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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

Vente-Privée.Com, Vente-Privée.Com IP S.à.r.l. contre Peng Hu

Litige No. D2019-1246

1. Les parties

Les Requérants sont Vente-Privée.Com, France et Vente-Privée.Com IP S.à.r.l., Luxembourg, représentés par Cabinet Degret, France.

Le Défendeur est Peng Hu, Italie.

2. Nom de domaine et unité d’enregistrement

Le nom de domaine litigieux <venteprive.net> est enregistré auprès de 1&1 IONOS Inc. (ci-après désigné “l’Unité d’enregistrement”).

3. Rappel de la procédure

Une plainte a été déposée par Vente-Privée.Com et Vente-Privée.Com IP S.à.r.l. auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 31 mai 2019. En date du 31 mai 2019, le Centre a adressé une requête à l’Unité d’enregistrement aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par les Requérants. Le 5 juin 2019, l’Unité d’enregistrement a transmis sa vérification au Centre révélant l’identité du titulaire du nom de domaine litigieux et ses coordonnées, différentes du nom du Défendeur et des coordonnées désignées dans la plainte. Le 17 juin 2019, le Centre a envoyé un courrier électronique aux Requérants avec les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux telles que communiquées par l’Unité d’enregistrement et invitant les Requérants à soumettre un amendement à la plainte ou une plainte amendée.

Le Centre a également indiqué aux Requérants que la langue du contrat d’enregistrement du nom de domaine litigieux était l’italien. La plainte ayant été déposée en français, le Centre a invité les Requérants à fournir la preuve suffisante d’un accord entre les parties pour que la procédure se déroule en français, ou une plainte traduite en italien ou encore une demande motivée pour que le français soit la langue de la procédure.

Les Requérants ont déposé une plainte amendée le 19 juin 2019 modifiant les données relatives au titulaire du nom de domaine litigieux et a déposé une requête motivée pour que le français soit la langue de la procédure le 21 juin 2019.

Le Centre a vérifié que la plainte et la plainte amendée répondaient bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.

Concernant la langue de la procédure, le Centre, au vu des arguments des parties, a décidé le 28 juin 2019 d’accepter la plainte soumise en français, d’accepter une réponse aussi bien en français qu’en italien et de nommer une Commission administrative qui soit familiarisée avec les deux langues mentionnées. Le Centre a de plus déclaré que la Commission administrative, en conformité avec le paragraphe 11 des Règles d’application, peut choisir de rendre la décision dans l’une ou l’autre langue, ou de demander la traduction des éléments supplémentaires fournis par l’une ou l’autre partie.

Conformément aux paragraphes 2 et 4 des Règles d’application, le 28 juin 2019, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée au Défendeur en français et en italien. Conformément au paragraphe 5 des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 18 juillet 2019. Le Défendeur n’a fait parvenir aucune réponse. En date du 22 juillet 2019, le Centre notifiait le défaut du Défendeur.

En date du 30 juillet 2019, le Centre nommait Michael A.R. Bernasconi comme expert dans le présent litige. La Commission administrative constate qu’elle a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application. La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 7 des Règles d’application.

4. Les faits

Les Requérants, qui appartiennent au même groupe de sociétés, ont pour activité l’achat et la vente de produits et services de toute nature via les outils du commerce électronique, ainsi que la fourniture de conseils dans le domaine du e-commerce. Ils déploient leurs activités en particulier sur le site Internet “www.vente-privée.com” (qui opère une redirection vers le site “www.veepee.com” depuis janvier 2019). Les Requérants exploitent le site Internet “www.vente-privée.com” depuis 2001. Sur le site sont organisées des ventes événementielles de produits ou de services de grandes marques bénéficiant de fortes décotes. Chacune de ces ventes a la particularité de n’être consacrée qu’à une seule marque et de ne durer que quelques jours.

La plateforme des Requérants figure parmi les sites de commerce en ligne les plus visités en France et connaît un succès important au niveau international. Chaque mois, plusieurs millions de visiteurs de nombreux pays se rendent sur le site « www.vente-privée.com ». Selon les Requérants plus de 14.000 ventes ont été organisées et plus de 90 millions de produits ont été vendus en 2015. En 2017, ce nombre est passé à 125 millions de produits. Le Défendeur n’a pas contesté ces chiffres. Le chiffre d’affaires annuel de la plateforme des Requérants est estimé à plus de 3 milliard d’euros (voir Vente-Privée.Com et Vente-Privée.Com IP S.à.r.l. c. Privacy Inc. Customer 0150839799 / Milen Radumilo, Litige OMPI No. D2018-1751). Ainsi, le site “www.vente-privée.com” jouit d’une notoriété étendue, ce qui a été confirmé dans la décision Vente-Privee.Com, Vente-Privee.Com IP S.à.r.l. c. XL Liu, Litige OMPI No. D2015-2166 et ce qui n’a pas été contesté par le Défendeur.

