous seing privé font foi de leur date, entre les parties, leurs héritiers et leurs ayant cause à titre particulier, agissant au nom de leur débiteur.
Ils n’ont de date contre les tiers que :
1) du jour où ils ont été enregistrés, soit en Tunisie, soit à l’étranger ;
2) du jour ou l’acte a été déposé dans les mains d’un officier public ;
3) si l’acte est souscrit, soit comme partie, soit comme témoin, par une personne décédée ou réduite à l’impossibilité physique d’écrire, du jour du décès ou de l’impossibilité reconnue ;
4) de la date du visa ou de la légalisation apposés sur l’acte par un officier à ce autorisé ou par un magistrat soit en Tunisie soit à l’étranger ;
5) du jour ou leur substance est constatée dans les actes dressés par les officiers publics à ce autorisés soit en Tunisie soit à l'étranger ;
6) lorsque la date résulte d’autres preuves équivalentes et absolument certaines.
Les ayants cause et successeurs à titre particulier sont considérés comme tiers, aux effets du présent article, lorsqu’ils n’agissent pas au nom de leur débiteur.
Article 451
La date des lettres de change et autres effets à l’ordre, ainsi que celle de leurs endossements, est présumée véritable jusqu’à preuve du contraire.
Article 452
L’acte sous seing privé peut être d’une autre main que celle de la partie, pourvu qu’il soit signé par elle.
Article 453 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
La signature doit être apposée de la propre main de la partie au bas de l’acte ; un timbre ou cachet ne peuvent y suppléer et sont considérés comme non apposés.
La signature consiste à apposer de la propre main du contractant un nom ou un signe spécial intégré à l’écrit auquel il se rapporte. Lorsque la signature est électronique, elle consiste en l’utilisation d’un procédé d’identification fiable garantissant le lien entre ladite signature et le document électronique auquel elle se rattache.
Article 453 bis (ajouté par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Le document électronique est l’écrit composé d’un ensemble de lettres et chiffres ou autres signes numériques y compris celui qui est échangé par les moyens de communication à condition qu’il soit d’un contenu intelligible, et archivé sur un support électronique qui garantit sa lecture et sa consultation en cas de besoin.
Le document électronique fait preuve comme acte sous seing privé s’il est conservé dans sa forme définitive par un procédé fiable et est renforcé par une signature électronique.
Article 454
Les écritures portant l’obligation de personnes illettrées ne vaudront que si elles ont été reçues par notaires ou par officiers publics à ce autorisés.
Article 455
Le télégramme fait preuve comme écriture privée, lorsque l’original porte la signature de la personne qui l’a expédié, ou s’il est prouvé que l’original a été remis au bureau du télégraphe par cette personne, bien qu’elle ne l'ait pas signé elle-même.
La date des télégrammes fait foi, jusqu’à preuve du contraire, du jour et de l’heure auxquels où ils ont été remis ou expédiés au bureau du télégraphe.
Article 456
Le télégramme a date certaine lorsque l’expéditeur a eu soin de s’en faire délivrer copie certifiée par le bureau de départ, indiquant le jour et l’heure du dépôt.
Article 457
En cas d’erreur, d’altération ou de retard dans la transcription d’un télégramme, on appliquera les principes généraux relatifs à la faute ; l’expéditeur d’un télégramme est présumé exempt de faute s’il a eu soin de faire collationner ou recommander le télégramme, selon les règlements télégraphiques.
Article 458
Celui auquel on oppose un acte sous seing privé est obligé de désavouer ou de reconnaître formellement son écriture ou sa signature, s’il ne veut la reconnaître ; faute de désaveu, l’écrit est tenu pour reconnu.
Les héritiers ou ayants cause peuvent se borner à déclarer qu’ils ne connaissent point l’écriture ou la signature de leur auteur.
Article 459
Dans le cas où la partie désavoue son écriture ou sa signature, et dans le cas où ses héritiers ou ayants cause déclarent ne point les connaître, la vérification en est ordonnée ; le tribunal pourra y procéder lui-même ou y faire procéder par expert.
Article 460
La partie qui a avoué son écriture ou sa signature ne perd point le droit d’opposer à l’acte tous les autres moyens de fond et de forme qui peuvent lui appartenir.
(Parag. III – Des autres écritures pouvant constituer une preuve littérale)
Article 461
Lorsque les livres des marchands portent l’annotation ou la reconnaissance écrite de l’autre partie, ou correspondent à un double qui se trouve entre les mains de cette dernière, ils constituent pleine preuve contre elle et en sa faveur.
Article 462
Les inscriptions faites sur les livres de commerce par le commis qui tient les écritures, ou qui est chargé de la comptabilité, ont la même foi que si elles étaient écrites par le commettant lui-même.
Article 463
La communication à l’autre partie des livres et inventaires des commerçants et des livres domestiques ne peut être ordonnée en justice que dans les affaires dérivant d’un rapport de succession, communauté, société, et dans les autres cas où les livres sont communs aux deux parties, et en cas de faillite. Elle peut être ordonnée, soit d’office, soit à la requête de l’une des parties, au cours d‘un litige, et même avant toute contestation, lorsqu’il est justifié d’une nécessité suffisante et seulement dans la mesure où cette nécessité l’exige.
Article 464
La communication a lieu de la manière établie entre les parties, et, si elles ne peuvent s’accorder, moyennant le dépôt au greffe du tribunal.
Article 465
Le tribunal peut, au cours d’une instance, ordonner d’office la représentation des livres de commerce et de tous autres, des lettres ou télégrammes de l’une des parties ou de toutes les deux, à l’effet, soit d’en extraire ce qui concerne le différend, soit d’en examiner la régularité. Il peut également ordonner aux mêmes effets la représentation du livre-journal du médiateur qui a traité l’affaire.
Dans le cas où la communication à l’autre partie est nécessaire, celle-ci ne pourra examiner que les annotations relatives au litige en la partie qui sera déterminée par le juge.
La représentation des livres pourra être faite, soit au tribunal, soit même au lieu où ils se trouvent, au juge lui-même, ou à un greffier ou notaire à ce commis. Lorsqu’il n’y a pas contestation sur la régularité des livres ou sur le document à examiner, l’extrait peut être fait soit par le greffier, soit par un notaire.
Article 466
Si la partie, aux livres de laquelle on offre de faire foi, refuse de les représenter, sans motif valable, le juge admettra le dire de l’autre partie en lui déférant le serment.
Article 467
Les livres des médiateurs relatifs aux affaires conclues par leur entremise et ceux des tiers non intéressés au litige ont la valeur d’un témoignage non suspect, s’ils sont bien et régulièrement tenus.
Article 468
Les registres et papiers domestiques tels que les lettres, notes et papiers volants, écrits de la main de la partie qui les invoque ou signés par elle, ne font pas foi en faveur de celui qui les a écrits.
Ils font foi contre lui :
1) dans tous les cas où ils énoncent formellement un paiement reçu par le créancier ou un autre mode de libération ;
2) lorsqu’ils contiennent la mention expresse que la note a été faite pour suppléer le défaut de titre en faveur de celui qui est y dénommé.
Article 469
La mention de la libération apposée sur le titre par le créancier, bien que non signée ni datée, fait foi contre lui, sauf la preuve contraire.
(Parag. IV – Des copies de titres)
Article 470 (modifié par la loi n°2000-57 du 13 juin 2000).
Les copies faites sur les originaux des actes authentiques ou des écritures privées ont la même valeur que les originaux lorsqu’elles sont certifiées par les officiers publics habilités dans les pays où les copies ont été faites ou lorsqu’elles sont reconnues par celui auquel on l’oppose ou qu’elles sont signées par lui ou qu’elles ont été réalisées selon des procédés techniques qui procurent toutes les garanties de leur conformité à l’original.
Si ces conditions ne sont pas remplies, une expertise est ordonnée pour s’assurer de leur validité.
Article 471 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Les copies des actes privés ou publics existant dans les archives publiques, faites conformément aux règlements par l’archiviste qui les a en dépôt, font foi au même titre que les originaux. La même règle s’applique aux copies des actes transcrits sur les registres des tribunaux, lorsqu’elles sont certifiées conformes à l’original ou lorsqu’elles ont été réalisées selon les procédés techniques prévus à l’article précédent.
Les dispositions de l’alinéa précédent s’appliquent si une partie ou un dépositaire des documents n’a pas gardé l’original de l’acte et présente une copie qui en est la reproduction fidèle et durable.
Est réputée une copie fidèle et durable, toute reproduction de l’original qui entraîne une modification irréversible du support matériel telle que le micro film et le microfiche ou tout autre procédé d’archivage électronique ou optique.
Article 472
Dans les cas prévus aux articles précédents, les parties ne peuvent exiger la représentation au tribunal de l’acte original déposé aux archives ; mais ils auront toujours le droit de demander la collation de la copie sur l’original, et à défaut, sur la copie déposée aux archives. Ils pourront aussi en demander à leurs frais une reproduction photographique.
A défaut de l’original et d’une copie déposée dans des archives publiques, les copies authentiques faites en conformité des articles 470 et 471 feront foi, si elles ne présentent ni ratures, ni altérations, ni aucune autre circonstance suspecte.
Section III
De la preuve testimoniale
Article 473 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Les conventions ou autres faits juridiques, ayant pour but de créer, de transférer, de modifier ou d’éteindre des obligations ou des droits, et excédant la somme ou la valeur de mille dinars, ne peuvent être prouvés par témoins, il doit en être passé un acte authentique ou sous seing privé.
Article 474 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Il n’est reçu entre les parties aucune preuve par témoins contre et outre le contenu des actes, et encore qu’il s’agisse d’une somme ou valeur inférieure à mille dinars.
Cette règle reçoit exception quant il s’agit de prouver des faits de nature à établir le sens des clauses obscures ou ambiguës d’un acte, à en déterminer la portée ou à en constater l’exécution.
Article 475 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Celui qui a intenté une action dont l’objet dépasse mille dinars ne peut être admis à la preuve testimoniale, même en restreignant sa demande primitive, s’il ne justifie que cette demande a été majorée par erreur.
Article 476 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
La preuve testimoniale sur la demande d’une somme même inférieure à mille dinars ne peut être admise, lorsque le demandeur a déclaré que cette somme fait partie d’une créance supérieure et qui n’est point prouvée par écrit.
Article 477
Les règles ci-dessus reçoivent exception lorsqu’il existe un commencement de preuve par écrit. On appelle ainsi tout écrit qui rend vraisemblable le fait allégué, et qui émane de celui auquel on l’oppose, de son auteur, ou de celui qui le représente. Est réputé émanant de la partie, tout acte dressé à sa requête par un officier public compétent, dans la forme voulue pour faire foi, ainsi que les dires des parties consignés dans un acte ou décision judiciaire réguliers en la forme.
Article 478
La preuve testimoniale est recevable, par exception aux dispositions ci-dessus :
1) toutes les fois que la partie a perdu le titre qui constituait la preuve littérale de l’obligation ou de la libération en conséquence d’un cas fortuit, d’une force majeure, d’une soustraction frauduleuse. Le cas des billets de banques et des titres au porteur est soumis à des règles spéciales.
2) lorsqu’il n’a pas été possible au créancier de se procurer une preuve littérale de l’obligation ; tel est le cas des obligations provenant des quasi-contrats et des délits ou quasi-délits et celui où il s’agit d’établir une erreur matérielle commise dans la rédaction de l’acte, ou des faits de violence, simulation, fraude ou dol dont l’acte est entaché, ou bien entre commerçants, dans les affaires où il n’est pas d’usage d’exiger des preuves écrites ;
L’appréciation des cas où il n’a pas été possible au créancier de se procurer une preuve écrite est remise à la prudence du tribunal.
Section IV
Des présomptions
Article 479
Les présomptions sont des indices au moyen desquels la loi ou le juge établit l’existence de certains faits inconnus.
(Parag. I – Des présomptions établies par la loi)
Article 480
La présomption légale est celle qui est attachée par la loi à certains actes ou à certains faits. Tels sont :
1) les actes que la loi déclare nuls d’après leurs seules qualités comme présumés faits en fraude de ses dispositions ;
2) les cas dans lesquels la loi déclare que l’obligation ou la libération résultent de certaines circonstances déterminées, telles que la prescription ;
3) l’autorité que la loi attribue à la chose jugée.
Article 481
L’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’au dispositif du jugement, et n’a lieu qu’à l’égard de ce qui en fait l’objet ou de ce qui en est une conséquence nécessaire et directe. Il faut :
1) que la chose demandée soit la même ;
2) que la demande soit fondée sur la même cause ;
3) que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre
elles en la même qualité.
Sont considérés comme parties, les héritiers et ayants cause des parties qui ont figuré à l’instance, lorsqu’ils exercent les droits de leurs auteurs, sauf le cas de dol et de collusion.
Article 482
L’autorité de la chose jugée ne s’attache pas :
1) aux jugements des tribunaux frappés d’appel, lorsqu’ils en sont susceptibles ;
2) aux jugements des tribunaux étrangers tant qu’ils n’ont pas été rendus exécutoires par les tribunaux tunisiens ;
3) aux ordonnances et jugements interlocutoires ou préparatoires rendus au cours de l’instance lorsqu’ils ne renferment aucune disposition sur le fond des droits en litige.
Article 483
L’exception de la chose jugée doit être opposée par la partie qui à intérêt à l’invoquer ; elle ne peut être suppléée d’office par le juge.
Article 484
L’autorité de la chose jugée peut être infirmée :
1) par la preuve de la fausseté des titres et autres preuves sur lesquelles se fonde le jugement, lorsque ces titres ou ces preuves en ont été la cause unique ou principale ;
2) par la preuve de l’erreur matérielle sur laquelle se fonde le jugement, lorsque cette erreur en est la cause unique ou principale ;
3) par la preuve des faits pouvant donner lieu à la prise à partie du juge.
Article 485
La présomption légale dispense de toute preuve celui au profit duquel elle existe.
Nulle preuve n’est admise contre la présomption de la loi.
(Parag. II – Des présomptions qui ne sont pas établies par la loi)
Article 486
Les présomptions qui ne sont pas établies par la loi sont remises à la prudence du tribunal ; il ne doit admettre que des présomptions graves et précises ou bien nombreuses et concordantes ; la preuve contraire sera de droit et elle pourra être faite par tous moyens.
Article 487
Les présomptions même graves, précises et concordantes, ne seront admises que si elles sont confirmées par serment de la partie qui les invoque.
Article 488
Celui qui possède de bonne foi une chose mobilière ou un ensemble de meubles est présumé avoir acquis cette chose régulièrement et d’une manière valable, sauf à celui qui allègue le contraire à le prouver.
N’est pas présumé de bonne foi celui qui savait ou devait savoir, au moment où il a reçu la chose, que celui dont il l’a reçue n’avait pas le droit d’en disposer.
Article 489
Entre deux parties qui sont également de bonne foi, celle qui est en possession doit être préférée, si elle était de bonne foi au moment où elle a acquis la possession, et encore que son titre soit postérieur en date.
Article 490
A défaut de possession et à égalité de titres, celui dont le titre a une date antérieure doit être préféré.
Lorsque le titre de l’une des parties n’a pas une date certaine, on préférera celle dont le titre a une date certaine.
Article 491
Lorsque les choses sont représentées par des certificats de dépôt, des lettres de voiture ou autres titres analogues, celui qui a la possession des choses est préféré à celui qui est nanti du titre, si les deux parties étaient également de bonne foi au moment où elles ont acquis la possession.
Section V
Du serment
Article 492
Le serment est de deux espèces :
1) celui qu’une partie défère à l’autre pour en faire dépendre la décision de la cause. Il est appelé décisoire ;
2) celui qui est déféré d’office par les juges à l’une ou à l’autre des parties. Il est appelé supplétoire.
Article 493
Le serment doit toujours être prêté personnellement et non par procureur.
Article 494
Pour prêter et déférer le serment décisoire, il faut avoir la capacité d’aliéner ; le père, le tuteur, le conseil judiciaire et l’administrateur ne peuvent déférer serment que dans les formes établies par la loi pour les aliénations des biens des mineurs et des incapables ; ils ne peuvent le prêter dans les affaires des personnes dont ils administrent les biens que sur les faits d’administration accomplis personnellement par eux ; le mineur autorisé à exercer le commerce peut prêter serment et le déférer dans la limite de son autorisation.
Article 495
Le serment doit toujours être prêté à la mosquée, le vendredi ou dans tout autre lieu religieux qui sera indiqué par la partie qui le défère et conformément au culte de la partie.
Si le lieu où le serment doit être prêté est éloigné de plus de trois mille du lieu où siège le tribunal, la partie à laquelle le serment est déféré pourra refuser de s’y rendre.
Article 496
La partie qui refuse de prêter serment dans le lieu indiqué, est censée avoir refusé le serment.
(Parag. I – Du serment décisoire)
Article 497
Le serment décisoire peut-être déféré sur quelque espèce de contestation que ce soit et en tout état de l’instance, et encore qu’il n’existe aucun commencement de preuve de la demande ou de l’exception sur laquelle il est déféré.
Article 498
Il ne peut être déféré que sur un fait personnel à la partie à laquelle on le défère, ou sur la connaissance d’un fait.
Les héritiers et spécialement tous tiers, dès qu’il s’agit du fait d’autrui, ne peuvent être astreints à prêter serment que sur la connaissance d’un fait.
Article 499
Le serment ne peut être déféré par un fils à son père ou à sa mère, mais il peut être référé par le fils, si le père ou la mère lui défèrent le serment.
Article 500
Il ne peut être déféré : 1) sur un fait criminel, lorsque l’accusé veut le référer au demandeur ; 2) sur une convention pour laquelle la loi exige l’acte authentique ou la
transcription ;
3) contre un fait qu’un acte authentique déclare avoir eu lieu en présence de l’officier public qui l’a reçu ;
4) pour établir une obligation à laquelle la loi refuse l’action en justice pour des raisons d’ordre public ou de morale ;
5) sur un fait qui a été déjà écarté par un jugement passé en force de chose jugée ;
6) dans le cas où le serment aurait, d’après les circonstances, un caractère évidemment vexatoire ou inutile.
Article 501
Le serment peut être référé par la partie à laquelle il a été déféré.
Article 502
La partie à laquelle a été déféré le serment ne peut le référer après avoir déclaré qu’elle était disposée à le prêter.
Article 503
Lorsque celui à qui le serment est déféré est défendeur, son refus de prêter serment ne suffit pas pour établir le droit de son adversaire : mais il faudra déférer le serment à ce dernier : s’il le prête ou si le défendeur renonce à le lui faire prêter, on doit lui adjuger sa demande ; s’il le refuse, il doit succomber, encore que le défendeur ait refusé de prêter le serment.
Article 504
La partie qui a déféré ou référé le serment ne peut plus se rétracter, lorsque l’adversaire a déclaré qu’il est prêt à faire ce serment.
Article 505
La délation du serment par la partie suppose la renonciation à tout autre moyen. Aucune preuve ne peut être admise contre le serment, sauf les poursuites pénales en cas de faux serment.
Article 506
Le serment n’a aucun effet lorsqu’on justifie que c’est par la violence ou le dol de l’autre partie qu’on a été amené à le prêter.
Article 507
Le serment prêté ou refusé ne forme preuve qu’au profit de celui qui l’a déféré ou contre lui et au profit de ses héritiers ou ayants cause ou contre eux ; mais le serment prêté ou refusé par l’un des héritiers ne peut être opposé aux autres.
(Parag. II – Du serment déféré d’office) Article 508
Le juge peut déférer le serment à l’une des parties ou même à toutes les deux pour en faire dépendre la décision de la cause, ou seulement pour déterminer le montant de la condamnation. Le serment supplétoire peut être déféré, soit sur un fait qui est personnel à la partie, soit sur la connaissance d’un fait.
Article 509
Le serment déféré d’office par le juge à l’une des parties ne peut être référé à l’autre.
Article 510
Lorsque l’action est dirigée contre un absent, contre la succession du débiteur, contre un mineur ou autre incapable, le juge doit toujours déférer le serment au demandeur, à peine de nullité du jugement. Il est permis, toutefois, de transiger sur ce serment.
Article 511
Chacune des parties a le droit de démontrer la fausseté du serment déféré d’office à son adversaire. Elle perd ce droit :
1) lorsqu’un jugement passé en force de chose jugée est intervenu sur ce serment ;
2) si elle a formellement acquiescé au jugement qui a ordonné la prestation du serment ; le simple défaut de protestation ou de réserve ne vaut pas acquiescement.
Article 512
Le serment sur la valeur de la chose demandée ne peut être déféré par le juge au demandeur que lorsqu’il est d’ailleurs impossible de constater autrement cette valeur. Le juge reste libre d’apprécier les effets du serment, et de réduire la somme, si elle lui paraît exagérée.
Chapitre II
De l’interprétation des conventions et de quelques règles générales de droit
(Parag. I – De l’interprétation des conventions)
Article 513
Lorsque les termes de l’acte sont formels, il n’y a pas lieu à rechercher quelle a été la volonté de son auteur.
Article 514
Il y a lieu à interprétation :
1) lorsque les termes employés ne sont pas conciliables avec le but évident qu’on a eu en vue en rédigeant l’acte ;
2) lorsque les termes employés ne sont pas clairs par eux-mêmes ou expriment incomplètement la volonté de leur auteur ;
3) lorsque l’incertitude résulte du rapprochement des différentes clauses de l’acte, qui fait naître des doutes sur la portée de ces clauses.
Article 515
Lorsqu’il y a lieu à interprétation, on doit rechercher qu’elle a été la volonté des parties, sans s’arrêter au sens littéral des termes, ou à la construction des phrases.
Article 516
On doit suppléer les clauses qui sont d’usage dans le lieu où l’acte a été fait ou qui résultent de sa nature.
Article 517
Les clauses des actes doivent être interprétées les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l’acte entier ; lorsque les clauses sont inconciliables entre elles, on s’en tient à la dernière dans l’ordre de l’écriture.
Article 518
Lorsqu’une expression ou une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l’entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n’en aurait aucun.
Article 519
Les termes employés doivent être entendus selon leur sens propre et leur acceptation usuelle dans le lieu où l’acte a été fait, à moins qu’il ne soit justifié qu’on a voulu les employer dans une acceptation particulière. Lorsqu’un mot a une acception technique usuelle, c’est dans cette signification qu’on est censé l’avoir employé.
Article 520
La qualification venant à la suite d’une énumération s’applique à tout ce qui précède, comme dans la phrase suivante : « Je donne à mes enfants et à mes petitsenfants mâles », à moins qu’il ne résulte clairement que l’attribut ne peut s’appliquer qu’à ce qui le précède immédiatement. Lorsque les deux parties de la phrase sont reliées par la particule «ensuite», l’attribut s’applique à ce qui le suit.
La condition exprimée à la suite d’une énumération s’applique à tout ce qui précède.
Article 521
Un acte de libéralité doit être interprété moins rigoureusement qu’un acte à titre onéreux.
Article 522
Les renonciations à un droit doivent être entendues strictement et n’ont jamais que la portée qui résulte évidement des termes employés par leur auteur, et ne peuvent être étendues au moyen de l’interprétation. Les actes dont le sens est douteux ne peuvent servir de fondement pour en induire la renonciation.
Article 523
Lorsque deux actions sont ouvertes à une personne à raison de la même cause, le choix de l’une de ces actions ne saurait être considéré comme une renonciation à l’autre.
Article 524
Lorsque, dans un acte, on a exprimé un cas pour l’explication de l’obligation, on n’est pas censé avoir voulu par là restreindre l’étendue que l’engagement reçoit de droit aux cas non exprimés.
Article 525
Lorsqu’il s’agit de choses indivisibles, la mention de la partie équivaut à la mention du tout. Ainsi la renonciation partielle à l’exercice du droit de chefâa vaut renonciation totale.
Article 526
Lorsque, dans une obligation, la somme, mesure ou quantité, est indiquée approximativement par les mots : « environ, à peu près » et autres équivalents, il faut entendre la tolérance admise par l’usage du commerce ou du lieu.
Article 527
Lorsque la somme ou quantité est écrite en toutes lettres et en chiffres, il faut, en cas de différence, s’en tenir à la somme écrite en toutes lettres, si l’on ne prouve avec précision de quel côté est l’erreur.
Cette règle s’applique aussi aux lettres de change.
Article 528
Lorsque la somme ou quantité est écrite plusieurs fois en toutes lettres, l’acte vaut, en cas de différence, pour la somme ou quantité la moins forte, si l’on ne prouve avec précision de quel côté est l’erreur.
Article 529
Dans le doute, l’obligation s’interprète dans le sens le plus favorable à l’obligé, mais à la charge par celui-ci de prêter serment à l’appui de ses déclarations.
Article 530
Quelques généraux que soient les termes dans lesquels un acte est conçu, il ne comprend que les choses sur lesquelles il paraît que les parties se sont proposé de contracter, ou de s’obliger.
Article 531
Lorsque aucune interprétation, soit au propre, soit au figuré, ne donne un sens raisonnable et conforme à la loi, la clause est non avenue.
(Parag. II - De quelques règles générales de droit)
Article 532
En appliquant la loi, on ne doit lui donner d’autre sens que celui qui résulte de ses expressions, d’après leur ordre grammatical, leur signification usuelle, et l’intention du législateur.
Article 533
Lorsque la loi s’exprime en termes généraux, il faut l’entendre dans le même sens.
Article 534
Lorsque la loi réserve un cas déterminé, elle s’applique à tous les autres cas qui ne sont pas expressément exceptés.
Article 535
Lorsqu’un cas ne peut être décidé par une disposition précise de la loi, on aura égard aux dispositions qui régissent les cas semblables ou des matières analogues ; si la solution est encore douteuse, on décidera d’après les règles générales de droit.
Article 536
Ce que la loi prescrit en vu d’un motif déterminé doit s’appliquer toutes les fois que le même motif existe.
Article 537
Ce que la loi permet en vu d’un motif déterminé cesse d’être permis lorsque ce motif n’existe plus.
Article 538
Ce que la loi défend pour un motif déterminé cesse d’être défendu lorsque ce motif n’existe plus.
Article 539
Lorsque la loi défend formellement une chose déterminée, ce qui est fait contrairement à la loi ne peut avoir aucun effet.
Article 540
Les lois restrictives et celles qui font exception aux lois générales ou à d’autres lois ne doivent pas être étendues au-delà du temps et des cas qu’elles expriment.
Article 541
L’interprétation peut, en cas de nécessité, modérer la rigueur de la loi ; elle ne doit jamais l’aggraver.
Article 542
Les lois ne sont abrogées que par des lois postérieures, lorsque celles-ci l’expriment formellement, ou lorsque la nouvelle loi est incompatible avec la loi antérieure ou qu’elle règle toute la matière réglée par cette dernière.
Article 543
La coutume et l’usage ne seraient prévaloir contre la loi, lorsqu’elle est formelle.
Article 544
Celui qui invoque l’usage doit en justifier l’existence : l’usage ne peut être invoqué que s’il est général ou dominant et s’il n’a rien de contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs.
Article 545
Lorsque la loi a été publiée et que le délai fixé pour sa mise à exécution est écoulé, l’ignorance de la dite loi n’excuse pas lorsqu’il s’agit d’un fait illicite ou de ce qui est notoire aux plus illettrés.
Article 546
A égalité de droit celui qui s’oppose à toute innovation doit être préféré.
Article 547
Nul ne peut venir contre son fait si la loi ne le permet expressément.
Article 548
Nul ne peut se constituer un titre à soi-même.
Article 549
Nul ne peut user des pouvoirs qu’il a pour autrui, par exemple comme administrateur ou tuteur, afin de contracter avec soi-même, même par intermédiaire.
Article 550
Celui qui peut le plus peut le moins.
Article 551
Nul ne peut conférer à autrui plus de droits qu’il n’en a lui même.
Article 552
Nul ne peut donner gratuitement s’il est insolvable.
Article 553
Le créancier passe avant l’héritier, et il n’y a d’hérédité qu’après l’acquittement des dettes.
Article 554
Celui qui a les avantages a les charges et les risques.
Article 555
Celui qui a subit un dommage injuste n’est pas autorisé par cela à causer des dommages à autrui.
Article 556
Entre deux inconvénients, il faut choisir le moindre.
Article 557
Entre l’intérêt général et l’intérêt particulier, il faut préférer l’intérêt général, s’il n’y a aucun moyen de les concilier.
Article 558
La bonne foi se présume toujours, tant que le contraire n’est pas prouvé.
Article 559
Tout rapport de droit est présumé valable et conforme à la loi, jusqu’à preuve du contraire.
Article 560
En principe, chacun est présumé libre de toute obligation jusqu’à preuve du contraire.
Article 561
Toute obligation est présumée pure et simple et celui qui soutient le contraire doit le prouver.
Article 562
Tout état de droit ou de fait est présumé persévérer le même qu’à l’origine et celui qui soutient qu’il a été modifié doit le prouver.
Article 563
Les dispositions établies dans les articles qui précèdent ne dérogent pas aux règles spéciales énoncées dans les titres relatifs aux contrats particuliers.
LIVRE II
DES DIFFERENTS CONTRATS DETERMINES ET DES QUASI-CONTRATS
QUI S’Y RATTACHENT
TITRE PREMIER
DE LA VENTE
Chapitre Premier
De la vente en général
Section Première
De la nature et des éléments constitutifs de la vente
Article 564
La vente est un contrat par lequel l’une des parties transmet la propriété d’une chose ou d’un droit à l’autre contractant, contre un prix que ce dernier s’oblige à lui payer .
Article 565
La vente faite par un malade, pendant sa dernière maladie, est régie par les dispositions de l’article 354, lorsqu'elle est faite à un de ses successibles dans l’intention de le favoriser, comme si, par exemple, il lui vendait à un prix beaucoup inférieur à la valeur réelle de la chose, ou s’il lui achetait à une valeur supérieure.
La vente faite par le malade à un non successible est régie par les dispositions de l’article 355.
Article 566
Les magistrats, greffiers, avocats, mandataires ad litem ne peuvent ni par euxmêmes, ni par personne interposée, et à peine de nullité, se rendre acquéreurs ou cessionnaires, à quelque titre que ce soit, en tout ou en partie, des droits litigieux qui sont de la compétence des tribunaux dans le ressort desquels ils exercent leurs fonctions.
La vente en ce cas est nulle de plein droit ; la nullité en devra être prononcée à la requête de tout intéressé et même d’office.
Article 567
Les magistrats, greffiers, notaires, avocats, mandataires ad litem et fonctionnaires de l’Etat, ne peuvent se rendre acquéreurs ou cessionnaires, ni par eux-mêmes ni par personne interposée, et à peine de nullité absolue, des biens, droits et créances dont ils doivent poursuivre ou autoriser la vente.
Article 568
Les administrateurs des communes et établissements publics, les tuteurs, les conseils judiciaires ou curateurs, les pères qui gèrent les biens de leurs enfants, les syndics de faillite, les liquidateurs de sociétés, ne peuvent se rendre cessionnaires des biens des personnes qu’ils représentent, sauf dans le cas où ils seraient copropriétaires des biens à alénier. Ne peuvent également, les personnes ci-dessus, se rendre cessionnaires de créances quelconques contre ceux dont ils administrent les biens.
La cession ou vente pourra, toutefois, être ratifiée par celui pour le compte duquel elle a eu lieu, s’il a capacité d’aliéner, ou par le tribunal, ou par toute autre autorité compétente.
Article 569
Les courtiers et experts ne peuvent se rendre acquéreurs, ni par eux-même, ni par personne interposée, des biens meubles ou immeubles dont la vente ou estimation leur a été confiée, à peine de nullité qui pourra être prononcée, ainsi que des dommages.
Article 570
Sont réputées personnes interposées, dans les cas prévus aux articles 566 à 569 ci-dessus, la femme et les enfants, même majeurs, des personnes qui y sont dénommées.
Article 571
Est nulle la vente des choses qui, par la nature ou à raison des circonstances, ne sont pas susceptibles d’être livrées à l’acheteur ; par exemple : le poisson dans l’eau, l’oiseau dans l’air, l’animal qui s’est échappé.
Article 572
Cependant, on peut vendre un droit incorporel, tel que le droit de chasser ou de pêcher dans un lieu déterminé, celui de faire usage de l’eau d’un endroit déterminé, lorsque le débit moyen peut être évalué, et encore qu’il puisse varier selon les années, le droit d’appuyer une poutre au mur du voisin, un droit de passage.
On peut aussi vendre une chose dont on a la propriété, quoiqu’on en ait perdu momentanément la détention, ainsi les animaux domestiques qui ont l’habitude de revenir chez leur maître.
Article 573
Est valable également la vente d’une partie déterminée de l’espace libre ou colonne d’air qui s’élève au-dessus de l’édifice déjà construit et l’acquéreur peut y construire, pourvu que la nature et les dimensions de la construction aient été déterminées ; mais l’acquéreur n’a pas le droit de vendre l’espace au-dessus de lui sans le consentement du vendeur primitif.
Article 574
Est nulle la vente d’une chose inexistante, telle que des fruits en germe ou dont l’existence est aléatoire, par exemple le produit à naître d’un animal, une récolte non encore sortie de terre.
Est valable, néanmoins, la vente sur pied des fruits et autres produits naturels déjà nés et même avant leur maturité.
Article 575
Est nulle entre musulmans la vente de choses déclarées impures par la loi religieuse, sauf les objets dont elle a autorisé le commerce, tels que les engrais animaux pour les besoins de l’agriculture.
Article 576
La vente de la chose d’autrui est valable :
1) si le maître la ratifie ;
2) si le vendeur acquiert ensuite la propriété de la chose ;
Dans le cas où le maître refuse de ratifier, l’acquéreur peut demander la résolution de la vente ; le vendeur est tenu, en outre, des dommages-intérêts, lorsque l’acquéreur ignorait, au moment de la vente que la chose était à autrui.
La nullité du contrat ne peut jamais être opposée par le vendeur, à raison de ce que la chose était à autrui.
Article 577
La vente peut avoir pour objet une chose déterminée seulement quant à son espèce ; mais, dans ce cas, la vente n’est valable que si la désignation de l’espèce s’applique à des choses fongibles suffisamment déterminées quant au nombre, à la quantité, au poids ou à la mesure et à la qualité, pour éclairer le consentement donné par les parties.
Article 578
La vente des mines, carrières, gisements et autres dépôts naturels enfouis dans le sol ou affleurant à la surface, est soumise à des règlements particuliers.
Article 579
Le prix de la vente doit être déterminé. On ne peut en rapporter la détermination à un tiers ni acheter au prix payé par un tiers, à moins que le prix ne soit connu des contractants. On peut, cependant, s’en référer au prix fixé dans une mercuriale, ou tarif déterminé, ou à la moyenne des prix du marché, lorsqu’il s’agit de marchandises dont le prix ne subit pas de variations. Lorsque ce prix est variable, les contractants sont présumés s’en être référés à la moyenne des prix pratiqués.
Section II
De la perfection de la vente
Article 580
La vente est parfaite entre les parties, dès qu’il y a consentement des contractants, l’un pour vendre, l’autre pour acheter, et qu’ils sont d’accord sur la chose, sur le prix et sur les autres clauses du contrat.
Article 581 (modifié par la loi n°92- 47 du 4 mai 1992).
Lorsque la vente a pour objet des immeubles, des droits immobiliers ou autres choses susceptibles d’hypothèques, elle doit être faite par écriture ayant date certaine, d’après la loi, et elle n’a d’effet, au regard des tiers, que si elle est enregistrée à la recette des finances, sous réserve des dispositions spéciales aux immeubles immatriculés(3).
(3). La modification de cet article est liée à la réintroduction du principe de l'effet constitutif de l'inscription ; elle devait entrer en vigueur trois années après la promulgation de la loi n° 92-47 du 4 mai 1992 ; ce délai a été, cependant, prorogé en 1995 de trois années supplémentaires ; la loi n° 98-30 du 20 avril 1998 a encore prorogé cette entrée en vigueur pour trois ans sauf pour les titres fonciers crées après
Article 582
Lorsque la vente a été faite en bloc, le contrat est parfait dès que les parties sont convenues de l’objet et du prix et des autres clauses du contrat, quoique les choses qui en font l’objet n’aient pas encore été pesées, comptées, mesurées ou jaugées.
La vente en bloc et celle qui a pour objet un ensemble de choses à un seul et même prix, sans égard au nombre, au poids ou à la mesure, si ce n’est à l’effet de déterminer le prix total.
Chapitre II
Des effets de la vente
Section Première
Des effets de la vente en général
Article 583
L’acheteur acquiert de plein droit la propriété de la chose vendue, dès que le contrat est parfait par le consentement des parties.
Article 584
Dès que le contrat est parfait, l’acheteur peut aliéner la chose vendue, même avant la délivrance ; le vendeur peut céder son droit au prix, même avant le paiement, sauf les conventions contraires des parties. Cette disposition n’a pas lieu dans les ventes de denrées alimentaires, entre musulmans.
Article 585
Dès la perfection du contrat, l’acheteur doit supporter les impôts, contributions et autres charges qui grèvent la chose vendue, s’il n’y a stipulation contraire ; les frais de conservation de la chose sont également à sa charge, ainsi que ceux de perception des fruits. En outre, la chose vendue est aux risques de l’acheteur, même avant la délivrance, sauf les conventions des parties.
Article 586
Lorsque la vente est faite à la mesure, à la jauge, au compte, à l’essai, sur dégustation ou sur simple description, tant que les choses n'ont pas été comptées, mesurées, jaugées, essayées, dégustées ou examinées et agrées par l’acheteur ou par son représentant, elles sont aux risques du vendeur, alors même qu’elles se trouveraient déjà au pouvoir de l’acheteur.
Article 587
Lorsque la vente est alternative avec détermination d’un délai pour le choix, les risques ne sont à la charge de l’acquéreur qu’à partir de l’avènement de la condition, s’il n’y a stipulation contraire.
sa date d'entrée en vigueur. La loi n° 2000-91 du 31 octobre 2000 relative à l'application de l'effet constitutif de l'inscription se rapportant à certains titres fonciers précise que la modification de l'article 581 s'applique aux titres fonciers visés par la loi 98-30 et aux titres mis à jour.
Article 588
La chose vendue voyage aux risques du vendeur jusqu’à sa réception par l’acheteur.
Article 589
Si on vend des marchandises qui se trouvent en voyage avec indication de leur quotité et qualité et du navire qui les transporte ou doit les transporter, les marchandises vendues sont aux risques du vendeur jusqu’à leur délivrance à l’acheteur.
Article 590
En cas de vente de fruits sur l’arbre, des produits d’un potager ou d’une récolte pendante, les fruits ou les légumes sont aux risques du vendeur jusqu’au moment de leur complète maturation.
