Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Marocads.com – SA contre Omar Farki

Litige No. D2015-1000

1. Les parties

Le Requérant est Marocads.com – SA de Rabat, Maroc, représenté par Cabinets JURISnet, Maroc.

Le Défendeur est Omar Farki de Saint Jean la Ruelle, France, représenté par soi-même.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le litige concerne le nom de domaine <hespress.org>.

L’unité d’enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine est enregistré est OVH.

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Marocads.com – SA auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 11 juin 2015.

En date du 12 juin 2015, le Centre a adressé une requête à l’unité d’enregistrement du nom de domaine litigieux, OVH, aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. Le 16 juin 2015, l’unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre confirmant l’ensemble des données du litige. Le Requérant a envoyé deux courriels au Centre le 17 et 18 juin 2015 auxquels a répondu le Défendeur par courriel le 19 juin 2015.

Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Conformément aux paragraphes 2(a) et 4(a) des Règles d’application, le 22 juin 2015, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur. Conformément au paragraphe 5(a) des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 12 juillet 2015. Le Défendeur a envoyé quatre courriels au Centre en date des 19, 22, et 24 juin 2015 et 9 juillet 2015 avant de faire parvenir sa réponse finale le 12 juillet 2015.

En date du 29 juillet 2015, le Centre nommait dans le présent litige comme expert unique J. Nelson Landry. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

En date du 26 août 2015, le Centre faisait parvenir une Ordonnance de Procédure No. 1 par laquelle l’expert unique exigeait du Requérant de fournir des preuves de ses activités avec le nom de domaine du Requérant enregistré en 2007 et de la notoriété acquise qui permettrait d’apprécier si l’emploi de ce dernier a généré des droits de marque de commerce non enregistrée et de plus, de produire à l’égard de son journal électronique et de celui du Défendeur des preuves que le site de ce dernier offre les mêmes prestations que celles offertes sur le site du Requérant d’une part, et d’autre part, exiger du Défendeur une preuve documentaire de son affirmation à l’effet que le terme “hespress” est un nom propre (le nom de certains jardins mythiques) et que c’est le nom phonétique d’un journal apparu pour la première fois en 1927, toujours existant, et que le journal électronique du Défendeur offre les mêmes prestations que celles offertes par le Requérant.

Chacune des parties avait jusqu’au 1er septembre 2015 pour faire parvenir au Centre la preuve et les documents demandés et chacune des parties avait jusqu’au 7 septembre 2015 pour répondre et commenter la documentation envoyée par l’autre partie. Chacune des parties a envoyé de l’information avec référence à des sites Web comme preuve et chacune a commenté la nouvelle preuve soumise par l’autre partie, le Requérant très brièvement sur un seul point et le Défendeur de façon plus détaillée.

4. Les faits

Le nom de domaine <hespress.com> du Requérant a été enregistré le 15 février 2007.

Le Défendeur a enregistré le nom de domaine litigieux <hespress.org> le 12 octobre 2009.

La marque de commerce HESPRESS.COM a été enregistrée par le Requérant auprès de l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (“OMPIC”) le 8 mars 2012 en liaison avec les classes 35, 41 et 42 (ci-après “la Marque HESPRESS.COM”). Le Requérant soumet avoir utilisé cette marque pour enregistrer les noms de domaine <hespress.com> et <hespress.ma>.

Le Requérant exploite un site d’information en ligne, journal électronique, à l’adresse “www.hespress.com”, lequel journal a été déclaré légal ou officiel le 3 juillet 2013 par les autorités compétentes de presse au Maroc.

Le Requérant n’a pas autorisé le Défendeur à utiliser le mot “hespress” pour enregistrer le nom de domaine litigieux.