Les Requérants ont fourni des preuves qu’ils détiennent des droits de marque pour VENTE-PRIVÉE.COM et VENTE-PRIVÉE, tant au niveau national qu’international. Les Requérants sont notamment titulaires des marques suivantes:

- vente-privée.com : marque française déposée le 14 octobre 2004, enregistrée sous le no. 3318310;

- vente-privée.com : marque de l’Union Européenne déposée le 24 octobre 2006, enregistrée le 20 décembre 2007 sous le no. 5413018;

- VEnte-privée : marque internationale déposée le 23 février 2012, enregistrée sous le no. 1116436 et couvrant notamment l’Australie, la Suisse, l’Algérie, l’Egypte, la Chine, le Japon, la République de Corée et la Turquie;

- vente-privée : marque de l’Union Européenne déposée le 17 juillet 2013, enregistrée le 3 janvier 2014 sous le no. 11991965.

Le litige porte sur le nom de domaine <venteprive.net> lequel a été enregistré le 8 mars 2019. Ce nom de domaine n’est actuellement plus utilisé en connexion avec un site actif. En juin 2019, le nom de domaine était encore utilisé. À ce moment-là, le site présentait les fonctionnalités d’un moteur de recherche permettant de rechercher des produits vendus sur la plateforme eBay. Les catégories de produits affichées sur le site litigieux correspondaient à celles dont relèvent les produits vendus par les Requérants (p.ex. montres, vêtements, téléphonie, informatique). Cependant, la fonction de recherche du site ne produisait aucun résultat et, par conséquent, aucun produit spécifique n’était affiché.

5. Argumentation des parties

A. Requérants

Les Requérants soutiennent que chacun des trois éléments spécifiés au paragraphe 4(a) des Principes directeurs est satisfait dans le cas présent et demandent le transfert du nom de domaine <venteprive.net>.

Les Requérants font valoir que le nom de domaine litigieux est semblable au point de prêter à confusion avec les marques des Requérants. En effet, le nom de domaine litigieux reproduit quasiment à l’identique l’élément verbal des marques dès lors qu’il n’en diffère que par l’omission de la lettre “e” dans la dénomination “privée”. Selon les Requérants, ledit nom de domaine “typosquatte” leurs marques, puisqu’il se caractérise par une faute de frappe susceptible d’être commise par tout Internaute entrant précipitamment les marques des Requérants dans la barre d’adresse de son navigateur Internet. Pour démontrer cela, les Requérants renvoient en outre à des décisions concernant les noms de domaine <ventepriveee.fr>, <venteprive.fr>, <vente-privve.com>, <vente-privè.com>, <ventepriveee.com> et <vente-rpivee.com> (Vente-Privee.Com c. F.M., Litige OMPI No. DFR2010-0006; Vente-Privee.Com c. Daniel Fuehrer, Litige OMPI No. DFR2010-0038; Vente-Privee.com IP S.à.r.l. c. Whois Agent / Gustavo Winchester, Litige OMPI No. D2014-0796; Vente-Privee.Com et Vente-Privee.Com IP S.à.r.l. c. XL Liu, Litige OMPI No. D2015-2166). Par ailleurs, les Requérants soutiennent que l’extension « .net » au sein du nom de domaine litigieux ne saurait le rendre différent des marques Vente-privee(.com).

Les Requérants font également valoir que le Défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache. Ils exposent notamment que le Défendeur n’est pas connu sous tout ou partie du nom de domaine litigieux et qu’il ne détient aucun droit sur la dénomination « Vente Privée ». De même, le Défendeur n’a pas été autorisé par les Requérants à faire usage du nom de domaine litigieux. Les Requérants soutiennent de plus que le Défendeur ne fait ni un usage non commercial légitime, ni un usage loyal du nom de domaine litigieux et son usage dudit nom est effectué afin de détourner les Internautes en créant une confusion et a pour effet de ternir la réputation des Requérants. En effet, la proximité entre le nom de domaine litigieux et les droits notoires des Requérants établit que le Défendeur cherche à bénéficier, probablement à des fins lucratives, du trafic engendré par les internautes qui saisissent erronément le nom de domaine litigieux alors qu’ils souhaitent atteindre le site de VENTE-PRIVEE(.COM).