Section II
Des obligations du vendeur
Article 591
Le vendeur a deux obligations principales :
1) celle de délivrer la chose vendue ;
2) celle de la garantir.
(Parag. I - De la délivrance)
Article 592
La délivrance a lieu lorsque le vendeur ou son représentant se dessaisit de la chose vendue et met l’acquéreur en mesure d’en prendre possession sans empêchement.
Article 593
La délivrance a lieu de différentes manières :
1) pour les immeubles, par le délaissement qu’en fait le vendeur, et par la remise des clefs, lorsqu’il s’agit d’un héritage urbain, pourvu qu’en même temps l’acheteur ne trouve pas d’empêchement à prendre possession de la chose ;
2) pour les choses mobilières, par la tradition réelle, ou par la remise des clefs du bâtiment ou du coffre qui les contient, ou par tout autre moyen, reconnu par l’usage ;
3) elle s’opère même par le seul consentement des parties, si le retirement des choses vendues ne peut être effectué au moment de la vente, ou si elles étaient déjà au pouvoir de l’acheteur à un autre titre ;
4) lorsqu’il s’agit de choses qui se trouvent dans un dépôt public, le transfert ou la remise du certificat de dépôt, du connaissement ou de la lettre de voiture, vaut délivrance.
Article 594
La délivrance des droits incorporels, par exemple un droit de passage, se fait, soit par la remise des titres qui en constatent l’existence, soit par l’usage que l’acquéreur en fait avec le consentement du vendeur ; lorsque l’exercice du droit incorporel comporte aussi la possession d’une chose, le vendeur est tenu de mettre l’acquéreur à même d’en prendre possession sans obstacle.
Article 595
La délivrance doit se faire au lieu où la chose vendue se trouvait au moment du contrat, s’il n’en a été autrement convenu.
Si l’acte de vente porte que la chose se trouve dans un lieu autre que celui où elle se trouve réellement, le vendeur sera tenu de transporter la chose à l’endroit désigné, si l’acheteur l’exige.
Article 596
Lorsque la chose vendue doit être expédiée d’un lieu à un autre, la délivrance n’a lieu qu’au moment où la chose parvient à l’acquéreur ou à son représentant.
Article 597
La délivrance doit se faire aussitôt après la conclusion du contrat, sauf les délais exigés par la nature de la chose vendue ou par l’usage.
Article 598
Le vendeur qui n’a pas accordé de terme pour le paiement n’est pas tenu de délivrer la chose, si l’acheteur n’offre d’en payer le prix, contre la remise de la chose.
L’offre d’une caution ou autre sûreté ne peut tenir lieu de paiement du prix.
Article 599
Lorsque plusieurs choses ont été vendues en bloc, le vendeur a le droit de retenir la totalité des choses vendues, jusqu’au paiement de la totalité du prix, alors même que le prix de chaque objet aurait été établi séparément.
Article 600
Le vendeur ne peut refuser de livrer la chose vendue : 1) s’il a autorisé un tiers à toucher le prix ou le solde restant dû sur le prix ; 2) ou s’il a accepté une délégation sur un tiers pour le paiement du prix ou du
solde restant dû sur le prix ; 3) si, après le contrat, il a accordé un terme pour payer.
Article 601
Le vendeur n’est pas tenu de délivrer la chose vendue, quand même il aurait accordé un délai pour le paiement :
1) si, depuis la vente, l’acheteur est tombé en déconfiture ;
2) s’il était déjà en faillite au moment de la vente, à l’insu du vendeur ;
3) s’il a diminué les sûretés qu’il avait données pour le paiement, de manière que le vendeur se trouve en danger de perdre le prix.
Article 602
Lorsque le vendeur use du droit de rétention établi aux articles ci-dessus, il répond de la chose dans les mêmes conditions que le créancier gagiste du gage qu’il détient.
Article 603
Les frais de la délivrance, tels que ceux de mesurage, de pesage, de comptage, de jaugeage, sont à la charge du vendeur.
Sont aussi à la charge du vendeur, lorsqu’il s’agit d’un droit incorporel, les frais des actes nécessaires pour constituer ou transmettre ce droit.
Le tout sauf les usages locaux et les conventions des parties.
Article 604
Les frais de courtage sont à la charge du vendeur, lorsque le courtier a conclu lui-même la vente, sauf les usages locaux et les stipulations des parties.
Article 605
Les frais d’enlèvement et de réception de la chose vendue, ainsi que ceux du paiement du prix, de change, et d’actes de notaire, d’enregistrement et de timbre, pour ce qui concerne l’acte d’achat, sont à la charge de l’acheteur. Sont également à sa charge les frais d’emballage, de chargement et de transport.
Les frais de réception comprennent les droits de transit, d’octroi et de douane, perçus pendant le transport et à l’arrivée de la chose.
Le tout sauf usage ou stipulation contraire.
Article 606
La chose doit être délivrée en l’état où elle se trouvait au moment de la vente. A partir de ce moment, le vendeur ne peut en changer l’état.
Article 607
Si, avant la délivrance, la chose déterminée qui fait l’objet de la vente est détériorée ou détruite par le fait du vendeur ou par sa faute, l’acheteur a le droit de demander la valeur de la chose ou une indemnité correspondant à sa moins-value, dans les mêmes conditions où il aurait action contre tout autre tiers.
Lorsque l’objet de la vente est une chose fongible, le vendeur sera tenu de délivrer une chose semblable en qualité et quantité à celle qui a fait l’objet du contrat, le tout sauf le droit de l’acheteur à de plus amples dommages, si le cas y échet.
Article 608
Si la chose vendue est détériorée ou détruite avant la délivrance par le fait de l’acheteur, ou par sa faute, celui-ci sera tenu de recevoir la chose en l’état où elle se trouve et de payer le prix par entier.
Article 609
Tous les fruits et accroissements de la chose, tant civils que naturels, appartiennent à l’acquéreur depuis le moment où la vente est parfaite, et doivent lui être délivrés avec elle, s’il n’y a convention contraire.
Article 610
L’obligation de délivrer la chose comprend également ses accessoires selon les conventions des parties ou selon l’usage.
A défaut de stipulation ou d’usage, on suivra les règles ci-après.
Article 611
La vente d’un héritage comprend celle des constructions et des plantations qui s’y trouvent, celle des récoltes qui n’ont pas encore levé, des fruits non noués.
Elle ne comprend pas les fruits noués, les récoltes pendantes, les plantes en pots et les pépinières, les arbres secs qui ne peuvent être utilisés que comme bois, les choses enfouies par le fait de l’homme, et qui ne remontent pas à une haute antiquité.
Article 612
La vente d’un édifice comprend celle du sol qui le soutient, et des accessoires fixes et immobilisés, tels que les portes, fenêtres, clefs faisant partie des serrures, moulins, escaliers ou armoires fixes, tuyaux servant à la conduite des eaux, poutres et fourneaux fixés au mur.
Elle ne comprend pas les objets mobiles, que l’on peut enlever sans dommage, les matériaux réunis pour faire des réparations, et ceux qui ont été séparés de l’édifice pour être remplacés.
Article 613
La vente d’un immeuble comprend aussi les plans, devis, titres et documents relatifs à la propriété. Lorsque les titres relatifs à la propriété se rapportent aussi à d’autres objets non compris dans la vente, le vendeur n’est tenu que de délivrer un extrait authentique de la partie relative à l’héritage vendu.
Article 614
Les ruches et les colombiers mobiles ne font pas partie de l’héritage vendu.
Article 615
Le jardin ou autre terrain, complanté ou non, qui se trouve en dehors de la maison, n’est pas considéré comme un accessoire de cette maison, même s’il communique avec elle par une porte intérieure, à moins :
1) qu’il ne soit de si petite étendue par rapport à l’édifice qu’on doive le considérer comme un accessoire ;
2) ou qu’il ne résulte de la destination du père de famille qu’il a été considéré comme un accessoire.
Article 616
La vente d’une coupe ou récolte ne comprend pas celle du regain, lorsqu’il s’agit de produits qui repoussent après une première coupe ou récolte, tels que le trèfle, la luzerne, le sainfoin. La vente de légumes, de fleurs, de fruits, comprend les légumes, les fruits et les fleurs sur pied, ainsi que ceux qui mûrissent ou éclosent après la vente et qui en sont considérés comme accessoires et non comme un regain.
Article 617
La vente d’un animal comprend :
1) celle du petit qu’il allaite ;
2) celle de la laine ou du poil prêt pour la tonte.
Article 618
La vente des arbres comprend le sol qui les porte, ainsi que les fruits non noués.
Les fruits noués appartiennent au vendeur, s’il n’y a stipulation contraire.
Article 619
La vente d’un navire comprend celle de ses agrès, de ses apparaux, c’est-à-dire des ancres, mâts, câbles, voiles, poulies, vergues, ainsi que celle des chaloupes et canots et tous autres objets qui y sont attachés par destination. Dans le doute, le tribunal jugera, à dire d’experts.
Article 620
La vente d’un fonds de commerce ou d’une industrie comprend celle des livres de commerce, des notes, pièces et dossiers qui s’y rattachent, de l’outillage et objets nécessaires à l’exploitation, de l’enseigne, du matériel et marchandises, des marques de fabrique dûment spécifiées, de l’achalandage, du brevet d’invention et du secret industriel, de tout, s’il n’y a pas convention contraire.
Il ne comprend pas, sauf les conventions des parties, ce qui est purement personnel au vendeur, tels que ses diplômes, patentes, médailles, certificats, titres scientifiques, ainsi que sa signature ou griffe ; lorsque l’enseigne est nominative, l’acquéreur ou successeur doit ajouter une indication précisant le fait de la cession.
Article 621
La vente d’une marchandise comprend l’emballage, les enveloppes, les marques et estampilles extérieures et autres objets destinés à la protéger ou à en garantir l’authenticité.
Article 622
Les valeurs ou objets précieux trouvés à l’intérieur d’un objet mobilier ne sont pas réputés compris dans la vente, s’il n’y a stipulation contraire.
Article 623
Les choses qui se vendent au poids et au nombre et ne présentent pas de variations sensibles dans leur prix, celles qu’on peut diviser sans préjudice, peuvent être vendues pour un prix unique ou à raison de tant par unité de mesure ou de poids. Si la quantité indiquée est trouvée complète au moment de la délivrance, la vente est obligatoire pour le tout. Dans le cas où il y aurait une différence en plus ou en moins, et soit qu’on ait vendu pour un prix unique ou à tant par unité, on appliquera les règles suivantes : s’il y a un excédent, il appartiendra au vendeur, si la différence est en moins, l’acheteur aura le choix de résilier le contrat pour le tout ou d’accepter la quantité livrée, en la payant à proportion.
Article 624
Lorsque la vente a pour objet des choses qui se vendent au nombre et dont le prix subit des variations sensibles, on appliquera les règles suivantes :
Si elles ont été vendues en bloc et pour un prix unique, toute différence en plus ou en moins annule la vente ; si elles ont été vendues à tant par unité, la différence en plus annule la vente ; si la différence est en moins, l’acheteur a le choix de résilier la vente pour le tout, ou d’accepter la quantité livrée en la payant à proportion.
Article 625
Lorsque la vente a pour objet des choses qui se vendent au poids et à la mesure et ne peuvent se fractionner sans dommage, entre autres des terres vendues à la mesure, on appliquera les règles suivantes :
a) si la chose a été vendue tout entière pour un prix unique, l’excédent appartient à l’acheteur, sans que le vendeur ait le choix de résilier la vente. Si la différence est en moins, l’acheteur aura le droit de résilier la vente ou bien d’accepter la quantité livrée en payant tant le prix fixé ;
b) si la vente a été faite à tant par unité de mesure et qu’on trouve une différence en plus ou en moins, l’acheteur a le choix de résilier le contrat ou bien d’accepter la quantité livrée en la payant à proportion.
Article 626
Si la chose a été vendue en bloc ou comme un corps déterminé par son individualité, l’expression du poids, de la mesure ou de la contenance ne donne lieu à aucun supplément de prix en faveur du vendeur, ni à aucune réduction en faveur de l’acheteur, à moins que la différence, la quantité ou mesure réelle à celle exprimée au contrat ne soit d’un vingtième en plus ou en moins. Le tout s’il n’y a stipulation ou usage contraire.
Article 627
Dans le cas où suivant l’article précédent, il y a lieu à augmentation de prix pour excédent de quantité ou de mesure, l’acquéreur a le choix ou de se désister du contrat ou de fournir le supplément de prix.
Article 628
Dans tous les cas ci-dessus, il sera tenu compte des tares et autres différences tolérées par l’usage commercial, s’il n’y a convention contraire.
Article 629
L’action en résolution du contrat et celle en diminution ou en supplément de prix, dans les cas ci-dessus, doivent être intentées dans l’année, à partir de la date fixée par le contrat pour l’entrée en jouissance ou la délivrance, et à défaut, à partir de la date du contrat, le tout à peine de déchéance.
Parag. II - De la garantie
Article 630
La garantie que le vendeur doit à l’acquéreur à deux objets :
a) le premier est la jouissance et la possession paisible de la chose vendue (garantie pour cause d’éviction) ;
b) le second, les défauts de cette chose (garantie pour les vices rédhibitoires).
La garantie est due de plein droit, quand même elle n’aurait pas été stipulée. La bonne foi du vendeur ne l’exonère pas de cette obligation.
A. De l’obligation de garantir la jouissance et la paisible possession (garantie pour cause d’éviction) :
Article 631
L’obligation de garantir emporte pour le vendeur celle de s’abstenir de tout acte ou réclamation qui tendrait à inquiéter l’acheteur ou à le priver des avantages sur lesquels il avait droit de compter, d’après la destination de la chose vendue, et l’état dans lequel elle se trouvait au moment de la vente.
Article 632
Le vendeur est également tenu de droit à garantir l’acquéreur de l’éviction qu’il souffre, en vertu d’un droit subsistant au moment de la vente.
Il y a éviction :
1) lorsque l’acquéreur est privé en tout ou en partie de la possession de la chose ;
2) lorsqu’il ne réussit pas à en obtenir la possession contre un tiers détenteur ;
3) ou, enfin, lorsqu’il est obligé de faire un sacrifice pour la délivrer.
Article 633
L’éviction d’une partie déterminée de la chose équivaut à l’éviction du tout, si cette partie est de telle importance par rapport au reste que l’acquéreur n’aurait point acheté la chose sans elle.
Il en est de même, si l’immeuble se trouve grevé de servitudes non apparentes ou autres droits sur la chose non déclarés lors de la vente.
Article 634
S’il s’agit de servitudes nécessaires et naturellement inhérentes au fonds, telles, par exemple, que le droit de passage sur un fonds enclavé, l’acheteur n’aurait de recours contre son vendeur que dans le cas où celui-ci aurait garanti la complète liberté du fonds.
Article 635
L’acheteur, actionné à raison de la chose vendue, est tenu, au moment où le demandeur a produit ses preuves, de dénoncer la demande en éviction à son vendeur. Le tribunal l'avertira à ce moment qu'en suivant l'action en son nom personnel, il s'expose à perdre tout recours contre son auteur ; si, malgré cet avertissement, il préfère défendre directement à l'action, il perdra tout recours contre le vendeur.
Article 636
L'acheteur qui a souffert l'éviction totale de la chose, sans qu'il y ait eu de sa part reconnaissance du droit de l'évinçant, a le droit de se faire restituer :
1) le prix qu'il a déboursé et les loyaux coûts du contrat ;
2) les dépens judiciaires qu'il a faits sur la demande en garantie ;
3) les dommages qui sont la suite directe de l'éviction.
Article 637
L'acheteur a le droit de se faire restituer la totalité du prix, même si la chose évincée se trouve détériorée ou dépréciée, en tout ou en partie, par son fait ou sa faute, ou par une force majeure.
Article 638
Le vendeur de mauvaise foi devra rembourser à l'acquéreur de bonne foi toutes les dépenses, même voluptuaires ou d'agrément, que celui-ci aurait faites.
Article 639
Si la chose évincée se trouve avoir augmenté de valeur au moment de l'éviction, même indépendamment du fait de l'acquéreur, la plus-value sera comprise dans le montant des dommages-intérêts, s'il y a dol du vendeur.
Article 640
En cas d'éviction partielle, mais de telle importance qu'elle vicie la chose vendue et que l'acheteur n'aurait pas acheté s'il avait pu la connaître, l'acheteur peut, à son choix, se faire restituer le prix de la partie évincée et maintenir la vente pour le surplus, ou bien résilier la vente et se faire restituer le prix total.
Lorsque l'éviction partielle n'a pas une importance suffisante pour justifier la résolution de la vente, l'acheteur n'a droit qu'à une diminution proportionnelle du prix.
Article 641
Lorsque la vente a pour objet plusieurs choses mobilières achetées en bloc et pour un prix unique, l'acheteur qui est évincé d'une partie de ces objets peut, à son choix, résilier le contrat et se faire restituer le prix, ou bien demander une réduction proportionnelle.
Mais si les choses sont de telle nature qu'on ne puisse les séparer sans dommage, l'acheteur n'a droit à la résolution que pour le tout.
Article 642
Les parties peuvent convenir que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie.
Cette clause n'a cependant pour effet que d’affranchir le vendeur des dommages-intérêts, mais ne peut le libérer de l'obligation de restituer, en tout ou en
partie, le prix qu'il a reçu, si l'éviction s'accomplit.
La stipulation de non-garantie n'a aucun effet :
1) si l'éviction se fonde sur un fait qui est personnel au vendeur lui-même;
2) lorsqu'il y a dol du vendeur, par exemple, lorsqu'il a sciemment vendu la
chose d'autrui, ou lorsqu'il connaissait la cause de l'éviction et qu'il ne l'a pas déclarée.
Dans ces deux cas, il devra, en outre, les dommages.
Article 643
Le vendeur est tenu de restituer le prix ou de subir la réduction, même si l'acheteur connaissait le risque de l'éviction ou l'existence des charges.
Article 644
Le vendeur n'est tenu d'aucune garantie :
a) si l'éviction a lieu par violence ou par force majeure ;
b) si elle dépend du fait du prince, à moins que le fait du prince ne se fonde sur un droit préexistant qu'il appartient au souverain de déclarer ou de faire respecter, ou sur un fait imputable au vendeur ;
c) lorsque l'acheteur est troublé dans sa jouissance par des voies de fait de la part de tiers qui ne prétendent d'ailleurs aucun droit sur la chose vendue.
Article 645
Le vendeur, même appelé en cause en temps utile, n'est tenu d'aucune garantie lorsque l'éviction a lieu par le dol ou la faute de l'acquéreur, si cette faute a été la cause déterminante du jugement qui a évincé ce dernier, et notamment :
a) lorsque l'acquéreur a laissé accomplir contre lui une prescription commencée du temps de son auteur, ou s'il néglige lui-même d'accomplir une prescription déjà commencée par ce dernier ;
b) si l'acquéreur laisse accomplir à son préjudice une immatriculation à laquelle il aurait eu le temps de s'opposer ;
c) lorsque l'éviction se fonde sur un fait ou une cause personnelle à l'acquéreur.
Article 646
L'acheteur ne perd point son recours en garantie contre le vendeur lorsqu'il n'a pu, à cause de l'absence de ce dernier, le prévenir en temps utile et qu'il a été obligé, en conséquence, de se défendre seul contre l'évinçant.
B. De la garantie des défauts de la chose vendue
Article 647
Le vendeur garantit les vices de la chose qui en diminuent sensiblement la valeur ou la rendent impropre à l'usage auquel elle est destinée d'après sa nature ou d'après le contrat. Les défauts qui diminuent légèrement la valeur ou la jouissance, et ceux tolérés par l'usage, ne donnent pas ouverture à garantie.
Le vendeur garantit également l'existence des qualités par lui déclarées, ou qui ont été stipulées par l'acheteur.
Article 648
Cependant lorsqu'il s'agit de choses dont le véritable état ne peut être connu qu'en les dénaturant, telles que des fruits en coque, le vendeur ne répond des vices cachés que s'il s'y est expressément engagé, ou si l'usage local lui impose cette garantie.
Article 649
Dans les ventes sur échantillon, le vendeur garantit l'existence des qualités de l'échantillon. Lorsque l'échantillon a péri ou s'est détérioré, l'acheteur est tenu de prouver que la marchandise n'est pas conforme à l'échantillon.
Article 650
Le vendeur ne garantit que les vices qui existaient au moment de la vente, s'il s'agit d'un corps déterminé par son individualité, ou au moment de la délivrance, s'il s'agit d'une chose fongible qui a été vendue au poids, à la mesure, sur description.
Article 651
En cas de doute, le dire du vendeur fait foi à charge de serment.
Article 652
Lorsqu'il s'agit de choses mobilières, autres que les animaux, l'acheteur doit examiner l'état de la chose vendue aussitôt après l'avoir reçue et notifier immédiatement au vendeur tout défaut dont celui-ci doit répondre, dans les sept jours qui suivront la réception.
A défaut, la chose est censée acceptée, à moins qu'il ne s'agisse de vices non reconnaissables par un examen ordinaire, ou que l'acheteur n'ait été empêché, pour une cause indépendante de sa volonté, d'examiner l'état de la chose vendue. Dans ce cas, les vices de la chose doivent être notifiés au vendeur aussitôt après leur découverte ; à défaut, la chose est censée acceptée. Le vendeur de mauvaise foi ne peut se prévaloir de cette dernière réserve.
Article 653
L'acheteur doit, sans délai, faire constater l'état de la chose vendue par l'autorité judiciaire, ou par experts à ce autorisés, contradictoirement avec l'autre partie ou son représentant s'ils sont sur les lieux. A défaut de constatation régulière, il sera tenu de prouver que les vices existaient déjà au moment de la réception. Cette vérification n'est pas requise lorsque la vente est faite sur échantillon, dont l'identité n'est pas contestée.
Si la marchandise provient d'un autre lieu, et si le vendeur n'a point de représentant au lieu de réception, l'acheteur est tenu de pouvoir provisoirement à la conservation de la chose.
S'il y a danger d'une détérioration rapide, l'acheteur a le droit, et lorsque l'intérêt du vendeur l'exige, il a le devoir de faire vendre la chose en présence de l'autorité compétente du lieu où elle se trouve, après la constatation dont il est parlé ci-dessus. Il doit aussitôt, et à peine des dommages-intérêts, donner avis au vendeur de tout ce qui précède.
Article 654
Les frais de réexpédition, dans le cas de l'article précèdent, sont à la charge du vendeur.
Article 655
Lorsqu'il y a lieu à rédhibition, soit pour cause de vices, soit à raison de l'absence de certaines qualités, l'acheteur peut poursuivre la résolution de la vente et la restitution du prix. S'il préfère garder la chose, il n'a droit à aucune diminution de prix.
Il aura droit aux dommages :
a) lorsque le vendeur connaissait les vices de la chose ou l'absence des qualités par lui promises et n'a pas déclaré qu'il vendait sans garantie : cette connaissance est toujours présumée lorsque le vendeur est un marchand ou un artisan qui vend les produits de l'art qu'il exerce ;
b) lorsque le vendeur a déclaré que les vices n'existaient pas, à moins qu'il ne s'agisse de vices qui ne se sont révélés qu'après la vente, ou que le vendeur pouvait ignorer de bonne foi ;
c) lorsque les qualités dont l’absence est constatée avaient été expressément stipulées ou étaient requises par l’usage du commerce.
Article 656
Lorsque la vente a pour objet un ensemble de choses déterminées et qu'une partie en est viciée, l'acheteur a le droit de se prévaloir de la faculté qui lui est accordée par l'article 655 ; lorsque la vente a pour objet des choses fongibles, l'acheteur ne pourra exiger que la délivrance d'une quantité de choses de la même espèce, exemptes des défauts constatés, sauf son recours pour les dommages si le cas y échet.
Article 657
Si la vente a pour objet plusieurs choses différentes achetées en bloc et pour un prix unique, l'acheteur pourra, même après délivrance, faire résilier la vente pour la partie défectueuse de ces objets et se faire restituer une partie proportionnelle du prix; cependant, lorsque les objets ne peuvent être séparés sans dommage, par exemple, lorsqu'ils forment une paire, il ne pourra faire résilier le marché que pour le tout.
Article 658
La résolution à cause du défaut de la chose principale s'étend aussi aux accessoires, même lorsque le prix en a été fixé séparément.
Le vice de la chose accessoire ne résout pas la vente de la chose principale.
Article 659
La diminution du prix se fait en établissant d'une part, la valeur de la chose à l'état sain au moment du contrat, et, d'autre part, la valeur qu'elle a en l'état où elle se trouve.
Lorsque la vente a pour objet plusieurs choses achetées en un lot unique l'évaluation se fait sur la base de la valeur de toutes les choses constituant le lot.
Article 660
Au cas de résolution de la vente, l'acheteur doit restituer :
1) la chose affectée du vice rédhibitoire, telle qu'il l'a reçue, avec ses accessoires et ce qui en faisait partie, ainsi que les accessoires qui se sont incorporés avec elle depuis le contrat ;
2) les fruits de la chose, depuis le moment de la résolution amiable ou du jugement qui la prononce, de même que les fruits antérieurs à cette date. Cependant, lorsque les fruits n'étaient pas noués au moment de la vente, l'acheteur les fait siens s'il les a cueillis, même avant leur maturité ; il fait également siens les fruits parvenus à leur maturité, encore qu'il ne les ait pas perçus.
D'autre part, le vendeur est tenu :
1) de faire raison à l'acheteur des frais de culture, d'arrosage ou d'entretien et
des frais relatifs aux fruits que l'acheteur lui a restitués ;
2) de restituer le prix qu'il a reçu ainsi que les frais et loyaux coûts du contrat ;
3) d'indemniser l'acheteur des pertes que la chose peut lui avoir occasionnées,
si le vendeur était en dol.
Article 661
L'acheteur n'a droit à aucune restitution, ni diminution de prix, s'il ne peut restituer la chose, dans les cas suivants :
1) si la chose a péri par cas fortuit ou par la faute de l'acheteur ou des personnes dont ce dernier doit répondre ;
2) si la chose a été volée ou soustraite à l'acheteur ;
3) s'il a transformé la chose de manière qu'elle ne puisse plus servir à sa destination primitive. Cependant, si le vice de la chose n'est apparu qu'au moment ou par suite de la manipulation, l'acheteur conserve son recours contre le vendeur.
Article 662
Si la chose vendue a péri à cause du vice dont elle était affectée ou d'un cas fortuit occasionné par ce vice, la perte est pour le vendeur, lequel est tenu de restituer le prix. Il est tenu, en outre, des dommages, s'il est de mauvaise foi.
Article 663
Il n’y a pas lieu à résolution, et l’acheteur ne peut demander qu’une diminution de prix :
1) si la chose a été détériorée par sa faute ou par celle des personnes dont il doit répondre ;
2) s'il l'a appliquée à un usage qui en diminue notablement la valeur. Cette disposition s'applique au cas où il aurait fait usage de la chose avant de connaître le défaut : s'il a fait usage de la chose après, on appliquera l'article 671.
Article 664
Lorsque la chose vendue et délivrée est atteinte d'un vice rédhibitoire et qu'il survient un vice nouveau non imputable à l'acheteur, celui-ci a le choix soit de garder la chose en exerçant son recours tel que de droit du chef de l'ancien vice, soit de la rendre au vendeur en subissant sur le prix qu'il a payé une diminution proportionnelle au vice nouveau qui a surgi depuis la vente. Cependant, le vendeur peut offrir de reprendre la chose en l'état où elle se trouve, en renonçant à toute compensation pour le vice qui a surgi ; dans ce cas, l'acheteur aura le choix soit de retenir la chose dans l'état où elle se trouve, en renonçant à un recours, soit de la restituer, sans payer d'indemnité.
Article 665
Si le nouveau défaut vient à disparaître, le défaut antérieur à la délivrance fait renaître l'action rédhibitoire en faveur de l'acheteur.
Article 666
La diminution de prix obtenue du chef d'un vice reconnu n'empêche pas l'acheteur de demander, soit la résolution de la vente, soit une nouvelle diminution de prix, si un autre vice venait à se déclarer.
Article 667
L'action rédhibitoire s'éteint lorsque le vice a disparu avant ou pendant l'instance en résolution ou en diminution de prix, s'il s'agit d'un vice transitoire de sa nature, et qui n'est pas susceptible de reparaître. Cette disposition ne s'applique pas, si le vice est de telle nature qu'il pourrait se reproduire.
Article 668
Le vendeur n'est point tenu des vices apparents, ni de ceux dont l'acheteur a eu connaissance ou qu'il aurait pu facilement connaître.
Article 669
Le vendeur répond même des défauts que l'acheteur aurait pu facilement connaître, s'il a déclaré qu'ils n'existaient pas.
Article 670
Le vendeur ne répond pas des vices de la chose, ou de l'absence des qualités requises :
1) s'il les a déclarés ;
2) s'il a stipulé qu'il ne serait tenu d'aucune garantie.
Article 671
L'action rédhibitoire s'éteint :
1) si l'acheteur y a expressément renoncé après avoir eu connaissance du vice de la chose;
2) si, depuis que le vice lui a été connu, il a vendu la chose ou en a autrement disposé à titre de propriétaire ;
3) s'il l'a appliquée à son usage personnel, et continue à s'en servir après avoir connu le vice dont elle est affectée. Cette règle ne s'applique pas aux maisons et autres immeubles analogues, que l'on peut continuer à habiter pendant l'instance en résolution de la vente.
Article 672
Toute action résultant des vices rédhibitoires, ou du défaut des qualités promises, doit être intentée, à peine de déchéance :
1) pour les choses immobilières dans les trois cents soixante cinq jours après la délivrance ;
2) pour les choses mobilières et les animaux, dans les trente jours après la délivrance, pourvu qu'il ait été donné au vendeur l'avis dont il est parlé à l'article 652.
Ces délais peuvent être prorogés ou réduits d'un commun accord par les parties. Les règles des articles 384 à 390 s'appliquent à la déchéance en matière d'action rédhibitoire.
Article 673
Le vendeur de mauvaise foi ne peut opposer les moyens de prescription établis en l'article précédent, ni toute autre clause limitant sa garantie. Est de mauvaise foi, tout vendeur qui aurait employé des manœuvres dolosives pour créer ou dissimuler les vices de la chose vendue.
Article 674
L'action rédhibitoire n'a pas lieu dans les ventes faites par autorité de justice.
Section III
Des obligations de l'acheteur
Article 675
L'acheteur a deux obligations principales :
-celle de payer le prix ;
- et celle de prendre livraison de la chose.
Article 676
L'acheteur est tenu de payer le prix à la date et de la manière établie au contrat ; à défaut de convention, la vente est censée faite au comptant, et l'acheteur doit payer au moment même de la délivrance.
Les frais du paiement sont à la charge de l'acheteur.
Article 677
Néanmoins, dans les cas où il est d'usage que le paiement ait lieu dans un certain délai, ou par échéances déterminées, les parties sont censées avoir voulu se conformer à l'usage, si elles n'ont expressément stipulé le contraire.
Article 678
Lorsqu'un délai a été accordé pour le paiement du prix, le terme commence à courir de la conclusion du contrat, si les parties n'ont pas établi une autre date.
Article 679
L'acheteur est tenu de prendre livraison de la chose vendue, dans le lieu et à la date fixés par le contrat. A défaut de convention ou d'usage, il est tenu de la retirer immédiatement, sauf le délai normalement nécessaire pour opérer le retirement. S'il ne se présente pas pour le recevoir, ou s'il se présente sans offrir en même temps le paiement du prix, lorsque la vente est faite au comptant, on appliquera les principes généraux relatifs à la mise en demeure du débiteur (article 597).
Lorsque les choses vendues doivent être livrées en plusieurs fois, le défaut de retirement des objets formant la première livraison produit les mêmes conséquences que le défaut de retirement de la totalité.
Le tout, sauf les conventions contraires des parties.
Article 680
S'il a été stipulé, d'après le contrat ou la coutume du lieu, que la vente serait résolue faute de paiement du prix, le contrat sera résolu de plein droit par le seul fait du non-paiement dans le délai convenu.
Article 681
Le vendeur qui n'a pas accordé de délai peut aussi, à défaut de paiement du prix, revendiquer les choses mobilières qui se trouvent au pouvoir de l'acheteur, ou en arrêter la vente. L'action en revendication n'est pas recevable après quinze jours, à partir de la remise de la chose à l'acheteur. La revendication a lieu, même si la chose vendue a été incorporée à une chose immobilière, et à l'encontre de tous tiers ayant des droits sur l'immeuble.
La revendication en cas de faillite est régie par les dispositions spéciales à la faillite.
Article 682
L'acheteur qui est troublé ou qui se trouve en danger imminent et sérieux d'être troublé, en vertu d'un titre antérieur à la vente, a le droit de retenir le prix tant que le vendeur n'aura pas fait cesser le trouble. Mais le vendeur peut le forcer à payer en donnant caution, ou autre sûreté suffisante pour la restitution du prix et des loyaux coûts du contrat en cas d'éviction.
Lorsque le trouble ne porte que sur une partie de la chose, l'acheteur ne peut retenir qu'une partie proportionnelle du prix, et le cautionnement sera limité à la portion de la chose en danger d'éviction.
L'acheteur ne peut exercer ce droit de rétention lorsqu'il a été stipulé qu'il paiera nonobstant tout trouble, ou lorsqu'il connaissait le danger d'éviction lors de la vente.
Article 683
Les dispositions de l'article précédent s'appliquent au cas où l'acheteur découvre un vice rédhibitoire dans la chose vendue.
Chapitre III
De quelques espèces particulières de vente
Section Première
De la vente à réméré
(les articles 684 à 699 inclus ont été abrogés par la loi n° 58-1 du 28 janvier 1958).
Section II
De la vente sous condition suspensive
en faveur de l'une des parties (vente à option)
Article 700
La vente peut être faite à condition que l'acheteur ou le vendeur aura le droit de se départir du contrat dans un délai déterminé. Cette condition doit être expresse ; elle peut être stipulée soit au moment du contrat soit après, par une clause additionnelle.
Article 701
La vente faite sous cette clause est censée faite sous condition suspensive, tant que la partie qui s'est réservé le droit d'opter n'a pas déclaré expressément ou tacitement dans le délai convenu si elle entend tenir le contrat ou s'en départir.
Article 702
Si le contrat n'indique pas le délai d'option, les parties sont présumées avoir stipulé le délai établi par la loi ou par l'usage. Les délais établis par l'usage ne peuvent, cependant, être supérieurs à ceux indiqués dans l'article suivant.
Article 703
La partie qui s'est réservé le droit d'option doit déclarer si elle entend tenir le contrat ou s'en départir dans les délais suivants :
a) pour les immeubles urbains et les fonds de terre, dans le délai de trente jours à partir de la date du contrat ;
b) pour les animaux domestiques et toutes les choses mobilières, dans le délai de cinq jours.
Les parties peuvent, toutefois, convenir d'un délai moindre ; toute stipulation d'un délai supérieur est nulle et doit être réduite aux délais ci-dessus.
Article 704
Le délai établi par les parties ou par la loi est de rigueur ; il ne peut être prorogé pas le tribunal même si la partie qui s'est réservé la faculté d'opter n'a pas usé de son droit même pour une cause indépendante de sa volonté.
Article 705
Pendant le délai d'option, le droit aux fruits, accroissements et accessions de la chose demeure en suspens; ils passent avec la chose elle-même à la partie qui acquiert définitivement la propriété.
Article 706
Si la partie opte affirmativement dans le délai établi par le contrat ou par la loi, la vente devient pure et simple, et la chose est réputée avoir appartenu a l'acheteur dès le jour du contrat.
Article 707
Si la partie qui s'est réservé le droit d'option laisse passer le délai sans faire connaître sa décision, elle est présumée, de plein droit, avoir accepté.
Article 708
L'acheteur perd le droit de refuser la chose par tout fait impliquant l'intention de faire acte de propriétaire, et notamment :
a) s'il dispose de la chose par gage, vente, location ou pour son usage personnel;
b) s 'il la dégrade volontairement ;
c) s 'il la transforme.
Au contraire, le vendeur est présumé avoir opté négativement et perd le droit d'exiger l'exécution de la vente dans les cas ci-dessus.
Article 709
Si la partie qui avait le droit d'opter meurt avant d'avoir choisi, le droit d'option se transmet aux héritiers ; si elle perd la capacité de contracter, le tribunal nommera un curateur spécial qui devra agir de la manière la plus conforme aux intérêts de l'incapable.
Article 710
Lorsque la partie opte négativement, le contrat est réputé non avenu ; les parties doivent se restituer réciproquement ce qu'elles ont reçu l'une de l'autre.
Les droits constitués par l'acheteur dans l'intervalle s'éteignent.
Article 711
L'acheteur qui ne peut restituer la chose ou la restitue détériorée, pour une cause non imputable à son fait ou à sa faute, n'est tenu d'aucune responsabilité.
Section III
De la vente à livrer avec avance de prix (sélem)
(les articles 712 à 717 inclus ont été abrogés par la loi n° 58-1 du 28 janvier 1958).
TITRE II
DE L'ECHANGE Article 718
L'échange est un contrat par lequel chacune des parties remet à l'autre, à titre de propriété, une chose mobilière ou immobilière, ou un droit incorporel, contre une autre chose ou un autre droit de même nature ou de nature différente.
Article 719
L'échange est parfait par le consentement des parties.
Toutefois, lorsque l'échange a pour objet des immeubles ou autres objets susceptibles d'hypothèques, on appliquera les dispositions de l'article 581.
Article 720
Lorsque les objets échangés sont de valeurs différentes, il est permis aux parties de composer la différence au moyen de soultes en numéraire ou en autres objets, au comptant ou à terme. Cette disposition n'a pas lieu entre musulmans, lorsque les objets de l'échange sont des denrées.
Article 721
Les dépens et loyaux coûts du contrat se partagent de droit entre les copermutants, sauf les stipulations des parties.
Article 722
Chacun des copermutants doit à l'autre la même garantie que le vendeur à raison soit de l'insuffisance du titre, soit des vices rédhibitoires de la chose qu'il a donnée.
Article 723
Lorsque l'échange a pour objet des immeubles ou des droits immobiliers, la demande en résolution doit être annotée en marge de l'inscription de l'acte d'échange, selon ce qui sera dit au titre des hypothèques.
Article 724
Les règles de la vente s'appliquent à l'échange dans la mesure où le permet la nature de ce contrat.
Article 725
L'échange des immeubles appartenant à des fondations pieuses (habous) est soumis à des règlements particuliers.