5. Argumentation des parties

A. Requérant

Nom de domaine litigieux porte à confusion avec la marque du Requérant

Le Requérant soumet qu’il est titulaire de la Marque HESPRESS.COM enregistrée en 2012 et bénéficie des droits exclusifs sur son utilisation. Il soumet de plus que le Défendeur a cybersquatté le nom de domaine du Requérant pour créer le nom de domaine litigieux, lequel est semblable au point de prêter à confusion avec la Marque HESPRESS.COM et pour lancer un journal électronique concurrent à celui du Requérant. Le Requérant soumet de plus que son journal est le premier portail d’information Web en arabe au Maroc avec une courbe de lectorat en constante croissance, selon un rapport Google Analytics couvrant le seul mois de décembre 2013, divulguant la visite de 6,856,578 internautes sur ce site au cours de ce mois (Annexe 5).

Le Requérant allègue que la notoriété de son journal électronique a fait l’objet de plusieurs actes de typosquatting dont plusieurs ont été réglés à l’amiable sauf un porté devant le Centre de l’OMPI qui aurait été en sa faveur, voir Hassane EL GUENNOUNI c. Mr. Abderrahim El yaakobi, Litige OMPI No. D2014-0564.

Droits et intérêts légitimes du Défendeur

Le Requérant soumet détenir un droit privatif sur le mot “hespress” aussi bien comme marque de commerce que comme nom de domaine, et que le Défendeur n’a aucun droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux. Le Requérant affirme n’avoir jamais autorisé le Défendeur à utiliser le mot “hespress” pour enregistrer le nom de domaine litigieux.

Nom de domaine enregistré et utilisé de mauvaise foi

Le Requérant représente que le site d’informations en ligne “www.hespress.com”, exploité par ce dernier comme journal déclaré officiel ou légal le 3 juillet 2013, est le premier journal d’information électronique au Maroc. Selon le Requérant, le Défendeur ne pouvait ignorer son existence. Le Requérant soumet que le Défendeur a voulu profiter de la notoriété de son journal pour créer un journal électronique à l’adresse du nom de domaine litigieux qui offre les mêmes prestations que celles du Requérant.

Le Requérant prétend que le but évident du Défendeur était ainsi de profiter de l’audience notoire du Requérant pour tromper ses lecteurs, les détourner vers son site et ainsi exercer un parasitage commercial et une concurrence déloyale en soulignant que le journal du Défendeur, non déclaré auprès des autorités, n’est pas légal au Maroc tel que la loi l’exige.

B. Défendeur

Le Défendeur, qui se représente lui-même, soumet qu’il a enregistré le nom de domaine litigieux en octobre 2009, trois ans avant que la Marque HESPRESS.COM ne soit déposée et enregistrée en mars 2012. De plus il soumet que le terme “hespress” est le nom de certains jardins mythiques ainsi que le nom phonétique d’une revue apparue pour la première fois en 1927, et en réponse à l’Ordonnance de Procédure No. 1, il fournit une preuve documentaire, comprenant six références spécifiques a des sites Web. La Commission administrative note spécifiquement celui-ci : “http://wadod.net/bookshelf/book/2443”. Il s’agit du livre 2862 d’un groupe d’auteurs, publié par Publication de l’Université Mohammed V. On y lit : «Profil : Hespress Tamoda publié pour la première fois en 1921 et a été l’une des revues sérieuses publiées par l’institut des Hautes Etudes du Maroc…. Le magazine Hespress émis depuis la publication en langues, anglais, espagnol et internationaux français, à partir de l’an 1991 est devenu la langue arabe de langues dans lesquelles à écrire » (texte écrit en arabe et traduction de Google). Enfin, le Défendeur mentionne que les couleurs revendiquées de la Marque ou de HESPRESS.COM sont le bleu et le blanc, alors que celles du nom de domaine litigieux tendent plutôt vers le rouge et le blanc, et soumet que la comparaison devrait se faire entre <hespress.com> et <hespress.org> alors que “hespress” n’est pas un nom de domaine, donc il ne peut y avoir d’ambigüité ou de confusion.