Les Requérants soutiennent, en outre, que le site web litigieux ne satisfait pas à la législation française en vigueur en matière de commerce électronique et de concurrence.

Enfin, les Requérants soumettent que le Défendeur a enregistré et utilisé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi. Les Requérants estiment que le Défendeur devait avoir connaissance de leurs marques lors du dépôt du nom de domaine litigieux, compte tenu de la notoriété des marques, et du fait que les fautes de frappe caractérisant le nom de domaine litigieux révèlent une intention manifeste de “yposquatter” les marques des Requérants. Selon les Requérants, en utilisant le nom de domaine litigieux, le Défendeur a sciemment tenté d’attirer, probablement à des fins lucratives, les utilisateurs d’Internet sur un site web lui appartenant, en créant un risque de confusion avec les marques des Requérants et en perturbant les opérations commerciales des Requérants.

B. Défendeur

Le Défendeur n’a pas répondu aux arguments des Requérants.

6. Discussion et conclusions

I. Langue de la procédure

Selon le paragraphe 11 des Règles d’application, “sauf convention contraire entre les parties ou stipulation contraire du contrat d’enregistrement, la langue de la procédure est la langue du contrat d’enregistrement; toutefois, la commission administrative peut décider qu’il en sera autrement, compte tenu des circonstances de la procédure administrative.”

S’agissant de la langue de la procédure, la Commission administrative est saisie d’une requête pour que la langue de la présente procédure soit le français plutôt que l’italien, langue du contrat d’enregistrement du nom de domaine litigieux.

A l’appui de leur requête, les Requérants allèguent être établis dans des pays francophones, que le nom de domaine litigieux est constitué de l’association des termes français “vente” et “prive”, le terme : “prive” contenant une faute de frappe évidente (i.e. en langue française, lorsqu’associé à un nom féminin, l’adjectif est censé s’accorder en genre avec celui-ci, soit apparaître comme suit: “privée”) et que le nom de domaine litigieux opère une redirection vers un site web rédigé quasi-exclusivement en français.

Dans ce contexte, il est probable que le Défendeur maîtrise le français, et il serait inéquitable, selon la Commission administrative, d’obliger les Requérants à traduire la plainte et ses annexes. En outre, le Défendeur ne s’est pas opposé à ce que la procédure se déroule en français et n’a pas déposé de réponse. D’autres commissions administratives ont par ailleurs admis le français comme langue de la procédure dans des circonstances similaires de celles du cas d’espèce (Vente-Privee.Com et Vente-Privee.Com IP S.à.r.l. c. Whois Privacy Services Pty Ltd. / Dzone Inc., Yeonju Hong, Litige OMPI No. D2013-0691; Vente-Privee.Com et Vente-Privee.Com IP S.a.r.l. c. Lin Yanxiao, Litige OMPI No. D2015-0104; Vente-Privee.Com et Vente-Privee.Com IP S.à.r.l. c. Contact Privacy Inc. Customer 0145729438 / Milen Radumilo, Litige OMPI No. D2017-1918; Vente-Privée.Com et Vente-Privée.Com IP S.à.r.l. c. Privacy Inc. Customer 0150839799 / Milen Radumilo, Litige OMPI No. D2018-1751)

La Commission administrative fait donc droit à la requête des Requérants et accepte le français comme langue de la procédure.

II. Au fond

A. Identité ou similitude prêtant à confusion

Selon le paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs, un requérant doit démontrer que le nom de domaine litigieux est identique ou semblable au point de prêter à confusion à une marque de produits ou de services sur laquelle le requérant a des droits.

Les Requérants ont démontré être titulaires des marques VENTE-PRIVEE(.COM) dans de nombreuses juridictions.

Le nom de domaine litigieux intègre dans sa totalité les marques des Requérants à l’exception de leur dernière lettre, à savoir le « e ». En d’autres termes, le nom de domaine litigieux ne diffère des marques que par la suppression de cette lettre. Une telle légère variation d’orthographe ne suffit pas à distinguer le nom de domaine litigieux des marques des Requérants (dans ce sens Michelin Recherche et Technique S.A. c. Jaz Azula, Genesis Media, Litige OMPI No. D2014-0415; Vente-Privee.Com IP S.à.r.l. c. Whois Agent / Gustavo Winchester, Litige OMPI No. D2014-0796; Novartis AG c. Ancient Holdings, LLC, Wendy Webbe, Litige OMPI No. D2014-1084; Vente-Privee.Com et Vente-Privee.Com IP S.à.r.l. c. XL Liu, Litige OMPI No. D2015-2166; Vente-Privee.Com et Vente-Privee IP S.à.r.l. c. Domain admin, Litige OMPI No. D2016-1061). Au contraire il s’agit d’une faute de frappe typique que peut commettre un Internaute en recherchant les marques des Requérants.