TITRE III
DU LOUAGE
Article 726
Il y a deux sortes de contrats de louage : celui des choses (kirâ) ; celui des personnes ou d’ouvrage (idjâra).
Chapitre Premier
Du louage de choses
Dispositions générales
Article 727
Le louage de choses est un contrat par lequel l’une des parties cède à l’autre la jouissance d’une chose mobilière ou immobilière, pendant un certain temps, moyennant un prix déterminé que l’autre partie s’oblige à lui payer.
Article 728
Le louage de choses est parfait par le consentement des parties sur la chose, sur le prix et sur les autres clauses dont elles pourraient convenir dans le contrat.
Article 729
Néanmoins, les baux d’immeubles et de droits immobiliers doivent être constatés par écrit s’ils sont faits pour plus d’une année. A défaut d’acte écrit, le bail est censé fait pour un temps indéterminé.
Les baux d’immeubles excédant une année n’ont d’effet au regard des tiers que s’ils sont enregistrés dans les conditions déterminées par la loi.
Article 730
Ceux qui n’ont sur la chose qu’un droit personnel d’usage et d’habitation ou un droit de rétention ou de gage ne peuvent la donner à louage.
Article 731
Les personnes qui, aux termes des articles 567 et 568, ne peuvent se rendre acquéreurs de certains biens, ne peuvent non plus les prendre à louage.
Article 732
L’objet du louage ne peut être une chose qui se consomme par l’usage, à moins qu’elle ne soit destinée à être seulement montrée ou exposée. On peut, cependant, louer les choses qui se détériorent par l’usage.
Article 733
Les articles 572, 575, 578 et 579 relatifs à l’objet de la vente s’appliquent au louage de choses.
Article 734
Le prix doit être déterminé ; il peut être établi soit en numéraire, soit en produits, denrées, ou autres choses mobilières, déterminés quant à la quotité et à la qualité ; Il peut consister aussi en une portion ou part indivise des produits de la chose louée.
Dans les baux de biens ruraux, on peut stipuler que le preneur, outre une somme déterminée en numéraire, ou une redevance en produits, sera tenu de faire certains travaux déterminés considérés comme faisant partie du prix.
Article 735
Les dispositions de l’article 579 s’appliquent au louage.
Article 736
Lorsque le prix de louage n’a pas été déterminé par les parties, elles sont présumées ensuite s’en être remises au prix courant pratiqué pour les choses de même nature dans le lieu du contrat ; s’il existe une taxe ou un tarif, elles sont censées s’être rapportées au tarif ou à la taxe.
Article 737
Les baux des biens habous sont, notamment quant aux conditions de validité et de forme, soumis à des règlements particuliers. Les dispositions de la présente loi non contraires à ces règlements leur sont également applicables.
Article 738
La location des mines, minières, carrières et gisements, enfouis dans le sol ou affleurant à la surface, est soumise également aux règlements spéciaux et aux règles de la vente.
Section Première
Des effets du louage de choses
(Parag. I – Des obligations du bailleur)
Article 739
Le bailleur est tenu de deux obligations principales :
1) celle de délivrer au preneur la chose louée ;
2) celle de la garantir.
A - De la délivrance et de l’entretien de la chose louée.
Article 740
La délivrance de la chose louée est régie par les dispositions établies pour la délivrance de la chose vendue.
Article 741
Les frais de délivrance sont à la charge du bailleur.
Les frais d’actes sont à la charge de chacune des deux parties pour le titre qui lui est délivré ; ceux d’enlèvement et de réception de la chose louée sont à la charge du preneur. Le tout, sauf usage ou stipulation contraire.
Article 742
Le bailleur est tenu de livrer la chose et ses accessoires et de les entretenir, pendant la durée du contrat, en état de servir à leur destination, selon la nature des choses louées, sauf les stipulations des parties et dans le cas de location d’immeubles, les menues réparations qui seraient à la charge du preneur d’après l’usage local.
Si le bailleur est en demeure d’accomplir les réparations dont il est chargé, le preneur peut l’y contraindre judiciairement : à défaut par le bailleur de les accomplir, il peut se faire autoriser par justice à les faire exécuter lui-même et à les retenir sur le prix.
Article 743
Dans les baux d’immeubles, le preneur n’est tenu des réparations locatives ou de menu entretien que s’il en est chargé par le contrat ou par l’usage. Ce sont les réparations à faire:
1) aux pavés et carreaux des chambres lorsqu’il y en a seulement quelques-uns de cassés ;
2) aux vitres, à moins qu’elles ne soient cassées par la grêle ou autres accidents extraordinaires et de force majeure, qui n’auraient pas été occasionnés par la faute du preneur ;
3) aux portes, croisées, planches de cloison ou de fermeture de boutique, gonds, targettes et serrures ;
Le blanchiment des chambres, la restauration des peintures, le remplacement des papiers, les travaux à faire aux terrasses, même lorsqu’il s’agit de simples travaux de recrépissage ou de blanchiment, sont à la charge du bailleur.
Article 744
Aucune des réparations réputées locatives n’est à la charge du preneur quand elles sont occasionnées par vétusté ou force majeure, par le vice de construction ou par le fait du bailleur.
Article 745
Le curage des puits, celui des fosses d’aisance, des conduites servant à l’écoulement des eaux, sont à la charge du bailleur, s’il n’y a clause ou coutume contraire.
Article 746
Le bailleur est tenu de payer les impôts et charges afférents à la chose louée, sauf stipulation ou usage contraire.
B - de la garantie due au preneur
Article 747
La garantie que le bailleur doit au preneur a deux objets : 1) la jouissance et la possession paisible de la chose louée ; 2) l’éviction et les défauts de la chose. Cette garantie est due de plein droit quand même elle n’aurait pas été stipulée.
La bonne foi du bailleur n’empêche pas cette obligation.
a) De la garantie de jouissance :
Article 748
L’obligation de garantie emporte pour le bailleur celle de s’abstenir de tout ce qui tendrait à troubler la possession du preneur ou à le priver des avantages sur lesquels il avait droit de compter d’après la destination de la chose louée et l’état dans lequel elle se trouvait au moment du contrat.
Il répond, à ce point de vue, non seulement de son fait et de celui de ses préposés, mais aussi des faits de jouissance des autres locataires, ou de ses autres ayants droit.
Article 749
Toutefois, le bailleur a le droit de faire, malgré l’opposition du preneur, les réparations urgentes qui ne peuvent être différées jusqu’à la fin du contrat. Mais si, à cause de ces réparations, le preneur est privé, en tout ou en grande partie, de l’usage de la chose louée pendant plus de trois jours, il pourra demander la résolution du bail ou bien une réduction proportionnelle au temps pendant lequel il a été privé de la chose.
Le bailleur est tenu de faire constater l’urgence des réparations et d’en prévenir les locataires. Faute de quoi, il pourra être tenu des dommages-intérêts, résultant du défaut d’avis préalable.
Article 750
Le bailleur est également tenu de droit à garantir le preneur du trouble ou de l’éviction qu’il souffre dans la totalité ou partie de la chose louée par suite d’une action concernant soit la propriété, soit un droit réel sur la chose.
Les articles 632, 633, 634, 635 s‘appliquent à ce cas.
Article 751
Dans les cas prévus aux articles 748 et 750 ci-dessus, le preneur pourra poursuivre la résolution du contrat ou demander une diminution du prix de louage, selon les cas.
Les dispositions des articles 635, 640 à 643 inclus s'appliquent aux cas prévus par le présent article.
Article 752
Si le preneur est lui-même cité en justice pour se voir condamner au délaissement de la totalité ou partie de la chose, ou à souffrir l’exercice de quelque servitude, il doit en donner avis immédiat au bailleur ; en attendant, il ne doit renoncer à aucune partie de la chose qu’il possède. L’action ne pourra être poursuivie dans ce cas que contre le bailleur, mais le preneur pourra intervenir à l’instance.
Article 753
Le bailleur n’est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d’ailleurs aucun droit sur la chose louée et sans que le bailleur y ait donné lieu par son fait, sauf au preneur à les poursuivre en son nom personnel.
Article 754
Néanmoins, lorsque ces troubles de fait ont une telle importance qu’ils privent le preneur de la jouissance de la chose louée, le preneur peut demander une remise proportionnelle du prix de louage.
Il est tenu de prouver, dans ce cas :
a) que le trouble a eu lieu ;
b) qu’il constituait un fait incompatible avec la continuation de sa jouissance.
Article 755
Lorsque la chose louée est soustraite au preneur par le fait du prince ou pour cause d’utilité publique, le preneur pourra poursuivre la résolution du bail, et ne sera tenu de payer le prix qu’à proportion de sa jouissance. Cependant, si le fait du prince ou l’expropriation n’a porté que sur une partie de la chose, le preneur n’aura droit qu’à une réduction de prix ; il pourra poursuivre la résolution si, par l’effet de la diminution que la chose a subie, elle ne peut plus servir à sa destination, ou si la jouissance de ce qui en reste est notablement amoindrie.
Les dispositions de l’article 644 s’appliquent à ce cas.
Article 756
Les faits de l’administration publique, légalement accomplis, qui diminuent notablement la jouissance du preneur, tels que les travaux exécutés par l’administration, ou les arrêtés pris par elle, autorisent le preneur à poursuivre, selon les cas, soit la résolution du bail, soit une réduction proportionnelle du prix ; ils peuvent donner ouverture aux dommages-intérêts contre le bailleur, s’ils ont pour cause un fait ou une faute imputable à ce dernier. Le tout, sauf les stipulations des parties.
Article 757
Les actions du preneur contre le bailleur à raison des articles 748 à 756 inclus se prescrivent par l’expiration du contrat de louage.
b) De la garantie des défauts de la chose louée
Article 758
Le bailleur est tenu envers le preneur pour tous les vices et défauts de la chose louée qui en diminuent sensiblement la jouissance, ou la rendent impropre à l’usage auquel elle était destinée, d’après sa nature ou d’après le contrat. Il répond également de l’absence des qualités expressément promises par lui, ou requises par la destination de la chose.
Les défauts qui n’empêchent la jouissance de la chose louée ou ne la diminuent que d’une manière insignifiante ne donnent lieu à aucun recours en faveur du preneur ; il en est de même de ceux tolérés par l’usage.
Article 759
Lorsqu’il y a lieu à garantie, le preneur pourra poursuivre la résolution du contrat, ou demander une diminution du prix. Il aura droit aux dommages-intérêts, dans les cas prévus à l’article 655.
Les dispositions des articles 657, 658, 659 s’appliquent au cas prévu dans le présent article.
Article 760
Le bailleur n’est pas tenu des vices de la chose louée qu’on pouvait facilement constater, à moins qu’il n’ait déclaré qu’ils n’existaient pas. Il n’est également tenu d’aucune garantie :
a) lorsque le preneur connaissait, au moment du contrat, les vices de la chose louée ou l’absence des qualités requises ;
b) lorsque les vices ont été déclarés au preneur ;
c) lorsque le bailleur a stipulé qu’il ne serait tenu d’aucune garantie.
Article 761
Néanmoins, si le vice de la chose louée est de nature à compromettre sérieusement la santé ou la vie de ceux qui y habitent, le preneur aura toujours la faculté de demander la résiliation, encore qu’il eût connu les vices au moment du contrat, ou qu’il eût renoncé expressément au droit de demander la résiliation.
Article 762
L’article 673 s’applique au louage.
Article 763
Lorsque, sans la faute d’aucun des contractants, la chose louée périt, se détériore ou est modifiée en tout ou en partie, de telle manière qu’elle ne puisse servir à l’usage pour lequel elle a été louée, le bail est résolu sans indemnité d’aucune part, et le preneur ne devra payer le prix qu’à proportion de sa jouissance.
Toute clause contraire est sans effet.
Article 764
Si la chose louée n’est détruite ou détériorée qu’en partie et de manière qu’elle ne soit pas impropre à l’usage pour lequel elle a été louée, ou qu’elle n’y soit impropre qu’en partie, le preneur n’aura droit qu’à une diminution proportionnelle du prix.
Article 765
Les dispositions des articles 763 et 764 s’appliquent au cas où la qualité promise par le bailleur, ou requise par la destination de la chose, viendrait à manquer en tout ou en partie, sans la faute de l’une des parties.
Article 766
Les actions du preneur contre le bailleur, à raison des articles 758, 764, 765, ne peuvent plus être utilement intentées à partir du moment où le contrat de louage a pris fin.
(Parag. II – Des obligations du preneur)
Article 767
Le preneur est tenu de deux obligations principales : a) de payer le prix du louage ; b) de conserver la chose louée et d’en user sans excès ni abus suivant sa
destination naturelle, ou celle qui lui a été donnée par le contrat.
Article 768
Le preneur doit payer le prix au terme fixé par le contrat, ou, à défaut, par l’usage local ; à défaut d’usage, le prix doit être payé à la fin de la jouissance.
Il est permis de stipuler que le bail sera payé d’avance. Les frais du paiement sont à la charge du preneur.
Article 769
Tout acte portant libération ou quittance de loyers ou baux non échus pour une période excédant une année, ne peut être opposée aux tiers, s’il n’a été enregistré en la forme prescrite par la loi.
Article 770
Le prix de location doit être payé, pour les immeubles, au lieu où se trouve la chose louée, et pour les meubles, au lieu où le contrat a été conclu.
Le tout, sauf stipulation contraire.
Article 771
Le preneur est tenu de payer le prix par entier même si, par sa faute ou pour une cause relative à sa personne, il n’a pu jouir de la chose louée ou n’en a eu qu’une jouissance limitée, pourvu que le bailleur ait tenu la chose à sa disposition, pendant le temps et dans les conditions déterminés par le contrat ou par l’usage.
Cependant, si le bailleur a disposé de la chose ou en a autrement profité pendant le temps où le preneur n’en a pas joui, il devra faire état des avantages qu’il a retirés de la chose en déduction de ce qui lui serait dû par le preneur.
Article 772
Le preneur a le droit de sous-louer, et même de céder son bail à un autre, en tout ou en partie, à moins que la défense de sous-louer ou de céder n’ait été exprimée ou en résulte de la nature de la chose. La défense de sous-louer doit être entendue d’une manière absolue, et entraîne celle de sous-louer même pour partie, ou de céder la jouissance, même à titre gratuit.
Article 773
Le preneur ne peut céder ou sous-louer la chose pour un usage différent, ou plus onéreux, que celui déterminé par la convention ou par la nature de la chose.
En cas de contestation et en l’absence de titres, on doit décider en faveur du bailleur.
Article 774
Le preneur est garant de celui auquel il a cédé ou sous-loué la chose, et ne cesse pas d’être tenu lui-même envers le bailleur de toutes les obligations résultant du contrat. Il cesse d’être tenu :
1) lorsque le bailleur a touché directement et sans faire aucune réserve contre le preneur, le prix du louage des mains du sous-locataire ou cessionnaire ;
2) lorsque le bailleur a accepté formellement la sous-location ou la cession, sans aucune réserve contre le preneur.
Article 775
Le sous-locataire est tenu directement envers le bailleur à concurrence de ce qu’il doit lui-même au preneur principal au moment de la sommation qui lui est faite ; il ne peut opposer les paiements anticipés faits au locataire principal, à moins :
1) que ces paiements ne soient conformes à l’usage local ;
2) qu’ils soient constatés par acte ayant date certaine.
Article 776
Le bailleur a une action directe contre le sous-locataire, dans tous les cas où il l’aurait à l’encontre du preneur principal, sans préjudice de son recours contre ce dernier. Le preneur principal pourra toujours intervenir à l’instance. Le bailleur a également action directe contre le sous-locataire pour le contraindre à restituer la chose à l’expiration du terme fixé.
Article 777
La cession est régie par les dispositions établies au chapitre de la cession des créances (articles 199 et suivants) et emporte la substitution du cessionnaire dans les droits et dans les obligations résultant du contrat de louage.
Article 778
Le preneur est tenu, sous peine de dommages-intérêts, d’avertir sans délai le propriétaire de tous les faits qui exigent son intervention qu’il s’agisse de réparations urgentes, de la découverte de défauts imprévus, d'usurpations ou de revendications portant sur la propriété ou tout autre droit réel ou de dommages commis par des tiers.
Article 779
Le preneur doit restituer la chose à l’expiration du terme fixé ; s’il la retient audelà, il doit le prix de location à dire d’experts pour le surplus de temps pendant lequel il l’a retenue ; il répond de tous dommages survenus à la chose pendant ce temps, même par cas fortuit : mais dans ce cas, il ne devra que les dommages sans être tenu du loyer.
Article 780
S’il a été fait un état des lieux ou une description de la chose entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu’il l'a reçue.
Article 781
S’il n’a pas été fait d’état des lieux ou de description de la chose, le preneur est présumé avoir reçu la chose en bon état.
Article 782
Le preneur répond de la perte et de la dégradation de la chose causées par son fait, par sa faute ou par l’abus de la chose louée. Le preneur d’une hôtellerie ou autre établissement public répond aussi du fait des voyageurs et des clients qu’il reçoit dans son établissement.
Article 783
Le preneur ne répond pas de la perte ou des détériorations provenant : 1) de l’usage normal et ordinaire de la chose ; 2) d’une cause fortuite ou de force majeure non imputables à sa faute ; 3) de l’état de vétusté, du vice de la construction, ou du défaut des réparations
qui incombaient au bailleur.
Article 784
La restitution de la chose louée doit être faite dans le lieu du contrat ; les frais de restitution sont à la charge du preneur, s’il n’y a convention ou usage contraire.
Article 785
Le preneur n’a pas le droit de retenir la chose louée, soit à raison des dépenses faites à la chose, soit du chef d’autres créances qu’il pourrait avoir contre le bailleur.
Article 786
Le bailleur est tenu de rembourser au preneur toutes les impenses nécessaires faites pour la conservation de la chose, autres que les dépenses locatives. Il doit aussi rembourser les dépenses utiles faites sans autorisation jusqu’à concurrence de la valeur des matériaux ou plantations et de la main-d’œuvre, sans égard à la plus-value acquise par le fonds.
Le bailleur n’est pas tenu de rembourser les impenses voluptuaires ; le preneur pourra toutefois enlever les améliorations par lui accomplies, pourvu qu’il puisse le faire sans dommage.
Article 787
S’il a autorisé le preneur à faire des améliorations, le bailleur est tenu de lui en rembourser la valeur, jusqu’à concurrence de la somme dépensée.
Le preneur doit prouver l’autorisation qu’il allègue.
Article 788
Le bailleur a le droit de rétention, pour les loyers échus et pour ceux de l’année en cours, sur les meubles et autres choses mobilières qui se trouvent dans les lieux loués et appartenant, soit au locataire, soit au sous-locataire, soit même à des tiers.
Il a le droit de s’opposer au déplacement de ces objets en recourant à l’autorité compétente. Il peut les revendiquer, lorsqu’ils ont été déplacés à son insu ou malgré son opposition, à l’effet de les replacer au lieu où ils se trouvaient, ou dans un autre dépôt.
Le bailleur ne peut exercer ce droit de rétention ou de revendication qu’à concurrence de la valeur nécessaire pour le garantir ; il n’a pas le droit de suite lorsque les choses qui se trouvent encore sur les lieux suffisent pour assurer ses droits.
Le droit de revendication ne peut être exercé après quinze jours à partir de celui où le bailleur a eu connaissance du déplacement.
Le droit de rétention ou de revendication ne peut s’exercer :
a) sur les choses qui ne peuvent faire l’objet d’une exécution mobilière ;
b) sur les choses volées ou perdues ;
c) sur les choses appartenant à des tiers, lorsque le bailleur savait, au moment où ces choses ont été introduites sur les lieux, qu’elles appartenaient à des tiers.
Article 789
Le droit de rétention du bailleur s’étend aux effets introduits par le souslocataire à concurrence des droits du premier preneur envers celui-ci, sans que ce dernier puisse opposer les paiements anticipés faits au premier preneur, sauf les exceptions prévues à l’art.775.
Article 790
Les actions du bailleur contre le preneur, à raison des articles 774, 776, 778, 779, 780, 782, se prescrivent par six mois à partir du moment où il rentre en possession de la chose louée.
Section II
De l'extinction du louage de choses Article 791
Le louage de choses cesse de plein droit à l'expiration du terme établi par les parties, sans qu'il soit nécessaire de donner congé, s'il n'y a convention contraire ou sauf les dispositions spéciales aux baux à ferme.
Article 792
Si aucun terme n'a été établi, le louage est censé fait à l'année, au semestre, au mois, à la semaine ou au jour, selon que le prix a été fixé à tant par an, par semestre, par mois, etc., et le contrat cesse à l'expiration de chacun de ces termes, sans qu'il soit nécessaire de donner congé, à moins d'usage contraire.
Article 793
Au cas où, à l'expiration du contrat, le preneur reste en possession, le contrat est renouvelé dans les mêmes conditions, et pour la même période, si le contrat a été fait pour une période déterminée ; s'il est fait sans détermination d'époque, chacune des parties peut résilier le bail ; le preneur aura cependant droit au délai fixé par l'usage local pour vider les lieux.
Article 794
La continuation de la jouissance n'emporte pas de tacite reconduction lorsqu'il y a congé donné ou autre acte équivalent indiquant la volonté de l'une des parties de ne pas renouveler le contrat.
Article 795
Dans le cas prévu à l'article 793, les cautions données pour le contrat primitif ne s'entendent pas aux obligations résultant de la tacite reconduction ; mais les gages et autres sûretés continuent à être tenus.
Article 796
La résolution a lieu en faveur du bailleur, sans préjudice des dommages, si le cas y échet :
1) si le preneur emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle est destinée par sa nature ou par la convention ;
2) s'il la néglige de manière à causer à la chose un dommage notable ;
3) s'il ne paie pas le prix échu du bail ou de la location.
Article 797
Le bailleur ne peut résoudre la location, encore qu'il déclare vouloir occuper par lui-même la maison louée.
Article 798
Le contrat de louage n'est pas résolu par l'aliénation, volontaire ou forcée, de la chose louée. Le nouveau propriétaire est subrogé à tous les droits et à toutes les obligations de son auteur, résultant des locations et baux en cours, s'ils sont faits sans fraude, et ont date certaine antérieure à l'aliénation.
Article 799
A défaut d'acte écrit ayant date certaine, l'acquéreur pourra expulser le locataire; mais il doit lui donner congé dans les délais établis par l'usage.
Article 800
Si le nouvel acquéreur n'exécute pas les obligations imposées par le bail au bailleur, le preneur aura action contre lui et contre son vendeur, solidairement entre eux, pour toutes indemnités telles que de droit.
Article 801
En cas d'éviction de la chose louée, l'évinçant a le choix ou de maintenir les locations en cours ou de les résoudre ; mais il devra, dans ce dernier cas, observer les délais établis pour les congés, si le preneur est de bonne foi. Le preneur n'aura de recours, pour les loyers et les indemnités à lui dus que contre le bailleur, s'il y a lieu.
Article 802
En cas de faillite déclarée du preneur, le bailleur a le droit de faire résoudre le bail.
Le preneur ou ses créanciers peuvent cependant empêcher la résolution en payant les termes échus et en offrant caution ou en en faisant le dépôt pour ceux à échoir. Les créanciers seront, dans ce cas, subrogés aux droits et aux obligations de leur débiteur.
Article 803
Le bail n'est point résolu par la mort du preneur, ni par celle du bailleur.
Néanmoins :
1) le bail fait par le bénéficiaire d'un bien habous est résolu par la mort du bénéficiaire ;
2) le bail fait par celui qui détient la chose à titre de précaire est résolu par la mort du détenteur.
Article 804
La résolution de la location principale entraîne la résolution des sous-locations faites par le preneur, sauf les cas prévus aux numéros 1 et 2 de l'article 774.
Section III
De quelques espèces particulières de locations de choses
(Parag. I - Des baux à ferme)
Article 805
Les baux des biens ruraux sont soumis aux règles générales ci-dessus et sauf les dispositions suivantes.
Article 806
Les baux de biens ruraux peuvent être faits pour quarante ans ; s'ils sont faits pour un terme supérieur, chacune des parties pourra résoudre le contrat à l'expiration des quarante années.
Le bail des biens ruraux commence le 13 septembre adjemy, si les parties n'ont établi une autre date.
Article 807
Le bail doit indiquer le genre de cultures ou de produits qui sont l'objet de l'exploitation. A défaut, le preneur est censé autorisé à y faire toutes cultures pouvant être faites dans les terres de même espèce, d'après ce qui est dit à l'article 809.
Article 808
Si le bail comprend des ustensiles, du bétail ou des provisions, telles que du foin, de la paille, des engrais, chacune des parties est tenue d'en délivrer à l'autre un inventaire exact signé par elle, et de se prêter à une évaluation commune.
Article 809
Le preneur doit jouir de la chose louée dans les conditions déterminées par le contrat. Il ne peut en jouir d'une manière nuisible au propriétaire ; il ne peut introduire dans l'exploitation des changements qui pourraient avoir une influence nuisible même après la fin du bail, s'il n'y est expressément autorisé.
Article 810
Le preneur n'a pas droit au croît des animaux ni aux accessions qui surviennent à la chose pendant la durée du contrat.
Article 811
Le preneur n'a pas droit au produit de la chasse ou de la pêche, à moins que le fonds ne soit spécialement destiné à cet usage ; il a, toutefois, le droit d'empêcher toute personne, même le bailleur, de pénétrer dans les lieux loués afin d'y chasser ou d'y pêcher.
Article 812
Tous les travaux nécessaires à la jouissance de la chose tels qu'ouverture et entretien des fossés d'écoulement, curage des canaux, entretien des chemins, sentiers et haies, réparations locatives des bâtiments ruraux et des silos, ne sont à la charge du preneur, que s'il en a été chargé par le contrat ou par la coutume du lieu ; dans ce cas, il doit les accomplir à ses frais et sans indemnité, et répond envers le bailleur des dommages résultant de l'inexécution de ces obligations.
Les travaux de construction ou de grosse réparation des bâtiments ou autres dépendances de la ferme sont à la charge du bailleur ; il en est de même de la réparation des puits, canaux, conduites et réservoirs. En cas de demeure du bailleur, on appliquera l'article 742.
Article 813
Si, dans un bail à ferme, on donne aux fonds une contenance supérieure ou inférieure à celle qu'ils ont réellement, il y aura lieu soit à supplément ou à diminution de prix, soit à résolution du contrat, dans les cas et d'après les règles établies au titre de la vente. Cette action se prescrit dans un an à partir du contrat, à moins que l'entrée en jouissance n'ait été fixée à une date postérieure ; dans ce cas, le délai de prescription partira de cette dernière date.
Article 814
Lorsque le preneur est empêché de labourer ou d'ensemencer sa terre par cas fortuit ou cause majeure, il a droit, soit à la remise du prix du bail, soit à la répétition de ce qu'il a payé d'avance, pourvu :
1) que le cas fortuit ou la force majeure n'aient pas été occasionnés par sa faute,
2) qu'ils ne soient pas relatifs à sa personne.
Article 815 (complété par le décret du 4 mai 1920).
Le preneur a droit à la remise ou à la répétition du prix si, après avoir ensemencé, il perd complètement sa récolte pour une cause fortuite ou de force majeure non imputables à sa faute.
Si la perte est partielle, il n'y aura lieu à réduction ou à répétition proportionnelles du prix que si la perte est supérieure à la moitié.
Il n'y aura lieu ni à remise, ni à réduction, si le fermier a été indemnisé du dommage subi, soit par l'auteur de ce dommage, soit par une assurance.
L'action en exonération ou réduction de loyers et fermages, dans les cas visés par le présent article, doit être, à peine de déchéance, intentée avant le 1er octobre de l'année où la récolte a été perdue, en tout ou en partie, par cas fortuit ou force majeure.
Article 816
Il n'y a lieu ni à remise, ni à réduction : 1) si la perte arrive après que la récolte a été séparée de terre ; 2) lorsque la cause du dommage existait et était connue du preneur au moment
du contrat et était de telle nature qu'on ait pu espérer la faire cesser.
Article 817 (abrogé par le décret du 4 mai 1920).
Article 818
Il y a lieu à résolution, en faveur du bailleur d'un bien rural : 1) si le preneur ne le garnit pas des instruments et bestiaux nécessaires à son
exploitation ;
2) s'il en abandonne la culture, ou ne cultive pas en bon père de famille ;
3) s'il emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle est
destinée, d'après sa nature ou d'après le contrat, et généralement s'il n'exécute pas les clauses du bail, de manière qu'il en résulte un dommage pour le bailleur.
Le tout, sauf le droit du bailleur aux dommages-intérêts, s'il y a lieu.
Article 819 (modifié par la loi n° 87-30 du 12 juin 1987).
Le bail des fonds ruraux cesse de plein droit à l'expiration du temps pour lequel il a été fait.
Le congé doit être donné au moins six mois avant l'expiration de l'année en cours.
Lorsqu'il s'agit d'une terre irriguée, l'année agricole est de douze mois ; si à l'expiration de l'année, il se trouve encore des plantes vertes, le bailleur sera tenu de permettre au preneur qui a ensemencé en temps utile pour récolter, dans des conditions normales, à l'expiration du bail, d'occuper les lieux jusqu'à ce qu'il puisse cueillir les produits ; il aura droit, d'autre part, à un loyer correspondant à cette nouvelle période.
Article 820
Si, à l'expiration du terme convenu, le preneur reste et est laissé en possession, le contrat est censé renouvelé pour la même période, s'il est fait pour un temps déterminé.
(le dernier alinéa du présent article est abrogé par la loi n° 87-30 du 12 juin 1987 organisant les baux ruraux).
Article 821
Le preneur d'un fonds rural, dont la récolte n'a pas été levé à l'expiration de son bail, a le droit de rester sur les lieux en payant au bailleur un loyer égal à celui établi dans le contrat, s'il a eu soin de constater, à la fin de son bail, l'état de la récolte. Le tout, sauf le cas de dol ou de faute à lui imputable.
Article 822
Si, à la fin du bail, ayant pour objet une terre irrigable, il se trouve encore des récoltes sur pied ou des légumes verts, le bailleur peut, à son choix, si le preneur n'a pas ensemencé en temps utile et de façon à pouvoir récolter, dans des conditions normales, à l'expiration du bail, renouveler le bail pour le même prix, ou le résoudre en payant au preneur la valeur estimée de la semence et de la main-d’œuvre, avec la réduction d'un quart.
Article 823
Le fermier sortant ne doit rien faire qui diminue ou retarde la jouissance de son successeur. Il ne peut pas entreprendre de nouveaux labours deux mois avant l'expiration de son bail. Il doit permettre au fermier entrant de faire les travaux préparatoires en temps utile, s'il a lui-même fait sa récolte. Le tout, sauf l'usage des lieux.
Article 824
Le preneur sortant doit laisser à celui qui lui succède quelque temps avant son entrée en jouissance les logements convenables et les autres facilités nécessaires pour les travaux de l'année suivante ; réciproquement, le fermier entrant doit laisser à celui qui sort les logements convenables et autres facilités pour la consommation des fourrages et pour les récoltes restant à faire.
Dans l'un et l'autre cas, on suivra l'usage des lieux.
Article 825
Le fermier sortant doit laisser les foins, pailles et engrais de l'année, s'il les a reçus lors de son entrée en jouissance, en quantité égale à celle qu'il a reçue. Il ne pourra se décharger de cette obligation en alléguant le cas fortuit. Lors même qu'il ne les aurait pas reçus, le bailleur pourra en retenir une quantité suffisante, sur estimation au cours du jour. On suivra également en cette matière l’usage des lieux.
Article 826
Le fermier doit restituer à la fin du bail les choses à lui délivrées sur inventaire, et il en répond, sauf les cas de force majeur non imputables à sa faute, et les détériorations provenant de l’usage ordinaire et normal de ces choses.
Si, au cours du bail, il a remplacé ou fait réparer ce qui est venu à manquer ou à se détériorer, il aura droit à se faire rembourser sa dépense, s’il n’y a faute à lui imputable.
Article 827
Si le fermier à complété de ses derniers l'outillage destiné à l'exploitation par d'autres objets non compris dans l'inventaire, le propriétaire aura le choix, à la fin du bail, de lui en rembourser la valeur à dire d'experts, ou de les restituer au fermier en l'état où ils se trouvent.
Chapitre II
Du louage d'ouvrage et du louage de services (idjara)
Dispositions générales
Article 828
Le louage de services ou de travail est un contrat par lequel l'une des parties s'engage, moyennant un prix que l'autre partie s'oblige à lui payer, à fournir à cette dernière ses services personnels pour un certain temps ou à accomplir un fait déterminé.
Le louage d'ouvrage est celui par lequel une personne s'engage à exécuter un ouvrage déterminé, moyennant un prix que l'autre partie s'engage à lui payer.
Le contrat est dans les deux cas parfait par le consentement des parties.
Article 829
La loi considère comme louage d'industrie les services que les personnes exerçant une profession ou un art libéral rendent à leurs clients, ainsi que ceux des professeurs et maîtres de sciences, arts et métiers.
Article 830
Le louage d'ouvrages et celui de services ne sont valables que si les parties contractantes ont la capacité de s'obliger ; l'interdit et le mineur doivent être assistés par les personnes sous l'autorité desquelles ils sont placés.
Article 831 (abrogé par la loi n° 2000-17 du 7 février 2000).
Article 832
On ne peut engager ses services qu'à temps ou pour un travail ou un ouvrage déterminés par le contrat ou par l'usage à peine de nullité absolue du contrat.
Article 833
Est nulle toute convention qui engagerait les services d'une personne sa vie durant ou pour un temps tellement étendu qu'elle lierait l'obligé jusqu'à sa mort.
Article 834
Est nulle toute convention qui aurait pour objet :
a) l'enseignement ou l'accomplissement de pratiques occultes, ou de faits contraires à la loi, aux bonnes moeurs ou à l'ordre public ;
b) des faits impossibles physiquement ;
c) des faits que tout musulman est tenu d'accomplir personnellement, tels que
la prière, le jeûne.
Article 835
Le prix doit être déterminé ou être susceptible de détermination. On peut promettre comme prix de louage une part déterminée des grains ou des produits, ou bien une remise proportionnelle sur les opérations faites par le locateur d'ouvrage.
Article 836
Néanmoins, les avocats, et toutes autres personnes s'occupant d'affaires contentieuses ne peuvent ni par eux-mêmes, ni par personnes interposées, établir avec leurs clients aucune convention sur les procès, droits et actions litigieuses, ni sur les choses comprises dans les affaires dont ils sont chargés en cette qualité, et ce, à peine de nullité de droit et des dommages, si le cas y échet.
Article 837
La convention d'un prix ou salaire est toujours sous-entendue :
1) lorsqu'il s'agit de services ou d'ouvrages qu'il n'est point d'usage d'accomplir gratuitement ;
2) lorsque celui qui les accomplit en fait sa profession ou son état ;
3) lorsqu'il s'agit d'une affaire commerciale ou d'un fait accompli par un commerçant dans l'exercice de son commerce.
Article 838
A défaut de convention, le tribunal déterminera le prix des services ou de l'ouvrage d'après l'usage et au dire d'experts ; s'il existe un tarif ou une taxe déterminés, les parties sont censées s'en être remises au tarif ou à la taxe.
Article 839
Le commettant ou maître est tenu de payer le prix selon ce qui est dit au contrat ou établi par l'usage du lieu ; à défaut de convention ou d'usage, le prix n'est dû qu'après l'accomplissement des services ou de l'ouvrage qui font l'objet du contrat. Lorsqu'il s'agit de travailleurs engagés à temps, le salaire est dû jour par jour, sauf convention ou usage contraires.
Article 840
Celui qui s'est engagé à exécuter un ouvrage ou à accomplir certains services, a droit à la totalité du salaire qui lui a été promis, s'il n'a pu prêter ses services ou accomplir l'ouvrage promis pour une cause dépendante de la personne du commettant, lorsqu'il s'est toujours tenu à la disposition de ce dernier, et n'a pas loué ailleurs ses services.
Cependant, le tribunal pourra réduire le salaire stipulé d'après les circonstances.
Article 841
Le locateur de services ou d'ouvrage ne peut en confier l'exécution à une autre personne, lorsqu'il résulte de la nature des services ou de l'ouvrage, ou de la convention des parties, que le commettant avait intérêt à ce qu'il accomplit personnellement son obligation.
Article 842
Si le locateur de services ou d'ouvrage a loué en même temps ses sévices à deux personnes différentes, le premier en date aura droit à être servi le premier.
Article 843
Le locateur d'ouvrage ou de services répond non seulement de son fait, mais de sa négligence, de son imprudence et de son impéritie.
Toute convention contraire est sans effet.
Article 844
Il répond également des conséquences provenant de l'inexécution des instructions qu'il a reçues, lorsqu'elles étaient formelles, et qu'il n'avait aucun motif grave de s'en écarter ; lorsque ces motifs existent, il doit en avertir le commettant et attendre ses instructions, s'il n'y a péril en la demeure.
Article 845
Le locateur d'ouvrage répond du fait et de la faute des personnes qu'il se substitue, qu'il emploie ou dont il se fait assister, comme de son propre fait ou de sa faute.
Cependant, lorsqu'il est obligé de se faire assister à raison de la nature des services, ou de l'ouvrage, qui font l'objet du contrat, il n'est tenu d'aucune responsabilité s'il prouve:
1) qu'il a employé toute la diligence nécessaire dans le choix et dans la surveillance de ces personnes ;
2) qu'il a fait de son côté tout ce qui était nécessaire afin de prévenir le dommage ou d'en conjurer les suites.
Article 846
Le locateur de services et le locateur d'ouvrage qui ne fournit que son travail sont tenues de veiller à la conservation des choses qui leur ont été remises pour l'accomplissement des services ou de l'ouvrage dont ils sont chargés ; ils doivent les restituer après l'accomplissement de leur travail, et ils répondent de la perte ou de la détérioration imputables à leur faute.
Cependant, lorsque les choses qu’ils ont reçues n’étaient pas nécessaires à l'accomplissement de leur travail, ils n'en répondent que comme simples dépositaires.
Article 847
Ils ne répondent pas de la détérioration et de la perte provenant d'un cas fortuit ou de force majeure, qui n'a pas été occasionné par leur fait on par leur faute et sauf le cas où ils seraient en demeure de restituer les choses qui leur ont été confiées.
La perte de la chose, en conséquence des vices ou de l'extrême fragilité de la matière, est assimilée au cas fortuit, s'il n'y a faute de l'ouvrier.
La preuve de la force majeure est à la charge du locateur d'ouvrage.
Article 848
Le vol ou la soustraction frauduleuse des choses qu'il doit restituer au maître ou commettant, n'est pas considéré comme un cas de force majeure déchargeant la responsabilité du locateur d'ouvrage ou de services, s'il ne prouve qu'il a déployé toute diligence pour se prémunir contre ce risque.