Relativement à la mention d’avoir profité de cybersquattage, le Défendeur souligne avec fichier à l’appui qu’il y a eu 2.500 sessions sur le site du nom de domaine litigieux le mois dernier (soit juin 2015) après cinq ans d’existence et un travail acharné depuis la fin de 2014. De plus, le Défendeur souligne qu’il n’a jamais mis une seule publicité sur son site depuis sa création jusqu’au 7 mars 2015, site sur lequel il a créé et travaillé pendant plusieurs années.

Le Défendeur souligne de plus que le journal HESPRESS.COM, visant un public marocain, est écrit en arabe et ne parle que du Maroc alors que son site “www.hespress.org” vise un public français et un public international, tel que la France, les États-Unis, et l’Arabie Saoudite, sous trois langues, français comme langue principale, l’anglais, et l’arabe, tel que mentionné dans un courriel envoyé au Centre et à l’avocat du Requérant le 24 juin 2015 : “mon site n’a aucun rapport avec le Maroc, ni au niveau du contenu ni au niveau des serveurs”.

6. Discussion et conclusions

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Bien que la Commission administrative note en premier lieu que dans les décisions, la jurisprudence UDRP a établi que l’antériorité de l’enregistrement ou de la présence d’une marque de commerce non enregistrée relatif à l’enregistrement du nom de domaine litigieux n’est pas déterminante dans l’analyse requise sous le du premier critère de l’UDRP, la Commission administrative va étudier si le Requérant a un droit de marque non enregistrée depuis le 15 février 2007.

Droit de marque du Requérant

La Marque HESPRESS.COM dont se réclame le Requérant a été enregistrée le 8 mars 2012. Le Requérant revendique avoir enregistré le nom de domaine <hespress.com> le 15 février 2007, avant l’enregistrement du nom de domaine litigieux. L’emploi du nom “hespress.com” par le Requérant, du 15 février 2007 au 12 octobre 2009, date d’enregistrement du nom de domaine litigieux, n’est qu’une allégation dans la plainte, sans aucun fait qui permette à la Commission administrative d’examiner la preuve et observer l’emploi d’une marque de commerce non enregistrée. Le Requérant, en réponse à l’Ordonnance de Procédure No. 1, a fourni certains éléments de preuve, lesquels, selon ce dernier, supporteraient son affirmation que son nom de domaine <hespress.com> bénéficierait du statut et des droits de marque de commence non enregistrée et jouissait d’une notoriété.

Le Requérant fait état de sa notoriété lors de la reconnaissance du caractère légal et officiel de son journal électronique au Maroc en 2013, mais la seule preuve dans sa demande est le rapport Google analytics pour la période du 1er au 31 décembre 2013 qui mentionne 6,856,578 visiteurs internautes, mais ne mentionne aucun début d’usage ou calcul avant le mois de décembre 2013, encore moins avant 2009. La Commission administrative, par l’Ordonnance de Procédure No. 1, a demandé des éléments de preuve soutenant les prétentions du Requérant que l’usage du nom de domaine <hespress.com> a été important et développé une notoriété et jouit d’un statut de marque de commerce non enregistrée qu’il revendique au moment où le Défendeur enregistre le nom de domaine litigieux.

Alors que le Requérant, dans son Annexe 5 à la demande, donne le nombre de visiteurs sur son site Web du 1er au 31 décembre 2013, la Commission administrative constate que le Requérant, en réponse à l’Ordonnance de Procédure No. 1, est constituée de 11 liens de “hespress” référencés sur le moteur de recherche Google pour la période 2007-2009, dont un Google Analytics, et des références à des articles publiés commentant son site.