Par ailleurs, de manière similaire à d’autres commissions administratives UDRP, la Commission administrative estime que l’ajout de l’extension générique de premier niveau (“gTLD”) “.net” au nom de domaine litigieux ne constitue pas un élément de nature à éviter une similitude pouvant prêter à confusion aux fins du Règlement (voir Telecom Personal, S.A., c. NAMEZERO.COM, Inc, Litige OMPI No. D2001-0015; Société Air France c. Arnaud Gautier, Litige OMPI No. D2003-0830; Alstom c. Itete Peru S.A., Litige OMPI No. D2009-0877; L’Oréal c. Tina Smith, Litige OMPI No. D2013-0820).

Sur la base des constatations qui précèdent, et conformément au paragraphe 4(a)(i) des Principes directeurs, la Commission administrative estime et conclut que le nom de domaine litigieux est semblable au point de prêter à confusion avec les marques VENTE-PRIVEE(.COM) des Requérants.

B. Droits ou intérêts légitimes

Aux termes du paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs, un requérant doit être en mesure de démontrer que le défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine litigieux ni aucun intérêt légitime qui s’y attache.

Si la charge de la preuve de l’absence de droits ou intérêts légitimes du défendeur incombe au requérant, il est généralement considéré difficile de prouver un fait négatif. Il est donc admis que le requérant doit établir prima facie que le défendeur n’a pas de droit ni d’intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux. Il incombe ensuite au défendeur d’établir le contraire. S’il n’y parvient pas, les affirmations du requérant sont réputées exactes (voir Petroleo Brasileiro S.A - Petrobras c. Benoit Menetrieux, Litige OMPI No. D2014-1673; Crédit Mutuel Arkea c. Delphine Stepanoff, Litige OMPI No. D2018-0037).

La Commission administrative estime qu’il n’y a aucune indication au dossier suggérant que le Défendeur aurait des droits ou des intérêts légitimes dans le nom de domaine litigieux. Il n’y a aucune indication que le Défendeur serait connu sous le nom “Venteprive” ou aurait été autorisé par les Requérants à utiliser ce nom de domaine.

De même, la Commission administrative estime malgré le fait que l’expression « vente privée » soit une expression courante en langue française, il ne peut en être déduit une volonté du Défendeur de faire du nom de domaine litigieux une exploitation non commerciale légitime ou un usage loyal. Le site Internet vers lequel le nom de domaine litigieux dirige, actuellement inactif, présentait les fonctionnalités d’un moteur de recherche permettant de rechercher des produits vendus sur la plateforme eBay. Cependant, les recherches effectuées ne produisaient aucun résultat. En vue de cela, la Commission administrative retient qu’il n’y a pas de preuves montrant que le Défendeur utilise ou a l’intention d’utiliser le nom de domaine litigieux pour exercer des activités légitimes. En effet, la Commission administrative considère que les Requérants rendent suffisamment vraisemblable que le Défendeur fait un usage commercial illégitime et déloyal du nom de domaine litigieux par une pratique de “typosquatting”.

Concernant la question de savoir si le site web litigieux satisfait à la législation française en vigueur en matière de commerce électronique et de concurrence, la Commission administrative estime qu’elle n’a pas la compétence dans le cadre de la présente procédure UDRP pour se prononcer sur ce point.

Partant, la Commission administrative considère que les Requérants ont démontré prima facie que le Défendeur n’a aucun droit ou intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux et que le Défendeur, ayant renoncé à faire la preuve de son droit ou de ses intérêts légitimes, ne bénéficie pas de la présomption qu’il posséderait un droit ou un intérêt légitime.

Par conséquent, la Commission administrative retient que le Défendeur n’a pas de droits sur le nom de domaine litigieux, ni d’intérêts légitimes s’y rapportant, conformément au paragraphe 4(a)(ii) des Principes directeurs.

C. Enregistrement et usage de mauvaise foi

Selon le paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs, le requérant doit démontrer que le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi par le défendeur. La preuve de ce que le nom de domaine litigieux a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi peut être constituée, en particulier, pour autant que leur réalité soit constatée par la Commission administrative, par les circonstances nommées au paragraphe 4(b) des Principes directeurs.