Article 849
Les hôteliers, aubergistes, logeurs en garni, propriétaires d'établissement de bains, cafés, restaurants, spectacles publics, répondent de la perte, de la détérioration et du vol des choses et effets apportés dans leurs établissements par les voyageurs et personnes qui les fréquentent, qu'ils soient arrivés par le fait de leurs serviteurs et proposés, ou par le fait des autres personnes qui fréquentent leur établissement.
Est nulle toute déclaration ayant pour objet de limiter ou d'écarter la responsabilité des personnes ci-dessus dénommées, telle qu'elle est établie par la loi.
Article 850
Les personnes énumérées en l'article précédent ne sont pas responsables, si elles prouvent que la perte ou la détérioration ont eu pour cause :
1) le fait ou la négligence grave du propriétaire des effets, de ses serviteurs ou des personnes qui sont avec lui ;
2) la nature ou le vice des choses perdues ou détériorées ;
3) une force majeure ou un cas fortuit non imputables à leur faute ou à celle de leurs agents, préposés et serviteurs. La preuve de ces faits est à leur charge. Elles ne répondent pas des documents, des valeurs, titres et objets précieux qui n'ont pas été remis entre leurs mains ou celles de leurs préposés.
Article 851
Le louage d'ouvrage et celui de services prennent fin :
1) par l'expiration du terme établi, ou l'accomplissement de l'ouvrage ou du fait qui faisait l'objet du contrat ;
2) par la résolution prononcée par le juge, dans les cas déterminés par la loi ;
3) par l'impossibilité d'exécution résultant, soit d'un cas fortuit ou de force majeure survenus avant ou pendant l'accomplissement du contrat, soit du décès du locateur d'ouvrages ou de services, sauf, dans ce dernier cas, les exceptions exprimées par la loi ; ils ne sont pas résolus par la mort du maître ou du commettant.
Article 852
La faillite du maître, du commettant ou celle du locateur d'ouvrage ou de services, n'est pas une cause de résolution du contrat, et la masse des créanciers est subrogée aux droits et aux obligations qui en résultent. Cette règle n'a pas lieu lorsque les qualités personnelles du locateur d'ouvrage ou de services ont été l'une des causes déterminantes du contrat.
Section Première
Du louage de services ou de travail
Article 853
Le louage de services est régi par les dispositions générales des articles 828 et suivants, et par les dispositions ci-après.
Article 854
Lorsque le locateur de services vit dans la maison du maître, celui-ci doit fournir à ses frais, et pendant vingt jours, les soins nécessaires et l'assistance médicale en cas de maladie ou d'accident survenus au locateur de services, s'ils n'ont pour cause la faute de ce dernier.
Le maître est autorisé à faire donner ces soins hors de sa maison, dans un établissement public à ce destiné, et à imputer le montant de ses déboursés sur les gages ou salaires dus au locateur de services.
Article 855
Le maître est affranchi de l'obligation établie en l'article précédent, lorsque le locateur de services peut se faire donner les soins nécessaires et l'assistance médicale par les associations de secours mutuels dont il fait partie, les compagnies d'assurances auprès desquelles il est assuré, ou par l'assistance publique.
Article 856
Le patron ou maître et généralement tout employeur est tenu :
1) de veiller à ce que les chambres, ateliers et généralement tous les locaux qu'il fournit à ses ouvriers, gens de service et employés, présentent toutes les conditions de salubrité et de sécurité nécessaires ; il doit les entretenir au même état pendant la durée du contrat ;
2) de veiller à ce que les appareils, machines, instruments et généralement tous autres objets qu'il fournit, et au moyen desquels doit s'accomplir le travail, soient en état de garantir contre tout danger la vie ou la santé de ceux qu'il emploie, dans la mesure où le comporte la nature des services à prêter par eux ; il est tenu de les entretenir au même état pendant la durée du contrat ;
3) de prendre toutes les mesures de précaution nécessaires afin de garantir la vie et la santé de ses ouvriers, gens de service et employés, dans l'accomplissement des travaux qu'ils exécutent sous sa direction ou pour son compte.
Le maître répond de toute contravention aux dispositions du présent article, d'après les dispositions établies pour les délits et quasi-délits.
Article 857
Il répond également des accidents ou sinistres dont l'ouvrier travaillant avec lui est victime en exécutant le travail qui lui a été confié, lorsque l'accident ou le sinistre a pour cause la violation ou l'inobservation par l'employeur des règlements spéciaux relatifs à l’exercice de son industrie ou de son art.
Article 858
Sont sans effet toutes clauses et conventions ayant pour objet de restreindre ou d'écarter la responsabilité établie par les articles 856 et 857 à la charge des maîtres ou employeurs.
Article 859
L'indemnité pourra être réduite lorsqu'il est établi que l'accident dont l'ouvrier a été victime a été causé par son imprudence ou par sa faute. La responsabilité du maître cesse complètement, et aucune indemnité ne sera allouée, lorsque l'accident a eu pour cause l'ivresse ou la faute lourde de l'ouvrier.
Article 860
Le louage de services prend fin avec l'expiration du délai fixé par les parties.
Lorsqu'à l'expiration du terme établi, le locateur de services continue à rendre ses services sans opposition de l'autre partie, le contrat est censé renouvelé pour la même période, s'il a été fait pour une année ou un terme plus court. Le contrat est censé renouvelé pour une année, s'il est fait pour un terme plus long . Lorsque le contrat est fait au mois, il n'est censé renouvelé que pour un mois. La continuation des services malgré un congé formel n'emporte pas tacite reconduction.
Article 861
Lorsque le terme du contrat n'est pas déterminé, soit par les parties, soit par la nature du travail à accomplir, le contrat est annulable et chacune des parties peut s'en départir en donnant congé dans les délais établis par l'usage du lieu ou par la convention ; le salaire est dû en proportion du service et d'après ce qui est dû pour les travaux semblables.
Article 862
Dans les engagements d'ouvriers ou de gens de service, commis de magasin ou de boutique, garçons d'établissements publics, les premiers quinze jours sont considérés comme un temps d'essai, pendant lequel chacune des parties peut annuler le contrat à son gré et sans indemnité, sauf le salaire dû à l'employé d'après son travail et en donnant congé deux jours d'avance.
Le tout, sauf les usages du lieu et les conventions contraires des parties.
Article 863
Dans le louage de services, la clause résolutoire est de droit en faveur de chacune des parties, lorsque l'autre contractant n'accomplit pas ses engagements, ou pour d'autres motifs graves dont l'appréciation est réservée aux juges.
Article 864
Le maître a le droit de résoudre le contrat pour cause de maladie ou autre accident de force majeure survenus à son serviteur ou employé, en payant ce qui est dû à ce dernier proportionnellement à la durée de son service.
Article 865
Lorsque l'une des parties n'accomplit pas ses engagements ou lorsqu'elle les résout brusquement, à contretemps, sans motifs plausibles, elle peut être tenue des dommages-intérêts envers l'autre contractant ; ainsi, lorsque l'ouvrier s'absente avant d'avoir terminé son travail et qu'il vient ensuite, après l'expiration de son temps, réclamer le salaire correspondant à l'époque pendant laquelle il a travaillé, l'employeur pourra opposer à cette demande les dommages résultant de l'interruption du travail et ne devra à l'ouvrier que la différence, s'il y en a une. De même lorsque la violation du contrat a eu lieu de la part de l'employer, il devra les dommages à l'ouvrier.
L'existence du dommage et l'étendue du préjudice causé seront déterminées par le juge d'après la nature de l'ouvrage ou des services, les circonstances du fait et l'usage des lieux.
Section II
Du louage d'ouvrage
Article 866
Le louage d'ouvrage est régi par les dispositions générales des articles 828 à 834 inclus et par les dispositions ci-après.
Article 867
L'entreprise de construction et tous autres contrats dans lesquels l'ouvrier ou artisan fournit la matière sont considérés comme louage d'ouvrage.
Article 868
Le locateur d'ouvrage doit fournir les instruments et ustensiles nécessaires, s'il n'y a coutume ou convention contraires.
Article 869
Le commettant ou son héritier peut résoudre le contrat, quand bon lui semble, quoique le travail soit déjà commencé, en payant au locateur d'ouvrage la valeur des matériaux préparés pour ce travail, et tout ce qu'il aurait pu gagner s'il l'avait achevé.
Le tribunal pourra réduire le montant de cette indemnité d'après les circonstances de fait.
Article 870
La clause résolutoire est de droit en faveur du commettant après sommation faite au locateur :
a) lorsque le locateur d'ouvrage diffère plus que de raison et sans motif valable à entamer l'exécution de l'ouvrage ;
b) lorsqu'il est en demeure de le livrer.
Le tout, s'il n'y a faute imputable au commettant.
Article 871
S'il est nécessaire, pour l'exécution de l'ouvrage, que le commettant accomplisse quelque chose de son côté, le locateur d'ouvrage aura le droit de l'inviter formellement à l'accomplir. Après un délai raisonnable et si le commettant n'a pas fait ce qu'il doit, le locateur d'ouvrage a le choix soit de maintenir le contrat, soit d'en poursuivre la résolution, avec les dommages-intérêts dans les deux cas, s'il y a lieu.
Article 872
Lorsque, pendant l'exécution de l'ouvrage, il se produit, dans les matières fournies par le maître, dans le sol destiné à la construction, ou autrement, des vices ou défauts de nature à compromettre le bon accomplissement de l'ouvrage, le locateur d'ouvrage est tenu d'en donner avis immédiatement au commettant. Il répond, en cas d'omission, de tout le préjudice résultant de ces vices et défauts, à moins qu'ils soient de telle nature qu'un ouvrier tel que lui ne put les connaître.
Article 873
Lorsque l’entrepreneur fournit la matière, il est garant des qualités des matières qu’il emploie.
Lorsque la matière est fournie par le maître ou commettant, le locateur d'ouvrage doit l'employer selon les règles de l'art et sans négligence, rendre compte au commettant de l'emploi qu'il en a fait, et lui restituer celle qui reste.
Article 874
Le locateur d'ouvrage est tenu de garantir les vices et défauts de son ouvrage ; les articles 647, 651, 652 et 655 s'appliquent à cette garantie.
Article 875
Dans le cas prévu à l'article ci-dessus, le commettant peut refuser de recevoir l'ouvrage ou le restituer s'il a été livré dans la semaine qui suit la livraison en fixant à l'ouvrier un délai raisonnable afin de corriger, s'il est possible, le vice ou le défaut de qualités. Passé ce délai, et faute par le locateur d'ouvrage de remplir son obligation, le commettant peut à son choix :
1) faire corriger lui-même l'ouvrage aux frais du locateur, si la correction en est encore possible ;
2) demander une diminution du prix ;
3) ou enfin poursuivre la résolution du contrat et laisser la chose pour le compte de celui qui l'a faite.
Le tout, sans préjudice des dommages, s'il y a lieu.
Lorsque le commettant a fourni des matières premières pour l'exécution du travail, il a le droit d'en répéter la valeur. Les règles des articles 659, 660, 661 s'appliquent aux cas prévus aux numéros 2 et 3 ci-dessus.
Article 876
L'architecte ou ingénieur, et l'entrepreneur chargés directement par le maître sont responsables lorsque, dans les cinq années à partir de l'achèvement de l'édifice ou autre ouvrage dont ils ont dirigé ou exécuté les travaux, l'ouvrage s'écroule, en tout ou en partie, ou présente un danger évident de s'écrouler, par défaut des matériaux, par le vice de la construction ou par le vice du sol.
L'architecte qui n'a pas dirigé les travaux ne répond que des défauts de son plan.
Le délai de cinq ans commence à courir du jour de la réception des travaux. L’action doit être intentée dans les trente jours à partir du jour où s’est vérifié le fait qui donne lieu à la garantie ; elle n’est pas recevable après ce délai.
Article 877
La garantie prévue aux articles 873, 874 et 875 n'a pas lieu, lorsque les défauts de l'ouvrage sont causés par les instructions formelles du commettant, et malgré l'avis contraire de l'entrepreneur ou locateur d'ouvrage.
Article 878
Lorsque le commettant reçoit un ouvrage défectueux ou manquant des qualités requises, et dont il connaît les défauts, et qu'il ne le restitue pas ou ne réserve pas ses droits ainsi qu'il est dit à l'article 875, il y aura lieu d'appliquer l'article 652 relatif aux défauts des choses mobilières vendues et livrées à l'acheteur. On appliquera les dispositions de l'article 672 en ce qui concerne le délai dans lequel il peut exercer son recours, s'il n'est pas établi qu'il avait connaissance des défauts de la chose.
Article 879
Est nulle toute clause ayant pour objet de limiter ou d'écarter la garantie du locateur d'ouvrage pour les défauts de son œuvre, surtout lorsqu'il a sciemment dissimulé ces défauts, ou lorsqu'ils proviennent de sa négligence grave.
Article 880
Dans tous les cas où l'ouvrier fournit la matière, si l'ouvrage vient à périr, en tout ou en partie, par cas fortuit ou force majeure, avant sa réception et sans que le maître soit en demeure de le recevoir, le locateur d'ouvrage ne répond pas de la perte, mais il ne peut répéter le prix.
Article 881
Le commettant est tenu de recevoir l’œuvre lorsqu'elle est conforme au contrat, et de la transporter à ses frais si elle est susceptible d'être transportée.
Lorsque le commettant est en demeure de recevoir la chose et lorsqu'il n'y a pas faute de l'ouvrier, la perte ou la détérioration de la chose sont à ses risques à partir de la demeure dûment constatée par une sommation à lui faite.
Article 882
Le paiement du prix n'est dû qu'après l'accomplissement de l'ouvrage ou du fait qui est l'objet du contrat.
Lorsque le paiement du prix est calculé par fraction de temps ou d'ouvrage, le paiement est dû après l'accomplissement de chaque unité de temps ou d'ouvrage.
Article 883
Lorsque l'ouvrage a dû être interrompu pour une cause indépendante de la volonté des parties, le locateur d'ouvrage n’a droit à être payé qu'à proportion du travail qu'il a accompli.
Article 884
Celui qui a entrepris un travail à prix fait, d'après un plan ou devis fait ou accepté par lui, ne peut demander aucune augmentation de prix, à moins que les dépenses n'aient été augmentées par le fait du maître, et qu'il ait expressément autorisé ce surplus de dépense.
Le tout sauf les stipulations des parties.
Article 885
Le paiement est dû au lieu où l'ouvrage doit être livré.
Article 886
Le locateur d'ouvrage a le droit de retenir la chose qui lui a été commandée ou les autres choses du commettant qui se trouvent en son pouvoir, jusqu'au paiement de ses avances et main-d’œuvre, à moins que, d'après le contrat, le paiement ne doive se faire à terme. Dans ce cas, l'ouvrier répond de la chose qu'il retient d'après les règles établies pour le créancier gagiste (article 602). Cependant si la chose périt sans la faute de l'ouvrier, il n'aura pas droit au paiement de son salaire, car le salaire n'est dû que contre la livraison de l'ouvrage.
Article 887
Les ouvriers et artisans, employés à la construction d'un édifice, ou autre ouvrage fait à l'entreprise, ont une action directe contre celui pour lequel l'ouvrage a été fait, à concurrence de la somme dont il se trouve débiteur envers l'entrepreneur au moment de la saisie valablement faite par l'un d'eux, et après cette saisie.
Ils ont un privilège au prorata entre eux, sur ces sommes qui peuvent leur être payées directement par le maître sur ordonnance. Les sous-traitants employés par un entrepreneur, et les fournisseurs de matières premières, n'ont aucune action directe contre le commettant. Ils ne peuvent exercer que les actions de leur débiteur.
Section III
De quelques espèces particulières de louage d'ouvrage
Du contrat de transport
Dispositions générales
(les articles 888 à 953 ont été abrogés par la loi n° 59-129 du 5 octobre 1959 portant promulgation du Code de Commerce).
TITRE IV
DE L’ENZEL (EMPHYTEOSE),
DU KIRDAR (EMPHYTEOSE A RENTE VARIABLE), DU KHOULOU ET DE LA NAÇBA (LOCATION PERPETUELLE)
Chapitre Premier
De l’enzel
Article 954
L’enzel est un contrat par lequel le propriétaire d’un immeuble ou l’administration d’une fondation habous cède, à titre perpétuel, mais sous la réserve de la faculté de rachat établie par le décret du 22 janvier 1905, la possession et jouissance d’un immeuble, contre une redevance déterminée et invariable, payable par année ou par mois, que l’autre partie s’engage à lui verser.
On peut stipuler aussi que le tenancier accomplira des améliorations déterminées, telles que des constructions ou des plantations, considérées comme faisant partie des charges à lui imposées par le contrat.
Article 955
Les personnes qui, aux termes des articles 566 à 570, du présent code, ne peuvent se rendre acquéreurs de certains biens, ne peuvent non plus les prendre en enzel.
Article 956
Le contrat d’enzel est parfait par le consentement des parties sur l’immeuble qui fait l’objet du contrat, sur la redevance et sur les autres clauses du contrat. Il doit être constaté par écriture ayant date certaine. L’acte doit porter une description exacte de l’immeuble concédé, de ses accessoires et les droits qui en dépendent, des constructions, plantations ou autres travaux qu’il renferme ; il énonce la valeur qu’on est convenu de lui donner en l’état où il se trouve au moment du contrat.
Article 957
Le bailleur à enzel ou crédirentier est tenu de livrer l’immeuble en la possession et jouissance du tenancier. Il doit aussi délivrer au tenancier un titre régulier constatant la réalisation du contrat d’enzel.
Les frais de délivrance sont à la charge du crédirentier. Sont à la charge des deux parties, les frais de l’acte ainsi que les frais d’expertise et de courtage, le tout s’il n’y a stipulation ou usage contraires.
Les dispositions relatives à la délivrance en cas de vente (articles 592 et suivants) s’appliquent à l’enzel, sauf les stipulations des parties.
Article 958
Le crédirentier doit délivrer la contenance portée au contrat. En cas de différence, il y a lieu, soit à une réduction ou à une augmentation proportionnelles de la redevance, soit à la résolution du contrat, d’après les dispositions de l’article 629 de la présente loi.
Le tout sauf stipulation contraire.
Article 959
Les dispositions relatives à la garantie due par le vendeur s’appliquent à la garantie due par le crédirentier.
Article 960
Le tenancier à enzel doit payer toutes contributions et charges publiques dont l’immeuble est grevé, et celles dont il pourrait être grevé par la suite, s’il n’y a stipulation contraire, ou s’il n’en est autrement disposé par les lois de finances relatives à cette matière.
Article 961
Le tenancier à enzel a le droit de jouir de l’immeuble concédé dans les mêmes conditions que le propriétaire lui-même ; il peut y élever des constructions, y faire des plantations, le mettre en valeur de toutes les manières, transformer l’état des lieux ; il a la pleine propriété des améliorations par lui accomplies. Tous les produits, tant civils que naturels, de l’immeuble concédé et des améliorations qu’il y a faites lui appartiennent, ainsi que les accroissements et accessions qui peuvent y survenir. Il exerce, en son nom et à partir du jour du contrat, toutes les actions, tant personnelles que réelles, relatives à l’immeuble à lui concédé.
Les droits de l’enzéliste quant aux trésors, mines, minières et gisements, sont régis par des règlements particuliers.
Article 962
Le tenancier ne peut céder ses droits en partie sans le consentement du propriétaire direct. Toute cession partielle accomplie sans le consentement de ce dernier n’aurait aucun effet vis-à-vis de lui.
Article 963
Le tenancier à la faculté d’aliéner à titre onéreux ou gratuit la totalité des droits constitués en sa faveur par le contrat d’enzel.
Le consentement du propriétaire direct n’est pas requis pour la validité de la cession, mais le tenancier est tenu de lui en donner avis par lettre recommandée avec accusé de réception.
Le bailleur peut, s’il a de justes motifs, s’opposer à la cession. Cette opposition doit être formulée dans les soixante jours à partir de la date de l’avis.
Article 964
La notification de la cession au propriétaire direct et le défaut d’opposition de ce dernier dans le délai établi en l’article précédent emportent la subrogation du nouveau tenancier aux droits et aux obligations résultant du contrat d’enzel en faveur et à la charge de son auteur.
Article 965
A défaut de notification, la cession n’a aucun effet à l’égard du propriétaire direct, et le preneur reste personnellement responsable envers ce dernier du montant de l’enzel, ainsi que des autres obligations résultant du contrat, jusqu’au jour de la notification régulière, auquel cas le propriétaire pourra exercer son droit d’opposition. Tant que la notification n’aura pas été faite, le propriétaire pourra diriger son action contre le cédant et le cessionnaire solidairement jusqu’à concurrence de la redevance due et des obligations résultant du contrat d’enzel.
Article 966
La cession faite par le tenancier de son droit de jouissance ne constitue pas, en faveur du cédant, un nouveau droit d’enzel ou autre droit réel sur l’immeuble. Elle ne crée entre les parties qu’un simple droit d’obligation.
Article 967
Le tenancier doit payer exactement sa redevance aux époques fixées par la convention ou par l’usage. Il n’a pas le droit de la retenir, soit à raison des troubles de fait ou de droit dont sa jouissance a été l’objet, soit à raison d’un prétendu défaut de contenance, sauf son recours en garantie, tel que de droit, contre son auteur, toutefois, le tribunal pourra, à raison des circonstances, autoriser le tenancier à consigner la somme due.
Article 968
Lorsque l’objet du contrat est un fonds rural, le tenancier ne peut demander ni la réduction ni la remise de sa redevance sous prétexte qu’il n’a pas joui du fonds pour cause de force majeure ou autre motif.
La destruction partielle du fonds peut, toutefois, donner lieu à une remise proportionnelle de la rente, lorsque cette destruction a une telle importance qu’elle diminue notablement le produit du fonds ou le rend impropre à l’usage auquel il était destiné. Le débirentier peut, dans ce cas, se prévaloir de la faculté qui lui est accordée par l’article 970.
Article 969
S’il y a plusieurs tenanciers, le bailleur à enzel n’a action, contre chacun d’eux, pour le paiement de la redevance, qu’à proportion de sa part de jouissance, à moins que la solidarité n’ait été stipulée.
Toutefois, et même si la solidarité n’a pas été stipulée, le défaut de paiement par un seul débirentier autorise le bailleur à poursuivre la résolution du contrat ou la vente de l’immeuble pour la totalité, et à l’encontre de tous les autres. Ceux-ci peuvent arrêter les poursuites en offrant de payer ce qui est dû au propriétaire direct, jusqu’à la date de leur intervention, sauf leur recours contre leur coobligé.
Ce recours est régi par les dispositions relatives à la gestion d’affaires. (Titre VII, chapitre III).
Article 970
Le tenancier ne peut s’affranchir du paiement de la redevance à l’avenir en abandonnant l’immeuble au bailleur en l’état où il se trouve.
Article 971
Faute par le tenancier de payer la rente pendant deux années consécutives, le propriétaire direct ou crédienzéliste a le choix :
1) de faire prononcer la résolution de l’enzel, le retour de l’immeuble à son propriétaire direct et la condamnation du tenancier au paiement des arrérages échus et non payés.
Dans ce cas, l’immeuble fait retour au propriétaire direct avec toutes ses accessions et améliorations. Toutefois, le propriétaire devra faire état au tenancier à dire d’experts des impenses utiles faites par ce dernier, pourvu :
a) qu’elles soient antérieures à la demande en résolution ;
b) qu’elles soient encore subsistantes au moment où l’immeuble fait retour au propriétaire direct et lui aient été livrées avec l’immeuble. Il n’est point tenu de rembourser les dépenses somptuaires.
2) ou bien de maintenir le contrat et de poursuivre le paiement de ce qui lui est dû sur l’immeuble tenu à enzel. Si le produit de la vente est insuffisant à payer les arrérages et indemnités dus au propriétaire, le tenancier sera personnellement tenu sur ses autres biens de la différence restant due. S’il y a un surplus, le tenancier aura le droit de le répéter entre les mains du propriétaire pour la part afférente à la plus-value par lui donnée au fonds.
Le crédienzéliste a une action directe contre tout détenteur de l’immeuble, et il a privilège sur tous autres créanciers sur le produit de la vente, jusqu’à concurrence des arrérages et indemnités qui lui sont dus.
Article 972
Dans le cas prévu à l’article précédant, le débienzéliste peut toujours arrêter l’effet des poursuites, jusqu’au jugement, en payant ce qui est dû au propriétaire direct jusqu’à la date du paiement, ainsi que les frais de poursuites judiciaires, et en donnant caution ou autre sûreté valable pour deux années à venir.
Les créanciers du débiteur ont également le droit d’intervenir à l’instance pour la conservation de leurs droits, et peuvent arrêter l’effet des poursuites dans les mêmes conditions.
Article 973
Le crédirentier a également le droit de demander la résolution de l’enzel et la dévolution de l’immeuble dans tous les autres cas où le tenancier ne remplit pas les obligations qui lui sont imposées par le contrat, notamment celle d’accomplir des améliorations, lorsque cette clause est exprimée. Si le contrat n’indique pas le délai dans lequel ces améliorations devront être faites, le tribunal pourra accorder un délai raisonnable au tenancier pour les accomplir, à peine de déchéance.
Article 974
En cas de dévolution de l’immeuble au propriétaire direct, les hypothèques constituées par le débirentier se transportent sur l’indemnité qui pourrait être due à ce dernier à raison des améliorations par lui faites.
Article 975
La redevance d’enzel est rachetable. Le rachat de l’enzel est soumis aux dispositions du décret du 22 janvier 1905.
Article 976
L’enzel s’éteint : 1) par la résolution prononcée en justice ; 2) par la résiliation consentie par les parties ; 3) par la confusion ; 4) par la destruction totale du fonds ; 5) par le rachat.
Article 977
La résolution judiciaire n’aura d’effet à l’égard des tiers que si elle est mentionnée en marge du titre constitutif. La résiliation amiable doit également être mentionnée en marge du dit titre ; cette mention doit être enregistrée.
Article 978
Lorsque le contrat d’enzel a été résolu par autorité de justice ou par le consentement des parties, le tenancier n’a plus le droit de se faire restituer contre sa déchéance en offrant de payer les arrérages échus et d’accomplir les autres obligations imposées par le contrat.
Article 979
L’enzel des biens habous est soumis aux dispositions du présent code en tant qu’elles ne sont pas contraires aux décrets spéciaux sur les habous auxquels il n’est rien innové.
Chapitre II
De l’enzel à redevance variable
Article 980 (modifié par la loi n° 57-23 du 25 septembre 1957).
Le kirdar ou enzel à redevance variable est un contrat par lequel le propriétaire d’un bien cède, à perpétuité, le domaine utile au profit d’un tiers et de ses successeurs, n’en conservant que le domaine éminent, à charge par le débikirdariste de servir une redevance perpétuelle.
Tout comme l’enzeliste, le débikirdariste se comporte quant au fonds à lui cédé, en véritable propriétaire sous réserve du paiement de la redevance.
Article 981 (modifié par la loi n° 57-23 du 25 septembre 1957).
Cette redevance, payable par année et d’avance, est susceptible d’être augmentée ou diminuée tous les cinq ans suivant que le bien acquiert par lui-même et indépendamment des travaux exécutés par le preneur, une plus-value ou une moinsvalue, pendant le dit laps de temps, égale ou supérieure au tiers de la valeur antérieure.
Si l’augmentation de valeur provient du fonds lui-même, en ce sens que les terres qui l’entourent étant de même nature ont acquis de la plus-value indépendamment des travaux exécutés par le tenancier, ce dernier est tenu de subir cette augmentation de valeur estimée à dire d’experts avec droit d’appréciation définitive à l’autorité judiciaire en cas de conflit.
Il n’y a pas lieu de recourir à l’estimation de la valeur locative tous les cinq ans, si cette valeur est restée la même qu’à l’époque de sa fixation et si la partie intéressée n’en formule pas la demande.
En cas de lésion, le droit de réclamer la différence de valeur payée en moins se prescrit par cinq ans.
Article 982 (modifié par la loi n° 57-23 du 25 septembre 1957).
La révision sera poursuivie entre les parties désignées à l’article précédent par acte extrajudiciaire comportant l’indication des prétentions du demandeur. Il y sera répondu du même dans les deux mois ; l’adhésion vaudra fixation nouvelle de la redevance.
A défaut d’accord dans le délai imparti, le demandeur devra dans le mois qui suivra l’expiration de ce délai, à peine de forclusion, agir en conciliation devant le Président du Tribunal de Première Instance du lieu de la situation de l’immeuble et éventuellement, dans le mois de l’ordonnance de non-conciliation, au fond devant ledit tribunal.
Pendant toute la durée de la procédure, la redevance continuera d’être payée sur la base du taux ancien, mais en cas de nouvelle estimation, celle-ci sera réputée avoir pris effet à compter du premier du mois suivant la date de l’acte extrajudiciaire notifié par le demandeur à la partie adverse.
Chapitre III
Des locations perpétuelles dites khoulou et naçba
Article 983
Il y a deux espèces de khoulou :
1) le khoulou dit khoulou el meftah ;
2) le khoulou dit naçba.
Section Première
Du khoulou dit khoulou el meftah
Article 984
Le khoulou dit khoulou el meftah est le contrat par lequel le propriétaire d’un immeuble ou l’administrateur d’une fondation pieuse concède à une autre personne le droit d’occuper l’immeuble à titre de locataire perpétuel, à charge par le tenancier de le réparer, de l’entretenir et de payer une redevance déterminée.
Article 985
Le khoulou ne peut être constitué que par convention expresse ; il doit être fait par écrit, en la forme déterminée par l’article 956 et n’est opposable aux tiers que s’il est enregistré.
Les articles 955, 957, 958 et 960 s’appliquent au khoulou.
Article 986
Le tenancier à khoulou ne peut ni imposer des servitudes, ni constituer des hypothèques, ni faire aucun acte de disposition ayant pour objet la propriété. Il n’a sur l’immeuble qu’un simple droit d’occupation héréditaire. Il peut céder ce droit à titre gratuit ou onéreux, l’échanger, le donner en paiement, le constituer en nantissement.
L’aliénation ou la cession du khoulou est réglée par les dispositions des articles 962 à 965.
Article 987
Les réparations de l’immeuble qui fait l’objet du khoulou sont à la charge commune du propriétaire et du tenancier, chacun à proportion de sa part d’intérêt dans l’immeuble.
Article 988
Les impôts et contributions dont la propriété est grevée sont à la charge du propriétaire, sauf les stipulations des parties et les lois spéciales à la perception de ces impôts.
Article 989
Les autres dispositions relatives à l’enzel, et notamment celles des articles 967 à 975 s’appliquent au khoulou.
Article 990
Le khoulou s’éteint dans les cas prévus par l’article 976. Les dispositions des articles 977 et 978 s’appliquent à ce cas. Section II
De la naçba Article 991
La naçba est le droit d’occuper une boutique ou autre lieu destinés à l’industrie ou au commerce moyennant une redevance déterminée et invariable que le preneur s’oblige à payer au propriétaire. Ce droit s’établit en faveur du preneur par l’introduction de son matériel d’exploitation ou de ses instruments de travail (naçba) dans les lieux occupés, et dure tant que le matériel ou les instruments se trouvent dans les lieux.
Article 992
Le propriétaire a le droit de demander la résolution du bail dès que le matériel d’exploitation (naçba) est enlevé ou a été changé sans son autorisation.
Article 993
La naçba est régie par les dispositions relatives au louage de choses dans la mesure où elles sont applicables à ce contrat.
Article 994
Les articles ci-dessus ne s’appliquent qu'aux naçbas antérieures à l’année 1280 de l’hégire.
TITRE V
DU DEPOT ET DU SEQUESTRE
Chapitre Premier
Du dépôt volontaire
Dispositions générales Article 995
Le dépôt est un contrat par lequel une personne remet une chose mobilière à une autre personne qui se charge de garder la chose déposée et de la restituer dans son individualité.
Article 996
Lorsqu’on remet à quelqu’un des choses fongibles, des titres au porteur ou des actions industrielles à titre de dépôt, mais en autorisant le dépositaire à en faire usage, à charge de restituer une quantité égale de choses de mêmes espèces et qualités, le contrat qui se forme est régi par les règles relatives au prêt de consommation.
Article 997
Lorsqu’on remet à quelqu’un sans les fermer et comme dépôt ouvert, une somme en numéraire, des billets de banque ou autres titres faisant office de monnaie, le dépositaire est présumé autorisé, sauf la preuve contraire, à faire usage du dépôt, et il en supporte les risques en cas de perte.
Article 998
Pour faire un dépôt et pour l’accepter, il faut avoir la capacité de s’obliger.
Néanmoins, si une personne capable de s’obliger accepte le dépôt fait par un incapable, elle est tenue de toutes les obligations résultant du dépôt.
Article 999
Si le dépôt a été fait par une personne capable à une personne qui ne l’est pas, le majeur qui a fait le dépôt n’a que l’action en revendication de la chose déposée, si elle existe dans la main du dépositaire ; à défaut, le déposant n’a qu'une action en restitution à concurrence de ce qui a tourné au profit de l’incapable et sauf ce qui est établi pour les cas des délits et quasi-délits des incapables.
Article 1000
Il n’est pas nécessaire, pour la validité du dépôt entre les parties, que le déposant soit propriétaire de la chose déposée ni qu’il la possède à titre légitime.
Article 1001
Le dépôt est parfait par le consentement des parties et par la tradition de la chose.
La tradition s’opère par le seul consentement si la chose se trouvait déjà, à un autre titre, entre les mains du dépositaire.
Article 1002
Néanmoins, la promesse de recevoir un dépôt motivée pour cause de départ du déposant ou pour tout autre motif légitime, constitue une obligation qui peut donner lieu à des dommages, en cas d’inexécution, si le promettant ne justifie que des causes imprévues et légitimes l'empêchent d’accomplir son engagement.
Article 1003 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Le dépôt doit être constaté par écrit, lorsqu’il a une valeur excédant mille dinars, cette règle ne s’applique pas au dépôt nécessaire, le dépôt nécessaire est celui qui a été forcé par un événement fortuit ou de force majeure, tel qu’un incendie, un naufrage ou autre événement, la preuve peut être faite par tous moyens, quelle que soit la valeur de l’objet du dépôt.
Article 1004
Le dépôt est essentiellement gratuit. Toutefois, le dépositaire a droit à un salaire, s’il l’a expressément stipulé, ou s’il était implicitement entendu, d’après les circonstances et l’usage, qu’un salaire lui serait alloué ; cette présomption est de droit lorsque le dépositaire reçoit habituellement des dépôts à paiement.
(Parag. I - Des obligations du dépositaire) Article 1005
Le dépositaire doit veiller à la garde du dépôt, avec la même diligence qu’il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent, sauf ce qui est établi en l’article 1021.
Article 1006
Le dépositaire n’a pas le droit de se substituer une autre personne dans la garde du dépôt, s’il n’y est expressément autorisé, et sauf le cas de nécessité urgente.
Il répond de celui qu’il s’est substitué sans autorisation, à moins qu’il ne prouve que le dépôt aurait également péri s’il était resté entre ses mains. S’il est autorisé à se substituer une autre personne, il ne répond que dans deux cas :
1) s’il a choisi une personne qui n’avait pas les qualités nécessaires pour se charger du dépôt ;
2) si, tout en ayant bien choisi, il a donné ou substitué des instructions qui ont été la cause du dommage.
Le déposant a une action directe contre le dépositaire substitué dans tous les cas où il l’aurait contre le dépositaire lui-même, sans préjudice de son recours contre ce dernier.
Article 1007
Le dépositaire répond de la perte ou de la détérioration de la chose même si elles sont survenues par force majeure ou cas fortuit, lorsqu’il fait usage ou dispose du dépôt, sans l’autorisation du déposant, par exemple lorsqu’il prête la chose, lorsqu’il se sert de la monture qu’on lui a confiée, etc. Il répond de même du cas fortuit et de la force majeure s’il fait commerce de la chose, mais dans ce cas il jouit du bénéfice qu’il peut retirer du dépôt. S’il ne fait usage ou ne dispose que d’une partie du dépôt, il n’est tenu que pour la partie dont il s’est servi.
Article 1008
Il ne peut obliger le déposant à reprendre la chose avant le terme convenu, à moins de motifs graves.
D’autre part, il doit restituer le dépôt au déposant aussitôt que celui-ci le réclame, lors même que le contrat aurait fixé une date déterminée pour la restitution.
Article 1009
Le dépositaire est constitué en demeure, par le seul fait de son retard à restituer la chose, dès qu’il en est requis par le déposant, à moins de motifs légitimes de retard. Cependant, lorsque le dépôt a été fait aussi dans l’intérêt d’un tiers, le dépositaire ne peut le restituer sans l’autorisation de ce dernier.
Article 1010
Si aucun terme n’a été fixé, le dépositaire peut restituer le dépôt à tout moment, pourvu que ce ne soit pas à contretemps, et qu’il accorde au déposant un délai suffisant pour retirer le dépôt ou pourvoir à ce que les circonstances exigent.
Article 1011
Le dépôt doit être restitué dans le lieu du contrat. Si le contrat désigne un autre lieu pour la restitution du dépôt, le dépositaire est tenu de le restituer dans le lieu indiqué ; les frais du transport et de la restitution sont à la charge du déposant.
Article 1012
Le dépositaire doit restituer le dépôt au déposant, ou à celui au nom duquel le dépôt a été fait, ou à la personne indiquée pour le recevoir. Il ne peut pas exiger que le déposant justifie qu’il était propriétaire de la chose déposée.
La personne indiquée pour recevoir le dépôt a une action directe contre le dépositaire pour le contraindre à exécuter son mandat.
Article 1013
Si le dépôt a été fait par un incapable ou par un insolvable judiciairement déclaré, il ne peut être restitué qu’à celui qui le représente légalement, même si l’incapacité ou l’insolvabilité est postérieure à la constitution du dépôt.
Article 1014
En cas de mort du déposant, la chose déposée ne peut être restituée qu’à son héritier ou à son représentant légal.
S’il y a plusieurs héritiers, le dépositaire pourra, à son choix, en référer au tribunal et se conformer à ce qu’il lui sera ordonné par ce dernier, afin de dégager sa responsabilité, ou bien restituer le dépôt à chacun des héritiers pour sa part et portion, auquel cas le dépositaire demeure responsable. Si la chose est indivisible, les héritiers devront s’accorder entre eux pour la recevoir. S’il y a parmi eux des mineurs ou des non-présents, le dépôt ne peut être restitué qu’avec l’autorisation du tribunal. Faute par les héritiers de s’entendre ou d’obtenir l’autorisation, le dépositaire sera libéré en consignant la chose dans les formes de la loi. Il pourra aussi y être contraint par le tribunal à la demande de tout intéressé.