Le Défendeur commente le rapport Google Analytics de février 2007 à décembre 2009 en soulignant le chiffre de 16 millions d’internautes (visiteurs uniques). La Commission administrative a localisé ledit rapport Google pour cette période. Elle observe dans un premier temps qu’on y indique que seulement 24,3% sont des «nouveaux visiteurs» alors que 75,7% sont des «anciens visiteurs (returning visitors)» et observe de plus que dans le diagramme de cette période, quoique progressif, il y a quatre pointes très basses qui indiqueraient absence ou très peu de visiteurs. Elle a effectué d’autres recherches et a pu localiser de l’information sur le site de WayBackMachine relativement à la période du 19 février 2007 jusqu’au 8 septembre 2015 mais n’a pas réussi à dégager les quantités spécifiques analogues à celles de Google telles que reflétées dans le diagramme WayBackMachine qu’elle a consulté, lequel est reproduit en Annexe A à la présente, dans laquelle elle commente son analyse des diagrammes.

L’observation des périodes d’absence de visiteurs pendant 10 mois de 2007 à 2009 notée dans l’Annexe A ne concorde pas bien avec le rapport Google Analytics qui ne montre que quatre pointes basses ou nulles pour la période de 2007 à 2009. Cet élément du nombre d’utilisateurs n’est cependant qu’un facteur d’appréciation parmi les autres à prendre en considération. L’absence d’autres éléments de preuve mentionnés dans la section 1.7 de la Synthèse des avis des commissions administratives de l’OMPI sur certaines questions relatives aux principes UDRP, deuxième édition, “Synthèse version 2.0” ci-après ne permet pas à la Commission administrative de conclure que seul l’emploi du nom de domaine <hespress.com> pendant cette période, 2007 à 2009, puisse constituer un usage avec une reconnaissance telle qu’elle était en présence d’une marque de commerce non enregistrée dite de common law (voir le paragraphe 1.7 de la Synthèse version 2.0).

Dans la section 1.7 de la Synthèse version 2.0 le lecteur peut lire les exigences applicables au fardeau de la preuve pour démontrer comment un terme ou des termes peuvent être considérés comme marque de commerce non enregistrée. On y lit que la preuve comprend la durée d’usage, le volume de ventes sous la marque, la nature et l’étendue de la publicité, les sondages de consommateurs, et la reconnaissance par les médias. Dans le cas présent nous n’avons aucun élément de preuve de volume de visiteurs internautes, de publicité, ni de perception du consommateur ou visiteur du site par sondage ou autrement.

La Commission administrative note que les quelques articles de revues ou journal électronique soumis sous forme d’adresse de site Web archive 2007 à 2009 pour attester de la notoriété du journal électronique du Requérant et commentés par le Défendeur en réponse, ce dernier n’y trouve aucun résultat d’ordre quantitatif et de plus certaines observations dans les articles de la version française sont introuvables ou n’existent plus et les dits articles sont peu nombreux. Le Défendeur note de plus que certains de ces articles étaient déjà publiés antérieurement, en mai 2006, tel le premier article sur “www.almaghribia.ma” et un autre sur “www.al-jazirah.com”, en avril 2006. De plus, le Défendeur soumet qu’il n’y a pas un seul article qui parle de HESPRESS.COM comme journal, son histoire, sa particularité, ou sa politique, seulement des sujets d’actualité de l’époque tels la monarchie marocaine traitée dans six articles dont quatre en espagnol et deux sur le piratage qui citent le journal du Requérant, HESPRESS.COM. La Commission administrative retient que ces informations n’attestent pas sérieusement de la notoriété et elles ne comblent pas cette lacune pour la période avant l’enregistrement du nom de domaine litigieux.

Dans un premier temps le nom de domaine <hespress.com> a été enregistré en 2007, le nom de domaine litigieux <hespress.org> a été enregistré en 2009, et enfin la Marque HESPRESS.COM a été enregistrée en 2012. Quelle preuve la Commission administrative a-t-elle pour déterminer si le nom de domaine du Requérant a été utilisé régulièrement et reconnu de façon telle qu’il puisse être considéré comme une marque de commerce en octobre 2009 lors de l’enregistrement du nom de domaine litigieux? Aucune satisfaisante, conclut-elle. La Commission administrative considère cette preuve insuffisante pour lui permettre de conclure que lors de l’enregistrement du nom de domaine litigieux en octobre 2009, le nom de domaine <hespress.com> jouissait de droits ou du statut de marque non enregistrée.