Au regard de l’enregistrement du nom de domaine litigieux par le Défendeur, la Commission administrative estime, après avoir examiné les preuves apportées par les Requérants, que le Défendeur devait savoir que les Requérants avaient des droits dans les marques VENTES-PRIVEES(.COM) au moment de l’enregistrement du nom de domaine litigieux. Tenant compte, en particulier, de la notoriété étendue des marques des Requérants, il apparaît manifeste que le Défendeur connaissait ces marques au moment de l’enregistrement du nom de domaine litigieux. La seule différence entre le nom de domaine litigieux et les marques des Requérants se limite à une faute de frappe, révélant l’intention du Défendeur de “typosquatter” les marques. Il est de jurisprudence UDRP constante que la pratique du “typosquatting” est en soi une indication suffisante de la mauvaise foi du défendeur lors de l’enregistrement d’un nom de domaine (Wal-Mart Stores, Inc. c. Longo, Litige OMPI No. D2004-0816; Lexar Media, Inc. c. Michael Huang, Litige OMPI No. D2004-1039; ALK-Abelló A/S c. Manila Industries Inc., Litige OMPI No. D2006-1033; Vente-Privee.Com et Vente-Privee IP S.à.r.l. c. Domain admin, Litige OMPI No. D2016-1061)

Au vu de ce qui précède, la Commission administrative estime que le Défendeur devait être au courant de l’existence de droits de marques des Requérants au moment de l’enregistrement du nom de domaine litigieux. Partant, le nom de domaine litigieux a été enregistré de mauvaise foi par le Défendeur.

Concernant l’usage, il a lieu de rappeler que le nom de domaine litigieux ne déploie actuellement pas d’activité. Le Défendeur a dès lors cessé d’utiliser activement le nom de domaine. Cependant, les activités précédentes du Défendeur sur le site associé au nom de domaine litigieux doivent également être considérées. Jusqu’en juin 2019, le site contenait un outil de recherche pour rechercher des produits vendus sur eBay. Les catégories de produits affichées sur le site litigieux correspondaient à celles dont relèvent les produits vendus par les Requérants. Cependant, l’outil de recherche ne produisait aucun résultat.

Partant, la Commission administrative soutient que le Défendeur a sciemment tenté d’attirer les utilisateurs de l’Internet sur un site qui lui appartient, en créant une probabilité de confusion avec les marques des Requérants en ce qui concerne la source, le commanditaire, l’affiliation ou l’approbation de son site ou d’un produit ou service qui y est proposé. Il ne ressort pas des faits de quelle manière le Défendeur agissait à des fins lucratives, toutefois, il est raisonnable d’admettre que ceci était le cas vu que le but du site semble avoir été de vendre des produits concurrents à ceux offerts par les Requérants. L’utilisation du nom de domaine litigieux de cette manière indique un usage de mauvaise foi et démontre que le Défendeur comptait tirer un avantage déloyal de la réputation des marques des Requérants. Partant, la Commission administrative retient que le Défendeur a utilisé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi.

De surcroît, dans la mesure où l’utilisation faisant l’objet de la plainte a cessé, l’existence du nom de domaine entre les mains du Défendeur représente une menace abusive pour les Requérants (c’est-à-dire un abus pouvant être déclenché par le Défendeur à tout moment) et donc une utilisation de mauvaise foi continue (dans ce sens Conair Corp. c. Pan Pin, Hong Kong Shunda International Co. Limited, Litige OMPI No. D2014-1564).

Par ailleurs, la Commission administrative considère que l’exploitation du nom de domaine litigieux par le Défendeur porte atteinte à l’image des Requérants. En effet, les Internautes qui cherchent à atteindre le site de la marque VENTE-PRIVEE(.COM) mais sont redirigés, par erreur, vers le site du nom de domaine litigieux se trouvaient confrontés, jusqu’en juin 2019, à un outil de recherche de produits vendus sur eBay qui ne fonctionnait pas, respectivement se trouvent actuellement confrontés à un site inactif. Par conséquent, les Internautes, n’atteignant pas le site souhaité, ont une impression erronée du site et de la plateforme des Requérants.

Des éléments supplémentaires, comme le fait que le Défendeur s’abstient de se prononcer dans la présente procédure ou le fait qu’il a essayé de masquer son identité, corroborent davantage que le nom de domaine litigieux a été utilisé de mauvaise foi par le Défendeur.

Par conséquent, la Commission administrative considère qu’il est établi que le nom de domaine litigieux a été enregistré et utilisé de mauvaise foi, conformément au paragraphe 4(a)(iii) des Principes directeurs.

7. Décision

Pour les raisons exposées ci-dessus, et conformément aux paragraphes 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la Commission administrative ordonne que le nom de domaine litigieux <venteprive.net> soit transféré au Requérant Vente-Privee.Com.

Michael A.R. Bernasconi
Expert Unique
Le 12 août 2019