Lorsque l’hérédité est insolvable, et lorsqu’il y a des légataires, le dépositaire devra toujours en référer au tribunal.
Article 1015
La règle de l’article ci-dessus s’applique au cas où le dépôt a été fait par plusieurs personnes conjointement, s’il n’a été expressément convenu que le dépôt pourrait être restitué à l’un d’eux ou à tous.
Article 1016
Si le dépôt a été fait par un tuteur ou un administrateur, en cette qualité, et qu'il n’a plus cette qualité au moment de la restitution, le dépôt ne pourra être restitué qu’à la personne qu’il représentait, si elle a capacité de recevoir ou à celui qui a succédé au tuteur ou à l’administrateur.
Article 1017
Le dépositaire doit restituer la chose au déposant, alors même qu’un tiers prétendrait y avoir droit, à moins qu’elle n’ait été saisie et revendiquée judiciairement contre lui. Il est tenu, dans ce cas, de donner immédiatement avis au déposant de ces faits, et doit être mis hors d’instance dès qu’il a justifié de sa qualité de simple dépositaire.
Si la contestation se prolonge au-delà du terme fixé pour le dépôt, il peut se faire autoriser à consigner la chose pour le compte de qui de droit.
Article 1018
Le dépositaire doit restituer identiquement la chose même qu’il a reçue, ainsi que les accessoires qui lui ont été remis avec elle, dans l’état où elle se trouve, sauf ce qui est établi aux articles 1022 et 1023.
Article 1019
Le dépositaire doit restituer, avec le dépôt, tous les fruits civils et naturels qu’il a perçus.
Article 1020
Il répond de la perte ou de la détérioration de la chose causées par son fait ou sa négligence.
Il répond aussi du défaut des précautions dont l’observation est stipulée par le contrat. Toute stipulation contraire est sans effet.
Article 1021
Le dépositaire répond même de toute cause de perte ou de dommage contre laquelle il était possible de se prémunir :
1) quand il reçoit un salaire pour la garde du dépôt ; 2) quand il reçoit des dépôts par état ou en vertu de ses fonctions.
Article 1022
Le dépositaire ne répond pas :
1) de la perte ou de la détérioration causées par la nature ou le vice des choses déposées ou par la négligence du déposant ;
2) des cas de force majeure ou des cas fortuits, à moins qu’il ne soit déjà en demeure de restituer de dépôt, ou que la force majeure ne soit occasionnée par sa faute ou par celle des personnes dont il doit répondre. La preuve de la force majeure ou du vice des choses déposées est à sa charge, lorsqu’il reçoit un salaire pour le dépôt ou lorsqu’il a reçu le dépôt par état ou en vertu de ses fonctions.
Article 1023
Est nulle toute convention qui chargerait le dépositaire des cas fortuits ou de force majeure, sauf le cas prévu aux articles 996 et 997 et celui où le dépositaire reçoit un salaire. Cette dernière disposition n’a lieu qu’entre non-musulmans.
Article 1024
Le dépositaire, auquel la chose a été enlevée par une force majeure, et qui a reçu une somme ou quelque chose à la place, doit restituer ce qu’il a reçu.
Article 1025
Lorsque l’héritier du dépositaire a, de bonne foi, aliéné la chose à titre gratuit ou onéreux, le déposant a le droit de la revendiquer entre les mains de l’acquéreur, à moins qu’il ne préfère exercer son recours pour la valeur de la chose contre l’héritier qui l’a aliénée. L’héritier sera tenu, en outre, des dommages s’il était de mauvaise foi.
Article 1026
S’il y a plusieurs dépositaires, ils sont solidaires entre eux, quant aux obligations et aux droits naissant du dépôt, d’après les règles établies pour le mandat, sauf stipulation contraire.
Article 1027
Le dépositaire est cru sur son serment, soit pour le fait même du dépôt, soit pour la chose qui en faisait l’objet, soit pour sa restitution au propriétaire ou à celui qui avait droit de la retirer. Cette disposition n’a pas lieu lorsque le dépôt est justifié par écrit authentique ou par acte sous seing privé.
Est nulle toute stipulation qui affranchirait le dépositaire du serment, dans les cas précités.
Le dépositaire ne pourrait invoquer les dispositions ci-dessus, s’il avait abusé du dépôt ou l’avait détourné à son profit.
(Parag. II - Des obligations du déposant) Article 1028
Le déposant est tenu de rembourser au dépositaire les impenses nécessaires qu’il a faites pour la conservation de la chose déposée, et de lui payer le salaire convenu, ou celui fixé par la coutume, s’il y a lieu. Il doit aussi l’indemniser des dommages que le dépôt peut lui avoir causés. Quant aux dépenses utiles, il n’est tenu de les rembourser que dans les cas et d’après les dispositions établies pour la gestion d’affaires.
Il ne doit aucune indemnité pour les dommages éprouvés par le dépositaire :
1) lorsqu'ils sont occasionnés par la faute de ce dernier ;
2) lorsque celui-ci, bien que dûment averti, n'a pas pris les précautions nécessaires afin d'éviter le dommage.
Article 1029
Lorsqu'il y a plusieurs déposants, ils sont tenus envers le dépositaire à proportion de leur intérêt dans le dépôt, sauf stipulation contraire.
Article 1030
Si le contrat de dépôt a pris fin avant le délai fixé, le dépositaire n'a droit à la rétribution convenue qu’à proportion du temps où il a eu la garde du dépôt, s’il n’en est autrement convenu.
Article 1031
Le dépositaire n'a le droit de retenir le dépôt qu'à raison des dépenses nécessaires qu'il a faites pour le conserver ; il n'a le droit de rétention à aucun autre titre.
(Parag. III - Des entrepreneurs de dépôts ou entreposeurs)
Article 1032
L'entrepreneur de dépôt ou entreposeur est celui qui se charge par profession de recevoir en dépôt des objets mobiliers et de veiller à leur conservation.
Article 1033
L'entreprise de dépôt est soumise aux règles générales du dépôt salarié, et aux dispositions suivantes.
Article 1034
Lorsque les choses entreposées menacent de dépérir ou de s'altérer, l'entreposeur doit en informer immédiatement le déposant à peine des dommages.
Article 1035
L'entreposeur doit permettre au déposant, pendant les heures des affaires, de visiter la marchandise, d'en prendre les échantillons et de faire ce qui est nécessaire pour la conservation de la chose, pour autant qu'il n'y est pas obligé lui-même.
Article 1036
Si le dépôt consiste en choses fongibles, l'entrepreneur ou entreposeur ne peut les mélanger avec d'autres choses de la même espèce, s'il n'y est expressément autorisé.
Dans ce dernier cas, la masse qui résulte de la confusion ne passe pas en la propriété de l'entreposeur, mais celui-ci est autorisé à livrer à chacun des déposants la quantité qui lui appartient, sans le consentement des autres déposants. Cependant, lorsque le dépôt consiste en choses fongibles qui peuvent être facilement distinguées les unes des autres (par exemple des monnaies de différentes espèces) ou bien qui peuvent se substituer les unes aux autres (par exemple des monnaies de même espèce), le dépositaire peut les mélanger sans autorisation.
Article 1037
Le déposant est tenu de payer à l'entreposeur le prix de magasinage ou d'entrepôt et de lui rembourser ses avances et déboursés pour les transports, droits de douane et autres dépenses nécessaires relatives à l'objet du dépôt.
Les avances et déboursés faits par l'entreposeur sont exigibles sans délai.
Le prix de magasinage ou d'entrepôt est dû à la date fixée par la convention ou
par l'usage ou lors du retirement de la marchandise, si elle est retirée avant ce délai.
Si la marchandise est retirée en partie, l'entreposeur a droit, au moment du retirement, à une partie correspondante du magasinage.
Le tout, sauf convention contraire.
Article 1038
L'entreposeur a un droit de rétention sur les choses entreposées pour le remboursement de ses avances.
Article 1039
Les certificats de dépôt ou récépissés délivrés par l'entreposeur peuvent être transférés par endossement lorsqu'ils portent la clause à l'ordre. Lorsqu'ils sont au porteur, l'entreposeur n'est tenu de reconnaître que celui qui lui présente le titre par lui signé, sauf ce qui est établi pour le cas des titres perdus ou volés.
Article 1040
Lorsque le récépissé est nominatif et ne porte point de clause à lordre, le transfert du dépôt ne s'opère que par l'autorisation expresse du premier déposant, et à partir du moment où le dépositaire s'est obligé envers le nouvel ayant droit à garder les marchandises pour son compte.
Article 1041
L'entrepreneur de dépôt est obligé de tenir un registre coté et paraphé par l'autorité judiciaire locale ; il doit inscrire sur ce registre la nature et la quantité des marchandises entreposées et toutes autres indications qui seraient nécessaires d'après les usages du commerce afin d'en constater l'identité.
Article 1042
L'entreposeur est tenu de retirer le récépissé de dépôt ou de l'annuler, au moment où il livre la marchandise ; il inscrira ce retrait sur un livre spécial à ce destiné, et qui devra être tenu au courant jour par jour. En cas de retrait partiel du dépôt, la quantité retirée devra être annotée sur le récépissé et sur le registre.
Chapitre II
Du séquestre
Article 1043
Le dépôt d'une chose litigieuse entre les mains d'un tiers s'appelle séquestre ; il peut avoir pour objet des meubles ou des immeubles ; il est régi par les règles du dépôt volontaire et par les dispositions du présent chapitre.
Article 1044
Il peut être fait, du consentement des parties intéressées, à une personne dont elles sont convenues entre elles, ou ordonné par le juge, dans les cas déterminés par la loi de procédure.
Article 1045
Le séquestre peut n’être pas gratuit.
Article 1046
Le tiers dépositaire a la garde et l’administration de la chose ; il est tenu de lui faire rendre tout ce qu’elle est capable de produire.
Article 1047
Il ne peut faire aucun acte d’aliénation ni de disposition, sauf ceux qui sont nécessaires dans l’intérêt des choses séquestrées.
Article 1048
Lorsque le séquestre a pour objet des choses sujettes à détérioration, la vente de ces choses peut être autorisée par le juge, avec les formalités requises pour la vente du gage ; le séquestre portera sur le produit de la vente.
Article 1049
Le tiers dépositaire est tenu de restituer la chose sans délai à celui qui lui sera indiqué par les parties, ou par justice. Il est tenu, quant à cette restitution, des mêmes obligations que le dépositaire salarié.
Article 1050
Il répond de la force majeure et du cas fortuit, s'il est en demeure de restituer la chose, si, étant partie au procès, il a accepté d'être constitué gardien provisoire, ou si la force majeure a été occasionnée par son fait, sa faute ou par le fait ou la faute des personnes dont il doit répondre.
Article 1051
Il doit présenter un compte exact de tout ce qu'il a reçu et dépensé, en produire les justifications et en représenter le montant ; lorsque le séquestre n'est pas gratuit, il répond de toute faute commise dans sa gestion, d'après les règles établies pour le mandat.
Article 1052
S'il y a plusieurs séquestres, la solidarité entre eux est de droit, d'après les règles établies pour le mandat.
Article 1053
La partie à laquelle la chose est restituée doit faire raison au tiers dépositaire des dépenses nécessaires et utiles, faites de bonne foi et sans excès, ainsi que des honoraires convenus, ou fixés par le juge. Lorsque le dépôt est volontaire, le tiers dépositaire a action contre tous les déposants, pour le remboursement des dépenses et des honoraires, proportionnellement à leur intérêt dans l'affaire.
TITRE VI
DU PRET Article 1054
Il y a deux espèces de prêt : le prêt à usage ou commodat (âria) et le prêt de consommation (kardh ou salaf).
Chapitre Premier
Du prêt à usage ou commodat (âria)
Article 1055
Le prêt à usage, ou commodat, est un contrat par lequel l'une des parties remet une chose à l'autre partie pour s'en servir pendant un temps, ou pour un usage déterminé, à charge par l'emprunteur de restituer la chose même. Dans le commodat, le prêteur conserve la propriété et la possession juridique des choses prêtées ; l'emprunteur n'en a que l'usage.
Article 1056
Pour donner une chose à commodat, il faut avoir la capacité d'en disposer à titre gratuit.
Les tuteurs, curateurs et administrateurs de la chose d'autrui ne peuvent prêter à usage les choses qu'ils sont chargés d'administrer.
Article 1057
Le prêt à usage peut avoir pour objet des choses mobilières ou immobilières.
Article 1058
Le prêt à usage est parfait par le consentement des parties et par la tradition de la chose à l'emprunteur.
Article 1059
Cependant, la promesse de prêt faite pour une cause connue du promettant constitue une obligation qui peut se résoudre en dommages-intérêts, en cas d'inexécution de la part du prêteur, si ce dernier ne prouve qu'un besoin imprévu l'a empêché d'exécuter son obligation, ou que les conditions financières de l'emprunteur ont notablement empiré depuis que l'engagement a été pris.
Article 1060
Le prêt à usage est essentiellement gratuit.
Article 1061
L'emprunteur est tenu de veiller avec diligence à la conservation de la chose prêtée. Il ne peut en confier la garde à une autre personne, à moins de nécessité urgente ; il répond, en cas de contravention, du cas fortuit et de la force majeure.
Article 1062
L'emprunteur ne peut se servir de la chose prêtée que de la manière et dans la mesure déterminées par le contrat ou par l'usage, d'après sa nature.
Article 1063
L'emprunteur peut se servir de la chose lui-même, la prêter ou en céder gratuitement l'usage à un autre, à moins que le prêt n'ait été fait en considération de sa personne, ou pour un usage spécialement déterminé.
Article 1064
L'emprunteur ne peut ni louer, ni donner en gage la chose prêtée, ni en disposer sans la permission du prêteur.
Article 1065
L'emprunteur doit restituer, à l'expiration du temps convenu, identiquement la chose même qu'il a reçue, avec toutes ses accessions et accroissements depuis le prêt; il ne peut être contraint à la restituer avant le temps convenu.
Article 1066
Si le prêt a été fait sans détermination d'époque, l'emprunteur ne doit restituer la chose qu'après s'en être servi suivant la destination convenue ou suivant l'usage.
Lorsque le prêt a été fait sans détermination de but, le prêteur peut réclamer la restitution de la chose à tout moment, s'il n'y a usage contraire.
Article 1067
Néanmoins, le prêteur pourra obliger l'emprunteur à restituer la chose même avant le temps ou l'usage convenu :
1) s'il a lui-même un besoin imprévu et urgent de la chose ;
2) si l'emprunteur en abuse, ou s'en sert pour un usage différent de celui prévu par le contrat ;
3) s'il néglige de donner à la chose les soins qu'elle exige.
Article 1068
Lorsque l'emprunteur a cédé l'usage de la chose ou en a autrement disposé en faveur d'une autre personne, le prêteur a une action directe contre ce dernier dans le même cas où il l'aurait contre l'emprunteur.
Article 1069
L'emprunteur doit restituer la chose dans le lieu où elle lui a été remise, sauf clause contraire.
Article 1070
Les frais de réception et de restitution du prêt sont à la charge de l'emprunteur. Sont également à sa charge :
1) les frais d'entretien ordinaires ;
2) ceux nécessaires pour l'usage de la chose.
Article 1071
Cependant, l'emprunteur a le droit de répéter les dépenses urgentes et extraordinaires qu'il a dû faire pour la chose avant d'avoir pu en donner avis au prêteur. Il a, de ce chef, un droit de rétention sur la chose prêtée. Cependant, lorsqu'il est en demeure de restituer la chose, il ne peut répéter les frais déboursés pendant le temps de sa demeure.
Article 1072
En dehors des cas prévus aux articles précédents, le commodataire n'a point le droit de retenir la chose prêtée à raison de ses créances contre le prêteur.
Article 1073
Lorsque le commodat n'est point prouvé par acte authentique ou sous seing privé, l'affirmation de l'emprunteur fait foi, à charge de serment, quant à la restitution de la chose prêtée. Il peut se dispenser du serment en faisant la preuve de la restitution. Si le commodat est prouvé par écriture sous seing privé ou par acte authentique, l'emprunteur n'est libéré que par une preuve écrite.
Article 1074
L'emprunteur ne répond pas de la perte ou de la détérioration de la chose prêtée, résultant de l'usage qu'il en a fait, lorsque cet usage est normal ou conforme à la convention des parties ; si le prêteur prétend que l'emprunteur a abusé de la chose, il doit en fournir la preuve.
Article 1075
L'emprunteur répond de la détérioration et de la perte de la chose prêtée, survenues par cas fortuit ou force majeure, lorsqu'il abuse de la chose prêtée et notamment :
1) s'il emploie la chose à un usage différent de celui déterminé par sa nature ou par la convention ;
2) s'il est en demeure de la restituer ;
3) s'il a négligé les précautions nécessaires pour la conservation de la chose ou s'il dispose de la chose en faveur d'un tiers sans la permission du prêteur, lorsque le prêt a été fait en considération de la personne.
Article 1076
Toute stipulation qui chargerait l'emprunteur des cas fortuits est nulle.
Est nulle également, la stipulation par laquelle l'emprunteur stipulerait d'avance qu'il ne répondra pas de son fait ou de sa faute.
Article 1077
L'emprunteur a une action en dommages contre le prêteur :
1) lorsque la chose a été évincée par un tiers pendant qu'il s'en servait ;
2) lorsque la chose prêtée avait des défauts tels qu'il en résulte un préjudice pour celui qui s'en sert.
Article 1078
Toutefois, le prêteur n'est pas responsable : 1) lorsqu'il ignorait la cause de l'éviction ou les vices cachés de la chose ; 2) lorsque les vices ou les risques étaient tellement apparents que l'emprunteur
eût pu facilement les connaître ;
3) lorsqu'il a prévenu l'emprunteur de l'existence de ces défauts ou de ces dangers, ou des risques de l'éviction ;
4) lorsque le dommage a été occasionné exclusivement par le fait ou la faute de l'emprunteur.
Article 1079
Le prêt à usage se résout par la mort de l'emprunteur, mais les obligations qui en résultent se transmettent à sa succession. Ses héritiers répondent personnellement des obligations qui résultent de leur fait et relatives à la chose prêtée.
Article 1080
Les actions du prêteur contre l'emprunteur, et de ce dernier contre le prêteur, à raison des articles 1061, 1062, 1064, 1066, 1071 et 1077 se prescrivent par six mois ; ce délai commence, pour le prêteur, à partir du moment où la chose lui est restituée, et pour l'emprunteur, du moment où le contrat a pris fin.
Chapitre II
Du prêt de consommation (kardh) Article 1081
Le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties remet à une autre des choses qui se consomment par l'usage, ou d'autres choses mobilières, pour s'en servir, à charge par l'emprunteur de lui en restituer autant de même espèce et qualité, à l'expiration du délai convenu.
Article 1082
Le prêt de consommation se contracte aussi lorsque celui qui est créancier d'une somme en numéraire, ou d'une quantité de choses fongibles, à raison d'un dépôt ou à d'autres titres, autorise le débiteur à retenir, à titre de prêt, la somme ou quantité qu'il doit. Dans ce cas, le contrat est parfait dès que les parties sont convenues des clauses essentielles du prêt.
Article 1083
Pour prêter il faut avoir la capacité d'aliéner les choses qui font l'objet du prêt.
Le père ne peut, sans l'autorisation du juge, prêter, ni emprunter lui-même les capitaux du fils dont il a la garde. Le juge devra prescrire dans ce cas toutes les garanties qui lui paraîtront nécessaires afin de sauvegarder complètement les intérêts du mineur. La même règle s'applique au tuteur, au curateur, à l'administrateur d'une personne morale, en ce qui concerne les capitaux ou valeurs appartenant aux personnes dont ils administrent les biens.
Article 1084
Le prêt de consommation peut avoir pour objet :
a) des choses mobilières, telles que des animaux, des étoffes, des meubles meublants ;
b) des choses qui se consomment par l'usage, telles que des denrées, du numéraire.
Article 1085
Lorsque, au lieu de la valeur stipulée en numéraire, l'emprunteur reçoit des titres de rente ou d'autres valeurs ou des marchandises, la somme prêtée sera calculée au cours ou prix de marché des titres ou marchandises, au temps et au lieu de la livraison.
Toute stipulation contraire est nulle.
Article 1086
Le prêt de consommation transmet la propriété des choses ou valeurs prêtées à l'emprunteur, à partir du moment où le contrat est parfait, par le consentement des parties et même avant la tradition des choses prêtées.
Article 1087
L'emprunteur a les risques de la chose prêtée à partir du moment où le contrat est parfait, et avant même qu’elle lui soit livrée, à moins de stipulation contraire.
Article 1088
Néanmoins, le prêteur a le droit de retenir par devers lui le prêt, lorsque, depuis le contrat, les affaires de l’autre partie ont tellement empiré, que le prêteur se trouve en danger de perdre tout ou partie de son capital. Il a ce droit de rétention quand même le mauvais état des affaires de l’emprunteur remontrait à une époque antérieure au contrat, si le prêteur n’en a eu connaissance qu’après.
Article 1089
Le prêteur répond des vices cachés et de l’éviction des choses prêtées, d’après les règles établies au titre de la vente.
Article 1090
L’emprunteur doit rendre une chose semblable en quantité et qualité à celle qu’il a reçue, et ne doit que cela.
Article 1091
L’emprunteur ne peut être contraint à restituer ce qu’il doit avant le terme établi par le contrat ou par l’usage ; il peut le restituer avant l’échéance, à moins que la restitution avant le terme ne soit contraire à l’intérêt du créancier.
Article 1092
Si aucun terme n’a été fixé, l’emprunteur doit payer à toute requête du prêteur.
S’il a été stipulé que l’emprunteur rendrait la quantité prêtée quand il pourrait, ou sur les premiers fonds dont il pourra disposer, le tribunal fixera un délai raisonnable, d’après les circonstances, pour la restitution.
Article 1093
L’emprunteur est tenu de restituer les choses prêtées au lieu même où le prêt a été conclu, sauf convention contraire.
Article 1094
Les frais de réception et de restitution des choses prêtées sont à la charge de l’emprunteur.
Chapitre III
Du prêt à intérêts
Article 1095 (abrogé par la loi n° 59-148 du 7 novembre 1959).
Article 1096 (modifié par la loi n° 59-148 du 7 novembre 1959).
Entre non-commerçants, les intérêts ne sont dus que s’ils ont été stipulés par écrit.
Cette stipulation est présumée lorsque les contractants sont commerçants.
Article 1097
Les intérêts des sommes portées en compte courant sont dus de plein droit par celle des parties au débit de laquelle elles figurent, à partir du jour des avances constatées.
Article 1098 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Les intérêts ne peuvent être calculés que sur la taxe d’une année entière. En matière commerciale, ils peuvent être calculés au mois. Les intérêts non payés seront capitalisés avec la somme principale
conformément aux dispositions prescrites à l’article suivant.
Article 1099 (modifié par la loi n° 2000-57 du 13 juin 2000).
Les intérêts non payés peuvent être capitalisés avec la somme principale et seront productifs d’intérêts si les parties l’ont prévu par écrit.
En matière civile, les intérêts non payés prévus à l’alinéa précédent ne peuvent être capitalisés avec la somme principale qu’à la fin de chaque année et à condition que le défaut de paiement n’est pas dû au créancier.
En matière commerciale, les intérêts arrivés à échéance et non payés sont capitalisés avec la somme principale et produisent des intérêts du jour de l’échéance selon les prescriptions du premier paragraphe à condition que le retard du paiement n’est pas dû au créancier.
Contrairement aux dispositions du premier paragraphe et en matière de compte courant les intérêts non payés sont capitalisés avec la somme principale et seront productifs eux mêmes d’intérêts tout en respectant les délais qu’exige l’usage et ce jusqu’à la clôture du compte à moins qu’il n’y ait une stipulation contraire.
Article 1100 (modifié par la loi n° 83-14 du 15 février 1983).
Lorsque les parties n’ont pas déterminé le taux des intérêts, le taux de l’intérêt légal qui s’applique est le suivant :
1) en matière civile, il est calculé à raison de 7 % l’an ;
2) en matière commerciale, il est égal aux taux maximum des découverts bancaires, fixé par la Banque Centrale, majoré d’un demi point.
Article 1101 (modifié par la loi n° 83-14 du 15 février 1983).
Lorsque les intérêts stipulés dépassent les taux ci-dessus établis, le débiteur aura toujours le droit de rembourser le capital après une année de la date du contrat, toute clause contraire est sans effet. Il devra toutefois prévenir le créancier deux mois à l’avance, et par écrit, de son intention de payer. Cet avis emportera de plein droit renonciation au terme le plus long qui aurait été convenu.
Le présent article ne s’applique pas aux dettes contractées par l’Etat, les communes et autres personnes morales, dans les formes établies par la loi.
Article 1102
La disposition de l’article 1101 s’applique tant au cas où les intérêts ont été stipulés directement, qu’à celui où la stipulation d’intérêts prend la forme d’antichrèse, de contrat pignoratif, de retenue sur le capital au moment du prêt, de commission prise en sus des intérêts.
Article 1103
Celui qui, abusant des besoins, de la faiblesse d’esprit ou de l’inexpérience d’une autre personne, se fait promettre, pour consentir un prêt ou le renouveler à l’échéance, des intérêts ou autres avantages qui excèdent notablement le taux normal de l’intérêt, et la valeur du service rendu, selon les lieux et les circonstances de l’affaire, sera l’objet de poursuites pénales. Les clauses et conventions passées en contravention du présent article pourront être annulées, à la requête de la partie et même d’office, le taux stipulé pourra être réduit, et le débiteur pourra répéter, comme indû, ce qu’il lui aurait payé au-dessus du taux qui sera fixé par le tribunal. S’il y a plusieurs créanciers, ils seront tenus solidairement.
TITRE VII
DU MANDAT
Chapitre Premier
Du mandat en général
Article 1104
Le mandat est un contrat par lequel une personne charge une autre d’accomplir un acte licite pour le compte du commettant. Le mandat peut être donné aussi dans l’intérêt du mandant et du mandataire, ou dans celui du mandant et d’un tiers, et même exclusivement dans l’intérêt d’un tiers.
Article 1105
Pour donner mandat, il faut être capable de faire par soi-même l’acte qui en est l’objet. La même capacité n’est pas requise chez le mandataire ; il suffit que celui-ci soit doué de discernement et de ses facultés mentales, quoiqu’il n’ait pas la capacité d’accomplir l’acte pour lui-même. Il peut valablement faire au nom d’autrui ce qu’il ne pourrait accomplir en son propre nom.
Article 1106
Le mandat de représenter une maison ou raison de commerce ne peut être donné que par le titulaire du fonds de commerce ou par son représentant à ce dûment autorisé.
Article 1107
Le mandat est nul : a) s’il a un objet impossible, ou trop indéterminé ; b) s’il a pour objet des actes contraires à l’ordre public, aux bonnes mœurs, ou
aux lois civiles ou religieuses.
Article 1108
Le mandat est non avenu s’il a pour objet un acte que nul ne peut accomplir par procureur, tel que celui de prêter serment.
Article 1109
Le mandat est parfait par le consentement des parties.
La commission donnée par le mandant peut être expresse ou tacite, sauf les cas où la loi prescrit une forme spéciale.
L’acceptation du mandataire peut être également tacite et résulter du fait de l’exécution, sauf les cas où la loi prescrit une acceptation expresse.
Article 1110
Cependant, les gens de service ne sont pas présumés avoir mandat d’acheter à crédit les provisions et fournitures nécessaires au ménage, s’il n’est justifié qu’il est
dans l’habitude du maître d’acheter à crédit.
Article 1111
Lorsque l’offre de mandat est faite à celui qui, de son état, se charge des services faisant l’objet de la commission, il est réputé avoir accepté s’il n’a notifié son refus au mandant aussitôt après la réception de l’offre. Il doit, malgré son refus, prendre les mesures qui sont requises d’urgence par l’intérêt du commettant ; lorsque des marchandises lui ont été expédiées, il doit les faire déposer en lieu sûr, et prendre les mesures nécessaires à leur conservation, aux frais du proposant, jusqu’au moment où ce dernier aura pu pourvoir lui-même. S’il y a péril en la demeure, il devra faire vendre les choses expédiées, par l’entremise de l’autorité judiciaire, après en avoir fait constater l’état.
Article 1112
Lorsque le mandat est donné par lettre, par messager ou par télégramme, le contrat est censé conclu dans le lieu où réside le mandataire, lorsque celui-ci accepte purement et simplement.
Article 1113
Le mandat peut être donné en une forme différente de celle qui est requise pour l’acte qui en est l’objet.
Article 1114
Le mandat est gratuit, à moins de convention contraire. Cependant, la gratuité n’est pas présumée :
1) lorsque le mandataire se charge par état ou profession des services qui font l’objet du mandat ;
2) entre commerçants pour affaires de commerce ;
3) lorsque, d’après l’usage, les actes qui font l’objet du mandat sont rétribués.
Article 1115
Le mandat peut être donné sous condition, à partir d’un terme déterminé, ou jusqu’à un certain terme.
Chapitre II
Des effets du mandat
Section Première
Des effets du mandat entre les parties
(Parag. A – Des pouvoirs et des obligations du mandataire)
Article 1116
Le mandat peut être spécial ou général.
Article 1117
Le mandat spécial est celui qui est donné pour une ou plusieurs affaires déterminées, ou qui ne confère que des pouvoirs spéciaux.
Il ne donne pouvoir d’agir que dans les affaires ou pour les actes qu’il spécifie, et leurs suites nécessaires, selon la nature de l’affaire et l’usage.
Article 1118
Le mandat d’ester en justice est un mandat spécial ; il est régi par les dispositions de la présente loi. Il ne donne pouvoir d’agir que pour les actes qu’il spécifie, et ne confère pas, notamment, le pouvoir de recevoir un paiement, de passer des aveux, de reconnaître une dette, de transiger, si ces pouvoirs ne sont exprimés. Il doit être fait par acte authentique. Cependant, le mandataire, s’il est autorisé de par la loi et porteur des pièces d’un plaideur, est présumé avoir reçu mandat de le représenter en justice pour l’affaire à laquelle lesdites pièces se rapportent - et ce, même s’il ne produit pas la procuration y afférent.
Article 1119
Le mandat général est celui qui donne au mandataire le pouvoir de gérer tous les intérêts du mandant sans limiter ses pouvoirs, ou qui confère des pouvoirs généraux sans limitation dans une affaire déterminée.
Il donne le pouvoir de faire tout ce qui est dans l’intérêt du mandant, selon la nature de l’affaire et l’usage du commerce, et notamment de recouvrer ce est dû au mandant, de payer ses dettes, de faire tous actes conservatoires, d’intenter des actions possessoires, d’assigner ses débiteurs en justice, et même de contracter des obligations dans la mesure qui est nécessaire pour l’accomplissement des affaires dont le mandataire est chargé.
Article 1120
Quelle que soit l’étendue de ses pouvoirs, le mandataire ne peut, sans l’autorisation expresse du mandant, déférer serment décisoire, faire un aveu judiciaire, défendre au fond en justice, acquiescer à un jugement ou s’en désister, compromettre ou transiger, faire une remise de dette, aliéner un immeuble ou un droit immobilier, constituer une hypothèque ou un gage, radier une hypothèque ou renoncer à une garantie, si ce n’est contre paiement, faire une libéralité, acquérir ou aliéner un fonds de commerce ou le mettre en liquidation, contracter société ou communauté, le tout, sauf les cas expressément exceptés par la loi.
Article 1121
Le mandataire est tenu d’exécuter exactement la commission qui lui a été donnée ; il ne peut rien faire au-delà, ni en dehors de son mandat.
Article 1122
Les opérations faites par le mandataire au-delà de son mandat, ou contrairement aux instructions de son mandant, restent pour son compte pour tout ce qui dépasse ses pouvoirs ; et, par suite :
1) s’il a vendu pour un prix inférieur à celui fixé, ou à défaut de détermination, au-dessous du prix courant, il doit payer au commettant la différence, s’il ne prouve que la vente audit prix était impossible, et qu’en vendant comme il l’a fait, il a empêché le commettant de subir un préjudice ;
2) s’il a acheté pour un prix supérieur, le commettant peut désavouer l’opération et la laisser pour le compte du mandataire, si celui-ci n’offre de supporter la différence du prix, ou si la différence n’est pas de celles tolérées dans le commerce ;
3) si la chose achetée ne répond pas à la qualité que le mandataire était chargé d’acheter, le commettant peut la refuser ;
4) si la quantité achetée est supérieure à celle indiquée, le commettant n’est tenu qu’à concurrence de la quantité qu’il a indiquée ;
5) s’il a acheté au comptant ce qu’il était chargé d’acheter à terme, le commettant peut refuser l’affaire.
Article 1123
Si le mandataire a pu réaliser l’affaire dont il est chargé dans des conditions plus avantageuses que celles exprimées dans son mandat, la différence est à l’avantage du mandant.
Article 1124
En cas de doute sur l’étendue ou les clauses des pouvoirs conférés au mandataire, le dire du mandant fait foi, à charge de serment.
Article 1125
Lorsque plusieurs mandataires sont nommés par le même acte et pour la même affaire, ils ne peuvent agir séparément, s’ils n’y sont expressément autorisés ; un seul ne peut accomplir aucun acte de gestion en l’absence de l’autre, alors même que celui-ci serait dans l’impossibilité d’y concourir.
Cette règle n’a pas lieu :
1) lorsqu’il s’agit de défendre en justice, de resituer un dépôt, de payer une dette liquide et exigible, de prendre une mesure conservatoire dans l’intérêt du
mandant, ou d’une chose urgente dont l’omission serait préjudiciable à ce dernier ;
2) dans le mandat donné entre commerçants pour affaires de commerce.
Dans ces cas, l’un des mandataires peut agir valablement sans l’autre, si le
contraire n’est exprimé.
Article 1126
Lorsque plusieurs mandataires ont été nommés séparément pour la même affaire, chacun d’eux peut agir à défaut de l’autre.
Article 1127
Le mandataire ne peut se substituer une autre personne dans l’exécution du mandat, si le pouvoir de se substituer ne lui a été expressément accordé, ou s’il ne résulte de la nature de l’affaire ou des circonstances.
Article 1128
Cependant, le mandataire général avec pleins pouvoirs est censé autorisé à se substituer une autre personne en tout ou en partie.
Article 1129
Le mandataire répond de celui qu’il s’est substitué. Cependant, lorsqu’il est autorisé à se substituer sans désignation de personne, il ne répond que s’il a choisi une personne qui n’avait pas les qualités requises pour exercer le mandat ou si, tout en ayant bien choisi, il a donné au substitué des instructions qui ont été la cause de dommages, ou s’il a manqué de le surveiller lorsque cette surveillance était nécessaire d’après les circonstances.
Article 1130
Dans tous les cas, le substitué est directement tenu envers le mandant, dans les mêmes conditions que le mandataire, et il a, d’autre part, les mêmes droits que ce dernier.
Article 1131
Le mandataire est tenu d’apporter à la gestion dont il est chargé la diligence d’un homme attentif et scrupuleux, et il répond du dommage causé au mandant par le défaut de cette diligence, tel que l’inexécution volontaire de son mandat ou des instructions spéciales qu’il a reçues, ou l’omission de ce qui est d’usage dans les affaires.
S’il a des raisons graves pour s’écarter de ces instructions ou de l’usage, il est tenu d’en avertir aussitôt le mandant, et s’il n’y a péril en la demeure, d’attendre ses instructions.
Article 1132
Les obligations dont il est parlé en l’article précédent doivent être entendues plus rigoureusement :
1) lorsque le mandat est salarié ;
2) lorsqu’il est exercé dans l’intérêt d’un mineur, d’un incapable, d’une personne morale.
Article 1133
Si les choses que le mandataire reçoit pour le compte du commettant sont détériorées ou présentent des signes d’avarie reconnaissables extérieurement, le mandataire est tenu de faire le nécessaire afin de conserver les droits du mandant contre le voiturier et autres responsables.
S’il y a péril en la demeure, ou si des détériorations se produisent par la suite, sans qu’il ait le temps d’en référer au mandant, le mandataire a la faculté, et lorsque l’intérêt du mandant l’exige, il est tenu de faire vendre les choses par l’entremise de l’autorité judiciaire, après en avoir fait constater l’état. Il doit, sans délai, informer le mandant de tout ce qu’il aura fait.
Article 1134
Le mandataire est tenu d’instruire le mandant de toutes les circonstances qui pourraient déterminer ce dernier à révoquer ou à modifier le mandat.
Article 1135
Dès que sa commission est accomplie, le mandataire est tenu d’en informer immédiatement le mandant, en ajoutant tous les détails nécessaires, afin que le mandant puisse se rendre un compte exact de la manière dont sa commission a été exécutée.
Si le mandant, après avoir reçu l’avis, tarde à répondre plus que ne le comporte la nature de l’affaire ou l’usage, il est censé approuver, même si le mandataire a dépassé ses pouvoirs.
Article 1136
Tout mandataire doit rendre compte au mandant de sa gestion, lui présenter le compte détaillé de ses dépenses et de ses recouvrements, avec toutes les justifications que comporte l’usage ou la nature de l’affaire et lui faire raison de tout ce qu’il a reçu par suite ou à l’occasion du mandat.
Article 1137
Le mandataire répond des choses qu’il a reçues à l’occasion de son mandat, d’après les dispositions des articles 1005, 1006, 1018 à 1028.
Néanmoins, si le mandat est salarié, il répond d’après ce qui est dit à l’article
Article 1138 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005)
Les dispositions de l’article 1136 ci-dessus doivent être entendues moins rigoureusement s’il s’agit d’un mandataire qui représente un membre de sa famille.
Dans ce cas, le mandataire pourra, d’après les circonstances, être cru sur son serment, quant à la restitution des choses qu’il a reçues pour le compte du mandant.
Article 1139
Dès que le mandat a pris fin, le mandataire doit restituer au mandant, ou déposer en justice, l’acte qui lui confère ses pouvoirs.
Le mandant ou ses ayants cause qui n’exigeraient pas la restitution de l’acte sont tenus des dommages-intérêts envers les tiers de bonne foi.
Article 1140
Lorsqu’il y a plusieurs mandataires, il n’y a solidarité entre eux que si elle a été stipulée. Toutefois, la solidarité entre les mandataires est de droit :
1) si le dommage a été causé au mandant par leur dol ou leur faute commune, et qu’on ne puisse discerner la part de chacun d’eux ;
2) lorsque le mandat est indivisible ;
3) lorsque le mandat est donné entre commerçants pour affaires de commerce, s’il n’y a stipulation contraire.