Similitude prêtant à confusion

Relativement à la vraisemblance de confusion, dans le cas présent, la partie distinctive de la Marque HESPRESS.COM est le terme “hespress” que l’on retrouve intégralement dans le nom de domaine litigieux. De plus l’ajout ou la considération d’un suffixe tel “.org” dans le nom de domaine litigieux sous considération différent du suffixe “.com” dans le nom de domaine <hespress.com> ne diminue en rien la vraisemblance de confusion qui est évidente à la considération du seul mot “hespress” dans le nom de domaine litigieux et la Marque HESPRESS.COM, nonobstant le fait qu’elle a été enregistrée en 2012. La confusion est présente telle que le détermine la Commission administrative.

La Commission administrative retient que le premier critère posé au paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs est rempli.

B. Droits ou intérêts légitimes

Le Requérant soumet qu’il n’a jamais autorisé le Défendeur à utiliser le “mot HESPRESS” pour enregistrer le nom de domaine litigieux. L’expression “mot HESPRESS” précitée textuellement est celle utilisée par le Requérant dans la plainte sous “Aucun droit ni intérêt légitime”. Le Requérant prétend détenir un droit exclusif sur le mot “hespress” autant comme marque de commerce que comme nom de domaine de sorte que le Défendeur ne peut se réclamer de quelque droit ou intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux.

La Commission administrative a déterminé que le Requérant n’avait pas de droit de marque non enregistrée sur HESPRESS.COM découlant de l’usage, ni de notoriété lors de l’enregistrement du nom de domaine litigieux.

Le Défendeur n’a pas nié, ni commenté être au courant du journal électronique du Requérant lors de l’enregistrement du nom de domaine litigieux. D’ailleurs, le Défendeur souligne que le terme “hespress” est le nom de certains jardins mythiques et de plus c’est le nom phonétique d’un journal apparu pour la première fois en 1921 sans préciser davantage, et suite à l’Ordonnance de Procédure No. 1, ce dernier a apporté la preuve de l’appellation “hespress” reconnue pour ces jardins mythiques et note que le Requérant n’a fourni aucun commentaire sur cette preuve.

La Commission administrative détermine donc qu’au moment de l’enregistrement du nom de domaine litigieux, en 2009, le Requérant ne détenait aucun droit de marque non enregistré sur son nom de domaine et n’était donc pas en mesure d’accorder ou refuser quelque consentement que ce soit au Défendeur. Le terme “hespress” est un terme générique connu et disponible pour usage par le public.

Vu les conclusions de la Commission administrative sous le paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs, voir ci-dessous, il n’est pourtant pas nécessaire pour la Commission administrative de faire des conclusions relatives au paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Le Requérant prétend à la mauvaise foi du Défendeur lors de l’enregistrement du nom de domaine litigieux en invoquant les faits que ce journal du Requérant a été déclaré officiel le 3 juillet 2013, est le premier journal d’information au Maroc, et que le Défendeur ne pouvait donc en ignorer l’existence. Est-ce que le Défendeur, comme le prétend le Requérant, a voulu profiter de la notoriété du journal du Requérant pour créer un journal électronique concurrent qui offre les mêmes prestations que celles du Requérant?

Les représentations du Requérant soulèvent beaucoup de difficultés lorsqu’on considère la preuve antérieure au 12 octobre 2009, lors de l’enregistrement du nom de domaine litigieux, pour apprécier le comportement de bonne ou mauvaise foi du Défendeur et la nature respective des journaux électroniques du Défendeur par rapport à celui du Requérant pour déterminer la mauvaise foi alléguée du Défendeur soit lors de l’enregistrement du nom de domaine, soit lors de son usage.

Les droits que le Requérant prétend avoir ou pourrait avoir sur la Marque HESPRESS.COM en 2009 lors de l’enregistrement du nom de domaine litigieux ont été examinés par la Commission administrative ci-dessus et elle a conclu que faute de preuves satisfaisantes, le Requérant ne jouissait pas de droit de marque non enregistrée à ce moment.

Le Requérant soutient que le Défendeur présente sur son site Web à l’adresse du nom de domaine litigieux des prestations dans son journal électronique identiques ou semblables à celles du Requérant et s’adonne a du parasitage commercial. Sur ce dernier point, le Défendeur affirme n’avoir aucune publicité. Sur le dossier présent, la Commission administrative ne voit pas de fondement à l’allégation de parasitage commercial.

La Commission administrative a effectué une recherche sur Google relativement au terme “hespress”. Dès les premiers résultats, nous retrouvons, en premier lieu, le nom de domaine <hespress.com> du Requérant qui y est identifié “Hespress Officiel-est une source centrale d’informations et de nouvelles sur le Maroc”. Cette mention est suivie de six courtes phrases en langue arabe, chacune incorporant le terme “hespress”. D’autres entrées “hespress” suivent tels HESPRESS I Facebook, Hespress sport, Hespress-Officiel – You-tube, et Maroc Hespress et en seconde page, nous retrouvons hespress.org avec l’adresse exacte du nom de domaine litigieux et on y lit “À la Une : Retrouvez l’actualité en France, à l’international, l’actualité économique, politique et surtout ce que vous cache les médias avec Hespress France”. La Commission administrative note que dans ce dernier cas, il n’y a aucune mention du Maroc ni d’expression ou phrases en langue arabe ou script semblable à ce que nous retrouvons dans les six entrées susmentionnées pour <hespress.com>.

La Commission administrative a également voulu constater par elle-même le contenu du journal électronique du Défendeur sous le nom de domaine litigieux et elle a ainsi visité le site Web le 28 août 2015 relativement à la version française, anglaise, et arabe. Dans la version française dont elle a imprimé les 24 pages, on y remarque à la une un article portant sur “Le bureau politique sur le front national en France avec le conflit de Madame Le Pen et son père” et également un second article portant sur “l’Arabie Saoudite est devenu une puissance nucléaire”; il est important de noter que dans chacun des articles il y a référence à des sites Web particuliers. Nous retrouvons ensuite des pages sur la gastronomie française et la nourriture saine, avec photographies (pages 3 à 14) et des thèmes d’articles divers entre autres “le spécialiste du Maroc, cours d’italien en Italie, cinq aliments interdits, noms de famille au Canada, technologie, dette grecque, aide sociale». La version anglaise reprend avec photographies les mêmes nombreuses pages portant sur la cuisine, la restauration, et les aliments (pages 2 à 20); la politique en France; et Napoléon. Enfin, la version arabe comprend également 22 pages dont les titres sont en arabe mais une section très importante parait correspondre aux quelques nombreuses pages sur la nourriture et les menus, du fait qu’on y retrouve les mêmes photographies.

La Commission administrative a également consulté les liens que le Requérant a mentionné dans sa Réponse à l’Ordonnance de Procédure relativement à des articles pour la période des années 2007 à 2009 à l’adresse “www.hespress.com/archive/2007/9”. Ce site comprend 21 pages chacune portant la mention générale de contenu notamment : “Quatrième Puissance, Marocains Du Monde, Business Et Finance, Communauté, Vue, Politique, Video Et Audio, Sports, Orbites, Tamazight, Art Et Culture Et Accidents” (ces titres sont selon la traduction de Google). Sous chaque titre on retrouve une brève explication du contenu qui se termine avec (“détails…”) ce dernier élément, “détails”, lorsqu’on y clique nous donne l’article au complet qui est généralement d’une page selon les quelques articles que la Commission administrative a ouverts.

Suite à cet examen sommaire de la version Google traduite pour les articles du Requérant et des trois sections française, anglaise, et arabe du journal du Défendeur, la Commission administrative ne voit pas de duplicata ou copie chez le Défendeur du genre et style de journal du Requérant ni des éléments qui supporteraient un usage de mauvaise foi de la part du Défendeur.