Néanmoins, les mandataires, même solidaires, ne répondraient pas de ce que leur comandataire aurait fait en dehors ou par abus de son mandat.
(Parag. B - Des obligations du mandant)
Article 1141
Le mandant est tenu de fournir au mandataire les fonds et autres moyens nécessaires pour l’exécution du mandat, s’il n’y a usage ou convention contraires.
Article 1142
Le mandant doit :
1) rembourser au mandataire les avances et frais qu’il a dû faire pour l’exécution du mandat dans la mesure de ce qui était nécessaire à cet effet, lui payer sa rétribution au cas où elle serait due, quel que soit le résultat de l’affaire, s’il n’y a fait ou faute imputable au mandataire ;
2) exonérer le mandataire des obligations qu’il a dû contracter, par suite ou à l’occasion de sa gestion ; il n’est pas tenu des obligations que le mandataire aurait assumées ou des pertes qu’il aurait essuyées, par son fait ou par sa faute ou pour d’autres causes étrangères au mandat.
Article 1143
Le mandataire n’a pas droit à la rétribution convenue :
1) s’il a été empêché, par un cas de force majeure, d’entreprendre l’exécution de son mandat ;
2) si l’affaire ou l’opération dont il a été chargé a pris fin avant qu’il ait pu l’entreprendre ;
3) si l’affaire ou l’opération en vue de laquelle le mandat avait été donné n’a pas été réalisée, sauf, dans ce dernier cas, l’usage commercial ou celui du lieu.
Il appartient, cependant, au tribunal d’apprécier si une indemnité ne serait pas due au mandataire, d’après les circonstances, surtout lorsque l’affaire n’a pas été conclue pour un motif personnel au mandant ou pour cause de force majeure.
Article 1144
Lorsque la rétribution n’a pas été fixée, elle sera déterminée d’après l’usage du lieu où le mandat a été accompli, et à défaut, d’après les circonstances.
Article 1145
Le mandant qui a cédé l’affaire à d'autres demeure responsable, envers le mandataire, de toutes les suites du mandat, d’après l’article 1142, s’il n’y a stipulation contraire acceptée par le mandataire.
Article 1146
Si le mandat a été donné par plusieurs personnes, pour une affaire commune, chacune d’elles est tenue envers le mandataire en proportion de son intérêt dans l’affaire, s’il n’en a été autrement convenu.
Article 1147
Le mandataire a le droit de retenir les effets mobiliers ou marchandises du mandant à lui expédiés ou remis pour se rembourser de ce qui lui est dû par le mandant, d’après l’article 1142.
Section II
Des effets du mandat à l’égard des tiers
Article 1148
Lorsque le mandataire agit en son nom personnel, il acquiert les droits résultant du contrat et demeure directement obligé envers ceux avec lesquels il a contracté, comme si l’affaire lui appartenait, alors même que les tiers auraient connu sa qualité de prête-nom ou de commissionnaire.
Article 1149
Le mandataire qui a traité en cette qualité et dans les limites de ses pouvoirs n’assume aucune obligation personnelle envers les tiers avec lesquels il contracte. Ceux-ci ne peuvent s’adresser qu’au mandant.
Article 1150
Les tiers n’ont aucune action, contre le mandataire en cette qualité, pour le contraindre à exécuter son mandat, à moins que le mandat n’ait été donné aussi dans leur intérêt.
Article 1151
Les tiers ont action contre le mandataire pour le contraindre à recevoir l’exécution du contrat, lorsque cette exécution rentre nécessairement dans le mandat dont il est chargé.
Article 1152
Celui qui traite avec le mandataire, en cette qualité, a toujours le droit de demander l’exhibition du mandat, et, au besoin, une copie authentique, à ses frais.
Article 1153
Les actes valablement accomplis par le mandataire, au nom du mandant et dans la limite de ses pouvoirs, produisent leur effet en faveur du mandant et contre lui, comme s’ils avaient été accomplis par le mandant lui-même.
Article 1154
Le mandant est tenu directement d’exécuter les engagements contractés pour son compte par le mandataire, dans la limite des pouvoirs conférés à ce dernier.
Les réserves et les traités secrets passés entre le mandant et le mandataire et qui ne résultent pas du mandat lui-même, ne peuvent être opposés aux tiers, si on ne prouve que ceux-ci en ont eu connaissance au moment du contrat.
Article 1155
Le mandant n’est pas tenu de ce que le mandataire aurait fait en dehors ou audelà de ses pouvoirs, sauf dans les cas suivants :
1) lorsqu’il l’a ratifié, même tacitement ;
2) lorsqu’il en a profité ;
3) lorsque le mandataire a contracté dans des conditions plus favorables que celles portées dans les instructions de son mandant ;
4) même lorsque le mandataire a contracté dans des conditions plus onéreuses, si la différence est de peu d’importance ou si elle est conforme à la tolérance usitée dans le commerce, ou dans le lieu du contrat.
Article 1156
Le mandataire qui a agi sans mandat ou au-delà de son mandat est tenu des dommages envers les tiers avec lesquels il a contracté, si le contrat ne peut être exécuté.
Le mandataire n’est tenu d’aucune garantie :
a) s’il a donné à la partie une connaissance suffisante de ses pouvoirs ;
b) s’il prouve que celle-ci en avait connaissance.
Le tout à moins qu’il ne se soit porté fort de l’exécution du contrat.
Section III
De l’extinction du mandat
Article 1157
Le mandat finit : 1) par l’accomplissement de l’affaire pour laquelle il a été donné ; 2) par l’avènement de la condition résolutoire ou l’expiration du terme qui y a
été ajouté ;
3) par la révocation du mandataire ;
4) par la renonciation de celui-ci au mandat ;
5) par le décès du mandant ou du mandataire ;
6) par le changement d’état par lequel le mandant ou le mandataire perd l’exercice de ses droits, tels que l’interdiction, la déclaration d’insolvabilité, à moins que le mandat n’ait pour objet des actes qu’il peut accomplir malgré ce changement d’état ;
7) par l’impossibilité d’exécution pour une cause indépendante de la volonté des contractants.
Article 1158 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le divorce mettra fin au mandat donné par l'un des époux à l'autre.
Article 1159
Le mandat donné par une personne morale ou une société cesse avec la fin de la personne morale ou de la société.
Article 1160
Le mandant peut, quand bon lui semble, révoquer sa procuration ; toute clause contraire est sans effet entre les parties et vis-à-vis des tiers. La stipulation d’un salaire n’empêche pas le mandant de faire usage de ce droit.
Cependant :
1) lorsque le mandat a été donné dans l’intérêt du mandataire, ou dans celui d’un tiers, le mandant ne peut le révoquer sans l’assentiment de la partie dans l’intérêt de laquelle le mandat a été donné ;
2) le mandataire ad litem ne peut être révoqué lorsque la cause est en état.
Article 1161
La révocation peut être expresse ou tacite.
Lorsque la révocation a lieu par lettre ou par télégramme, elle ne produit ses effets qu’à partir du moment où le mandataire a reçu la communication qui met fin à son mandat.
Article 1162
Lorsque le mandat a été donné par plusieurs personnes pour la même affaire, le mandat ne peut être révoqué que de l’adhésion de tous ceux qui y ont concouru. Cependant, lorsque l’affaire est divisible, la révocation opérée par l’un des intéressés éteint le mandat pour la part de celui qui l’a révoqué.
(l'alinéa 2 du présent article est abrogé par la loi n° 59-129 du 5 octobre 1959 promulguant le Code de commerce).
Article 1163
La révocation totale ou partielle du mandat ne peut être opposée aux tiers de bonne foi qui ont contracté avec le mandataire, avant de connaître la révocation, sauf au mandant son recours contre le mandataire.
Lorsque la loi prescrit une forme déterminée pour la constitution du mandat, la même forme est requise pour la révocation.
Article 1164
Le mandataire ne peut renoncer au mandat qu’en notifiant sa renonciation au mandant ; il répond du préjudice que cette renonciation peut causer au mandant, s’il ne prend les mesures nécessaires afin de sauvegarder complètement les intérêts de ce dernier, jusqu’au moment où celui-ci aura pourvu lui-même.
Article 1165
Le mandataire ne peut pas renoncer, lorsque le mandat lui a été donné dans l’intérêt d’un tiers, sauf le cas de maladie ou autre empêchement légitime ; dans ce cas, il est tenu de donner avis à celui dans l’intérêt duquel le mandat a été conféré, et de lui accorder un délai raisonnable afin de pourvoir à ce que les circonstances exigent.
Article 1166
La révocation ou la mort du mandataire principal entraînent la révocation de celui qu’il s’est substitué. Cette disposition ne s’applique pas :
1) lorsque le substitué a été nommé avec l’autorisation du commettant ;
2) lorsque le mandataire principal avait pleins pouvoirs d’agir ou qu’il était autorisé à se substituer.
Article 1167
Le décès ou le changement d’état du mandant éteint le mandat du mandataire principal et de celui qu’il s’est substitué. Cette disposition n’a pas lieu :
1) lorsque le mandat a été conféré dans l’intérêt du mandataire ou dans l’intérêt d’un tiers ;
2) lorsqu’il a pour objet un fait à accomplir après la mort du mandant, de sorte que le mandataire se trouve par là dans la situation d’un exécuteur testamentaire.
Article 1168
Sont valides les actes faits par le mandataire au nom du mandant, au temps où il ignorait encore le décès de celui-ci, ou l’une des autres causes qui ont fait cesser le mandat, pourvu que les tiers, avec lesquels il a contracté l’aient également ignorée.
Article 1169
En cas de cessation du mandat par décès, faillite ou incapacité du mandant, le mandataire est tenu, s’il y a péril en la demeure, d’achever la chose commencée, dans la mesure de ce qui est nécessaire, et de pourvoir à tout ce que les circonstances exigent dans l’intérêt du mandant, s'il n’y a pas d’héritier capable ou de représentant légal du mandant ou de l’héritier. Il peut d’autre part, répéter les avances et frais faits pour l’exécution de son mandat d’après les principes de la gestion d'affaires.
Article 1170
En cas de décès du mandataire, ses héritiers, s’ils connaissent l’existence du mandat, doivent en informer immédiatement le mandant. Ils doivent aussi conserver les documents et autres titres appartenant au mandant.
Cette disposition n’a pas lieu pour les héritiers mineurs, tant qu’ils ne sont pas pourvus d’un tuteur.
Article 1171
Lorsque le mandant ou le mandataire résout le contrat brusquement, à contretemps et sans motifs plausibles, il peut être tenu des dommages-intérêts envers l’autre contractant, s’il n’en est autrement convenu.
L’existence et l’étendue du dommage seront déterminées par le juge d’après la nature du mandat, les circonstances de l’affaire et l’usage des lieux.
Chapitre III
Des régisseurs des biens ruraux Article 1172
Le régisseur d’un bien rural est un mandataire salarié ; ses droits et ses obligations sont régis par les règles du mandat et par les dispositions spéciales du présent titre.
Article 1173
A défaut de convention, le salaire du régisseur sera déterminé ainsi qu’il suit :
1) si l’exploitation compte de trois à dix méchias, il aura droit à un cafis de blé et autant d’orge ;
2) si le régisseur a été engagé seulement pour l’été ou pour l’hiver, il aura droit à un demi cafis de blé et un demi cafis d’orge ;
3) lorsque le régisseur demeure sur la ferme avec sa famille, il recevra les deux cafis dont il a été parlé et il aura le droit, en outre, de cultiver pour son compte une maouna (parcelle supplémentaire en dehors de l’exploitation) de deux ouibas de blé et de deux ouibas d’orge.
Article 1174
Lorsque le régisseur est associé pour une méchia à un cultivateur qui exploite de cinq à dix méchias, il n’aura droit à aucune rétribution, sauf stipulation contraire. Le loyer de sa méchia et les frais d’exploitation seront à la charge du cultivateur.
Si l’exploitation est de moins de cinq méchias, le loyer de la méchia et les frais d’exploitation y afférent sont supportés par le régisseur.
Article 1175 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le régisseur à la garde des denrées destinées aux semis ; il les remet aux métayers et les mesures en leur présence au fur et à mesure des besoins ; il surveille et dirige les travaux des métayers et autres personnes employées sur la ferme : l’arrachage des mauvaises herbes, la moisson, le glanage, le dépiquage ou le battage, jusqu’à la fin des travaux pour la formation des meules ; il reçoit les grains de l’aire après le battage, en surveille le dépôt dans les silos ; il répond envers le cultivateur de la quantité qu’il a reçue.
Article 1176
Le régisseur répond du manque qui peut se produire dans la semence, lorsque chaque méchia n’en reçoit pas la quantité nécessaire, sauf l’action pénale contre lui, en cas de soustraction frauduleuse.
Article 1177 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le régisseur répond, solidairement avec le métayer, de la détérioration ou de la perte des ustensiles et instruments servant à l’exploitation, sauf les cas fortuits et de force majeure et les détériorations résultants de l’usage normal de ces objets.
Article 1178 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le régisseur répond, solidairement avec le métayer, de la perte ou de la détérioration des animaux attachés à l’exploitation, sauf les cas prévus en l’article précédent.
Chapitre IV
Des quasi-contrats analogues au mandat De la gestion d’affaires
Article 1179
Lorsque, sans y être autorisé par le maître ou par le juge, on gère volontairement ou par nécessité les affaires d’autrui, en son absence ou à son insu, il se constitue un rapport de droit analogue au mandat, qui est régi par les dispositions suivantes.
Article 1180
Le gérant est tenu de continuer la gestion qu’il a commencée jusqu’à ce que le maître soit en état de la continuer lui-même si l’interruption de la gestion est de nature à nuire au maître.
Article 1181
Il doit apporter à sa gestion la diligence d’un bon père de famille et se conformer à la volonté connue ou présumée du maître de l’affaire. Il répond de toute faute, même légère ; mais il n’est tenu que de son dol et de sa faute lourde : lorsque son immixtion a eu pour but de prévenir un dommage imminent et notable qui menaçait le maître de l’affaire ; lorsqu’il n’a fait que continuer, comme héritier, un mandat commencé par son auteur.
Article 1182
Il est tenu des mêmes obligations que le mandataire quant à la reddition de ses comptes, et à la restitution de tout ce qu’il a reçu par suite de sa gestion.
Il est soumis à toutes les autres obligations qui résulteraient d’un mandat exprès.
Article 1183
Le gérant d’affaires qui s’est immiscé aux affaires d’autrui contrairement à la volonté connue ou présumée du maître, ou qui a entrepris des opérations contraires à sa volonté présumée, est tenu de tous les dommages résultant de sa gestion, même si on ne peut lui imputer aucune faute.
Article 1184
Néanmoins, la volonté contraire du maître ne saurait être invoquée lorsque le gérant d’affaires a dû pourvoir d’urgence :
1) à une obligation du maître provenant de la loi et dont l’intérêt public exigeait l’accomplissement ;
2) à une obligation légale d’aliments, à des dépenses funéraires ou à d’autres obligations de même nature.
Article 1185
Si l’affaire est administrée dans l’intérêt du maître et d’une manière utile, le maître a tous les droits provenant de la gestion et il est tenu directement envers les tiers de toutes les obligations que le gérant a contractées pour son compte. Il doit décharger le gérant des suites de sa gestion et l’indemniser de ses avances, dépenses et pertes, d’après les dispositions de l’article 1142.
Quel qu’en soit le résultat, l’affaire est réputée bien administrée lorsqu’au moment où elle a été entreprise, elle était conforme aux règles d’une bonne gestion, d’après les circonstances.
Article 1186
Lorsque l’affaire est commune à plusieurs personnes, elles sont tenues envers le gérant dans la proportion de leur part d’intérêt et d’après les dispositions de l’article précédent.
Article 1187
Le gérant a droit de retenir les choses du maître pour le remboursement des créances dont la répétition lui est accordée par l’article 1185.
Ce droit de rétention n’appartient pas à celui qui s’est immiscé aux affaires d’autrui contrairement à la volonté du maître.
Article 1188
Dans tous les cas où le maître n’est pas tenu de reconnaître les dépenses faites par le gérant, celui-ci a le droit d’enlever les améliorations par lui accomplies, pourvu qu’il puisse le faire sans dommage, ou de se faire remettre les choses par lui achetées, et que le maître a laissées pour son compte.
Article 1189
La gestion d’affaires est essentiellement gratuite.
Article 1190
Le maître n’est tenu d’aucun remboursement lorsque le gérant a entrepris l’affaire sans l’intention de répéter ses avances. Cette intention est présumée :
a) lorsque la gestion a été entreprise contrairement à la volonté du maître, sauf le cas prévu en l’article 1184 ;
b) dans tous les autres cas où il ressort clairement des circonstances que le gérant n’avait pas l’intention de répéter ses avances.
Article 1191
Lorsque le gérant est dans l’erreur quant à la personne du maître, les droits et les obligations provenant de la gestion s’établissent entre lui et le véritable maître de l’affaire.
Article 1192
Lorsqu’une personne, croyant gérer son affaire propre, fait l’affaire d’autrui, les rapports de droit qui se constituent sont régis par les dispositions relatives à l’enrichissement sans cause (articles 71 et suivants).
Article 1193
La mort du gérant met fin à la gestion d’affaires ; les obligations de ses héritiers sont réglées par l’article 1170.
Article 1194
Lorsque le maître ratifie expressément ou tacitement, les droits et les obligations des parties entre elles sont régis par les règles du mandat, depuis l’origine de l’affaire ;
à l’égard des tiers, la ratification n’a d’effet qu’à partir du moment où elle est donnée.
TITRE VIII
DU CONTRAT DE COMMANDE (KIRADH OU MOUDHARABA)
Article 1195
La commande est le contrat par lequel une personne, appelée bailleur de fonds, remet un capital déterminé à une autre personne, dénommée gérant ou agent, lequel se charge d’employer ce capital dans le commerce, en son propre nom, mais pour le compte du bailleur de fonds, moyennant une quotité déterminée dans les bénéfices.
Article 1196
Le capital ou fonds de commerce peut consister soit en numéraire, soit en effets, marchandises ou autres choses mobilières, ou en créances sur des tiers.
Article 1197
Le contrat de commande ne peut être conclu qu’entre parties capables de contracter société.
Article 1198
Le contrat de commande est parfait par le consentement exprès des parties sur les clauses essentielles du contrat et par la remise du fonds ou capital au pouvoir de l’agent. Tant que cette remise n’a pas eu lieu, le contrat peut être dissous par la seule volonté de l’une des parties.
La tradition s’opère par le simple consentement, lorsque les fonds ou les choses constituant le capital se trouvaient déjà effectivement à un autre titre au pouvoir de l’agent ; il ne suffirait pas cependant qu’elles fussent dues par lui du chef d’une dette.
Article 1199
Les fonctions du gérant ne commencent qu’à partir du moment où le capital est remis entre ses mains.
Article 1200
Le bailleur de fonds ne peut stipuler qu’il prendra part à l’administration à peine de nullité du contrat.
Le gérant a la gestion exclusive du fonds qui lui a été confié. Il a seul le droit de faire tous les actes relatifs à cette gestion, même ceux qui excèdent la simple administration, et nonobstant l’opposition du bailleur de fonds, dans les conditions déterminées par le contrat et par l’usage du commerce.
Article 1201
Le gérant peut notamment, sauf les restrictions à lui imposées par le contrat :
- -
- restituer les marchandises et effets rédhibitoires, résilier des contrats, accorder terme et délai ;
- -
- louer et prendre à louage, acheter, vendre au comptant ou à terme, pourvu qu’il se conforme aux délais pratiqués dans le commerce ;
- -
- accepter une délégation en paiement d’effets vendus ;
- -
- conférer mandat à un tiers de faire les actes qu’il pourrait faire lui-même ; - constituer un nantissement ou le recevoir ;
- -
- suivre en son nom personnel toutes les actions judiciaires relatives aux opérations par lui engagées tant en demandant qu’en défendant ;
- -
- s’obliger par voie de change, le tout dans la mesure qui est nécessaire pour l’accomplissement des opérations dont il est chargé.
Article 1202
Le gérant ne peut faire aucun acte d’aliénation à titre gratuit s’il n’y est expressément autorisé. Il peut cependant accorder les réductions et autres tolérances qui sont d’usage dans le commerce.
Article 1203
Le gérant ne peut engager d’opérations pour une somme supérieure à celle qui lui a été fournie, s’il n’y est expressément autorisé ; ce qu’il fait au-delà reste à son compte personnel, à moins que le bailleur de fonds ne le ratifie.
Article 1204
Il n’est pas défendu au gérant de trafiquer pour son compte personnel et avec ses capitaux, mais il doit tenir distincte sa caisse particulière de celle de la commande, s’il n’y a usage ou convention contraire.
Article 1205
Le gérant peut se charger des affaires d’autres personnes, pourvu qu’il les tienne distinctes les unes des autres et s’il n’y a préjudice pour les intérêts du premier bailleur. Il doit, en tous cas, en donner avis à ce dernier.
Article 1206
Le gérant répond de tous les dommages résultant de son fait ou de sa faute d’après les règles du mandat salarié.
Article 1207
Le gérant ne peut être chargé des cas fortuits ou de force majeure. Toute stipulation contraire est non avenue.
Article 1208
Le gérant est tenu même des cas fortuits ou de force majeure, s’il ont été occasionnés par son fait ou sa faute, ou par l’inexécution des clauses valablement stipulées par le bailleur de fonds.
Article 1209
Le gérant répond de toutes les personnes qu’il s’est substituées ou adjointes sans l’autorisation du bailleur de fonds, soit comme associées, soit en qualité de commis et de préposés.
Article 1210
Le gérant a le droit de se rembourser sur le capital de ses avances et frais de route et de séjour, lorsqu’il voyage pour les affaires de la commande ou pour le recouvrement des créances de cette dernière.
Les dépenses qui ne dépendent pas des opérations de commerce dont il est chargé, telles que les frais de pèlerinage, de mariage et de médicaments, sont exclusivement à la charge du gérant.
Article 1211
Le gérant a droit, sur les bénéfices, à la part établie par le contrat, après déduction des pertes et des dépenses. Dans le silence du contrat, les parties sont présumées s’en être remises à la coutume locale ; à défaut de coutume, le tribunal décidera d’après ce qui est dit à l’article 1218.
Article 1212
Lorsqu’il y a plusieurs gérants, la part de chacun d’eux dans les bénéfices est, dans le silence du contrat, en proportion de sa part dans le travail commun.
Article 1213
Les reprises et remboursements du gérant, ainsi que la part de bénéfices à laquelle il a droit, ne sont jamais considérés comme une obligation personnelle du bailleur, mais doivent être prélevés sur le capital. En conséquence, si le capital a péri, ou se trouve insuffisant pour désintéresser l’agent, celui-ci n’a rien à répéter au bailleur.
Article 1214
Le gérant est tenu de toutes les obligations du mandataire quant à la reddition de comptes et à la justification de ses dépenses.
Article 1215
Dès que le contrat a prix fin, le gréant est tenu de restituer au bailleur le capital qu’il a reçu, et la part de bénéfices revenant à ce dernier. Lorsque la remise du capital au gérant a été constatée par écrit, le gérant n’est libéré que par la production d’une décharge par écrit du bailleur de fonds.
La succession du gérant est tenue des mêmes obligations que son auteur ; cependant, les héritiers sont admis à prouver leur libération par tous moyens de preuve.
Article 1216
Après le règlement des comptes et la restitution au bailleur de son capital et de sa part de bénéfices, l’agent n’est plus recevable à demander le remboursement de ses dépenses ou autres avances, sous prétexte d’erreur ou d’omission. Cependant, les erreurs purement matérielles de compte, telles que les erreurs d’addition, doivent être rectifiées.
Article 1217
En cas de doute, la déclaration de l’agent fait foi, à charge de serment :
1) quant à la perte des effets qui lui ont été confiés par le bailleur de fonds, s’il n’y a faute ou dol de l’agent ;
2) quant à l’existence du contrat de commande, lorsque le bailleur de fonds prétend qu’il n’y a qu’un contrat de commission, de préposition ou de louage de services ;
3) quant à la quantité ou à la valeur du capital ou fonds de commerce qui lui a été remis. La déclaration du bailleur de fonds fera foi, à charge de serment, quant à la part de bénéfice promise à l’agent.
Article 1218
Le contrat de commande est nul comme tel :
1) lorsque la part de bénéfices du gérant n’est point déterminée et que rien, dans la coutume locale ou dans les circonstances, ne permet d’en fixer le montant ;
2) lorsque la rétribution de l’agent est déterminée en une somme fixée d’avance ;
3) lorsque le contrat a pour objet des choses qui ne sont point dans le commerce, ou qui ne se trouvent qu’à des époques incertaines et variables ;
4) lorsqu’il est stipulé que le gérant ne pourra agir seul et devra toujours prendre l’avis, soit du bailleur de fonds, soit d’une autre personne déterminée ;
5) lorsque le contrat impose au gérant des travaux personnels autres que ceux dépendant de la gestion proprement dite ;
6) lorsque la faculté d’action du gérant est restreinte à certains cas déterminés ; par exemple s’il n’est autorisé à traiter qu’avec certaines personnes, ou dans un certain lieu, ou pendant un certain temps de l’année ;
7) lorsqu’il est stipulé que les bénéfices appartiendront exclusivement au bailleur de fonds, ou au gérant, ou à des tiers, par exemple, aux pauvres ;
8) lorsqu’il est stipulé que le capital restera entre les mains du bailleur de fonds et ne sera pas remis à l’agent.
Article 1219
Lorsqu’il est stipulé que tous les bénéfices appartiendront au bailleur de fonds, le contrat est une préposition ; lorsqu’il est stipulé que tous les bénéfices appartiendront à l’agent, le contrat est un prêt et on appliquera la règle de ces contrats.
Article 1220
Le contrat de commande finit :
-par la renonciation de l’une des parties ;
- -
- par la dissolution prononcée par l’autorité judiciaire ;
- -
- par le décès ou l’incapacité survenue de l’agent ;
- -
- par l’expiration du terme pour lequel il avait été contracté ou la consommation des affaires qui en étaient l’objet ;
- -
- par la perte du capital ou fonds social survenue soit avant l’exécution, soit au cours du contrat.
Article 1221
Chacune des parties peut résoudre à son gré le contrat de commande, pourvu que cette renonciation soit faite sans fraude et non à contretemps.
La renonciation est faite à contretemps, lorsque le gérant a déjà engagé les opérations prévues par le contrat, par exemple, s’il a acheté des marchandises ou s’est mis en voyage.
Article 1222
En cas de dissentiment grave, et lorsque, par exemple, les parties ne sont pas d’accord sur l’opportunité de liquider le capital de la commande, le tribunal pourra, d’après les circonstances, ordonner la liquidation définitive et le partage, ou bien assigner un terme passé lequel cette liquidation devra être faite.
Article 1223
En cas de décès du gérant, avant la liquidation des bénéfices, ses héritiers majeurs pourront continuer les opérations commencées ou les continuer par une personne digne de confiance qu’ils choisiront. Faute par eux de présenter une personne de confiance, ils perdent tout droit aux bénéfices et le bailleur prendra la suite des affaires aux lieu et place de l’agent.
Article 1224
Le décès ou l’incapacité survenue du bailleur de fonds ne dissout pas la commande, et l’agent a le droit de continuer les opérations commencées, mais il n’a pas le droit d’en entreprendre de nouvelles.
Article 1225
Toutes actions naissant du contrat de commande sont prescrites entre les parties après cinq ans à partir du moment où le contrat a pris fin.
TITRE IX
DE L’ASSOCIATION Dispositions générales
Article 1226
Il y a deux espèces d’association :
1) la communauté ou quasi-société ;
2) la société proprement dite ou société contractuelle.
Chapitre Premier
De la communauté ou quasi-société
(les articles 1227 à 1248 inclus ont été abrogés par la loi n° 65-5 du 12 février 1965, portant promulgation du Code des Droits Réels).
Chapitre II
De la société contractuelle Dispositions générales aux sociétés civiles et commerciales
Article 1249
La société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur travail, ou tous les deux à la fois, en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter.
Article 1250
La participation aux bénéfices accordée aux employés et représentants d’une personne ou d’une société, à titre de rétribution totale ou partielle de leurs services, ne suffit pas à leur conférer la qualité d’associés, à défaut de toute autre circonstance.
Article 1251
La société ne peut être contractée :
1) entre le père et le fils soumis à la puissance paternelle ;
2) entre le tuteur et le mineur, jusqu’à la majorité de ce dernier et à la reddition et à l’approbation définitive des comptes de tutelle ;
3) entre le curateur d’un incapable ou l’administrateur d’une institution pieuse et la personne dont ils administrent les biens.
L’autorisation d’exercer le commerce accordée au mineur ou à l’incapable par son père ou curateur ne suffit pas à le rendre habile à contracter société avec l’un d’eux.
Article 1252
Toute société doit avoir un but licite. Est nulle de plein droit toute société ayant un but contraire aux bonnes mœurs, à la loi ou à l’ordre public.
Article 1253
Est nulle de plein droit, entre musulmans, toute société ayant pour objet des choses prohibées par la loi religieuse, et, entre toutes personnes, celle ayant pour objet des choses qui ne sont pas dans le commerce.
Article 1254
La société est parfaite par le consentement des parties sur la constitution de la société et sur les autres clauses du contrat, sauf les cas dans lesquels la loi exige une forme spéciale. Cependant, lorsque la société a pour objet des immeubles ou autres biens susceptibles d’hypothèques, et qu’elle doit durer plus de trois ans, le contrat doit être fait par écrit et enregistré en la forme déterminée par la loi.
Article 1255
L’apport peut consister en numéraire, en objets mobiliers ou immobiliers, en droits incorporels. Il peut aussi consister dans l’industrie d’un associé ou même de tous. Entre musulmans, l’apport ne peut consister en denrées alimentaires.
Article 1256
L’apport peut consister dans le crédit commercial d’une personne.
Article 1257
Les mises des associés peuvent être de valeur inégale et de différentes natures.
En cas de doute, ils sont censés avoir apporté chacun une mise égale.
Article 1258
L’apport doit être spécifié et déterminé ; lorsqu’il consiste dans tous les biens présents de l’un des associés, ces biens doivent être inventoriés. Si l’apport consiste en choses autres que du numéraire, elles doivent être estimées à la valeur du jour où elles ont été mises dans le fonds social ; à défaut, les parties sont censées avoir voulu s’en rapporter à la valeur courante du jour où l’apport a été fait, ou à défaut à ce qui sera arbitré par experts.
Article 1259
L’ensemble des apports des associés et des choses acquises moyennant ces apports, en vue des opérations sociales, constitue le fonds commun des associés, ou capital social.
Font partie également du capital ou fonds social :
Les indemnités pour la perte, la détérioration ou l’expropriation d’une chose
faisant partie de ce fonds, à concurrence de la valeur pour laquelle cette chose a été mise dans la société d’après le contrat.
Le capital ou fonds social constituent la propriété commune des associés, qui y ont chacun une part indivise proportionnelle à la valeur de son apport.
Article 1260
La société peut être contractée à terme ou à temps indéterminé. Lorsqu’elle a pour objet une affaire dont la durée est déterminée, la société est censée contractée pour tout le temps que durera cette affaire.
Article 1261
La société commence dès l’instant même du contrat, si les parties n’ont établi une autre date. Cette date peut même être antérieure au contrat.
Section Première
Des effets de la société entre associés et à l’égard des tiers
(Parag. I - Des effets de la société entre associés)
Article 1262
Chaque associé est débiteur envers les autres de tout ce qu’il a promis d’apporter à la société.
En cas de doute, les associés sont présumés s’être engagés à verser une mise égale.
Article 1263
Chaque associé doit délivrer son apport à la date convenue, et s’il n’y a pas de terme fixé, aussitôt après la conclusion du contrat, sauf les délais provenant de la nature de la chose ou des distances.
Si l’un des associés est en demeure de faire son apport, les autres associés peuvent faire prononcer son exclusion, ou le contraindre à exécuter son engagement, sans préjudice des dommages, dans les deux cas.
Article 1264
L’associé qui apporte à la société une ou plusieurs créances contre des tiers, n’est libéré que le jour où la société reçoit le paiement de la somme pour laquelle ces créances lui ont été apportées ; il répond, en outre, des dommages si la créance dont il a fait l’apport n’est pas payée à l’échéance.
Article 1265
Lorsque l’apport consiste en la propriété d’un corps déterminé par son individualité, l’associé doit aux autres la même garantie que le vendeur, du chef des vices cachés et de l’éviction de la chose. Lorsque l’apport ne consiste que dans la jouissance, l’associé est tenu de la même garantie que le bailleur. Il garantit également la contenance, dans les mêmes conditions.
Article 1266
L’associé qui s’est obligé à apporter son industrie est tenu de prêter les services qu’il a promis, et doit compte de tous les gains qu’il a faits, depuis le contrat, par l’espèce d’industrie qui est l’objet de la société.
Il n’est pas tenu, cependant, d’apporter à la société les brevets d’invention obtenus par lui, s’il n'y a convention contraire.
Article 1267
Lorsque l’apport périt ou se détériore, pour une cause fortuite ou de force majeure, après le contrat, mais avant la délivrance de fait ou de droit, on appliquera les règles suivantes :
a) si l’apport consiste en numéraire ou autres choses fongibles, ou dans la jouissance d’une chose déterminée, la perte ou la détérioration est au risque de l’associé propriétaire.
b) s'il consiste en une chose déterminée dont la propriété a été mise dans la société, les risques sont à la charge de tous les associés.
Article 1268
Aucun associé n’est tenu de reconstituer son apport en cas de perte, sauf ce qui est dit à l’article 1319, ni de l’augmenter au-delà du montant établi par le contrat.
Article 1269
Un associé ne peut pas compenser les dommages dont il doit répondre avec les bénéfices qu’il aurait procurés à la société dans une autre affaire.
Article 1270
Il ne peut se substituer d’autres personnes dans l’exécution de ses engagements envers la société ; il répond dans tous les cas du fait et de la faute des personnes qu’il se substitue, ou dont il se fait assister.
Article 1271
Un associé ne peut, sans le consentement des autres associés, faire d’opérations pour son propre compte ou pour le compte d’un tiers ou dans des opérations analogues à celles de la société, lorsque cette concurrence est de nature à nuire aux intérêts de la société. En cas de contravention, les associés peuvent à leur choix répéter les dommages-intérêts ou prendre à leur compte les affaires engagées par l’associé et se faire verser les bénéfices par lui réalisés, le tout sans préjudice du droit de poursuivre l’exclusion de l’associé de la société. Les associés perdent la faculté de choisir, passé le délai de trois mois, et ne peuvent plus que répéter les dommagesintérêts, si le cas y échet.
Article 1272
La disposition de l’article précédent n’a pas lieu lorsque, avant son entrée dans la société, l’associé avait un intérêt dans d’autres entreprises analogues, ou faisait des opérations de même genre au su des autres associés, s’il n’a pas été stipulé qu’il doit les cesser.
L’associé ne peut recourir au tribunal pour contraindre les associés à donner leur consentement.
Article 1273
Tout associé est tenu d’apporter dans l’accomplissement de ses obligations envers la société la diligence qu’il apporte dans ses propres affaires ; tout manquement à cette diligence est une faute dont il est tenu de répondre envers les autres associés. Il répond aussi de l’inexécution des obligations résultant de l’acte de société, et de l’abus des pouvoirs à lui conférés. Il ne répond du cas fortuit et de la force majeure que lorsqu’ils ont été occasionnés par sa faute ou par son fait.
Article 1274
Tout associé est comptable dans les mêmes conditions que le mandataire :
1) de toutes les sommes et valeurs qu’il a prises dans le fonds social, pour les affaires communes ;
2) de tout ce qu’il a reçu pour le compte commun, ou à l’occasion des affaires qui font l’objet de la société ;
3) et, en général, de toute gestion par lui exercée pour le compte commun.
Toute clause qui affranchirait un associé de l’obligation de rendre compte est sans effet.
Article 1275
Un associé peut prélever, sur le fonds commun, la somme qui lui a été allouée dans le contrat pour ses dépenses particulières, mais ne peut rien prendre au-delà.
Article 1276
L’associé qui, sans l’autorisation écrite des autres associés, emploie les capitaux ou les choses communes à son profit ou au profit d’une tierce personne, est tenu de restituer les sommes qu’il a prélevées et de rapporter au fonds commun les gains qu’il a réalisés, sans préjudice de plus grands dommages et de l’action pénale, s’il y a lieu.
Article 1277
Un associé même administrateur ne peut, sans le consentement de tous les autres, associer une tierce personne à la société, à moins que l’acte de société lui confère cette faculté. Il peut seulement intéresser une tierce personne dans la part qu’il a dans la société, ou lui céder cette part ; il peut aussi céder la part de capital qui pourra lui être attribuée lors du partage, le tout sauf convention contraire.
Dans ce cas, il ne se crée aucun lien de droit entre la société et le tiers intéressé, ou le cessionnaire de l’associé ; ceux-ci n’ont droit qu’aux bénéfices et aux pertes attribuées à l’associé d’après le bilan, et ne peuvent exercer aucune action contre la société, même par subrogation aux droits de leur auteur.
Article 1278
L’associé qui se substitue à l’associé sortant par le consentement des associés ou en vertu des stipulations de l’acte de société, est subrogé purement et simplement aux droits et aux obligations de son auteur dans les conditions déterminées par la nature de la société.
Article 1279
Chaque associé a action contre les autres, en proportion de leur part contributive :
1) à raison des sommes déboursées par lui pour la conservation des choses communes, ainsi que des dépenses faites, sans imprudence ni excès, dans l’intérêt de tous ;
2) à raison des obligations qu’il a contractées sans excès, dans l’intérêt de tous.
Article 1280
L’associé administrateur n’a pas droit à une rétribution spéciale à raison de sa gestion, si elle n’est expressément convenue. Cette disposition s’applique aux autres associés, pour le travail qu’ils accomplissent dans l’intérêt commun ou pour les services particuliers qu’ils rendront à la société et qui ne rentrent pas dans leurs obligations comme associés.
Article 1281
Les obligations de la société envers un associé se divisent entre tous les associés, en proportion de leur mise.
A. De l’administration de la société
Article 1282
Le droit d’administrer les affaires sociales appartient à tous les associés conjointement, et nul ne peut l’exercer séparément s’il n’y est pas autorisé par les autres.
Article 1283
Le pouvoir d’administrer emporte celui de représenter les associés vis-à-vis des tiers, si le contraire n’est exprimé.