Relativement au journal électronique HESPRESS.COM du Requérant, la Commission administrative a essayé de localiser des sections quotidiennes où les photographies pourraient s’avérer d’informations. En utilisant les mentions de sites fournis par le Requérant en connaissance du site qui comprend 214 articles échelonnés sur 10 pages que le Défendeur a commentés en soulignant certaines anomalies telles que des articles en langue française qu’il n’a pu retrouver et d’autres articles publiés en mai 2006 dont un sur “www.almaghribia.ma”, à titre d’exemple, dans sa communication tel que permis en deuxième phase de l’Ordonnance de Procédure susmentionnée.

Dans la plainte demande, le Requérant sous l’élément A de confusion entre le nom de domaine litigieux et le nom de domaine du Requérant invoque la notoriété de son journal électronique qui aurait fait l’objet de plusieurs actes de cybersquattage, tous réglés à l’amiable, sauf un porté devant le Centre et jugé en sa faveur.

La Commission administrative a vérifié cette affirmation en consultant la décision Hassane EL GUENNOUNI c. Mr. Abderrahim El yaakobi, Litige OMPI No. D2014-0564. Elle note que dans ce dossier il s’agit d’une situation impliquant le nom de domaine <hispress.info> où ce dernier a été enregistré le 12 décembre 2012 postérieurement à l’enregistrement de la marque HESPRESS, le 8 mars 2012. Dans la décision MAROCADS.COM c. Abderrahim Elyaakobi, Litige OMPI No. D2015-0127 par ailleurs, le nom de domaine litigieux dans ce dossier est aussi <hispress.info>, le même que dans le précédent où la plainte avait été rejetée. Dans ce second cas, le nom de domaine litigieux enregistré le 12 décembre 2012, postérieurement à l’enregistrement de la même marque HESPRESS enregistrée le 8 mars 2012, la Marque du Requérant qui est sous considération dans le présent dossier.

La Commission administrative considère que ces décisions antérieures, favorables au Requérant, sont très différentes en droit des marques que le présent dossier et n’ont aucune pertinence autre que la présence de la Marque HESPRESS enregistrée avant le nom de domaine litigieux en cause.

La Commission administrative n’a pas à déterminer si le nom de domaine litigieux n’a pas été utilisé de mauvaise foi. Elle exprime cependant de sérieuses réserves sur les prétentions du Requérant à cet égard ayant déjà déterminé l’absence de droit de marque non enregistrée et le droit.

La Commission administrative retient que le troisième critère posé au paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs n’a pas été rempli. La Commission administrative note que la Décision est basée sur les soumissions des parties dans le présent dossier. Les parties peuvent, si elles le souhaitent, soumettre ce litige devant les juridictions nationales compétentes sous d’autres fondements juridiques.

La Commission administrative adhère aux conclusions de la décision UDRP Jetfly Aviation S.A. c. Paol S.A., Litige OMPI No. D2011-1576 (“ C’est le lieu de rappeler que la procédure a été adoptée dans le but de trancher des cas clairs en matière de cybersquatting. Les questions soumises aux Commissions administratives doivent ainsi être relativement simples et faciles à éclaircir de par le caractère sommaire de la procédure. […] Au vu de ce qui précède, la Commission considère que, dans un litige complexe dépassant manifestement le cadre limité pour lequel la présente procédure a été introduite, il ne lui appartient pas de se prononcer (voir, dans ce sens : Jason Crouch and Virginia McNeill c. Clement Stein, Litige OMPI No. D2005-1201; Knipping Kozijnen B.V. c. R.T.P. Hanssen, Litige OMPI No. D2006-0622; Family Watchdog LLC c. Lester Schweiss, Litige OMPI No. D2008-0183”).

7. Décision

Au regard des éléments développés ci-dessus et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative rejette la plainte.

J. Nelson Landry
Expert Unique
Le 16 septembre 2015

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