Article 1284
Lorsque les associés se sont donné réciproquement mandat d’administrer, en exprimant que chacun d’eux pourra agir sans consulter les autres, la société est dite fiduciaire, ou à mandat général.
Article 1285
Dans la société fiduciaire, chacun des associés peut faire seul tous les actes d’administration, et même d’aliénation, qui rentrent dans le but de la société.
Il peut notamment :
a) contracter pour le compte commun une société en participation avec une tierce personne, ayant pour objet une ou plusieurs opérations de commerce ;
b) commanditer une tierce personne pour le compte commun ;
c) constituer des facteurs ou préposés ;
d) donner mandat ou le révoquer ;
e) recevoir des paiements, résilier des marchés, vendre au comptant, à crédit, à terme ou à livrer (sélem) les choses faisant l’objet du commerce de la société ; reconnaître une dette ; obliger la société dans la mesure nécessaire pour les besoins de sa gestion ; constituer un nantissement ou autre sûreté dans la même mesure, ou en recevoir ; émettre et endosser des billets à ordre et des lettres de change ; accepter la restitution pour vice rédhibitoire d’une chose vendue par un autre associé lorsque celui-ci est absent ; représenter la société dans les procès où elle est défenderesse et demanderesse ; transiger pourvu qu’il y ait intérêt à la transaction.
Le tout pourvu que ce soit sans fraude, et sauf les restrictions spéciales exprimées dans l’acte de société.
Article 1286
L’associé fiduciaire ne peut, sans autorisation spéciale exprimée dans l’acte de société ou dans un acte postérieur :
a) faire une aliénation à titre gratuit, sauf les petites libéralités d’usage ;
b) se porter caution pour des tiers ;
c) faire un prêt d’usage ou de consommation, à titre gratuit ;
d) compromettre ;
e) céder l’établissement ou fonds de commerce, ou le brevet d’invention qui fait l’objet de la société ;
f) renoncer à des garanties, sauf contre paiement.
Article 1287
Lorsque le contrat de société exprime que les associés ont tous le droit d’administrer, mais qu’aucun d’eux ne peut agir séparément, la société est dite restreinte ou à mandat restreint.
A défaut de stipulation ou de coutume spéciale, chacun des associés à mandat restreint peut faire les actes d’administration, à la condition d’obtenir l’assentiment des autres, à moins qu’il ne s’agisse d’une chose urgente dont l’omission serait préjudiciable à la société.
Article 1288
Lorsqu’il est établi dans l’acte de société que les décisions seront prises à la majorité, il faut entendre, en cas de doute, la majorité en nombre.
En cas de partage, l’avis des opposants doit prévaloir.
Lorsque les deux parties diffèrent quant à la décision à prendre, la décision sera remise au tribunal qui décidera conformément à l’intérêt général de la société.
Article 1289
L’administration peut aussi être confiée à un ou plusieurs gérants ; ceux-ci peuvent être pris même en dehors de la société ; ils ne peuvent être nommés qu’à la majorité requise par l’acte de société pour les délibérations sociales.
Article 1290
L’associé chargé de l’administration par l’acte de société peut faire, nonobstant l’opposition des autres associés, tous les actes de gestion, et même de disposition, qui rentrent dans le but de la société, d’après ce qui est dit à l’article 1293, pourvu que ce soit sans fraude, et sauf les restrictions exprimées dans l’acte qui lui confère ses pouvoirs.
Article 1291
L’administrateur non associé a les pouvoirs attribués aux mandataires par l’article 1117, sauf les clauses exprimées dans l’acte qui le nomme.
Article 1292
Lorsqu'il y a plusieurs gérants, aucun d'eux ne peut agir sans le concours des autres, à moins que le contraire ne soit exprimé dans l'acte qui le nomme, et sauf les cas d'urgence où le retard produirait un préjudice notable aux intérêts de la société. En cas de dissentiment, l'avis de la majorité doit l'emporter ; en cas de partage, celui des opposants. S'il a y partage seulement quant au parti à prendre, il en sera référé à la décision de tous les associés. Lorsque les différentes branches de l'administration ont été réparties entre les gérants, chacun d'eux est autorisé à faire seul les actes qui rentrent dans sa gestion et ne peut rien faire au-delà.
Article 1293
Les administrateurs, même à l'unanimité, et les associés, à la majorité, ne peuvent faire d'autres actes que ceux qui rentrent dans le but de la société d'après sa nature, et l'usage du commerce.
L'unanimité des associés est requise :
1) pour faire une aliénation gratuite du patrimoine commun ;
2) pour modifier le contrat de société ou y déroger ;
3) pour faire des actes qui ne rentrent pas dans le but de la société.
Toute stipulation qui autoriserait d'avance les administrateurs ou la majorité à prendre des décisions de cette nature, sans consulter les autres, est sans effet. Ont droit de prendre part aux délibérations, dans le cas ci-dessus, même les associés non administrateurs. En cas de désaccord, l'avis des opposants doit prévaloir.
Article 1294
Les associés non administrateurs ne peuvent prendre aucune part à la gestion, ni s'opposer aux actes accomplis par les gérants nommés par le contrat, à moins que ces actes n'excèdent les limites des opérations qui sont l'objet de la société, ou ne soient manifestement contraires au contrat ou à la loi.
Article 1295
Les associés non administrateurs ont le droit de se faire rendre compte à tout moment de l'administration des affaires sociales, et de l'état du patrimoine commun, de prendre connaissance des livres et papiers de la société, et même de les compulser. Toute clause contraire est sans effet. Ce droit est personnel et ne peut être exercé par l'entremise d'un mandataire ou autre représentant, sauf le cas des incapables qui sont légalement représentés par leurs mandataires légaux, et le cas d'empêchement légitime dûment justifié.
Article 1296
Le simple associé en participation n'a pas le droit de prendre connaissance des livres et papiers de la société, sauf le cas de motifs graves, et sur ordonnance du tribunal.
Article 1297
Les administrateurs nommés par l'acte de société ne peuvent être révoqués que s'il y a de justes motifs, et à l'unanimité des autres associés.
L'acte de société peut cependant conférer ce droit à la majorité ou stipuler que les gérants nommés par le contrat pourront être révoqués comme de simples mandataires. Sont réputés justes motifs les actes de mauvaise gestion, les mésintelligences graves survenues entre les gérants, le manquement grave d'un ou plusieurs d'entre eux aux obligations de leur charge, l'impossibilité où ils se trouvent de les remplir.
Les administrateurs nommés par l'acte de société ne peuvent, d'autre part, renoncer à leurs fonctions que pour causes légitimes d'empêchement, à peine des dommages-intérêts envers les associés. Cependant les gérants, qui sont révocables au gré des associés, peuvent renoncer à leurs fonctions dans les conditions établies pour les mandataires.
Article 1298
Les associés administrateurs sont révocables, comme de simples mandataires, s'ils n'ont pas été nommés par l'acte de société ; la révocation ne peut être décidée qu'à la majorité requise pour la nomination.
Ils ont, d'autre part, la faculté de renoncer à leurs fonctions dans les conditions établies pour les mandataires. Les dispositions du présent article s'appliquent aux administrateurs non associés.
Article 1299
Lorsque rien n'a été établi quant à la gestion des affaires sociales, la société est réputée restreinte, et les rapports des associés à cet égard sont régis par les dispositions de l'article 1287.
B. De la répartition des bénéfices et des pertes
Article 1300
La part de chaque associé dans les bénéfices et dans les pertes est en proportion de sa mise.
Lorsque la part dans les bénéfices est seule déterminée, la même proportion s'applique aux pertes, et réciproquement.
En cas de doute, les parts des associés sont présumées égales.
La part de celui qui n'a apporté que son industrie est évaluée d'après l'importance de cette industrie pour la société. L'associé qui a fait un apport en numéraire, ou autres valeurs, outre son industrie, a droit à une part proportionnelle à l'un et à l'autre de ses apports.
Article 1301
Est nulle et rend nul le contrat de société, toute stipulation qui attribuerait à un associé une part dans les bénéfices, ou dans les pertes, supérieure à la part proportionnelle à sa mise. L'associé lésé par une clause de ce genre, aura recours contre la société, jusqu'à concurrence de ce qu'il aura touché en moins, ou payé en plus, de sa part contributive.
Article 1302
Lorsque le contrat attribue à l'un des associés la totalité des gains, la société est nulle et le contrat constitue une libéralité de la part de celui qui a renoncé aux bénéfices. La clause qui affranchirait l'un des associés de toute contribution aux pertes est nulle mais n’annule pas le contrat.
Article 1303
Cependant il peut être stipulé que celui qui apporte son industrie aura dans les bénéfices une part supérieure à celle des autres associés.
Article 1304
La liquidation des bénéfices et des pertes de la société a lieu après le bilan, qui doit être fait en même temps que l’inventaire, à la fin de chaque exercice ou année sociale.
Article 1305
Le vingtième des bénéfices nets acquis à la fin de chaque exercice devra être prélevé, avant tout partage, et servira à constituer un fonds de réserve, jusqu’à concurrence du cinquième du capital.
En cas de diminution du capital social, il devra être reconstitué, moyennant les bénéfices ultérieurs, jusqu’à concurrence des pertes. Il sera sursis, jusqu’à la reconstitution complète du capital, à toute distribution de bénéfices entre les associés, à moins que ceux-ci ne décident de réduire le capital de la société au capital effectif.
Article 1306
Après le prélèvement prescrit par l’article précédent, la part des associés dans les bénéfices sera liquidée ; chacun d’eux aura le droit de retirer la part qui lui a été attribuée; s’il ne la retire pas, sa part de bénéfices est considérée comme un dépôt, et n’augmente pas son apport, à moins que les autres associés n’y consentent expressément ; le tout sauf stipulation contraire.
Article 1307
En cas de perte, l’associé n’est pas tenu de rapporter au fonds social la part de bénéfices afférente à un exercice antérieur, lorsqu’il a touché cette part de bonne foi, d’après un bilan régulier et fait également de bonne foi.
Lorsque le bilan n’est pas de bonne foi, l’associé non administrateur qui a été obligé de rapporter au fonds social les bénéfices par lui touchés de bonne foi, aura son recours en dommages contre les gérants de la société.
Article 1308
Lorsque la société a été constituée en vue d’une affaire déterminée, la liquidation définitive des comptes et la répartition des bénéfices n’ont lieu qu’après l’accomplissement de l’affaire.
(Parag. II -Des effets de la société à l’égard des tiers)
Article 1309
Les associés sont tenus envers les créanciers proportionnellement à leur apport si le contrat ne stipule la solidarité.
Article 1310
Dans la société fiduciaire, les associés sont solidairement responsables des obligations valablement contractées par l’un d’eux, s’il n’y a fraude.
Article 1311
L’associé est seul tenu des obligations qu’il contracte au-delà de ses pouvoirs ou du but pour lequel la société est constituée.
Article 1312
La société est toujours obligée, envers les tiers du fait de l’un des associés, dans la mesure où elle a profité de l’opération entreprise par celui-ci en dehors de ses pouvoirs.
Article 1313
Les associés sont tenus envers les tiers de bonne foi des actes de dol et de fraude commis par l’administrateur qui représente la société et ils sont tenus de réparer le préjudice causé par ces actes, sauf leur recours contre l’auteur du fait dommageable.
Article 1314
Celui qui entre dans une société déjà constituée, répond avec les autres et dans la mesure établie par la nature de la société des obligations contractées avant son entrée, alors même que le nom ou la raison sociale auraient été modifiés.
Toute convention contraire n’a aucun effet à l’égard des tiers.
Article 1315
Les créanciers sociaux peuvent poursuivre leurs actions contre la société représentée par les gérants et contre les associés individuellement. Toutefois, l’exécution des jugements obtenus par eux doit être suivie en premier lieu sur le fonds ou patrimoine social ; ils ont privilège sur le fonds par préférence aux créanciers particuliers des associés. En cas d’insuffisance du fonds social, ils peuvent s’adresser aux associés pour être remplis de leurs créances, dans les conditions déterminées par la nature de la société.
Article 1316
Chacun des associés peut opposer aux créanciers sociaux les exceptions personnelles qui lui appartiennent, ainsi que celles qui appartiennent à la société, y compris la compensation.
Article 1317 (abrogé par la loi n° 66-66 du 26 juillet 1966).
Section II
De la dissolution de la société et
de l’exclusion des associés
Article 1318
La société finit :
1) par l’expiration du terme fixé pour sa durée, ou par l’accomplissement de la condition ou autre fait résolutoire sous laquelle elle a été contractée ;
2) par la réalisation de l’objet en vue duquel elle avait été contractée, ou par l’impossibilité de la réaliser ;
3) par l’extinction de la chose commune, ou la perte partielle assez considérable pour empêcher une exploitation utile ;
4) par le décès, l’absence déclarée, l’interdiction pour infirmité d’esprit, de l’un des associés, s’il n’a été convenu que la société continuerait avec ses héritiers ou représentants, ou qu’elle continuerait entre les survivants ;
5) par la déclaration d’insolvabilité, la faillite ou la liquidation judiciaire de l’un des associés ;
6) par la volonté commune des associés ;
7) par la renonciation d’un ou plusieurs associés lorsque la durée de la société n’est pas déterminée, soit par le contrat, soit par la nature de l’affaire qui en fait l’objet ;
8) par autorité de justice, dans les cas prévus par la loi.
Article 1319
Lorsque l’un des associés a mis en commun la jouissance d’une chose déterminée, la perte survenue, avant ou après la délivrance, opère la dissolution de la société à l’égard de tous les associés.
La même disposition s’applique au cas où l’associé, qui a promis d’apporter son industrie, se trouve dans l’impossibilité de prêter ses services.
Article 1320
Lorsque les administrateurs reconnaissent que le capital est diminué d’un tiers, ils sont tenus de convoquer les associés afin de leur demander s’ils entendent reconstituer le capital, ou le réduire à ce qui reste, ou dissoudre la société.
La société est dissoute de droit, lorsque les pertes s’élèvent à la moitié du capital social, à moins que les associés ne décident de le reconstituer, ou de le limiter à la somme effectivement existante. Les administrateurs répondent personnellement des publications relatives à ces faits.
Article 1321
La société est dissoute de plein droit après l’expiration du temps établi pour sa durée, ou la consommation de l’affaire pour laquelle elle avait été contractée.
Elle est prorogée tacitement lorsque, malgré l’expiration du délai convenu ou la consommation de l’affaire, les associés continuent les opérations qui faisaient l’objet de la société. La prorogation tacite est censée faite d’année en année.
Article 1322
Les créanciers particuliers d’un associé peuvent faire opposition à la prorogation de la société.
Ils n’ont ce droit, toutefois, que si leur créance est liquidée par jugement passé en force de chose jugée.
L’opposition suspend, à l’égard des opposants, l’effet de la prorogation de la société.
Pourront, toutefois, les autres associés, faire prononcer l’exclusion de l’associé qui donne lieu à l’opposition.
Les effets de l’exclusion sont réglés par l’article 1327.
Article 1323
Tout associé peut poursuivre la dissolution de la société, même avant le terme établi, s’il y a de justes motifs, tels que des mésintelligences graves survenues entre les associés, le manquement d’un ou de plusieurs d’entre eux aux obligations résultant du contrat, l’impossibilité où ils se trouvent de les accomplir.
Les associés ne peuvent renoncer d’avance au droit de demander la dissolution dans les cas indiqués au présent article.
Article 1324
Lorsque la durée de la société n’est pas déterminée soit par le contrat, soit par la nature de l’affaire, chacun des associés peut y renoncer en notifiant sa renonciation à tous les autres, pourvu que cette renonciation soit faite de bonne foi et non à contretemps.
La renonciation n’est pas de bonne foi, lorsque l’associé renonce pour s’approprier à lui seul le profit que les associés s’étaient proposé de retirer en commun.
Elle est faite à contretemps, lorsqu’elle se produit alors que les opérations sociales avaient déjà commencé, et qu’il importe à la société que la dissolution soit différée.
Dans tous les cas, elle n’a d’effet que pour la fin de l’exercice social, et doit être donnée trois mois au moins avant cette époque, à moins de motifs graves.
Article 1325
S’il a été convenu qu’en cas de mort de l’un des associés la société continuerait avec ses héritiers, la clause n’a aucun effet si l’héritier est un incapable.
Le tribunal peut, toutefois, autoriser les mineurs ou incapables à continuer la société, s’il y a intérêt sérieux pour eux à continuer la société. Il prescrira, dans ce cas, toutes les mesures requises par les circonstances afin de sauvegarder leurs droits.
Article 1326
Les sociétés de commerce ne sont censées dissoutes à l’égard des tiers, avant le terme établi pour leur durée, qu’un mois après la publication du jugement ou autre acte dont résulte la dissolution.
Article 1327
Dans le cas de l’article 1323 et dans tous les cas où la société est dissoute par la mort, l’absence, l’interdiction, ou l’insolvabilité déclarée de l’un des associés ou par la minorité des héritiers, les autres associés peuvent continuer la société entre eux, en faisant prononcer par le tribunal l’exclusion de l’associé qui donne lieu à la dissolution.
Dans ce cas, l’associé exclu, et les héritiers ou autres représentants légaux du décédé, interdit, absent ou insolvable, auront droit au remboursement de la part de ce dernier dans le fonds social et dans les bénéfices, liquidés au jour où l’exclusion a été prononcée. Ils ne participent aux bénéfices et aux pertes postérieures à cette date que dans la mesure où ils sont une suite nécessaire et directe de ce qui s’est fait avant l’exclusion, l’absence, la mort ou l’insolvabilité de l’associé auquel ils succèdent. Ils ne peuvent exiger le paiement de leur part qu’à l’époque de la répartition d’après le contrat social.
Article 1328 (abrogé par la loi n° 59-129 du 5 octobre 1959 portant promulgation du Code de Commerce).
Article 1329
En cas de décès de l’associé, ses héritiers sont tenus des mêmes obligations que les héritiers du mandataire.
Article 1330
Après la dissolution de la société, les administrateurs ne peuvent engager aucune opération nouvelle, si ce n’est celles qui sont nécessaires pour liquider les affaires entamées ; en cas de contravention, ils sont personnellement et solidairement responsables des affaires par eux engagées.
Cette prohibition a effet du jour de l’expiration du délai fixé pour la durée de la société, ou de la consommation de l’affaire pour laquelle elle s’est constituée, ou de l’événement qui, d’après la loi, produit la dissolution de la société.
Chapitre III
De la liquidation et du partage des sociétés et des communautés ou quasi-sociétés
Article 1331
Le partage se fait entre associés ou communistes majeures et maîtres de leurs droits, d'après le mode prévu par l'acte constitutif, ou de telle autre manière qu'ils aviseront, s'ils ne décident à l'unanimité de procéder à une liquidation avant tout partage.
Section Première
De la liquidation
Article 1332
Tous les associés, même ceux qui ne prennent point part à l'administration, ont le droit de prendre part à la liquidation.
La liquidation est faite par les soins de tous les associés, ou d'un liquidateur nommé par eux à l'unanimité, s'il n'a été préalablement indiqué par l'acte de société.
Si les intéressés ne peuvent s'entendre sur le choix, ou s'il y a de justes causes de ne pas confier la liquidation aux personnes indiquées par l'acte de société, le liquidateur sera nommé par le tribunal, à la requête des administrateurs ou de l'un des associés.
Article 1333
Tant que le liquidateur n'a pas été nommé, les administrateurs sont constitués dépositaires des biens sociaux, et doivent pourvoir aux affaires urgentes.
Article 1334
Tous les actes d'une société dissoute doivent énoncer qu'elle est "en liquidation".
Les clauses de l'acte de société et les dispositions de la loi relatives aux sociétés existantes s'appliquent à la société en liquidation, tant dans les rapports des associés entre eux que dans leurs rapports avec les tiers, dans la mesure ou elles peuvent s'appliquer à une société en liquidation, et sauf les dispositions des articles suivants.
Article 1335
Lorsqu'il y a plusieurs liquidateurs, ils ne peuvent agir séparément s'ils n'y sont expressément autorisés ; cette autorisation doit être mentionnée au registre du commerce.
Article 1336
Dés son entrée en fonctions, le liquidateur est tenu de dresser, conjointement avec les administrateurs de la société, l'inventaire et le bilan actif et passif de la société qui seront souscrits par les uns et par les autres.
Il devra recevoir et conserver les livres, les documents et les valeurs de la société qui lui seront remis par les administrateurs ; il prendra note, en forme de journal et par ordre de date, de toutes les opérations relatives à la liquidation, selon les règles de la comptabilité usitée dans le commerce, et gardera tous les documents justificatifs et autres pièces relatives à cette liquidation.
Article 1337
Le liquidateur représente la société en liquidation, et il en a l’administration.
Son mandat comprend tous les actes nécessaires afin de réaliser l’actif et acquitter le passif, notamment le pouvoir d’opérer le recouvrement des créances, de terminer les affaires pendantes, de prendre toutes les mesures conservatoires requises par l’intérêt commun, de faire toutes publicités nécessaires afin d’inviter les créanciers à présenter leurs créances, de payer les dettes sociales liquides ou exigibles, de vendre judiciairement les immeubles de la société qui ne peuvent se partager commodément, de vendre les marchandises en magasin et le matériel ; le tout, sauf les réserves exprimées dans l'acte qui le nomme ou les discisions qui seraient prises par les associés à l'unanimité au cours de la liquidation.
Article 1338
Si un créancier connu ne se présente pas, le liquidateur est autorisé à consigner la somme à lui due, dans le cas où la consignation est de droit.
Pour les obligations non échues ou en litige, il est tenu de réserver et de déposer en lieu sûr une somme suffisante pour y faire face.
Article 1339
Au cas où les fonds de la société ne suffisent pas à payer le passif exigible, le liquidateur doit demander aux associés les sommes à ce nécessaires, si les associés sont tenus de les fournir, d'après la nature de la société, ou s'ils sont débiteurs de tout ou partie de leur apport social. La part des associés insolvables se répartit sur les autres dans la proportion où ils sont tenus des pertes.
Article 1340
Le liquidateur peut contracter des emprunts et autres obligations, même par voie de change, endosser des effets de commerce, accorder des délais, donner et accepter des délégations, donner en nantissement les biens de la société ; le tout, si le contraire n'est exprimé dans son mandat, et seulement dans la mesure strictement requise par l'intérêt de la liquidation.
Article 1341
Le liquidateur ne peut ni transiger ni compromettre, ni abandonner des sûretés si ce n'est contre paiement, ou contre des sûretés équivalentes, ni céder à forfait le fonds de commerce qu'il est chargé de liquider, ni aliéner à titre gratuit, ni entamer des opérations nouvelles, s'il n'y est expressément autorisé. Il peut, toutefois, engager des opérations nouvelles dans la mesure où elles seraient nécessaires pour liquider des affaires pendantes. En cas de contravention, il est personnellement responsable des opérations engagées ; cette responsabilité est solidaire, lorsqu'il y a plusieurs liquidateurs.
Article 1342
Le liquidateur peut déléguer à des tiers le pouvoir de faire un ou plusieurs actes déterminés ; il répond, d'après les règles du mandat, des personnes qu'il se substitue.
Article 1343
Le liquidateur, même nommé par le tribunal, ne peut s'écarter des décisions prises à l'unanimité par les intéressés et ayant trait à la gestion de la chose commune.
Article 1344
Le liquidateur est tenu de fournir aux communistes ou associés, à toute requête, des renseignements complets sur l'état de la liquidation, et de mettre à leur disposition les registres et documents relatifs à ces opérations.
Article 1345
Le liquidateur est tenu de toutes les obligations du mandataire salarié en ce qui concerne la reddition de ses comptes et la restitution de ce qu'il a touché à l'occasion de son mandat. Il doit, à la fin de la liquidation, dresser un inventaire et un bilan actif et passif, résumant toutes les opérations par lui accomplies et la situation définitive qui en résulte.
Article 1346
Il répond de son fait et de sa faute, d'après les règles du mandat salarié. S'il y a plusieurs liquidateurs, ils répondent solidairement entre eux.
Article 1347
Le mandat du liquidateur n'est pas censé gratuit. Lorsque les honoraires du liquidateur n'ont pas été fixés, il appartient au tribunal de les liquider sur sa note, sauf le droit des intéressés de s'opposer à la taxe.
Article 1348
Le liquidateur qui a payé de ses deniers les dettes communes, ne peut exercer que les droits des créanciers qu'il a désintéressés. Il n'a de recours contre les associés ou communistes qu'à proportion de leur intérêt.
Article 1349
Après la fin de la liquidation et la remise des comptes, les livres, papiers et documents de la société dissoute seront déposés par les liquidateurs au greffe du tribunal ou autre lieu sûr qui lui sera désigné par le tribunal, si les intéressés ne lui indiquent, à la majorité, la personne à laquelle il devra remettre ce dépôt. Ils devront y être conservés pendant quinze ans à partir de la date du dépôt.
Les intéressés et leurs héritiers et ayants cause, de même que les liquidateurs, auront toujours le droit de consulter les documents, de les compulser, d'en prendre copie, même notariée.
Article 1350
Si un ou plusieurs liquidateurs viennent à manquer par mort, faillite ou interdiction, renonciation ou révocation, ils devront être remplacés de la manière établie pour leur nomination.
Les dispositions de l'article 1297 sont applicables à la révocation des liquidateurs et à leur renonciation.
Section II
Du partage
(les articles 1351 à 1364 inclus ont été abrogés par loi n° 65-5 du 12 février 1965, portant promulgation du Code des Droits Réels).
Chapitre IV
De quelques espèces particulières de sociétés
Section Première
Des sociétés agricoles
Article 1365
La société agricole est parfaite par le consentement des parties sur les clauses essentielles du contrat et notamment :
a) sur le fonds de terre à exploiter ;
b) sur le genre de culture à faire, à moins que le choix de la culture à faire n'ait été laissé à l'un des associés ;
c) sur l'apport de chacun des associés.
Il n'est pas nécessaire pour sa perfection, qu'il y ait un commencement
d'exécution.
Article 1366
La société agricole peut avoir pour objet différentes terres portant des produits divers, et la répartition des produits entre les associés peut être établie d'après des proportions diverses, selon les fonds de terre mis en culture.
Article 1367
Lorsque l'un des associés exploite une maâouna pour son compte personnel sans en donner avis à son associé, celui-ci aura le droit de cultiver une maâouna pour son compte, s'il est encore temps de semer ; mais si le temps des semailles est passé, il pourra, en restituant à l'autre associé la moitié de sa semence, partager avec lui le produit de la maâouna.
Article 1368
Si l'un des deux associés, après avoir reçu sa part de semence, n'en fait aucun usage, il devra payer le loyer de la part du terrain appartenant à son associé.
(Parag. I – De la société à métayage)
Article 1369 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
La société à métayage est une société dans laquelle l’un des associés met un fonds de terre, la semence, les animaux de labour et de trait, l’autre son travail, à condition que les produits du fonds seront partagés entre les parties, dans certaines proportions établies au contrat.
Article 1370 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
A défaut de détermination, les parties sont censées se soumettre à la coutume tunisienne qui fixe la part du métayer à un cinquième ou à la moitié du produit net selon les produits et la coutume des lieux.
Il est loisible aux parties de fixer une proportion plus forte ; le décret du 30 chaoual 1292 (19 novembre 1875) est abrogé sur ce point.
Article 1371 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
La société à métayage est nulle comme tel :
a) lorsque la part du métayer est établie d'avance en une quantité déterminée de produits, fixée à un certain nombre ou à tant de mesures ;
b) lorsque la rétribution du métayer ne consiste pas en une part des produits ou de la récolte.
Dans ces cas, on appliquera les règles du louage d'ouvrage.
Article 1372 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le métayer, qui a reçu une avance de deux cultivateurs différents, est tenu de prêter ses services à celui dont la créance est la plus ancienne, sauf le recours de l'autre cultivateur contre le métayer.
Article 1373 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le cultivateur, qui s'est engagé à acquitter la dette contractée par son métayer envers un précédent propriétaire, assume une obligation personnelle, et il est tenu de l'exécuter alors même qu'à l'échéance, le métayer aurait déjà quitté la ferme, sauf son recours contre le métayer.
Article 1374 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le cultivateur doit fournir gratuitement au métayer les moyens de transporter à la ferme ses effets, sa famille et ses provisions, à concurrence d’un quart de cafis de blé et d’un quart de cafis d’orge, quelle que soit la distance à parcourir ; pour toute quantité de provisions excédant ce chiffre, le métayer doit faire le transport à ses frais.
Article 1375 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le métayer n’est pas tenu de prêter ses services dans un lieu différent de celui indiqué dans le contrat, s’il n’y a stipulation contraire ; dans ce dernier cas, le lieu où le métayer devra prêter ses services ; à défaut de celui qui fait l’objet du contrat, doit être indiqué avec précision, à peine de nullité.
Article 1376 (nouveau) (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le métayer est tenu des obligations suivantes :
1) il doit garder et entretenir le matériel dont il se sert pour son travail,
2) il doit faire les labours et autres travaux nécessaires pour préparer le terrain.
3) tous les travaux nécessaires, avant la complète maturation des récoltes.
4) tous les travaux nécessaires, après la maturation de la récolte.
Article 1377 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le métayer n'est pas tenu de faire des maâounas. S'il en fait, il aura droit à un salaire ainsi qu'il est dit en l'article 1378.
Article 1378 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le métayer n'est tenu de faire aucun travail permanent de construction ou autre devant durer après la fin de l'exploitation, tels que la construction de murs, le forage de puits, le creusement des fossés ou des silos ; tout travail en dehors de ceux énumérés à l'article 1376 doit être payé au métayer sur le taux des salaires pratiqués dans le lieu de situation des biens, ou à dire d'experts en cas de contestation.
Article 1379 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Si le métayer trouve les labours de printemps (rebii) déjà faits, il devra, en quittant, laisser le terrain dans le même état, et n'aura droit à aucune rétribution spéciale pour ce travail. Mais si le terrain n'était point préparé, il n'est tenu de faire ces travaux, à la fin de son contrat, que moyennant un salaire spécial, calculé comme ci-dessus.
Toutefois, si le contrat est renouvelé, il n'aura droit à salaire que pour la première année.
Article 1380 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Si le métayer quitte la ferme sans motif ou s'il néglige son travail, le cultivateur pourra le faire remplacer par un journalier. Le salaire de ce dernier est imputé sur la part de récolte du métayer. Si l'absence du métayer est justifiée par des raisons de santé, ou autres motifs légitimes, le cultivateur ne pourra engager un remplaçant salarié qu'après trois jours d'absence.
Article 1381 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Dans le cas de l'article précédent, le cultivateur ou son régisseur sont crus sur leur affirmation, quant à la quotité du salaire dû à l'ouvrier, pourvu que le chiffre indiqué par eux soit raisonnable ou conforme aux usages du lieu ; en cas de contestation, le salaire sera établi par experts.
Article 1382 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Si le métayer est expulsé par mesure d'ordre public, le cultivateur pourra lui substituer un journalier ou contracter société avec un autre métayer. Le métayer expulsé a le droit de choisir lui-même son remplaçant. Le cultivateur peut s'opposer à ce choix s'il a de justes motifs.
Article 1383 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le cultivateur doit fournir les animaux et les instruments aratoires ; le remplacement des animaux malades ou morts et la réparation des instruments sont à sa charge ; le métayer n'est tenu des détériorations et de la perte de ces choses que si elles proviennent de son fait ou de sa faute ; il ne répond pas de celles qui sont produites par l'usage normal de ces choses ou par un cas fortuit ou de force majeure qui ne lui est pas imputable.
Article 1384 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Si le cultivateur engage un gardien pour l'aire, le salaire de ce dernier est à sa charge. Des métayers se succéderont à tour de rôle avec ce gardien pour la surveillance de l'aire.
Article 1385 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Dans les terres d'Afrikia, le cultivateur n'est pas tenu de louer des ouvriers pour la moisson de l'orge. Pour les autres produits, il n'est pas tenu d'engager plus d'un journalier par métayer ; mais il peut louer pour la moisson un nombre supérieur d'ouvriers. La nourriture des métayers pendant l'époque des labours et des moissons n'est pas à sa charge.
Article 1386 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Dans les terres dites "Eddoukhania", le cultivateur est tenu, pendant le printemps, de fournir des ouvriers pour aider le métayer à arracher les mauvaises herbes. Lorsque ces herbes sont en grande quantité, le métayer devra le cinquième du salaire de ces ouvriers.
Article 1387 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Le cultivateur doit fournir au métayer et à sa famille, les provisions de bouche nécessaires au prix courant et dans la proportion fixée par la coutume locale.
Le registre du cultivateur ou de son régisseur fait foi quant à la quantité et au prix des fournitures, si les quotités qui y sont portées sont vraisemblables, et si les prix correspondent aux prix courants du lieu à la date de la fourniture.
En cas de contestation sur la réalité des fournitures, le cultivateur ou son régisseur seront tenus de prêter serment à l'appui de leur déclaration ; en cas de doute sur les quantités fournies ou sur les prix, le tribunal les déterminera lui-même, ou commettra des experts.
Article 1388 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Toutes avances d'argent faites par le cultivateur au métayer ne pourront être prouvées que par acte notarié. Les frais de cet acte sont à la charge des parties, par moitié.
Article 1389 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
La part du métayer est liquidée sur le produit de la récolte, après déduction de la dîme et autres impôts afférents aux produits du sol ainsi que de la nourriture des animaux de labour et de trait pendant l'été. La nourriture des montures du cultivateur est exclusivement à la charge de ce dernier.
Article 1390 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Sont à la charge du cultivateur, les frais de transport de la dîme au lieu de versement, ainsi que toutes autres contributions portant sur la propriété foncière. Ces charges ne peuvent être imputées sur la part du métayer. Toute clause contraire est sans effet.
Article 1391 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
La remise au métayer de sa part de récolte doit être constatée par une quittance par écrit ; le cultivateur n'est libéré que par la production de cette quittance.
Les frais de notaire et de timbre pour la rédaction de cet acte sont à la charge du cultivateur, si la quittance est notariée.
Article 1392 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Toute réclamation du métayer au sujet de sa part de récolte, et tout recours du cultivateur contre son métayer, ne sont pas recevables s'ils se rapportent aux années antérieures à la date de la dernière quittance.
Article 1393 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
Après l'enlèvement de la récolte, la société du cultivateur et son métayer est résolue de plein droit. Toutes dispositions contraires sont abrogées. Cependant, si le mois d'octobre (style grégorien) est déjà commencé, sans que l'une ou l'autre des parties ait dénoncé le contrat, la société est censée renouvelée pour une autre année agricole, et aucune des parties ne peut la résoudre.
Article 1394 (modifié par la loi n° 2005-80 du 9 août 2005).
La société à métayage n'est pas résolue par le décès du cultivateur. En cas de décès du métayer, le cultivateur pourra le faire remplacer. Dans ce cas, la part de récolte du métayer décédé sera partagée entre le remplaçant et les héritiers du défunt, à proportion du travail effectué par chacun d'eux, le tout à moins que les héritiers du métayer ne demandent à le remplacer eux-mêmes. Si le décès du métayer a lieu au moment de la récolte, ses héritiers auront droit à toute la part des produits qui aurait été due à leur auteur, à condition toutefois d'accomplir le travail de ce dernier.
Parag. II - De la société à champart (mouçakâte) et de la société à complant (moughâraça)
A - De la société à champart (mouçakâte)
Article 1395
La société à champart (mouçakâte) est un contrat par lequel le maître d'une plantation en rapport ou d'une récolte qui a déjà levé charge une autre personne, dénommé colon, de faire les travaux nécessaires jusqu'à la cueillette des fruits, ou l'enlèvement de la récolte, moyennant une part déterminée des produits.
Article 1396
Le champart peut avoir pour objet plusieurs exploitations conjointement moyennant une part prise sur la totalité des produits, s'ils sont de même espèce, ou moyennant une proportion déterminée pour chacune des exploitations, si les produits sont d'espèces différentes.
Article 1397
La société à champart est parfaite par le consentement des parties, et avant toute prise de possession de la part des colons.
Le contrat de champart n'est opposable aux tiers que s'il a été enregistré au lieu de situation des biens.
Article 1398
L'acte devra contenir un état descriptif du fonds, de l'espèce de plantation ou de culture qu'il porte, des moyens d'irrigation dont il est pourvu, ainsi que des animaux et du matériel d'exploitation qui s'y trouvent, s'ils sont compris dans le contrat.
Article 1399
Dans le silence du contrat, le colon est censé avoir droit à l'usage des animaux de labour et de trait, et des instruments agricoles qui se trouvent sur les lieux au moment du contrat.
Article 1400
Dans la société à champart, la part du colon doit être établie en une part ou quotité proportionnelle de produit total.
Dans le silence du contrat, les parties sont présumées s'en être remises, pour la détermination de la part de chacune d'elles, à la coutume locale, et à défaut de coutume, à ce qui sera arbitré par le tribunal au dire d'experts.
Article 1401
La société à champart peut être contractée pour une période déterminée, soit par nombre d'années, soit par récoltes. La dernière année doit toujours finir avec la récolte, quelle que soit l'époque indiquée par les parties.
Dans le silence du contrat, le champart s'entend conclu jusqu'à la récolte ou cueillette.
Article 1402
Lorsque le champart a été fait pour une récolte, et qu'il a pour objet des plantes ou produits qui ont plus d'une portée par an, il est censé fait pour la première récolte seulement, s'il n'y a stipulation contraire.
Article 1403
Le cultivateur est tenu :
1) d'entretenir en bon état de réparation les murs et les baies, ainsi que tous les édifices, canaux, réservoirs, compris dans le fonds, s'il n'y a stipulation contraire ;
2) de remplacer les animaux morts ou malades, s'ils sont compris dans le contrat. Est nulle, toute stipulation qui chargerait le colon de ce remplacement.
Article 1404
Le colon est tenu d'exécuter exactement et avec diligence tous les travaux relatifs à l'exploitation : il doit arracher les mauvaises herbes, veiller à la conservation des plantations et des récoltes, moissonner, dépiquer, mesurer les grains et autres produits, tailler, élaguer et émonder les plantes, greffer les arbres à fruits, féconder les dattiers et autres arbres de même nature, fournir à ses frais les semences, les plantes, les ouvriers, ainsi que les instruments nécessaires et les animaux de labour et de trait, si ces derniers ne se trouvent déjà sur les lieux, ou si ceux qui s'y trouvent ne sont pas suffisants, veiller à l'arrosage, curer les canaux et rigoles, et faire en général, à ses frais et par ses soins, tout ce qui est nécessaire à l'exploitation, selon sa nature.
Article 1405
Les petites réparations, et le remplacement des menus objets qui se détériorent par l'usage, tels que seaux, cordes et autres de ce genre, sont à la charge du colon.
Article 1406
Le colon n'est tenu de faire aucun travail en dehors de ceux qui se rapportent à l'exploitation agricole.
Toute stipulation qui imposerait au colon de faire des travaux de construction, de grosse réparation ou autres travaux permanents, est nulle, à moins qu'un salaire spécial ne soit établi pour ces travaux.
Article 1407
Le colon ne peut céder son contrat en tout ou en partie, sans le consentement du maître.
Article 1408
Le colon peut céder sa part de produits, même avant la récolte, pourvu que cette part soit déterminée au moment de la cession et que la récolte soit près de mûrir.
Article 1409
Dans la société à champart (mouçakâte), le produit net réparti entre le colon et le cultivateur dans les proportions établies par le contrat, et à défaut de contrat, par l'usage, après le prélèvement :
1) des impôts et charges publiques portant sur les produits agricoles ;
2) des frais nécessaires pour le traitement des produits, lorsqu'ils exigent un traitement spécial, à moins qu'il ne soit établi qu'ils seront répartis en nature, ou que l'une des parties sera chargée des frais de traitement.
Article 1410
Si la totalité ou une partie de la récolte est enlevée par un cas fortuit ou de force majeure qui n'est imputable à aucune des parties, le dommage sera supporté par elles dans la proportion où elles ont droit aux produits.
Article 1411
Le colon n'est point tenu de transporter au domicile du cultivateur la part de produits appartenant à ce dernier, à moins de clause expresse.
Lorsque le colon est chargé de ce transport, il aura droit à un salaire si la distance à parcourir dépasse celle fixée au contrat.
Article 1412
La société à champart prend fin :
1) par la résiliation volontairement consentie par les parties ;
2) par l'expiration du temps pour lequel elle a été faite ;
3) par l'impossibilité d'exécution, lorsque le colon est empêché, par un cas de force majeure relatif à sa personne, de faire ou de continuer les travaux de l'exploitation, et ne trouve point de remplaçant offrant de sérieuses garanties de capacité et d'honnêteté, sauf dans le cas où le contrat aurait été fait en considération de son travail personnel ;
4) par l'impossibilité qui résulte de la destruction de la totalité ou de la majeure partie du fonds, ou de la plantation ;
5) par la résolution demandée par l'un des contractants lorsque l'autre partie manque à ses engagements, ou pour d'autres motifs graves. Dans ce cas le tribunal arbitrera les indemnités qui pourraient être dues, soit au maître, soit au colon.
Article 1413
Dans le cas de résolution indiquée au n°3 de l'article précédent, on appliquera les dispositions de l'article 1394.
Cependant, lorsque l'empêchement survient au moment de la maturité des récoltes, le colon ou ses héritiers auront droit à la part de produits stipulée par le contrat.
Article 1414
La déclaration d'insolvabilité du colon ne résout pas la société à champart.
En cas de décès du colon, on appliquera l'article 1394.
Article 1415
La société à champart n'est pas résolue par le décès du cultivateur, ni par son insolvabilité déclarée, sauf l'action en résolution qui appartient aux créanciers, lorsque le contrat a été fait en fraude de leurs droits.
B - De la société à complant (moughâraça)
Article 1416 (modifié par le décret du 13 septembre 1934).
Lorsque la société a pour objet des arbres à fruits ou autres plantes de rapport qu'une des parties, dite colon, se charge de planter et de soigner dans le terrain fourni par le maître, moyennant une part indivise du sol et des arbres lorsqu'ils auront un âge déterminé ou lorsqu'ils seront en rapport, le contrat s'appelle moughâraça (complant).
Le contrat de mogharsa sera reçu par acte authentique.
Article 1417
Le complant peut avoir pour objet plusieurs exploitations différentes, en stipulant des parts différentes dans chacune selon la qualité des terres et la nature des plantations.
Article 1418
Dans la société à complant, la durée du contrat est déterminée par l'époque à laquelle les arbres peuvent commencer à être en rapport ; on ne peut stipuler une durée inférieure à ce délai.
Article 1419
Le colon est tenu de fournir les plantes, les instruments et les animaux, de faire tous les travaux nécessaires pour amender la terre, pour féconder et soigner les arbres.
Article 1420
Le colon peut céder son contrat, à moins qu'il n'ait été stipulé expressément qu'il doit l'exécuter personnellement. Il peut constituer un nantissement sur sa part indivise, dans les conditions déterminées au titre des hypothèques.
Article 1421
Dès que les arbres sont en rapport ou ont atteint l'âge convenu, le sol et les arbres appartiennent par indivis au maître du sol et au colon, dans la proportion établie par le contrat ou par la coutume, à défaut de stipulation à cet égard ; chacune des parties peut, dès lors, demander le partage.
Article 1422
Si les plantations périssent, en totalité, par cas fortuit ou force majeure, après avoir atteint l'âge convenu, le colon aura droit de partager le sol dans les proportions établies au contrat ; si elles périssent avant cette époque, le colon n'aura droit à rien.
Article 1423
Si les arbres plantés par le colon n'ont pas pris, s'ils n'ont pris qu'en partie, ou s'ils sont morts avant d'être parvenus à leur complète croissance, le colon ne peut demander aucun partage du sol et le contrat est résolu sans aucune indemnité, de part ni d'autre.
Si les plantations faites par le colon ont pris seulement dans une partie déterminée de l'exploitation, le colon ne pourra demander le partage que dans cette partie.
Article 1424
Les dispositions relatives à la société à champart (mouçakate) s'appliquent à la société à complant, dans la mesure où elles peuvent recevoir application à ce contrat.
Article 1425
La société à champart est nulle comme telle :
1) s'il est stipulé que le cultivateur fera une partie des travaux d'exploitation ;
2) lorsqu'il est stipulé que le cultivateur percevra seul les produits d'une partie déterminée du fonds qui fait l'objet de l'exploitation ou prélèvera une certaine quantité de produits avant tout partage ;
3) ou que le cultivateur ou le colon fourniront une certaine somme en valeurs ou en effets mobiliers ;
4) lorsque le terme du contrat est trop court pour que le colon puisse percevoir les fruits de la plantation ou de la récolte qui fait l'objet du contrat ;
5) lorsque le contrat a pour objet des arbres dont les fruits sont déjà mûrs, ou des récoltes prêtes à être moissonnées ;
6) lorsque la part du colon est établie d'avance en une quotité fixe, déterminée par nombre, poids ou mesure.
Article 1426
Dans les cas de nullité énumérés à l'article précédant, le colon aura droit à un salaire qui sera établi sur la base des salaires de même nature. Il n'aura droit à aucun salaire s'il n'a pas travaillé.
(Parag. III - Du bail à cheptel)
Article 1427
Le bail à cheptel est une société dans laquelle l'une des parties donne à l'autre, dénommée colon ou preneur, un fonds de bétail pour le garder et l'élever, à condition que les profits seront partagés entre les parties dans les proportions convenues entre elles.
Article 1428
On peut donner à cheptel toutes espèces d'animaux susceptibles de croît ou de profit pour l'agriculture ou le commerce, excepté ceux dont le commerce est défendu par la loi religieuse musulmane.
Article 1429
A défaut de conventions particulières, le croît se partage par moitié entre les parties, et elles sont tenues, chacune, de la moitié des pertes.
Article 1430
On entend par croît les petits des animaux, ainsi que la plus-value que les animaux peuvent acquérir par rapport à l'estimation primitive.
Article 1431 (modifié par le décret du 28 mars 1942).
L'état numératif descriptif et estimatif des animaux remis, figurant au bail, n'en transporte pas la propriété au preneur. Il n'a d'autre objet que de servir de base au règlement à intervenir au jour où le contrat prend fin.
Article 1432
Le colon ou preneur n'est tenu du cas fortuit que lorsqu'il a été précédé de quelque faute de sa part sans laquelle la perte ne serait pas arrivée.
Article 1433
En cas de contestation, le colon ou preneur est tenu de prouver le cas fortuit, et le bailleur est tenu de prouver la faute qu'il impute au preneur.
Article 1434
Le preneur qui est déchargé par le cas fortuit est toujours tenu de rendre compte des peaux des bêtes et de tout ce qui peut en être resté.
Article 1435
Si le cheptel périt en entier sans la faute du preneur, la société est résolue et la perte en est pour le bailleur ; s'il n'en périt qu'une partie, la société continue pour ce qui reste et le preneur ne doit aucune indemnité pour ce qui a péri.
Article 1436
Le preneur profite seul du fumier des animaux donnés à cheptel ainsi que de leur travail, dans la mesure ordinaire et pourvu que ce soit sans dommage pour les bêtes.
Le laitage, la laine et le croit se partagent, le tout sauf les conventions des parties.
Article 1437
On ne peut stipuler :
- que le preneur supportera la perte totale du cheptel, quoiqu' arrivée par cas fortuit et sans sa faute ; - ou qu'il supportera, dans la perte, une part plus grande que dans le profit ; - ou que le bailleur prélèvera, à la fin du bail, quelque chose de plus que le
cheptel qu'il a fourni. Toute convention semblable est nulle.
Article 1438
Le preneur ne peut disposer d'aucune bête du troupeau, soit du fonds, soit du croît, sans le consentement du bailleur, qui ne peut lui-même en disposer sans le consentement du preneur.
Article 1439
Le preneur ne pourra tondre sans en prévenir le bailleur.
Article 1440
S'il n'y a pas de temps fixé pour la durée du bail à cheptel, il est censé fait pour trois ans.
Le bailleur peut en demander plus tôt la résolution, si le preneur ne remplit pas ses obligations ; le colon a le même droit, de son côté.
Article 1441 (modifié par le décret du 28 mars 1942).
A la fin du bail ou lors de sa résolution, le bailleur prélève des animaux de chaque espèce de manière à obtenir un même fonds de bétail que celui qu'il a remis, notamment quant au nombre, à la race, à l'âge, au poids et à la qualité des bêtes ; l'excédent se partage.
S'il n'existe pas assez d'animaux pour reconstituer le fonds de bétail tel qu'il est cidessus défini, le règlement entre les parties se fera, pour les baux antérieurs au 1er septembre 1939, par comparaison entre la valeur des animaux à la fin du bail et leur valeur calculée d'après le cours des marchés au 31 août 1939.
Toute convention, aux termes de laquelle le preneur à la fin du bail ou lors de sa résolution, doit laisser un fonds de bétail d'une valeur égale au prix de l'estimation de celui qu'il aura reçu, est nulle.
Section II
De la société coopérative de travail
Article 1442
La société coopérative de travail est celle par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun leur travail et les profits qu'ils pourront en tirer. Il n'est pas nécessaire que les associés exercent le même métier ni qu'ils résident au même lieu ; est valable, par exemple, la société entre deux tailleurs ou entre un tailleur et un teinturier.
Article 1443
La société coopérative de travail est régie par les dispositions relatives aux sociétés contractuelles, sauf les règles suivantes.
Article 1444
Dans la société coopérative de travail, l'apport de chaque associé consiste dans son travail. Il est permis cependant, de faire des apports en nature tels que des matières premières, des outils, des instruments, pourvu que ce soit dans la mesure exigée pour l'exécution du travail commun. L'apport reste la propriété de l'associé qui l'a apporté.
Article 1445
L'outillage et les approvisionnements achetés sur les fonds communs appartiennent à tous les associés et sont à leurs risques communs.
Article1446
Chaque associé est tenu de deux obligations principales :
a) celle de donner son travail à l'avantage exclusif de la société, et de ne pas l'employer ailleurs à son profit personnel. Il peut travailler cependant à son profit personnel lorsqu'il a accompli tout ce qu'il doit à la société ;
b) celle de garantir, solidairement avec les autres associés, le travail ou l'ouvrage exécuté par eux, dans les cas de détérioration, de malfaçon ou de vice qui leur seraient imputables. Cette obligation existe même après la dissolution de la société.
Article 1447
Les associés sont solidairement responsables de la perte de la chose qui leur a été confiée par le commettant, lors même que cette perte proviendrait du fait d'un seul des associés, sauf leur recours contre celui qui a donné lieu à la responsabilité.
Article 1448
Chacun des associés est le mandataire de tous les autres pour la réception des commandes et le recouvrement du prix des ouvrages faits, sauf stipulation contraire.
Article 1449
Les bénéfices et les pertes se répartissent également entre tous les associés, à moins qu'il n'y ait des motifs de préférence, à raison de l'inégalité du travail accompli par chacun d'eux.
Article 1450
Si un associé est empêché, par suite de maladie ou d'une autre cause imprévue, ou de force majeure relative à sa personne, de prendre part au travail commun, cet empêchement ne lui fait point perdre le droit de participer au gain des autres associés.
Cependant, si l'absence de l'associé se prolonge au-delà de sept jours, les autres associés auront seuls droit aux gains pour toute la durée de l'absence. Toute stipulation contraire est sans effet.
Les associés peuvent aussi, dans le cas d'empêchement permanent, poursuivre l'exclusion de l'associé.
Article 1451
Dans le cas prévu ci-dessus, l'associé qui perd le droit aux bénéfices ne répond pas des obligations contractées par les autres associés, dans le cas des articles 1446 et 1447.
TITRE X
DES CONTRATS ALEATOIRES
Chapitre Premier
Du jeu et du pari Article 1452
Toute obligation ayant pour cause une dette de jeu ou un pari est nulle de plein droit.
Article 1453
Sont nulles également les reconnaissances et les ratifications postérieures des dettes ayant pour cause le jeu ou les paris, les titres souscrits pour en faire preuve, même s'ils sont à l'ordre, ainsi que les cautionnements et sûretés donnés pour les garantir, les dations en paiement, transactions et autres contrats ayant pour cause une dette de cette nature.
Article 1454
L'exception de jeu est opposable aux tiers qui ont prêté des sommes ou valeurs destinées à servir au jeu ou pari, lorsque les tiers connaissaient l'emploi qu'on se proposait de faire de ces sommes.
Article 1455
Tout paiement fait en exécution d'une dette de jeu ou d'un pari est sujet à répétition. Cette disposition s'applique à tout acte valant paiement, ainsi qu'à la remise d'effets de commerce ou d'obligations civiles pour faire preuve de la dette.
Article 1456
Sont réputés aléatoires et soumis aux dispositions des articles 1452 à 1455, les contrats, sur les valeurs publiques ou les marchandises qui ne doivent pas se régler par une livraison effective de titres ou de marchandises, mais par le paiement de la différence entre le prix convenu et le prix courant au moment de la liquidation.
Article 1457
Sont exceptés des dispositions précédentes les jeux et les paris ayant pour objet les courses à pied ou à cheval, le tir à la cible, les joutes sur l'eau, et autres faits tenant à l'adresse et à l'exercice du corps, pourvu:
1) que les valeurs ou sommes engagées ne soient pas promises par l'un des joueurs à l'autre ;
2) que les paris n'aient pas lieu entre simples spectateurs.
TITRE XI
DE LA TRANSACTION
Article 1458
La transaction est un contrat par lequel les parties terminent ou préviennent une contestation moyennant la renonciation de chacune d'elles à une partie de ses prétentions réciproques, ou la cession qu'elle fait d'une valeur ou d'un droit à l'autre partie.
Article 1459
Pour transiger, il faut avoir la capacité d'aliéner, à titre onéreux, les objets compris dans la transaction.
Le mineur autorisé à faire le commerce peut transiger dans les limites de son autorisation pourvu que la transaction ne constitue pas de sa part une pure libéralité.
Article 1460
Le père qui administre les biens de ses enfants, les tuteurs, curateurs et autres administrateurs d'incapables ne peuvent transiger pour ceux dont ils administrent les biens que dans les conditions prescrites pour les aliénations. Il faut en outre :
1) que le droit soit contesté ;
2) que l'on puisse craindre sérieusement, en engageant une action en justice, de perdre la totalité de la créance ou du droit en litige, ou d’engager l’incapable pour la totalité de l’obligation ou du droit réclamé contre lui.
Lorsque la contestation a lieu entre le mineur ou autre incapable, et son père, tuteur ou curateur, le tribunal demandera à l’autorité compétente de nommer un curateur spécial à l’incapable afin de procéder à la transaction.
Article 1461
Les transactions qui intéressent l’Etat, les communes et les administrations publiques, telles que l’administration des habous, sont soumises à des règlements particuliers.
Article 1462
On ne peut transiger sur une question d'état ou d'ordre public, ou sur les autres droits personnels qui ne font pas objet de commerce ; mais on peut transiger sur l'intérêt pécuniaire qui résulte d'une question d'état ou d'un délit.
Article 1463
Ce qui ne peut être l'objet d'un contrat commutatif entre musulmans, ne peut être objet de transaction.
Cependant, les parties peuvent transiger sur des droits ou des choses, encore que la valeur en soit incertaine pour elles.
Article 1464
On ne peut transiger sur le droit aux aliments ; on peut transiger sur le mode de prestation des aliments, ou sur le mode de paiement des arrérages déjà échus.
Article 1465
On peut transiger sur les droits héréditaires déjà acquis moyennant une somme inférieure à la portion légitime établie par la loi, pourvu que les parties connaissent la quotité de la succession.
Article 1466
Lorsque la transaction comprend la constitution, le transfert ou la modification de droits sur les immeubles ou autres objets susceptibles d'hypothèques, elle doit être faite par écrit, et elle n'a d'effet, au regard des tiers, que si elle est enregistrée en la même forme que la vente.
Article 1467
La transaction a pour effet d'éteindre définitivement les droits et les prétentions qui ont été l'objet du contrat et d'assurer à chacune des parties la propriété des choses qui lui ont été livrées et des droits qui lui ont été reconnus par l'autre partie. La transaction sur une dette, moyennant une partie de la somme due, vaut remise du reste et produit la libération du débiteur.
La transaction ne peut être révoquée, même du consentement des parties, à moins qu'elle n'eût eu simplement la nature d'un contrat commutatif.
Article 1468
Les parties se doivent réciproquement la garantie des objets qu'elles se donnent à titre de transaction. Lorsque la partie à laquelle l'objet en litige a été livré, par l'effet de la transaction, en est évincée ou y découvre un vice rédhibitoire, il y a lieu à résolution totale ou partielle de la transaction ou à l'action en diminution de prix dans les conditions établies pour la vente.
Lorsque la transaction consiste en la concession à temps de la jouissance d'une chose, la garantie que les parties se doivent est celle du louage de choses.
Article 1469
La transaction doit être entendue strictement, et quels qu'en soient les termes ; elle ne s'applique qu'aux contestations ou aux droits qui en ont été l'objet.
Article 1470
Si celui qui a transigé sur un droit qu'il avait de son chef, ou en vertu d'une cause déterminée, acquiert ensuite le même droit du chef d'une autre personne ou d'une cause différente, il n'est point, quant au droit nouvellement acquis, lié par la transaction antérieure.
Article 1471
Lorsque l'une des parties n'accomplit pas les engagements qu'elle a pris dans la transaction, l'autre partie peut poursuivre l'exécution du contrat si elle est possible, et à défaut, en demander la résolution, sans préjudice de son droit aux dommages dans les deux cas.
Article 1472
La transaction peut être attaquée : 1) pour cause de violence ou de dol ; 2) pour cause d'erreur matérielle sur la personne de l'autre partie, sur sa qualité,
ou sur la chose qui a fait l'objet de la contestation ;
3) pour défaut de cause, lorsque la transaction a été faite :
a) sur un titre faux ;
b) sur une cause inexistante ;
c) sur une affaire déjà terminée par une transaction valable ou par un
jugement non susceptible d'appel ou de requête civile, dont les parties ou l'une d'elles ignoraient l'existence.
La nullité ne peut être invoquée, dans les cas ci-dessus énumérés, que par la partie qui était de bonne foi.
Article 1473
La transaction ne peut être attaquée pour erreur de droit. Elle ne peut être attaquée pour lésion, si ce n'est en cas de dol.
Article 1474
Lorsque les parties ont transigé généralement sur toutes les affaires qui existaient entre elles, les titres qui leur étaient alors inconnus, et qui auraient été postérieurement découverts, ne sont point une cause de rescision, s'il n'y a dol de l'autre partie. Cette disposition n'a pas lieu lorsque la transaction a été faite par le représentant légal d'un incapable et qu'elle a été déterminée par le défaut du titre lorsque ce titre vient à être retrouvé.
Article 1475
La transaction est indivisible : la nullité ou la rescision d'une partie entraîne la nullité ou la rescision totale de la transaction.
Cette disposition n'a pas lieu :
1) lorsqu'il résulte des termes employés et de la nature des stipulations que les parties ont considéré les clauses de la transaction comme des parties distinctes et indépendantes;
2) lorsque la nullité provient du défaut de capacité de l'une des parties. Dans ce cas, la nullité ne profite qu'à l'incapable dans l'intérêt duquel elle est établie, à moins qu'il n'ait été expressément stipulé que la résolution de la transaction aurait pour effet de délier toutes les parties.
Article 1476
La résolution de la transaction remet les parties au même et semblable état de droit où elles se trouvaient au moment du contrat, et donne ouverture, en faveur de chacune d'elles, à la répétition de ce qu'elle a donné en exécution de la transaction, sauf les droits régulièrement acquis, à titre onéreux, par les tiers de bonne foi.
Lorsque le droit auquel on a renoncé ne peut plus être exercé, la répétition porte sur sa valeur.
Article 1477
Lorsque, malgré les termes employés, la convention dénommée transaction constitue, en réalité, une donation, une vente ou autre rapport de droit, la validité et les effets du contrat doivent être appréciés d'après les dispositions qui régissent l'acte fait sous le couvert de la transaction.
TITRE XII
DU CAUTIONNEMENT
Chapitre Premier
Du cautionnement en général
Article 1478
Le cautionnement est un contrat par lequel une personne s'oblige envers le
créancier à satisfaire à l'obligation du débiteur, si celui-ci n'y satisfait pas lui-même.
Article 1479
Celui qui charge une autre personne de faire crédit à un tiers, en s'engageant à répondre pour ce dernier, répond en qualité de caution, et dans la limite de la somme indiquée par lui, des obligations contractées par le tiers.
S'il n'a pas été fixé de limite, la caution ne répond que jusqu'à concurrence de ce qui est raisonnable, selon la personne à qui le crédit est ouvert.
Ce mandat est révocable tant qu'il n'a pas reçu un commencement d'exécution de la part de celui qui a été chargé d'ouvrir le crédit. Il ne peut être prouvé que par écrit.
Article 1480
Nul ne peut se porter caution s'il n'a la capacité d'aliéner à titre gratuit.
Le mineur ne peut se porter caution, même avec l'autorisation de son père ou tuteur, s'il n'a aucun intérêt dans l'affaire qu'il garantit.
Article 1481
Le cautionnement donné par le malade pendant sa dernière maladie ne vaut que pour le tiers de ses biens, si ses héritiers n'ont consenti à autoriser une obligation plus étendue.
(l'alinéa 2 du présent article est abrogé par la loi n°2000-17 du 7 février 2000).
Article 1482
Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable.
Néanmoins, on peut cautionner une obligation contractée par l'une des personnes énumérées en l'article 6, dans le cas où cette obligation est valable, d'après le présent code.
Article 1483
Le cautionnement peut avoir pour objet une obligation éventuelle (telle que la garantie pour cause d'éviction), future ou indéterminée, pourvu que la détermination puisse être faite par la suite (telle que la somme à laquelle une personne pourra être condamnée par un jugement) ; dans ce cas, l'engagement de la caution sera déterminé par celui du débiteur principal.
Article 1484
On ne peut cautionner une obligation que le fidéjusseur ne pourrait acquitter au lieu du débiteur principal, telle qu'une peine corporelle.
Article 1485
L'engagement de la caution doit être exprès, et ne se présume point.
Article 1486
L'engagement de cautionner quelqu'un ne constitue pas cautionnement, mais celui envers lequel il a été pris a le droit d'en exiger l'accomplissement ; à défaut il a droit aux dommages-intérêts.
Article 1487
Le cautionnement n’a pas besoin d’être accepté formellement par le créancier, mais il ne peut être donné contre sa volonté.
Article 1488
On peut cautionner une obligation à l'insu du débiteur principal, et même contre sa volonté ; mais le cautionnement donné contre la défense expresse du débiteur ne crée aucun lien de droit entre ce dernier et la caution, qui est seulement obligée envers le créancier.
Article 1489
On peut se rendre caution, non seulement du débiteur principal, mais aussi de celui qui l'a cautionné.
Article 1490
Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, sauf en ce qui concerne le terme.
Article 1491
Le cautionnement peut être à terme, c'est-à-dire pour un certain temps, ou à partir d'une certaine date ; il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses.
Article 1492
Lorsque le cautionnement n'a pas été expressément limité à une somme fixe, ou à une partie déterminée de l'obligation, la caution répond aussi des dommages-intérêts et des dépenses encourues par le débiteur principal, à raison de l'inexécution de l'obligation.
La caution ne répond pas des obligations nouvelles contractées par le débiteur principal après la constitution de l'engagement qu'elle a garanti.
Cependant lorsque la caution a expressément garanti l'exécution de tous les engagements contractés par le débiteur à raison du contrat, elle répond, comme le débiteur principal, de toutes les obligations dont ce dernier peut être tenu de ce chef.
Article 1493
Le cautionnement est essentiellement gratuit. Toute stipulation de rétribution est nulle et rend nul le cautionnement comme tel.
Cette règle reçoit exception entre commerçants, pour affaires de commerce, s'il y a coutume en ce sens.
Article 1494
Lorsque la caution reçue par le créancier, en vertu du contrat, est devenue insolvable, il doit en être donnée une autre, ou bien une sûreté équivalente. A défaut, le créancier peut poursuivre le paiement immédiat de sa créance, ou la résiliation du contrat qu'il a conclu sous cette condition.
Si la solvabilité de la caution est seulement devenue insuffisante, il devra être donné un supplément de cautionnement ou une sûreté supplémentaire.
Ces dispositions ne s'appliquent pas : 1) au cas où la caution a été donnée à l'insu du débiteur ou contre sa volonté ; 2) lorsque la caution a été donnée en vertu d'une convention par laquelle le créancier a exigé une telle personne déterminée pour caution. Chapitre II
Des effets du cautionnement Article 1495
Le cautionnement n'entraîne pas solidarité, si elle n'est expressément stipulée.
Dans ce dernier cas, et dans celui où le cautionnement constitue un acte de commerce de la part de la caution, les effets du cautionnement sont régis par les principes relatifs aux obligations solidaires entre débiteurs.
Article 1496
Le créancier n'a action contre la caution que si le débiteur principal est en demeure d'exécuter son obligation.
Article 1497
Néanmoins :
1) si la caution meurt avant l'échéance, le créancier a le droit d'agir aussitôt contre sa succession, sans attendre l’échéance. Dans ce cas, les héritiers qui ont payé auront recours contre le débiteur à l’échéance de l'obligation principale ;
2) l'insolvabilité déclarée de la caution fait échoir la dette à l'égard de celle-ci, même avant l’échéance de la dette principale ; le créancier est autorisé, dans ce cas, à insinuer sa créance dans la masse ;
3) la mort du débiteur fait échoir la dette à l'égard de la succession de celui-ci, mais le créancier ne pourra poursuivre la caution qu'à l’échéance du terme convenu.
Article 1498
La caution a le droit d'exiger que le créancier discute au préalable le débiteur principal dans ses biens meubles et immeubles, en lui indiquant ceux qui sont susceptibles d’exécution, pourvu qu'ils soient situés en Tunisie.
Dans ce cas, il sera sursis aux poursuites contre la caution, jusqu'à la discussion des biens du débiteur principal, sans préjudice des mesures conservatoires que le créancier pourra être autorisé à prendre contre la caution. Si le créancier possède un droit de gage ou de rétention sur un bien meuble du débiteur, il devra se payer sur cet objet, à moins qu'il ne soit affecté à la garantie d'autres obligations du débiteur, et qu'il soit insuffisant à les payer toutes.
Article 1499
La caution ne peut demander la discussion du débiteur principal :
1) lorsqu'elle a renoncé formellement à l'exception de discussion, et notamment lorsqu'elle s'est engagée solidairement avec le débiteur principal ;
2) dans le cas où les poursuites et l'exécution contre le débiteur principal sont devenues notablement plus difficiles par suite du changement de résidence ou de domicile de ce dernier, ou de son établissement industriel, depuis la constitution de l'obligation ;
3) lorsque le débiteur principal est en état de déconfiture notoire ou d'insolvabilité déclarée ;
4) lorsque les biens qui peuvent être discutés sont litigieux, ou grevés d’hypothèques qui absorbent une grande partie de leur valeur, ou évidement insuffisants pour désintéresser le créancier, ou bien encore lorsque le débiteur n'a sur les biens qu'un droit résoluble.
Article 1500
Lorsque plusieurs personnes ont cautionné la même dette par le même acte, chacune d'elles n'est obligée que pour sa part et portion. La solidarité entre cautions n'a lieu que si elle a été stipulée, ou lorsque le cautionnement a été contracté séparément par chacune des cautions pour la totalité de la dette, ou lorsqu'il constitue un acte de commerce de la part des cautions.
Article 1501
La caution de la caution n'est obligée envers le créancier que si le débiteur principal et toutes les cautions sont insolvables, ou si la caution est libérée au moyen d'exceptions qui lui sont exclusivement personnelles.
Article 1502
La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions tant personnelles que réelles qui appartiennent au débiteur principal, y compris celles qui se fondent sur l'incapacité personnelle de ce dernier. Elle a le droit de s'en prévaloir, encore que le débiteur principal s'y oppose ou y renonce. Elle peut même opposer les exceptions qui sont exclusivement personnelles à ce dernier, telles que la remise de la dette faite à la personne du débiteur.
Article 1503
La caution peut agir en justice contre le débiteur principal, afin d'être déchargée de son obligation :
1) lorsqu'elle est poursuivie en justice pour le paiement, et même avant toute poursuite, dès que le débiteur est en demeure d'exécuter l'obligation ;
2) lorsque le débiteur s'est obligé à lui rapporter la décharge du créancier dans un délai déterminé, si ce terme est échu ; au cas où le débiteur ne pourrait rapporter cette décharge, il devra payer la dette ou donner à la caution un gage ou une sûreté suffisante ;
3) lorsque les poursuites contre le débiteur sont devenues notablement plus difficiles par suite du changement de résidence ou de domicile du débiteur, ou de son établissement industriel.
La caution qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article 1509 ne peut invoquer le bénéfice des dispositions précédentes.
Article 1504
La caution peut agir contre le créancier, afin d'être déchargée de la dette, si le créancier diffère à réclamer l'exécution de l'obligation aussitôt qu'elle est devenue exigible.
Article 1505
La caution qui a valablement éteint l'obligation principale a son recours, pour tout ce qu'elle a payé, contre le débiteur, même si le cautionnement a été donné à l'insu de ce dernier. Elle a recours également pour les frais et les dommages qui ont été la conséquence légitime et nécessaire du cautionnement.
Tout acte de la caution, en dehors du paiement proprement dit, qui éteint l'obligation principale et libère le débiteur, vaut paiement, et donne ouverture au recours de la caution pour le principal de la dette et les frais y relatifs.
Article 1506
La caution qui a payé n'a de recours contre le débiteur principal, que si elle peut représenter la quittance du créancier, ou une autre pièce constatant l'extinction de la dette.
La caution qui a payé avant le terme n'a de recours contre le débiteur qu'à l'échéance de l'obligation principale.
Article 1507
S'il y a plusieurs cautions solidaires, celle qui a payé le tout, à l'échéance, a également recours contre les autres cautions, chacune pour sa part et portion, ainsi que pour la part des répondants solidaires insolvables.
Article 1508
La caution qui a transigé avec le créancier n'a de recours contre le débiteur et les autres cautions que jusqu'à concurrence de ce qu'elle a effectivement payé ou de sa valeur, s'il s'agit d'une somme déterminée.
Article 1509
La caution qui a valablement acquitté la dette est subrogée aux droits et aux privilèges du créancier contre le débiteur principal, à concurrence de tout ce qu'elle a payé, et contre les autres cautions, à concurrence de leurs parts et portions. Cette subrogation ne modifie pas, cependant, les conventions particulières intervenues entre le débiteur principal et la caution.
Article 1510
La caution n'a point de recours contre le débiteur :
1) Lorsqu'elle a acquitté une dette qui la concerne personnellement quoiqu'elle fût, en apparence, au nom d'un autre ;
2) Lorsque le cautionnement a été donné malgré la défense du débiteur ;
3) Lorsqu'il résulte de la déclaration expresse de la caution ou des circonstances que le cautionnement a été donné dans un esprit de libéralité.
Article 1511
La caution n'a aucun recours contre le débiteur principal, lorsqu'elle a payé ou s'est laissée condamner en dernier ressort sans avertir le débiteur, si le débiteur justifie qu'il a déjà payé la dette, ou qu'il a des moyens d'en prouver la nullité ou l'extinction. Cette disposition n'a pas lieu toutefois, lorsqu'il n'a pas été possible à la caution d'avertir le débiteur, dans le cas par exemple où celui-ci était absent.
Chapitre III
De l'extinction du cautionnement Article 1512
Toutes les causes qui produisent la nullité ou l'extinction de l’obligation principale, éteignent le cautionnement.
Article 1513
L'obligation qui résulte du cautionnement s'éteint par les mêmes causes que les autres obligations, même indépendamment de l'obligation principale.
Article 1514
Le paiement fait par la caution libère à la fois la caution et le débiteur principal; il en est de même de la délégation donnée par la caution et acceptée par le créancier et par le tiers délégué, de la consignation de la chose due lorsqu'elle est valablement faite, de la dation en paiement, de la novation consentie entre le créancier et la caution.
Article 1515
La caution peut opposer la compensation de ce qui est dû par le créancier au débiteur principal. Elle peut aussi opposer la compensation de ce que le créancier lui doit à elle même.
Article 1516
La remise de la dette accordée au débiteur libère la caution ; celle accordée à la caution ne libère pas le débiteur ; celle accordée à l'une des cautions sans le consentement des autres, libère celles-ci pour la part de la caution à qui la remise a été accordée.
Article 1517
La novation opérée à l'égard du débiteur principal libère les cautions à moins qu'elles n'aient consenti à garantir la nouvelle créance. Néanmoins, lorsque le créancier a stipulé l'accession des cautions à la nouvelle obligation, et que celles-ci refusent de la donner, l'ancienne obligation n'est pas éteinte.
Article 1518
La confusion qui s'opère entre le créancier et le débiteur principal libère la caution. Si le créancier laisse d'autres héritiers, la caution sera déchargée jusqu'à concurrence de la part du débiteur.
La confusion qui s'opère entre le créancier et la caution ne libère point le débiteur principal.
La confusion qui s'opère dans la personne du débiteur principal et de sa caution, lorsqu'ils deviennent héritiers l'un de l'autre, éteint le cautionnement, et ne laisse subsister que la dette principale ; cependant le créancier conserve son action contre celui qui s'est rendu caution de la caution, et retient les sûretés qu'il s'est fait donner pour garantir l'obligation de la caution.
Article 1519
La prorogation du terme accordée par le créancier au débiteur principal profite à la caution à moins qu'elle n'ait été accordée à raison de l'état de gêne du débiteur.
La prorogation du terme accordée par le créancier à la caution ne profite pas au débiteur principal, à moins de déclaration contraire du créancier.
La prorogation du terme accordée par le créancier au débiteur libère la caution si le débiteur était solvable au moment où la prorogation lui a été accordée, à moins que la caution n'y ait consenti.
Article 1520
L'interruption de la prescription à l'égard du débiteur principal s'étend à la caution. La prescription accomplie en faveur du débiteur principal profite à la caution.
Article 1521
Lorsque le créancier a accepté volontairement, en paiement de sa créance, une chose différente de celle qui en était l'objet, la caution, même solidaire, est déchargée, encore que le créancier vienne à être évincé de la chose, ou qu'il la restitue à raison de ses vices cachés.
Article 1522
Le décès de la caution n'éteint pas le cautionnement ; l'obligation de la caution passe à sa succession.
Chapitre IV
Du cautionnement de comparution
Article 1523
Le cautionnement de comparution est l'engagement par lequel une personne s'oblige à présenter en justice ou à faire comparaître une autre personne à l'échéance de l'obligation ou quand besoin sera.
Article 1524
Celui qui ne peut aliéner à titre gratuit, ne peut se porter caution de comparution.
(l'alinéa 2 du présent article est abrogé par la loi n°2000-17 du 7 février 2000).
Article 1525
Le cautionnement de comparution doit être exprès.
Article 1526
La caution doit présenter celui qu'elle a cautionné, dans le lieu indiqué par la convention ; si aucun lieu n'a été déterminé, le cautionné devra être présenté dans le lieu du contrat.
Article 1527
La caution de comparution est libérée, si elle présente le cautionné, ou si celuici se présente volontairement lui-même, au jour fixé, dans le lieu convenu ; la présentation du cautionné avant le jour fixé ne suffirait point à libérer la caution.
Article 1528
Si, au jour de l’échéance, le cautionné se trouve au pouvoir de la justice pour d’autres motifs, et que le créancier en soit informé, la caution est libérée.
Article 1529
La caution est tenue de la dette principale, si elle ne présente pas le cautionné au jour fixé. Elle est déchargée, si le cautionné se présente après cette date ; mais si un jugement est déjà intervenu prononçant la condamnation de la caution, la comparution du cautionné ne suffirait pas pour faire révoquer le jugement.
Article 1530
Le décès du cautionné libère la caution. L’état de déconfiture notoire ou l'insolvabilité déclarée du cautionné ont le même effet.
Article 1531
La caution qui a été condamnée à payer, faute de présenter le débiteur, a le droit de faire révoquer la condamnation, si elle prouve qu’à la date du jugement le cautionné était mort ou insolvable.
Si la caution a exécuté le jugement qui la condamne, elle a recours contre le créancier, à concurrence de la somme payée, dans les conditions établies pour la répétition de l’indû.
TITRE XIII
DU NANTISSEMENT
Dispositions générales
(les articles 1532 à 1612 inclus ont été abrogés par la loi 65-5 du 12 février 1965, portant promulgation du Code des Droits Réels).
Chapitre II
Du nantissement immobilier De l'antichrèse
(les articles 1613 à 1622 inclus ont été abrogés par la loi n° 58-1 du 28 janvier 1958, portant prohibition des transactions par contrats de vente à réméré, vente à livrer avec avance de prix et d'antichrèse).
TITRE XIV
DES DIFFERENTES ESPECES DE CREANCIERS
(les articles 1623 à 1632 inclus ont été abrogés par la loi 65-5 du 12 février 1965, portant promulgation du Code des Droits Réels).